Attendu que Léon Z... est décédé le 31 mars 1986, en laissant pour héritier son fils unique, M. Jean-François Z..., qui a chargé Mme X..., notaire associé de la SCP Y..., du règlement de la succession ; que par lettres des 12 et 26 septembre 1986, un neveu du défunt, M. Elie A..., leur a notifié l'existence d'un testament établi en Israël le 25 juillet 1982, aux termes duquel Léon Z... lui léguait 40 % de son patrimoine ; que la validité de ce testament a été reconnue par arrêt définitif du 20 janvier 1992 dans le cadre de l'instance en délivrance engagée par M. A... le 10 novembre 1986 ; qu'à la suite de cet arrêt, Mme X... lui a transmis le 13 avril 1992 la somme de 6 975 763 francs en règlement de sa part dans l'actif successoral comprenant notamment les prix de vente de l'appartement du défunt avenue Hoche à Paris, vendu 6 000 000 francs le 16 octobre 1986, et de son appartement de Cannes, vendu 2 000 000 francs le 13 avril 1988 ; que reprochant à M. Z... et à son notaire d'avoir procédé à ces aliénations sans autorisation, M. A... les a assignés en paiement de dommages-intérêts, évalués en dernier lieu à la somme de 2 510 280 francs correspondant à la différence entre le prix de vente des immeubles et leur valeur au jour de la décision à intervenir, ainsi qu'en remboursement de la somme de 119 366, 01 francs inscrite au débit de son compte établi le 13 avril 1992 au titre d'actes notariés accomplis en fraude de ses droits ; que l'arrêt attaqué, statuant sur renvoi après cassation (Civ. 1, 16 juillet 1997, pourvoi F 95-20. 119), l'a débouté de ces demandes ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches :
Vu les articles 1010 et 815-5 du Code civil ;
Attendu que la transmission d'une quote-part du patrimoine du défunt à son légataire à titre universel s'opèrant de plein droit par le seul fait du décès du testateur, indépendamment de la délivrance qui ne porte que sur la possession, l'héritier réservataire se trouve en état d'indivision avec le bénéficiaire du legs jusqu'au partage ;
Attendu que, pour débouter M. A... de sa demande en réparation du préjudice par lui subi du fait de l'aliénation d'immeubles dépendant de la succession, l'arrêt attaqué retient qu'indépendamment du fait que la vente de l'appartement parisien avait été précédée d'une promesse de vente consentie le 3 juin 1986, à une époque où le testament du 25 juillet 1982 était ignoré de M. Z..., celui-ci tenait de sa qualité d'héritier réservataire le droit de procéder à la vente des biens litigieux ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'existence du testament notifié le 12 septembre 1986 avait privé d'effet la promesse unilatérale dans laquelle M. Z... se présentait comme unique propriétaire de l'immeuble offert en vente, et qu'en l'absence d'accord de son coïndivisaire, il ne pouvait procéder aux ventes intervenues les 16 octobre 1986 et 13 avril 1988, postérieurement à la notification du testament, sans s'y être fait judiciairement autorisé, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que les notaires doivent s'abstenir de prêter leur ministère pour conférer le caractère authentique à une convention dont ils savent qu'elle méconnaît les droits d'un tiers ;
Attendu qu'en décidant que Mme X... et la SCP notariale avaient pu prêter leur concours à la réalisation par M. Z... des ventes d'immeubles de la succession en dépit de la notification antérieure du legs dévolu à M. A..., et en rejetant la demande de ce dernier tendant au remboursement des sommes imputées au débit de son compte au titre d'attestations de notoriété et de propriété délivrées au mépris de ses droits, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deux dernières branches du premier moyen ni sur le deuxième moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a débouté M. A... de ses demandes en paiement relatives aux immeubles de la succession vendus le 16 octobre 1986 et le 13 avril 1988 par M. Z... avec le concours de son notaire et de la SCP notariale, ainsi qu'aux sommes qui lui ont été imputées au titre des " attestations de propriété ", " notoriété et expéditions ", l'arrêt rendu le 9 juin 1999, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens.