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21/07/1987 | FRANCE | N°86-10054

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 21 juillet 1987, 86-10054


Sur le premier moyen pris en ses deux premières branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Louise X. et Jean Y. se sont mariés le 25 juillet 1964 après avoir fait précéder leur union d'un contrat de séparation de biens le 8 juillet 1964 ; que ce même jour et pour faire suite à une promesse de vente à elle consentie le 24 avril précédent, Louise X. a acquis un appartement ; qu'en 1978, elle a introduit une instance en divorce ; que Jean Y., prétendant que l'appartement avait été payé de ses seuls deniers, a, de son côté, formé une action aux fins de nullité de d

onation déguisée ; que les juges du fond ont estimé que les deniers ayant ...

Sur le premier moyen pris en ses deux premières branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Louise X. et Jean Y. se sont mariés le 25 juillet 1964 après avoir fait précéder leur union d'un contrat de séparation de biens le 8 juillet 1964 ; que ce même jour et pour faire suite à une promesse de vente à elle consentie le 24 avril précédent, Louise X. a acquis un appartement ; qu'en 1978, elle a introduit une instance en divorce ; que Jean Y., prétendant que l'appartement avait été payé de ses seuls deniers, a, de son côté, formé une action aux fins de nullité de donation déguisée ; que les juges du fond ont estimé que les deniers ayant servi à l'acquisition litigieuse provenaient bien du patrimoine du mari et que celui-ci avait agi avec intention libérale ;

Attendu que Louise X. fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen, d'une part, que la simple circonstance que le prix de l'immeuble ait été payé à l'aide de chèques tirés sur le compte bancaire du mari ne suffit pas légalement à caractériser le fait que les fonds provenaient de son patrimoine ; qu'en déduisant leur origine de la seule constatation du compte où ils ont été pris les juges du fond ont privé leur décision de base légale, alors, d'autre part, que c'est à celui qui se prétend donateur de faire la preuve de son intention libérale ; qu'en reprochant à Mme X. de ne pas fournir de justification d'une contre-partie à la prétendue remise des fonds par son mari la cour d'appel a inversé la charge de la preuve ;

Mais attendu que les juges du second degré ont non seulement retenu que les chèques avaient été tirés sur le compte dont Jean Y. était seul titulaire, mais encore que celui-ci avait vendu des biens personnels dont le prix avait été porté au crédit de son compte à l'époque de l'acquisition litigieuse ; que, sans inverser la charge de la preuve, ils ont apprécié l'intention libérale en relevant la concomitance de l'acquisition de l'appartement sous le nom de la future épouse et du contrat de mariage par lequel les futurs époux adoptaient le régime de la séparation de biens, tout en constatant que Louise X. n'alléguait l'existence d'aucune contre-partie qui aurait pu faire perdre à la donation son caractère de libéralité ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux premières branches ;

Sur la troisième branche du premier moyen et le second moyen réunis :

Attendu qu'il est en outre reproché à l'arrêt d'avoir considéré qu'il y avait eu donation déguisée et de l'avoir annulée, alors que, d'une part, l'absence dans l'acte de vente de toute indication sur la provenance du prix ne pouvait caractériser légalement un déguisement ; qu'ainsi la cour d'appel aurait privé sa décision de base légale au regard de l'article 1099 du Code civil ; et alors que, d'autre part, à l'exception des donations entre époux, les donations sont irrévocables ; qu'au jour de la prétendue donation déguisée M. Y. et Mlle X. n'avaient pas encore contracté mariage, qu'en révoquant néanmoins cette donation l'arrêt aurait violé l'article 894 du Code civil ;

Mais attendu que si, comme le soutient à bon droit le moyen, l'arrêt a prononcé à tort l'annulation de la donation en la considérant comme déguisée alors que cette qualification ne peut être retenue qu'en présence d'une affirmation mensongère de l'origine des fonds, il a implicitement retenu que toute donation entre époux est révocable même celle faite antérieurement au mariage en prévision de celui-ci et que l'action en nullité exercée par le donateur vaut nécessairement révocation de la donation ; que, dès lors, la cour d'appel, qui a reconnu à M. Y. une créance égale à la valeur actuelle de l'appartement, a fait une juste application de l'article 1099-1 du Code civil, lequel s'applique à toute remise gratuite des deniers quelle qu'en soit la forme, faite par un époux à l'autre en vue de lui procurer l'entrée d'un bien dans son patrimoine, et doit aussi recevoir application lorsque la donation des deniers, antérieure au mariage, a été faite en prévision de celui-ci ; que la décision est ainsi légalement justifiée ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 86-10054
Date de la décision : 21/07/1987
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

DONATION - Donation entre époux - Donation déguisée - Nullité - Effets - Donation de deniers - Epoux donateur - Créance - Montant - Valeur actuelle du bien acquis à l'aide de ces deniers

* SEPARATION DE BIENS CONVENTIONNELLE - Acquisition d'un immeuble par les époux - Acquisition par la femme - Paiement par le mari - Donation déguisée - Nullité - Effets - Epoux donateur - Créance - Montant - Valeur actuelle du bien acquis

* DONATION - Donation entre époux - Donation déguisée - Nullité - Donation faite en prévision du mariage

La cour d'appel, qui retient que l'immeuble a été acquis par la future épouse au moyen des deniers donnés par son futur époux, fait une juste application de l'article 1099-1 du Code civil en reconnaissant à celui-ci une créance égale à la valeur actuelle du bien .


Références :

Code civil 1099-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 22 juin 1983

A RAPPROCHER : Chambre civile 1, 1979-10-24 Bulletin, 1979, I, n° 255, p. 202 (rejet)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 21 jui. 1987, pourvoi n°86-10054, Bull. civ. 1987 I N° 243 p. 178
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1987 I N° 243 p. 178

Composition du Tribunal
Président : Président :M. Fabre
Avocat général : Avocat général :M. Charbonnier
Rapporteur ?: Rapporteur :Mme Delaroche
Avocat(s) : Avocats :la SCP Waquet, la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde .

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1987:86.10054
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