Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 23 avril 1998), que le tribunal de grande instance de Carpentras, statuant en matière commerciale, a prononcé la liquidation judiciaire de la société Collections Feux et Anges, M. X... étant désigné en qualité de liquidateur ; que M. Y..., avocat inscrit au barreau de Carpentras, assigné sur le fondement de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 devant ce même tribunal, a demandé le renvoi de l'affaire devant une juridiction limitrophe en invoquant sa qualité d'avocat ; que le tribunal a rejeté sa demande ; que la cour d'appel a infirmé cette décision et renvoyé l'affaire devant le tribunal de commerce d'Avignon, en application de l'article 47 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :
1° qu'il résulte de la combinaison des dispositions de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 et des articles 163 et 174 du décret du 27 décembre 1985 que la juridiction ayant procédé à l'ouverture d'une procédure collective est seule compétente pour statuer sur l'action en comblement de passif intentée à l'encontre d'un de ses dirigeants ; que la règle de compétence spéciale posée par le législateur en 1985 déroge à l'application de l'article 47 du nouveau Code de procédure civile édicté en 1976 ; qu'en l'espèce où l'action en comblement à l'encontre de M. Y... a été introduite devant le tribunal de grande instance ayant préalablement ouvert la procédure collective de la société dont il était dirigeant, la cour d'appel, qui a ordonné son renvoi devant une juridiction limitrophe, a violé les articles 163 et 174 du décret du 27 décembre 1985, ensemble l'article 47 du nouveau Code de procédure civile ;
2° que le principe d'impartialité posé par l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme est respecté dès lors que les faits sur lesquels un juge se prononce ne sont pas identiques à ceux ayant donné lieu à une précédente décision rendue par lui ; qu'en l'espèce où le tribunal de grande instance de Carpentras était saisi d'une action en paiement des dettes sociales contre M. Y... postérieure à l'ouverture par cette même juridiction d'une procédure collective contre sa société, la cour d'appel, qui a considéré que le renvoi du litige s'imposait eu égard aux exigences de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, a violé ce texte ainsi que l'article 47 du nouveau Code de procédure civile ;
3° que seul est habilité à demander le renvoi prévu par l'article 47 du nouveau Code de procédure civile l'auxiliaire de justice qui est personnellement partie à un litige en cette qualité ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a accordé le renvoi après avoir constaté que M. Y..., avocat au barreau de Carpentras, avait été assigné sur le fondement de l'article 180 de la loi de 1985 à la suite de la liquidation judiciaire de la société Collections Feux et Anges ; qu'en statuant ainsi, sans tirer les conséquences de ses constatations desquelles il s'évinçait que M. Y... était assigné en sa qualité de dirigeant social et qu'il n'était donc pas partie au litige en sa qualité d'auxiliaire de justice, la cour d'appel a violé l'article 47 du nouveau Code de procédure civile par fausse application ;
Mais attendu que les règles de compétence édictées par les articles 163 et 174 du décret du 27 décembre 1985 ne dérogent pas à l'application des dispositions de l'article 47 du nouveau Code de procédure civile ; que ce texte est applicable lorsque l'auxiliaire de justice est partie au litige, soit en son nom personnel, soit en sa qualité de représentant légal d'une partie ; que c'est, dès lors, à bon droit que la cour d'appel, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la deuxième branche, a retenu que les conditions d'application de l'article 47 du nouveau Code de procédure civile étaient réunies en l'espèce ; que le moyen, qui ne peut être accueilli pour partie, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.