Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 13
ARRÊT DU 12 AVRIL 2023
(n° , 7 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/15842 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGL5B
Décision déférée à la Cour : Election du 15 juin 2022 du délégué et de son remplaçant à la Chambre Nationale des Comissaires de justice pour représenter la Chambre régionale des huissiers de justice de la Cour d'appel de Paris (hors Paris)
DEMANDEUR A LA RECLAMATION :
M. [G] [V]
[Adresse 10]
[Localité 7]
Non comparant
Représenté par Me Sarah MARGAROLI, avocat au barreau de PARIS, toque : L0175
DEFENDEURS A LA RECLAMATION :
CHAMBRE NATIONALE DES COMMISSAIRES DE JUSTICE REPRÉSENTÉE PAR SON PRÉSIDENT
[Adresse 3]
[Localité 6]
non comparante
Représenté par Me Audrey DUFAU, avocat au barreau de PARIS, toque : C0869
CHAMBRE REGIONALE DES COMMISSAIRES DE JUSTICE REPRÉSENTÉE PAR SON PRÉSIDENT
[Adresse 1]
[Localité 5]
non comparante
Représenté par Me Benoît GOULESQUE MONAUX de la SELAS SELAS VALSAMIDIS AMSALLEM JONATH FLAICHER et ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : J010
Mme [R] [W]
[Adresse 4]
[Localité 9]
Non comparante
Représentée par Me Florian LASTELLE de l'AARPI LASTELLE & DE VALKENAERE, avocat au barreau de NICE, toque : 015
Mme [P] [D]
[Adresse 2]
[Localité 8]
Non comparante
Représentée par Me Florian LASTELLE de l'AARPI LASTELLE & DE VALKENAERE, avocat au barreau de NICE, toque : 015
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 08 février 2022, en chambre du conseil, devant la Cour composée de :
Mme Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre,
Mme Marie-Françoise d'ARDAILHON MIRAMON, Présidente de chambre,
Mme Estelle MOREAU, Conseillère,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 12 avril 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Sophie VALAY-BRIERE, Première Présidente de chambre et par Victoria RENARD, Greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
Le 24 juin 2022, M. [G] [V] a présenté une réclamation à l'encontre des élections des délégués à la chambre nationale des commissaires de justice en sollicitant l'annulation en leur entier des opérations électorales du 15 juin 2022 relatives à la désignation d'un délégué et de son remplaçant représentant la chambre régionale de la cour d'appel de Paris (hors Paris) à la chambre nationale des commissaires de justice.
M. [V], la chambre nationale des commissaires de justice, la chambre régionale de la cour d'appel de Paris, Mme [R] [W] et Mme [P] [D], candidates élues dont l'élection est contestée, ont été convoqués à l'audience en chambre du conseil du 9 novembre 2022.
A la demande des parties, l'affaire a été renvoyée à l'audience en chambre du conseil du 8 février 2023.
Par conclusions communiquées en temps utile, notifiées par RPVA le 7 février 2023, visées par le greffe et soutenues oralement, M. [V] renouvelle sa demande d'annulation des élections du 15 juin 2022.
Par conclusions communiquées en temps utile, notifiées par RPVA le 24 janvier 2023, visées par le greffe le 8 février 2023 et soutenues oralement, la chambre régionale des commissaires de justice de la cour d'appel de Paris demande à la cour de :
- rejeter l'intégralité des demandes formées par M. [V],
- condamner M. [V] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [V] aux dépens.
Par conclusions communiquées en temps utile, notifiées par RPVA le 26 janvier 2023,visées par le greffe le 8 février 2023 et soutenues oralement, la chambre nationale des commissaires de justice de la cour d'appel de Paris demande à la cour de :
- rejeter la requête en protestation électorale déposée par M. [V],
- débouter M. [V] de l'ensemble de ses demandes,
- condamner M. [V] à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [V] aux dépens.
Par conclusions communiquées le 7 février 2023, visées par le greffe le 8 février 2023 et soutenues oralement, Mmes [R] [W] et [P] [D] demandent à la cour de :
- rejeter l'intégralité des demandes formées par M. [V],
- condamner M. [V] à leur payer à chacune la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner M. [V] aux dépens.
SUR CE,
Aux termes de l'article 1er du décret n°2022-729 du 28 avril 2022 relatif à l'organisation de la profession de commissaires de justice, '. I- La chambre nationale des commissaires de justice est composée de délégués élus par les professionnels du ressort de chaque chambre régionale ou, le cas échéant, interrégionale. Elle est administrée par un bureau, dont le président préside la chambre.
II. - Les commissaires de justice du ressort de chaque chambre régionale élisent les délégués à la chambre nationale et leurs remplaçants à raison d'un délégué et son remplaçant lorsque la chambre régionale compte jusqu'à 150 commissaires de justice, puis d'un délégué supplémentaire et son remplaçant par tranche entamée de 150 commissaires de justice supplémentaires.[...].'
L'article 51 de ce texte donne compétence à la cour d'appel, siégeant en chambre du conseil, pour statuer sur les réclamations portant sur la régularité de cette élection et formées dans les dix jours de l'élection par tout électeur.
La réclamation formée dans les formes et délais prévus est recevable.
Invoquant l'article 52 du décret n°2022-729 du décret 28 avril 2022 et la jurisprudence afférente au contentieux des élections politiques générales rendues au visa des dispositions du code électoral prohibant les manoeuvres frauduleuses, M. [V] soutient que la fin de la campagne électorale a été entachée par de graves publications porteuses d'attaques personnelles et diffamatoires à son endroit, initiées dans le seul but de vicier la sincérité du scrutin. Développant quatre griefs relatifs à des publications communiquées par courriel à l'ensemble du collège électoral, il estime que celles-ci constituent des manoeuvres frauduleuses manifestes telles que sanctionnées par la jurisprudence administrative, notamment au visa des articles L.48-2 et L.97 du code électoral qui ont manifestement vicié la sincérité du scrutin eu égard au corps électoral, au mode de scrutin et de campagne, soulignant que l'écart de voix ne s'élève qu'à 15 votes sur 193 votants.
Après avoir expliqué que suite à la réforme relative à l'organisation de la profession de commissaires de justice, elle n'était pas l'entité qui avait organisé les élections et que si la cour d'appel venait à annuler ces élections, aucune disposition législative ne lui permettrait d'en organiser de nouvelles, la chambre régionale des commissaires de justice de la cour d'appel de Paris réplique que les conditions d'annulation de l'élection par le juge ne sont pas réunies et rappelle d'une part que les dispositions du code électoral ne sont pas applicables aux élections ordinales et professionnelles et, d'autre part que le critère principalement utilisé par les juridictions pour déterminer si la sincérité du scrutin a été altérée est l'écart de voix entre les candidats ainsi éventuellement que la possibilité de réponse laissée au candidat victime de la propagande.
La chambre nationale des commissaires de justice fait valoir que le code électoral, dont le champ d'application couvre les élections politiques, n'est pas applicable à l'élection contestée de sorte que l'argument tiré de la violation des articles L.48-2, L.49 et L.97 de ce code est inopérant et que ni elle-même ni le juge n'ont à y répondre.
Mmes [W] et [D] s'associent à l'argument développé par la chambre nationale des commissaires de justice.
* Sur le grief tiré de la propagande tardive et excédant les limites de la polémique électorale au sens de la jurisprudence administrative rendue au visa de l'article L.48-2 du code électoral
M. [V] fait état d'un mail anonyme adressé à l'ensemble des huissiers électeurs le 13 juin 2022 à 21h05, soit moins de 48 heures avant le scrutin, au contenu diffamatoire et injurieux suivi d'un autre mail que Mme [W], candidate et présidente actuelle de la chambre régionale des huissiers de justice du ressort de la cour d'appel de Paris (hors Paris), a envoyé le 14 juin 2022 à 21h18 à ses confrères où sous prétexte de condamner les procédés de fin de campagne, elle donne une nouvelle audience au mail anonyme et enfin de ce que constituerait un élément nouveau de polémique électorale et une manoeuvre frauduleuse la référence faite à sa mise en examen dans le cadre d'une information judiciaire toujours en cours par M. [L], président de la chambre nationale des commissaires de justice dans un courrier en date du 14 juin 2022 relayé par courriel à 18h19 à l'ensemble du collège électoral par la chambre régionale présidée par Mme [W]. Il soutient que la diffusion de ce courriel la veille du scrutin a eu un impact sur la sincérité ou la loyauté de celui-ci, seules 15 voix étant manquantes pour accéder au seuil de la majorité, justifiant son annulation.
La chambre régionale des commissaires de justice de la cour d'appel de Paris soutient que le mail envoyé le 13 juin 2022 est dépourvu de caractère tardif au sens de l'article L.49 du code électoral et que l'incidence des différents courriels adressés aux électeurs sur la sincérité du scrutin n'est pas établie. Elle ajoute que l'écart de voix entre chaque binôme, soit 29 voix sur un total de 191, ne peut pas être qualifié de faible ; que M. [V] a eu la possibilité de répondre aux critiques par un mail du 14 juin 2022 à 7h51 ; que les courriels d'apaisement de Mme [W] et M. [L] sont autant une réaction au courriel de M. [V] qu'au courriel anonyme ; enfin, que la procédure pénale dont M. [V] fait l'objet n'a pas été divulguée par les mails litigieux mais par des articles de presse antérieurs.
S'agissant de ce grief comme du suivant, la chambre nationale des commissaires de justice, se référant à la jurisprudence du juge des élections politiques, affirme que le scrutin a été libre et n'a pas été vicié par des manoeuvres frauduleuses en ce que l'envoi du courriel du 13 juin 2022 n'a pas eu pour conséquence de vicier le scrutin du 15 juin suivant, l'élection étant acquise avec plus de 15% des voix.
Mmes [W] et [D] prétendent que le mail du 13 juin 2022 n'est pas tardif et que M. [V] a eu la possibilité d'y répondre ce qu'il a d'ailleurs fait, donnant ainsi lui-même une nouvelle audience à ce courriel. Elles précisent que l'incidence des différents courriels, dont celui de Mme [W] qui appelait à la sérénité, sur la sincérité du scrutin n'est pas établie observant que l'écart de voix est de plus de 15%.
L'article 52 du décret n°2022-729 du 28 avril 2022 relatif à l'organisation de la profession de commissaires de justice prévoit que 'La nullité partielle ou totale de l'élection ne pourra être prononcée que dans les cas suivants :
1° Si l'élection n'a pas été faite selon les formes prescrites ;
2° Si le scrutin n'a pas été libre, ou s'il a été vicié par des man'uvres frauduleuses ;
3° S'il y a incapacité légale dans la personne d'un ou de plusieurs élus.'
Les dispositions du code électoral, et notamment les articles visés par M. [V], ne sont pas applicables à une élection professionnelle. Celle-ci doit toutefois respecter les grands principes du droit électoral, les opérations électorales devant notamment se dérouler de manière à permettre la libre expression des votes et la sincérité du scrutin.
En l'espèce et conformément à l'article 52 susvisé, il convient de rechercher si le scrutin du 15 juin 2022 a été ou non vicié par des manoeuvres de nature à en altérer la sincérité, étant précisé que la charge de la preuve de l'existence de tels actes et de leur impact sur le résultat du vote incombe à M. [V]
Il est constant que le 13 juin 2022 à 21h05, un mail émanant de 'chevalier blanc des huissiers' à destination d'interlocuteurs anonymes, mais dont il peut être légitimement supposé qu'il s'agit de commissaires de justice au regard du contenu du message, indiquait ' Vous allez élire ces prochains jours le représentant de notre cour. [...] Un candidat s'y emploie. Que penser de PS, notre confrère de [Localité 11] qui ose se présenter au poste de délégué '!!! La liste d'incompétences, de mensonges, de trahisons et d'opportunismes est longue...[...] Devons nous parler d'affaires en cours pour son étude et à titre ponctuel, d'incompétence 'Papa' ayant toujours été derrière. [...]Peut-être a-t-il vendu à un candidat ses compétences à l'international, dans un unique but d'assouvir ses pulsions avec l'argent de nos cotisations. N'oubliez pas qu'une instruction est en cours devant le juge d'instruction pour abus de confiance, qu'une affaire fiscale a eu lieu. Allez-vous élire cet homme qui se dit vertueux ''
M. [V] a été en mesure d'y apporter une réponse utile puisque dès le 14 juin 2022 à 7h51, il a répondu par un courriel adressé à ses confrères dénonçant des 'méthodes de voyou' 'coutumières de certains qui craignent de perdre leurs pouvoirs et leur privilèges' et annonçant le dépôt d'une plainte.
