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11/06/2015 | CANADA | N°2015_CSC_34

Canada | R. c. Smith


COUR SUPRÊME DU CANADA

Référence : R. c. Smith, 2015 CSC 34
Date : 20150611
Dossier : 36059

Entre :
Sa Majesté la Reine
Appelante
et
Owen Edward Smith
Intimé
- et -
Santé Cannabis, Criminal Lawyers' Association (Ontario),
Association canadienne des libertés civiles, Association des libertés
civiles de la Colombie‑Britannique, Société canadienne du sida,
Réseau juridique canadien VIH/sida et HIV & AIDS Legal Clinic Ontario
Intervenants

Traduction française officielle

Coram : La juge en

chef McLachlin et les juges Abella, Cromwell, Karakatsanis, Wagner, Gascon et Côté

Motifs de jugement :
(par. 1 à 34)
...

COUR SUPRÊME DU CANADA

Référence : R. c. Smith, 2015 CSC 34
Date : 20150611
Dossier : 36059

Entre :
Sa Majesté la Reine
Appelante
et
Owen Edward Smith
Intimé
- et -
Santé Cannabis, Criminal Lawyers' Association (Ontario),
Association canadienne des libertés civiles, Association des libertés
civiles de la Colombie‑Britannique, Société canadienne du sida,
Réseau juridique canadien VIH/sida et HIV & AIDS Legal Clinic Ontario
Intervenants

Traduction française officielle

Coram : La juge en chef McLachlin et les juges Abella, Cromwell, Karakatsanis, Wagner, Gascon et Côté

Motifs de jugement :
(par. 1 à 34)
La Cour

Note : Ce document fera l'objet de retouches de forme avant la parution de sa version définitive dans le Recueil des arrêts de la Cour suprême du Canada .



r. c. smith
Sa Majesté la Reine Appelante
c.
Owen Edward Smith Intimé
et
Santé Cannabis,
Criminal Lawyers' Association (Ontario),
Association canadienne des libertés civiles,
Association des libertés civiles de la Colombie‑Britannique,
Société canadienne du sida, Réseau juridique canadien VIH/sida et
HIV & AIDS Legal Clinic Ontario Intervenants
Répertorié : R. c. Smith
2015 CSC 34
N o du greffe : 36059.
2015 : 20 mars; 2015 : 11 juin.
Présents : La juge en chef McLachlin et les juges Abella, Cromwell, Karakatsanis, Wagner, Gascon et Côté.
en appel de la cour d'appel de la colombie‑britannique
Droit constitutionnel — Charte des droits — Qualité pour agir — Accusé inculpé de possession de cannabis et de possession de cannabis en vue d'en faire le trafic — Règlement restreignant la possession légale de marijuana à des fins médicales à sa forme séchée — Accusé non consommateur de marijuana à des fins médicales, mais producteur de produits dérivés en vue de leur vente en dehors du régime réglementaire — L'accusé a‑t‑il qualité pour contester la validité constitutionnelle du régime? — Loi réglementant certaines drogues et autres substances , L.C. 1996, c. 19 , art. 4(1) , 5(2) — Règlement sur l'accès à la marijuana à des fins médicales, DORS/2001‑227.
Droit constitutionnel — Charte des droits — Droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne — Justice fondamentale — Accusé inculpé de possession de cannabis et de possession de cannabis en vue d'en faire le trafic — Règlement restreignant la possession légale de marijuana à des fins médicales à sa forme séchée — La restriction porte‑t‑elle atteinte au droit garanti par l'art. 7 de la Charte canadienne des droits et libertés? — Si oui, l'atteinte est‑elle justifiable au regard de l'article premier de la Charte? — Réparation appropriée — Loi réglementant certaines drogues et autres substances , L.C. 1996, c. 19 , art. 4(1) , 5(2) — Règlement sur l'accès à la marijuana à des fins médicales, DORS/2001‑227.
S fabriquait, en vue de leur vente, des produits comestibles et des produits topiques à partir de la marijuana par l'extraction des composés actifs de la plante de cannabis. Il exerçait ses activités en dehors du cadre du régime établi par le Règlement sur l'accès à la marijuana à des fins médicales (le « RAMFM ») qui limite à la « marijuana séchée » la possession légitime de marijuana à des fins médicales. S ne consomme pas lui‑même de marijuana à des fins médicales. La police a inculpé S de possession de cannabis et de possession de cannabis en vue d'en faire le trafic, infractions décrites respectivement aux par. 4(1) et 5(2) de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances (la « LRCDAS »). Le juge du procès a conclu que l'interdiction touchant les formes non séchées de marijuana utilisées à des fins médicales portait atteinte de façon injustifiable au droit protégé par l' art. 7 de la Charte et les juges majoritaires de la Cour d'appel ont rejeté l'appel.
Arrêt : L'appel est rejeté, la suspension de la déclaration d'invalidité prononcée par la Cour d'appel est supprimée et l'acquittement de S est confirmé.
S a qualité pour contester la constitutionnalité du RAMFM . Tout accusé a qualité pour contester la constitutionnalité de la loi en vertu de laquelle il est inculpé, même si les effets inconstitutionnels allégués ne le visent pas personnellement et même si toute réparation possible à l'égard d'un vice constitutionnel ne mettra pas automatiquement fin aux accusations portées contre lui.
L'interdiction frappant la possession de formes non séchées de marijuana à des fins médicales limite de deux façons le droit à la liberté de la personne garanti par l' art. 7 de la Charte . Premièrement, elle prive S et les consommateurs de marijuana à des fins médicales de leur liberté en les exposant au risque d'être incarcérés s'ils sont reconnus coupables en application du par. 4(1) ou du par. 5(2) de la LRCDAS . Deuxièmement, l'interdiction limite le droit à la liberté des consommateurs de marijuana à des fins médicales en les privant de choix médicaux raisonnables puisque certains de ceux‑ci les exposent au risque d'une poursuite pénale. En outre, en contraignant ces personnes à choisir entre, d'une part, un traitement légal, mais inadéquat et, d'autre part, une solution illégale, mais plus efficace, la loi porte également atteinte à la sécurité de la personne.
Ces limites sont contraires aux principes de justice fondamentale parce qu'elles sont arbitraires. Les effets de l'interdiction sont contraires à l'objectif de protection de la santé et de la sécurité. La preuve appuie amplement les conclusions qu'a tirées le juge de première instance suivant lesquelles inhaler de la marijuana peut présenter des risques pour la santé et est moins efficace dans le cas de certaines affections que l'administration de dérivés du cannabis. Autrement dit, il n'y a pas de lien entre l'interdiction frappant les formes non séchées de marijuana utilisées à des fins médicales et la santé et la sécurité des patients qui satisfont aux conditions prévues par la loi pour avoir accès à de la marijuana à des fins médicales.
En l'espèce, l'objectif de l'interdiction est le même dans les analyses fondées tant sur l' art. 7 que sur l'article premier de la Charte : la protection de la santé et de la sécurité. Par conséquent, la même absence de lien entre l'interdiction et son objet qui rend l'interdiction arbitraire pour l'application de l' art. 7 fait échec à l'exigence de l'article premier selon laquelle il doit exister un lien rationnel entre la restriction du droit et un objectif urgent. L'atteinte portée à l' art. 7 n'est donc pas justifiée au regard de l'article premier.
Les articles 4 et 5 de la LRCDAS ne devraient toutefois pas être invalidés en entier. La réparation appropriée consiste à déclarer ces dispositions inopérantes dans la mesure où elles interdisent à une personne munie d'une autorisation médicale de posséder des dérivés du cannabis à des fins médicales; cette déclaration n'est toutefois pas suspendue parce que la suspendre ferait en sorte que les patients se retrouveraient sans traitement médical légal et que la loi et son application seraient laissées dans le flou.
Jurisprudence
Arrêts mentionnés : R. c. Parker (2000), 146 C.C.C. (3d) 193; R. c. Big M Drug Mart Ltd. , [1985] 1 R.C.S. 295; R. c. Morgentaler , [1988] 1 R.C.S. 30; R. c. Latchmana , 2008 ONCJ 187, 170 C.R.R. (2d) 128; R. c. Clay (2000), 49 O.R. (3d) 577; Renvoi sur la Motor Vehicle Act (C.‑B.) , [1985] 2 R.C.S. 486; Hitzig c. Canada (2003), 231 D.L.R. (4th) 104; Housen c. Nikolaisen , 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235; Canada (Procureur général) c. PHS Community Services Society , 2011 CSC 44, [2011] 3 R.C.S. 134; Canada (Procureur général) c. Bedford , 2013 CSC 72, [2013] 3 R.C.S. 1101; Carter c. Canada (Procureur général) , 2015 CSC 5, [2015] 1 R.C.S. 331; R. c. Oakes , [1986] 1 R.C.S. 103.
Lois et règlements cités
Charte canadienne des droits et libertés , art. 1 , 7 .
Loi constitutionnelle de 1982 , art. 52 .
Loi réglementant certaines drogues et autres substances , L.C. 1996, c. 19 , art. 4 , 5 , 19 , 55 .
Loi sur les aliments et drogues , L.R.C. 1985, c. F‑27 .
Règlement sur l'accès à la marihuana à des fins médicales , DORS/2001‑227 [abr. 2013‑119, art. 267], art. 1 « marihuana séchée », 24, 34.
Règlement sur la marihuana à des fins médicales , DORS/2013‑119.
POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel de la Colombie‑Britannique (les juges Levine, Chiasson et Garson), 2014 BCCA 322, 360 B.C.A.C. 66, 617 W.A.C. 66, 315 C.C.C. (3d) 36, 316 C.R.R. (2d) 205, 14 C.R. (7th) 81, [2014] B.C.J. No. 2097 (QL), 2014 CarswellBC 2383 (WL Can.), qui a infirmé en partie une décision du juge Johnston, 2012 BCSC 544, 290 C.C.C. (3d) 91, 257 C.R.R. (2d) 129, [2012] B.C.J. No. 730 (QL), 2012 CarswellBC 1043 (WL Can.). Pourvoi rejeté.
W. Paul Riley , c.r. , et Kevin Wilson , pour l'appelante.
Kirk I. Tousaw , John W. Conroy , c.r. , Matthew J. Jackson et Bibhas D. Vaze , pour l'intimé.
Julius H. Grey et Geneviève Grey , pour l'intervenante Santé Cannabis.
Gerald Chan et Nader R. Hasan , pour l'intervenante Criminal Lawyers' Association (Ontario).
Andrew K. Lokan et Debra McKenna , pour l'intervenante l' Association canadienne des libertés civiles .
Jason B. Gratl , pour l'intervenante l' Association des libertés civiles de la Colombie‑Britannique .
Argumentation écrite seulement par Paul Burstein , Ryan Peck et Richard Elliott , pour les intervenants la Société canadienne du sida, le Réseau juridique canadien VIH/sida et HIV & AIDS Legal Clinic Ontario.


Version française du jugement rendu par

La Cour —
[1] Le règlement pris en vertu de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances , L.C. 1996, c. 19 (la « LRCDAS »), permet la consommation de la marijuana pour le traitement d'un état pathologique. Toutefois, seule la « marijuana séchée » peut être utilisée à cette fin, de sorte qu'il est toujours interdit aux personnes légalement autorisées à posséder de la marijuana à des fins médicales de posséder des produits du cannabis extraits des composés médicinaux actifs présents dans la plante de cannabis. Il s'ensuit que les patients qui obtiennent de la marijuana séchée conformément à une telle autorisation ne peuvent choisir de l'administrer au moyen d'un traitement oral ou topique et qu'ils doivent l'inhaler, habituellement en la fumant. Or, inhaler de la marijuana peut présenter des risques pour la santé et est moins efficace dans le cas de certaines affections que l'administration de dérivés du cannabis.
[2] Les parties acceptent la conclusion de la Cour d'appel de l'Ontario dans R. c. Parker (2000), 146 C.C.C. (3d) 193, selon laquelle une interdiction totale frappant l'accès médical à la marijuana porte atteinte à la Charte canadienne des droits et libertés . En l'espèce, nous sommes toutefois appelés à décider si un régime d'accès médical qui restreint l'accès à la marijuana uniquement sous sa forme séchée porte atteinte de façon injustifiable au droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne reconnu à l' art. 7 de la Charte . Les tribunaux de la Colombie‑Britannique ont répondu par l'affirmative à cette question et nous abondons dans leur sens.
I. Contexte
[3] La LRCDAS interdit la possession, la production et la distribution du cannabis, de ses composés actifs et de ses dérivés. Reconnaissant le fait que certaines substances désignées peuvent avoir des usages bénéfiques, la LRCDAS habilite par ailleurs le gouvernement à créer par règlement des exemptions à des fins médicales, scientifiques ou industrielles ( art. 55 ). Le Règlement sur l'accès à la marijuana à des fins médicales , DORS/2001‑227 (le « RAMFM »), créait une telle exemption à l'égard des personnes qui étaient en mesure de démontrer qu'elles avaient besoin de cannabis à des fins médicales. Le demandeur devait produire une déclaration fournie par un médecin certifiant que les traitements conventionnels s'étaient révélés inefficaces ou ne convenaient pas dans son cas. Après avoir satisfait à toutes les exigences réglementaires, le patient était légalement autorisé à posséder de la « marijuana séchée », définie comme suit : « [m]arihuana qui a été récoltée et soumise à un processus de séchage » ( art. 1 ). Certains patients étaient autorisés à cultiver leur propre marijuana en vertu d'une l icence de production à des fins personnelles (art. 24), alors que d'autres pouvaient se la procurer auprès du titulaire d'une licence de production à titre de personne désignée (art. 34).
[4] Le RAMFM a été remplacé en 2013 par le Règlement sur la marijuana à des fins médicales , DORS/2013‑119 (le « RMFM »). Le nouveau régime remplace le système de production de marijuana que prévoyait le RAMFM par un système de producteurs autorisés par le gouvernement. Toutefois, aux fins du présent appel, la situation reste inchangée : pour les patients qui font usage de marijuana à des fins médicales, l'exception à l'infraction prévue par la LRCDAS se limite toujours à la marijuana séchée.
[5] L'accusé, Owen Edward Smith, travaillait pour le Cannabis Buyers Club of Canada, situé sur l'île de Vancouver, en Colombie‑Britannique. Le club vendait de la marijuana et des produits dérivés du cannabis à ses membres, des personnes dont le club était convaincu qu'elles souffraient de véritables problèmes de santé pouvant être soulagés par la marijuana, selon un diagnostic posé par un médecin ou des tests de laboratoire. Le club vendait non seulement de la marijuana séchée à fumer, mais également des produits du cannabis comestibles et topiques — des biscuits, des gélules, de l'huile à friction, des timbres transdermiques, du beurre et du baume à lèvres. Il fournissait également à ses membres des livres de recettes expliquant comment fabriquer les produits en question par l'extraction des composés actifs de la marijuana séchée. Le travail de M. Smith consistait à fabriquer, en vue de leur vente, des produits comestibles et des produits topiques à partir du cannabis par l'extraction des composés actifs de la plante de cannabis. M. Smith ne consomme pas personnellement de marijuana à des fins médicales et le club ne possédait pas de permis de production délivré sous le régime du RAMFM .
[6] Le 3 décembre 2009, répondant à une plainte faisant état d'une odeur désagréable, des policiers se sont présentés à l'appartement de M. Smith à Victoria et ont constaté la présence de marijuana sur une table. Ils ont obtenu un mandat de perquisition et ont saisi l'inventaire de l'appartement, dont 211 biscuits à base de cannabis, un sac de marijuana séchée et 26 contenants de liquide étiquetés notamment [ traduction ] « huile à massage » et « baume à lèvres ». Des tests de laboratoire ont démontré que les biscuits et le liquide présents dans les contenants renfermaient du tétrahydrocannabinol (du « THC »), le principal composé actif du cannabis. À l'instar des autres composés actifs du cannabis, le THC ne tombe pas sous le coup de l'exemption du RAMFM applicable à la marijuana séchée. La police a accusé M. Smith de possession de THC en vue d'en faire le trafic, infraction décrite au par. 5(2) de la LRCDAS , et de possession de cannabis, infraction décrite au par. 4(1) de la LRCDAS .
