REJET du pourvoi formé par :
- X... David,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, chambre correctionnelle, en date du 24 juin 1999, qui, pour outrage à magistrat, l'a condamné à 60 000 francs d'amende.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 388, 512 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré David X... coupable du délit d'outrage à magistrat commis le 24 juin 1996 et non le 25 juin 1996 ;
" aux motifs que le délit d'outrage a bien été commis lors de la conférence de presse du 24 juin 1996, les propos tenus étant relatés dans un article de presse du 25 juin 1996, comme le relève expressément la citation ; que l'erreur de date n'entache en rien la régularité des poursuites dans la mesure où les faits ont été commis depuis temps non couvert par la prescription ;
" alors que la juridiction de jugement ne peut légalement statuer que sur les faits mentionnés dans l'ordonnance de renvoi ou la citation qui l'a saisie ; qu'en l'espèce, la citation visait des faits d'outrage à magistrat commis le 25 juin 1996 dans le département de la Réunion ; que, dès lors, en déclarant David X... coupable du délit d'outrage à magistrat commis le 24 juin 1996, sans constater que le prévenu ait accepté d'être jugé sur ce fait nouveau retenu contre lui, la cour d'appel a excédé les limites de sa saisine, en violation des principe et textes susvisés " ;
Attendu que David X... a été cité devant le tribunal correctionnel pour avoir, le 25 juin 1996, par des propos de nature à porter atteinte à sa dignité et au respect dû à sa fonction, outragé Richard Y..., magistrat au tribunal de grande instance de Saint-Pierre, dans l'exercice de ses fonctions ;
Attendu qu'en rectifiant, par les motifs repris au moyen, une erreur portant sur la date des faits, les juges du fond n'ont modifié ni la nature, ni la substance de la prévention d'outrage à magistrat retenue contre le demandeur ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 23, 30 et 31 de la loi du 29 juillet 1881, 132-2 et 434-24, alinéa 1, du Code pénal, 10 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré David X... coupable du délit d'outrage à magistrat et l'a condamné à la peine de 60 000 francs d'amende ;
" aux motifs que les faits soumis au jugement du tribunal, déférés par la citation, l'ont été sous une qualification juridique qui ne viole pas les dispositions d'une loi d'ordre public ; qu'en effet, lorsqu'il y a concours entre la qualification de droit pénal commun et la qualification de délit de presse, en matière d'outrage et de diffamation envers un magistrat, la qualification de droit commun prévaut sur la qualification prévue par la loi sur la presse ; qu'au demeurant, le délit d'outrage a bien été commis lors de la conférence de presse du 24 juin 1996, les propos tenus étant relatés dans un article de presse du 25 juin 1996 ;
" alors, d'une part, que les juges correctionnels ont le droit et le devoir de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification ; que le délit d'outrage exclut l'outrage exprimé sous forme d'écrits rendus publics ; que, dès lors, la relation, dans un article de journal, de propos diffamatoires prétendument tenus par un avocat lors d'une conférence de presse, critiquant le mode d'exercice de ses fonctions par un magistrat, constitue le délit de diffamation ; qu'en énonçant pourtant que ces faits étaient constitutifs du délit d'outrage à magistrat prescrit en l'espèce, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
" alors, d'autre part, que la loi du 29 juillet 1881 est applicable lorsque les paroles diffamatoires sont proférées dans des réunions publiques ; que des propos, prétendument prononcés lors d'une conférence de presse et reproduits dans un article de presse, critiquant le mode d'exercice de ses fonctions par un magistrat, ne constituent pas le délit d'outrage à magistrat au sens de l'article 31 de la loi du 29 juillet 1881 ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a derechef méconnu les textes susvisés ;
" alors, de surcroît, et à titre subsidiaire, qu'un fait unique constituant un cumul idéal d'infractions doit être réprimé sous sa plus haute expression pénale ; qu'en déclarant David X... coupable du délit d'outrage à magistrat, alors que le délit de diffamation, prévu et réprimé par les articles 31 et 33 de la loi du 29 juillet 1881 est puni d'une peine d'amende plus sévère, la cour d'appel a méconnu les principe et textes susvisés ;
" alors, enfin, et en toute hypothèse, que si un fait unique constitue à la fois une infraction de droit commun et une infraction prévue et réprimée par la loi du 29 juillet 1881, seules les dispositions de ce dernier texte, qui déroge au droit commun, doivent recevoir application ; qu'ainsi, la prescription devait être retenue " ;
Attendu qu'en déclarant le prévenu coupable d'outrage à magistrat, l'arrêt attaqué n'encourt pas les griefs allégués ;
Qu'en effet, toute expression injurieuse ou diffamatoire, lorsqu'elle s'adresse à un magistrat de l'ordre administratif ou judiciaire dans l'exercice de ses fonctions ou à l'occasion de cet exercice, est qualifiée d'outrage par l'article 434-24 du Code pénal et, même lorsqu'elle a été proférée publiquement, entre dans les prévisions de ce texte ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.