Ces messages ont été suivis d'un courriel de la chambre régionale des huissiers de justice, en date du 14 juin 2022 à 18h19, transmettant une lettre datée du même jour de M. [L], président de la chambre nationale des commissaires de justice, section huissiers de justice, appelant les uns et les autres au calme et à la dignité et rappelant que 'Nul ne peut être empêché de se présenter, même mis en examen, puisque la présomption d'innocence prévaut,', puis le 14 juin 2022 à 21h20, d'un autre de Mme [W] faisant état d'une campagne 'qui s'achève dans la boue. Lettres anonymes sont malheureusement aujourd'hui le lot des huissiers de justice.' et invitant ses confrères à 'passer à autre chose en écartant les bruits de couloir et autres coups bas et d'oeuvrer uniquement à la réussite de la nouvelle profession.'
Outre que les effets éventuels du premier message ont pu être compensés en temps utile par une réponse de M. [V], de sorte qu'il ne peut être considéré comme tardif, les messages suivants, qui appelaient au calme, n'ont pas excédé les limites de la polémique électorale et n'étaient pas de nature à vicier le résultat du scrutin.
En tout état de cause, M. [V] ne démontre pas que ces courriels auraient altéré la sincérité du scrutin ou eu une quelconque incidence sur le résultat du vote alors que l'écart de voix entre les deux listes de candidats est de 29 voix sur 191 votants, soit plus de 15%, peu important le nombre de voix pour accéder à la majorité.
Le moyen est donc écarté.
* Sur le grief tiré de l'existence de manoeuvres frauduleuses et de bruits calomnieux en vue de détourner des suffrages au sens de l'article L.97 du code électoral
M. [V] expose que la campagne de dénigrement dont il a fait l'objet est constitutive de 'bruits calomnieux' et de 'manoeuvre frauduleuses' de nature à constituer des pressions sur les électeurs afin de les dissuader de voter pour lui.
La chambre régionale des commissaires de justice de la cour d'appel de Paris, faisant référence à un arrêt du Conseil d'Etat du 28 mai 2021 (n°445567) répond qu'en l'absence d'élément mensonger, une élection ne peut pas être annulée sur le fondement de l'article L.97 du code électoral. Elle considère qu'en l'espèce M. [V] ne justifie d'aucun élément mensonger constitutif de fausse nouvelle ou de bruit calomnieux puisque la procédure pénale existe et qu'elle avait déjà été révélée par voie de presse.
Mmes [W] et [D] reprennent le moyen développé par la chambre régionale des commissaires de justice de la cour d'appel de Paris sur l'absence d'élément mensonger constitutif d'une fausse nouvelle ou d'un bruit calomnieux.
Le mail du 13 juin 2022 et le courrier de M. [L] font référence à l'existence d'une instruction en cours et à la mise en examen de M. [V]. Toutefois ces éléments ne caractérisent pas une manoeuvre frauduleuse, seule exigée par l'article 52 susvisé, en ce qu'ils visent des faits réels qui avaient déjà été rendus publics par Europe 1 depuis le mois de novembre 2019 et qui, au demeurant, ne pouvaient pas être ignorés des professionnels amenés à voter s'agissant de faits concernant l'un d'entre eux et d'un électorat limité en nombre.
Au demeurant, là encore, M. [V] ne démontre pas que ces courriels auraient eu une quelconque incidence sur le résultat du vote au regard de l'écart des voix.
Le moyen est donc également écarté.
* Sur le grief tiré de la violation du secret de l'instruction
M. [V] considère que les mails des 13 et 14 juin 2022, qui font état de sa mise en examen, constituent une violation manifeste du secret de l'instruction qui a porté atteinte à sa réputation à un moment sciemment choisi de la campagne électorale imposant l'annulation des élections.
La chambre régionale des commissaires de justice de la cour d'appel de Paris estime que ce grief doit être rejeté en ce que les deux conditions nécessaires pour qu'une personne puisse être qualifiée d'auteur de l'infraction de violation manifeste du secret de l'instruction, à savoir que cette personne doit concourir à une instruction ou à une enquête et doit avoir révélé des informations issues de celle-ci, ne sont pas réunies. Elle précise qu'aucun des auteurs des courriels litigieux n'a concouru à l'instruction pénale dont M. [V] fait l'objet, qu'aucune information issue de celle-ci n'a été révélée et que l'existence de cette procédure était déjà connue.