[7] Lors de son procès devant le juge Johnston, M. Smith a soutenu que, combinée à l'exemption accordée dans le RAMFM , l'interdiction de posséder de la marijuana prévue par la LRCDAS contrevenait à l' art. 7 de la Charte et était inconstitutionnelle parce qu'elle limitait à la « marijuana séchée » la possession légitime de marijuana à des fins médicales. De nombreux témoins, tant experts que profanes, ont été appelés à la barre. À la fin du voir‑dire, le juge a tiré les conclusions suivantes (2012 BCSC 544, 290 C.C.C. (3d) 91) :
1) Il a été démontré que les composés actifs de la plante de cannabis, tels que le THC et le cannabidiol, ont des effets médicaux bénéfiques et leur effet thérapeutique est généralement admis, bien que le fondement précis de ces effets bénéfiques n'ait pas encore été établi.
2) Les divers modes d'administration de la marijuana présentent différents avantages sur le plan médical. Par exemple, l'ingestion orale des composés actifs, que ce soit sous forme de produits cuits avec de l'huile contenant du THC ou avec du beurre ou sous forme de gélules remplies des composés actifs en question, peut soulager des problèmes gastro‑intestinaux parce que ces composés sont acheminés directement vers le site même de la pathologie. De plus, l'administration par voie orale favorise une accumulation plus lente et une rétention plus longue des composés actifs dans le système que l'inhalation, ce qui permet aux effets médicaux bénéfiques de durer plus longtemps, notamment pendant le sommeil du patient. Ce mode d'administration convient donc davantage dans le cas de maladies chroniques.
3) Le fait d'inhaler la marijuana, habituellement en la fumant, permet de profiter rapidement des effets bénéfiques du cannabis, mais comporte aussi des effets secondaires dommageables. Bien que moins nocif que l'usage du tabac, le fait de fumer de la marijuana présente des risques reconnus, parce qu'il expose les patients à des produits chimiques cancérigènes et qu'il est associé à des troubles bronchiques.
[8] Le juge de première instance a conclu que la restriction de l'accès à la marijuana uniquement sous forme de plante séchée privait M. Smith et les consommateurs de marijuana à des fins médicales de leur liberté en les exposant à des menaces de poursuites et d'incarcération pour possession des composés actifs du cannabis. Il a ajouté que cette restriction privait les consommateurs de marijuana à des fins médicales de la liberté de choisir le mode d'administration d'un médicament qu'ils étaient autorisés à posséder — une décision qui, à son sens, revêtait [ traduction ] « une importance fondamentale sur le plan personnel » —, en contravention de l' art. 7 de la Charte (par. 88) . En outre, à son avis, la restriction en question violait les principes de justice fondamentale en raison de son caractère arbitraire; limiter l'exemption médicale à la marijuana séchée ne faisait « que peu ou rien » pour promouvoir l'intérêt de l'État à empêcher le détournement de drogues vers le marché illégal ou pour contrôler les prétentions fausses ou trompeuses de bénéfices pour la santé (par. 114). Pour la même raison, le juge de première instance a estimé qu'il n'existait pas de lien rationnel entre la restriction et les objectifs qu'elle visait, et que la restriction n'était donc pas justifiée au regard de l'article premier de la Charte .
[9] Les juges majoritaires de la Cour d'appel ont confirmé les conclusions tirées par le juge de première instance relativement à la preuve et aux questions constitutionnelles; ils ont toutefois décrit d'une manière plus générale l'objet de l'interdiction, qui visait selon eux la protection de la santé et de la sécurité (2014 BCCA 322, 360 B.C.A.C. 66). Le juge Chiasson, dissident, a estimé que M. Smith n'avait pas qualité pour soulever la question constitutionnelle et qu'en tout état de cause, la restriction ne violait pas l' art. 7 parce que les consommateurs de marijuana à des fins médicales pouvaient légalement transformer la marijuana séchée en d'autres formes.
II. Analyse
[10] Le présent pourvoi soulève trois questions : la qualité de M. Smith pour contester la constitutionnalité de l'interdiction, la constitutionnalité de l'interdiction et la réparation appropriée.
A. Qualité pour agir
[11] La première question est celle de savoir si M. Smith a qualité pour contester la constitutionnalité de l'interdiction. Nous concluons qu'il a effectivement cette qualité. Le ministère public ne s'est pas opposé au procès à la qualité pour agir de M. Smith. En appel, bien que la question ait été évoquée lors de sa plaidoirie orale, le ministère public a reconnu que le principe selon lequel « nul ne peut être déclaré coupable d'une infraction à une loi inconstitutionnelle » s'applique à M. Smith ( R. c. Big M Drug Mart Ltd. , [1985] 1 R.C.S. 295, p. 313; motifs de la C.A., par. 147). Devant la Cour, le ministère public a repris la position dissidente du juge Chiasson en faisant valoir que M. Smith n'avait pas qualité pour agir parce qu'il ne consomme pas lui‑même de marijuana à des fins médicales et qu'il exerçait ses activités en dehors du cadre du régime de réglementation. Le fait que l'exemption se restreigne à la marijuana séchée n'a donc [ traduction ] « rien à voir avec lui » (motifs de la C.A., par. 151).
[12] Cette thèse ne tient pas compte du rôle que joue le RAMFM dans le régime législatif. Le RAMFM constitue une exception aux dispositions pénales en vertu desquelles M. Smith a été accusé, en l'occurrence les art. 4 et 5 de la LRCDAS . Comme l'ont expliqué les juges majoritaires de la Cour d'appel, il faut déterminer si ces dispositions de la LRCDAS , [ traduction ] « telles qu'elles sont modifiées par le RAMFM , privent les personnes autorisées à posséder de la marijuana d'un droit qui leur est garanti par la Constitution en limitant leur protection contre des poursuites criminelles aux seuls cas où elles possèdent de la marijuana séchée » (par. 85). Le fait que M. Smith ne soit pas un consommateur de marijuana à des fins médicales et qu'il ne soit pas titulaire d'une licence de production conformément au régime ne signifie pas non plus qu'il n'a pas qualité pour agir. Tout accusé a qualité pour contester la constitutionnalité de la loi en vertu de laquelle il est inculpé, même si les effets inconstitutionnels allégués ne le visent pas personnellement (voir R. c. Morgentaler , [1988] 1 R.C.S. 30; Big M Drug Mart Ltd. ). Il n'est pas non plus nécessaire que l'accusé démontre que toute réparation possible à l'égard d'un vice constitutionnel mettra automatiquement fin aux accusations portées contre lui. Lorsqu'un demandeur conteste une loi en faisant valoir que son incidence à l'égard d'autres personnes est incompatible avec la Charte , il est toujours possible qu'une réparation accordée en application de l' art. 52 de la Loi constitutionnelle de 1982 ne porte pas sur la situation particulière du demandeur (voir R. c. Latchmana , 2008 ONCJ 187, 170 C.R.R. (2d) 128, par. 16; R. c. Clay (2000), 49 O.R. (3d) 577 (C.A.)).
[13] En l'espèce, la constitutionnalité de la disposition législative en application de laquelle M. Smith est accusé dépend directement de la constitutionnalité de l'exemption médicale prévue par le RAMFM (voir Parker ). Il est donc autorisé à la contester.
B. Constitutionnalité de l'interdiction
[14] Dans le cadre du présent pourvoi, la Cour est appelée à décider si le fait de restreindre l'accès médical à la marijuana uniquement à sa forme séchée viole l' art. 7 de la Charte :
7. Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale.
[15] L' article 7 permet au législateur de limiter le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de la personne, à condition de le faire en conformité avec les principes de justice fondamentale.
[16] La première question à se poser dans le cadre de l'analyse fondée sur l' art. 7 est celle de savoir si la loi limite le droit à la vie, à la liberté ou à la sécurité de la personne. À notre avis, c'est effectivement le cas. Le fait que le régime législatif restreigne l'accès à la marijuana à des fins médicales uniquement sous sa forme séchée limite de deux façons les droits garantis à l' art. 7 .
[17] En premier lieu, l'interdiction de posséder des dérivés du cannabis porte atteinte au droit à la liberté de M. Smith en l'exposant au risque d'être incarcéré s'il est reconnu coupable en application du par. 4(1) ou du par. 5(2) de la LRCDAS . Toute infraction dont l'incarcération constitue l'une des sanctions possibles fait intervenir le droit à la liberté ( Renvoi sur la Motor Vehicle Act (C.‑B.) , [1985] 2 R.C.S. 486, p. 515). L'interdiction en question fait également intervenir le droit à la liberté des consommateurs de marijuana à des fins médicales, car ces personnes s'exposent à des sanctions criminelles si elles produisent ou possèdent des produits du cannabis autres que de la marijuana séchée. Nous ne pouvons souscrire au point de vue exprimé par le juge dissident sur ce point : le RAMFM n'autorise pas les consommateurs de marijuana à des fins médicales à transformer la marijuana séchée en ses composés actifs. L'autorisation de posséder de la marijuana à des fins médicales ne peut être invoquée comme moyen de défense par un patient ayant en sa possession une autre forme médicamenteuse de cette drogue, comme des biscuits au cannabis, de l'huile de massage contenant du THC ou des gélules remplies de THC.
[18] En second lieu, l'interdiction frappant la possession des composés actifs du cannabis à des fins médicales limite le droit à la liberté des patients en les privant de la possibilité de faire des choix médicaux raisonnables en raison de la menace de poursuites pénales ( Parker , par. 92). En l'espèce, l'État refuse aux gens qui ont déjà démontré leur besoin légitime de marijuana — un besoin auquel le régime législatif est censé répondre — la possibilité de choisir le mode d'administration de la drogue. Suivant la preuve acceptée par le juge de première instance, ce refus n'est pas banal; il expose les personnes visées aux risques de contracter un cancer ou des infections des bronches qui sont associés au fait de fumer de la marijuana sèche, et les empêche de choisir un traitement plus efficace. En outre, en contraignant ces personnes à choisir entre, d'une part, un traitement légal, mais inadéquat et, d'autre part, une solution illégale, mais plus efficace, la loi porte également atteinte à la sécurité de la personne ( Morgentaler ; Hitzig c. Canada (2003), 231 D.L.R. (4th) 104, (C.A.Ont.)).
[19] Le ministère public a affirmé que la preuve présentée lors du voir‑dire n'avait pas établi que l'interdiction des autres formes de cannabis contrevenait à un quelconque droit garanti à l' art. 7 , si l'on faisait abstraction de la privation de liberté découlant de la sanction criminelle. Selon lui, la preuve n'a pas démontré que les autres formes d'utilisation médicale de la marijuana avaient quelque effet thérapeutique que ce soit; elle établissait tout au plus que les patients qui avaient témoigné préféraient les produits du cannabis à d'autres options de traitement. Cet argument va à l'encontre des conclusions de fait tirées par le juge de première instance. Après avoir analysé soigneusement les nombreux témoignages d'experts et témoignages personnels, le juge de première instance a conclu que, dans certaines circonstances, l'utilisation de dérivés du cannabis était plus efficace et moins dangereuse que le fait de fumer ou d'inhaler sous une autre forme de la marijuana séchée. Les conclusions tirées par le juge de première instance sur des questions de fait ne peuvent être écartées que si elles ne reposent pas sur la preuve ou si elles sont manifestement erronées ( Housen c. Nikolaisen , 2002 CSC 33, [2002] 2 R.C.S. 235). Or, la preuve appuie amplement les conclusions qu'a tirées le juge de première instance au sujet des avantages que comportent les autres formes de traitement à la marijuana; d'ailleurs, même la documentation de Santé Canada déposée par le témoin expert du ministère public indique que l'ingestion orale de cannabis peut être appropriée ou bénéfique dans le cas de certaines affections.