La chambre nationale des commissaires de justice indique que la violation du secret de l'instruction n'emporte pas, en elle-même, la nullité de l'élection et que ce n'est que dans l'hypothèse où l'information dévoilée serait constitutive d'une manoeuvre frauduleuse de nature à vicier le scrutin que cette violation pourrait avoir pour conséquence l'annulation de l'élection. Elle relève que M. [L] n'a pas concouru à la procédure d'instruction concernant M. [V], que rien dans son courrier ne constitue une violation du secret de l'instruction et qu'il n'est pas soutenu que l'auteur du mail anonyme pourrait avoir concouru à la procédure pénale.
Mmes [W] et [D] relèvent également qu'aucune information issue de l'information pénale n'a été révélée aux termes des courriels litigieux.
L'article 11 du code de procédure pénale prévoit que 'Sauf dans le cas où la loi en dispose autrement et sans préjudice des droits de la défense, la procédure au cours de l'enquête et de l'instruction est secrète. Toute personne qui concourt à cette procédure est tenue au secret professionnel dans les conditions et sous les peines prévues à l'article 434-7-2 du code pénal.'
M. [V] n'allègue pas que l'un des auteurs des courriels litigieux ait concouru à la procédure pénale le concernant. M. [L] et Mme [W], qui n'ont pas participé à cette procédure, ne sont pas tenus au secret de l'instruction, de sorte qu'ils ne peuvent pas l'avoir violé.
En outre et comme déjà indiqué, le seul fait de mentionner l'existence d'une instruction pénale déjà connue ne constitue pas une manoeuvre frauduleuse de nature à vicier le scrutin.
Le moyen est écarté.
* Sur le grief tiré de la violation des règles professionnelles et ordinales
Enfin, se prévalant de l'article 14 du règlement déontologique national des huissiers de justice, M. [V] invoque une violation volontaire et manifeste de leurs obligations déontologiques, notamment de confraternité, par Mme [W] et M. [L] constituant des manoeuvres frauduleuses initiées dans le seul but de porter atteinte à la sincérité du scrutin.
La chambre régionale des commissaires de justice de la cour d'appel de Paris répond que M. [V] se contente d'affirmer que Mme [W] et M. [L] ont commis des manquements à leur devoir de confraternité sans toutefois en justifier estimant au contraire qu'aucun manquement déontologique ne ressort des mails litigieux.
La chambre nationale des commissaires de justice fait valoir que la violation de règles déontologique n'emporte pas, en elle-même, la nullité de l'élection et que ce n'est que dans l'hypothèse où la violation de ces règles serait constitutive d'une manoeuvre frauduleuse de nature à vicier le scrutin que cette violation pourrait avoir pour conséquence l'annulation de l'élection. Elle considère qu'une telle violation n'est pas démontrée et que M. [L] n'a commis aucun manquement à son devoir de confraternité, son mail ayant au contraire pour objectif de pacifier le déroulé du scrutin.
Mme [W] conteste tout manquement déontologique de sa part.
L'article 14 du règlement déontologique national des huissiers de justice, approuvé par arrêté du 18 décembre 2018, prévoit que 'Les huissiers de justice se doivent mutuellement conseil, service, soutien et assistance. Ils font preuve en toute circonstance de loyauté et de courtoisie envers leurs confrères. Tout en respectant leur devoir de conseil envers les justiciables, ils ne portent en aucun cas une quelconque appréciation sur leurs confrères.'
Même à supposer que les courriels de M. [L] et de Mme [W] puissent être constitutifs d'un manquement aux obligations de loyauté et de courtoisie, il n'est pas démontré que ceux-ci auraient eu une quelconque incidence sur la sincérité du scrutin eu égard à l'écart de voix.
Ce moyen étant également écarté, la réclamation tendant à l'annulation des opérations électorales du 15 juin 2022 est rejetée.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Déboute M. [G] [V] de sa demande tendant à l'annulation des opérations électorales du 15 juin 2022 relatives à la désignation d'un délégué et de son remplaçant représentant la chambre régionale de la cour d'appel de Paris (hors Paris) à la chambre nationale des commissaires de justice,
Condamne M. [G] [V] à payer à la chambre régionale des commissaires de justice de la cour d'appel de Paris et à la chambre nationale des commissaires de justice la somme de 2 500 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [G] [V] à payer à Mmes [R] [W] et à [P] [D] la somme de 1 500 euros chacune sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [G] [V] aux dépens.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,