[20] Les témoignages d'experts, ainsi que les témoignages anecdotiques de patients consommant de la marijuana à des fins thérapeutiques, établissent davantage qu'une préférence subjective pour les formes de traitement par voie orale ou topique. Le fait que les témoins profanes n'aient pas soumis de rapports médicaux affirmant qu'il est nécessaire, sur le plan médical, de recourir à une autre forme de cannabis n'est pas, contrairement à ce que prétend le ministère public, déterminant dans le cas de l'analyse effectuée pour l'application de l' art. 7 . Bien qu'il ne soit pas nécessaire de déterminer de manière concluante le seuil justifiant l'application de l' art. 7 dans le contexte médical, nous convenons avec les juges majoritaires de la Cour d'appel que ce seuil est atteint eu égard aux faits de l'espèce. La preuve a démontré que la décision d'utiliser des formes non séchées de marijuana pour le traitement de pathologies graves est raisonnable sur le plan médical. Autrement dit, il y a des cas où d'autres formes de cannabis seront [ traduction ] « raisonnablement nécessaires » pour le traitement de maladies graves (motifs de la C.A., par. 103). À notre avis, en pareilles circonstances, la criminalisation de l'accès au traitement en question porte atteinte à la liberté et à la sécurité de la personne.
[21] Nous concluons que l'interdiction frappant la possession de formes non séchées de marijuana à des fins médicales limite le droit à la liberté et à la sécurité de la personne et fait intervenir l' art. 7 de la Charte . Il nous faut maintenant répondre à la seconde question, celle de savoir si cette limite est contraire aux principes de justice fondamentale.
[22] Le juge de première instance a conclu que la limite imposée par la loi à la liberté et à la sécurité de la personne n'était pas conforme aux principes de justice fondamentale parce que la restriction était arbitraire et ne faisait [ traduction ] « que peu ou rien » pour promouvoir les objectifs de la loi, lesquels consistaient selon lui à contrôler les drogues illégales ou les prétentions d'ordre médical fausses et trompeuses. Les juges majoritaires de la Cour d'appel, estimant que l'objet de l'interdiction était la protection de la santé et de la sécurité du public (en se fondant sur les arrêts Hitzig et Canada (Procureur général) c. PHS Community Services Society , 2011 CSC 44, [2011] 3 R.C.S. 134), ont également conclu que l'interdiction ne favorisait pas cet objectif et qu'elle était donc arbitraire et contraire aux principes de justice fondamentale.
[23] Il est nécessaire de déterminer l'objet de l'interdiction, étant donné qu'une loi n'est arbitraire que si elle impose des limites à la liberté ou à la sécurité de la personne sans lien avec son objectif ( Canada (Procureur général) c. Bedford , 2013 CSC 72, [2013] 3 R.C.S. 1101, par. 98).
[24] Le ministère public ne conteste pas la conclusion de la Cour d'appel suivant laquelle l'objet de l'interdiction frappant les formes non séchées de marijuana utilisées à des fins médicales est la protection de la santé et de la sécurité. Il va toutefois plus loin en soutenant que la restriction en cause protège la santé et la sécurité en faisant en sorte que les drogues offertes à des fins thérapeutiques soient conformes aux exigences en matière d'innocuité, de qualité et d'efficacité énoncées dans la Loi sur les aliments et drogues , L.R.C. 1985, c. F‑27 , et ses règlements d'application. Cette nuance ne change en rien l'objet de l'interdiction; elle ne fait que décrire un des moyens utilisés par le gouvernement pour protéger la santé et la sécurité du public. De plus, le RAMFM ne vise pas à assujettir la marijuana séchée à ces exigences en matière d'innocuité, de qualité et d'efficacité, ce qui contredit l'affirmation du ministère public qu'il s'agit là de l'objet de l'interdiction. Nous concluons donc que l'objet de la restriction à la seule marijuana séchée est simplement la protection de la santé et de la sécurité.
[25] Il s'agit de savoir s'il y a un lien entre l'interdiction frappant les formes non séchées de marijuana utilisées à des fins médicales et la santé et la sécurité des patients qui satisfont aux conditions prévues par la loi pour avoir accès à de la marijuana à des fins médicales. Le juge de première instance a conclu que, dans le cas de certains patients, l'administration sous d'autres formes utilisant des dérivés du cannabis était plus efficace que l'inhalation de la marijuana. Il a également estimé que l'interdiction forçait des personnes ayant un besoin légitime et légalement reconnu d'utiliser de la marijuana à accepter le risque pour leur santé auquel pouvait les exposer le fait de fumer chroniquement de cette drogue. Il découle de ces conclusions que l'interdiction frappant l'usage de la marijuana à des fins médicales sous une forme autre que séchée compromet la santé et la sécurité de ceux qui en consomment à ces fins en diminuant la qualité des soins médicaux qui leur sont offerts. Les effets de l'interdiction contredisent les objectifs qu'elle vise et la rendent donc arbitraire ( Bedford , par. 98‑100).
[26] Le ministère public affirme qu'il y a des risques pour la santé associés à l'extraction des composés actifs présents dans la marijuana en vue de leur administration au moyen de produits oraux ou topiques. Il soutient qu'il existe un lien rationnel entre l'objectif de protection de la santé et de la sécurité que poursuit l'État et l'existence d'un régime réglementaire qui ne permet l'accès qu'aux drogues dont il a été démontré par des études scientifiques qu'elles sont sans danger et efficaces sur le plan thérapeutique. Nous ne sommes pas de cet avis. La preuve qui a été acceptée au procès n'a pas établi de lien entre la restriction et la promotion de la santé et de la sécurité. Comme nous l'avons déjà expliqué, la marijuana séchée n'est pas assujettie aux mécanismes de surveillance du régime de la Loi sur les aliments et drogues . Il est donc difficile de comprendre pourquoi le fait de permettre à des patients de transformer de la marijuana séchée en huile à cuisson les exposerait à un risque plus élevé que le fait de leur permettre de fumer ou de vaporiser de la marijuana séchée. En outre, le ministère public n'a soumis aucun élément de preuve tendant à démontrer l'existence d'un tel risque. De fait, comme nous l'avons déjà signalé, certains des documents déposés par le ministère public mentionnent l'ingestion orale de cannabis comme solution de rechange viable à celle consistant à fumer la marijuana.
[27] Enfin, la preuve n'a démontré l'existence d'aucun lien entre la restriction contestée et les tentatives visant à mettre un frein au détournement de la marijuana vers le marché illégal. Force nous est de constater l'absence totale de lien entre la limite que l'interdiction impose à la liberté et à la sécurité de la personne et l'objet de l'interdiction, ce qui rend celle‑ci arbitraire ( Carter c. Canada (Procureur général) , 2015 CSC 5, [2015] 1 R.C.S. 331, par. 83).
[28] Nous concluons que l'interdiction visant les formes non séchées de marijuana utilisées à des fins médicales limite le droit à la liberté et à la sécurité de la personne d'une manière arbitraire, et n'est donc pas conforme aux principes de justice fondamentale. Elle viole donc l' art. 7 de la Charte .
[29] Il nous reste à déterminer si le ministère public a démontré que cette violation de l' art. 7 est raisonnable et si sa justification peut se démontrer au regard de l'article premier de la Charte . Comme nous l'avons expliqué dans l'arrêt Bedford , l'analyse fondée sur l'article premier se concentre sur la protection de l'intérêt public et diffère donc de l'analyse fondée sur l' art. 7 , qui est axée sur la violation de droits individuels : par. 125. Cependant, l'objectif de l'interdiction en l'espèce est le même dans les deux analyses : la protection de la santé et de la sécurité. Par conséquent, la même absence de lien entre l'interdiction et son objet qui rend l'interdiction arbitraire pour application de l' art. 7 fait échec à l'exigence de l'article premier selon laquelle il doit exister un lien rationnel entre la restriction du droit et un objectif urgent ( R. c. Oakes , [1986] 1 R.C.S. 103). À l'instar des juridictions inférieures, nous concluons que l'atteinte portée à l' art. 7 n'est pas justifiée au regard de l'article premier de la Charte .
C. Réparation
[30] Toute règle de droit incompatible avec les droits garantis par la Charte est « inopérante » ( Loi constitutionnelle de 1982 , art. 52 ). Nous estimons que le fait de restreindre l'accès médical à la marijuana uniquement à sa forme séchée est incompatible avec la Charte . Cette restriction est donc inopérante dans la mesure de cette incompatibilité.
[31] La forme exacte que l'ordonnance devrait revêtir se complique du fait que l'inconstitutionnalité découle de la combinaison des dispositions pénales en question et de l'exemption. Les dispositions pénales de la LRCDAS ne devraient pas être invalidées en entier. L'exemption n'est pas non plus, à strictement parler, problématique; le problème est qu'elle est trop étroite ou trop limitative. Nous concluons que la réparation appropriée consiste à déclarer inopérants les art. 4 et 5 de la LRCDAS dans la mesure où ils interdisent à une personne munie d'une autorisation médicale de posséder des dérivés du cannabis à des fins médicales.
[32] Nous sommes d'avis de rejeter la demande du ministère public visant à faire suspendre la déclaration d'invalidité pour que l'interdiction reste en vigueur en attendant une éventuelle réponse du législateur. (Ce que le législateur pourra choisir de faire ou de ne pas faire se complique par les diverses solutions qui s'offrent à lui ainsi que par le fait que le RAMFM a été depuis remplacé par un nouveau régime.) Suspendre la déclaration d'invalidité ferait en sorte que les patients se retrouveraient sans traitement médical légal et que la loi et son application seraient laissées dans le flou. Nous faisons nôtres les propos formulés par la Cour d'appel de l'Ontario dans l'arrêt Hitzig , au par. 170 : [ traduction ] « Le fait de suspendre l'application de la réparation que nous ordonnons [ne ferait que] prolonger encore une incertitude indésirable ».
III. Dispositif
[33] Nous sommes d'avis de rejeter le pourvoi , mais de modifier l'ordonnance rendue par la Cour d'appel en supprimant la suspension de sa déclaration d'invalidité et en déclarant plutôt que les art. 4 et 5 de la LRCDAS sont inopérants dans la mesure où ils interdisent à une personne munie d'une autorisation médicale de posséder des dérivés du cannabis à des fins médicales.
[34] À aucun moment dans le cadre de la présente instance, les tribunaux de la Colombie‑Britannique ou la Cour n'ont déclaré inconstitutionnelles les accusations portées contre M. Smith. En fait, à la suite du voir‑dire, le juge de première instance a refusé d'ordonner l'arrêt des procédures. Malgré cela, le ministère public a choisi de ne présenter aucune preuve au procès. M. Smith a été acquitté en raison de ce choix. Nous ne voyons pas pourquoi il faudrait autoriser le ministère public à rouvrir le dossier à l'issue du présent pourvoi. L'acquittement de M. Smith est confirmé.



Pourvoi rejeté.
Procureur de l'appelante : Service des poursuites pénales du Canada, Vancouver.
Procureurs de l'intimé : Tousaw Law Corporation, Duncan, Colombie‑Britannique; Conroy and Company, Abbotsford; Henshall Scouten, Vancouver; Bibhas D. Vaze, Vancouver.
Procureurs de l'intervenante Santé Cannabis : Grey Casgrain, Montréal.
Procureurs de l'intervenante Criminal Lawyers' Association (Ontario) : Ruby Shiller Chan Hasan, Toronto.
Procureurs de l'intervenante l' Association canadienne des libertés civiles : Paliare Roland Rosenberg Rothstein, Toronto.
Procureurs de l'intervenante l' Association des libertés civiles de la Colombie‑Britannique : Gratl & Company, Vancouver.
Procureurs des intervenants la Société canadienne du sida, le Réseau juridique canadien VIH/sida et HIV & AIDS Legal Clinic Ontario : Burstein Bryant Barristers, Toronto; HIV & AIDS Legal Clinic Ontario, Toronto; Réseau juridique canadien VIH/sida, Toronto.


Synthèse
Référence neutre : 2015 CSC 34 ?
Date de la décision : 11/06/2015
Proposition de citation de la décision: R. c. Smith


Origine de la décision
Date de l'import : 25/10/2015
Fonds documentaire ?: Lexum
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;2015-06-11;2015.csc.34 ?

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