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03/10/2019 | FRANCE | N°19BX00284

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 03 octobre 2019, 19BX00284


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 11 octobre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé son transfert aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile, et de la décision du même jour l'assignant à résidence.

Par un jugement n° 1804918 du 22 octobre 2018, le magistrat désigné du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 jan

vier 2019, et un mémoire enregistré le 22 aout 2019, qui n'a pas été communiqué, M. A..., représen...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 11 octobre 2018 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a décidé son transfert aux autorités italiennes, responsables de l'examen de sa demande d'asile, et de la décision du même jour l'assignant à résidence.

Par un jugement n° 1804918 du 22 octobre 2018, le magistrat désigné du tribunal administratif a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2019, et un mémoire enregistré le 22 aout 2019, qui n'a pas été communiqué, M. A..., représenté par Me Galinon, avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler les décisions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la décision de transfert,

- l'article 4 du règlement 604/2013/UE a été méconnu dès lors que les informations qu'il prévoit ne lui ont pas été délivrées ;

- l'article 5 de ce même règlement a été méconnu, dès lors que l'entretien individuel n'a pas été mené dans une langue qu'il comprend et il n'a pas eu accès au résumé de cet entretien ;

- la décision méconnaît l'article 17 du règlement 604/2013 dès lors que le préfet ne s'est pas interrogé sur la question de savoir si elle pouvait bénéficier de la clause dérogatoire, et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

S'agissant de l'assignation à résidence, elle est entachée d'un défaut de base légale du fait de l'illégalité du transfert.

Par décision du bureau d'aide juridictionnelle du 24 janvier 2019, M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Par ordonnance du 4 mars 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 6 mai 2019.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 mai 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête et fait valoir que :

- M. A... étant en fuite, l'arrêté portant transfert n'est pas caduc ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- Le rapport de Mme C...,

- L'affaire ayant été dispensée de conclusions du rapporteur public en application de l'article L. 732-1 du code de justice administrative.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant camerounais, a déposé une demande d'asile le 20 février 2018. La consultation des données Eurodac ayant révélé que l'Italie était responsable du traitement de sa demande, le préfet de la Haute-Garonne, par arrêté du 11 octobre 2018, a décidé de remettre M. A... aux autorités italiennes et, par une décision du même jour, l'a assigné à résidence. L'intéressé relève appel du jugement du 22 octobre 2018 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de ces deux décisions.

Sur l'arrêté de transfert :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement et notamment : / a) des objectifs du présent règlement (...) / b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5 (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier de première instance que M. A... s'est vu remettre le 20 février 2018 le guide du demandeur d'asile en France, ainsi que les brochures d'information A " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' " et B " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' ". Par suite, le moyen tiré de ce que la procédure aurait méconnu le droit à l'information de l'intéressé doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national. / 6. L'État membre qui mène l'entretien individuel rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien. Ce résumé peut prendre la forme d'un rapport ou d'un formulaire type. L'État membre veille à ce que le demandeur et/ou le conseil juridique ou un autre conseiller qui représente le demandeur ait accès en temps utile au résumé ".

5. Il ressort du " résumé de l'entretien individuel " signé par M. A... le 20 février 2018 que cet entretien a été mené ce même jour en français, langue que l'intéressé a déclaré comprendre, par un agent de la préfecture de la Haute-Garonne, et que M. A... a eu connaissance du résumé dès lors qu'il l'a signé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 5 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article 17 du règlement n° 604/2013 susvisé : " 1. Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe pas en vertu des critères fixés dans le présent règlement. (...) ".

7. Il ressort des termes mêmes de la décision litigieuse, qui mentionne " que l'ensemble des éléments de fait et de droit caractérisant la situation de l'intéressé ne relève pas des dérogations prévues par les articles 3-2, 17.1 ou 17.2 du règlement UE n° 604/2013 " et " que l'intéressé n'établit pas être dans l'impossibilité de retourner en Italie et surtout n'atteste pas que l'Italie serait dans l'incapacité d'assurer sa protection et sa prise en charge notamment médicale ", que le préfet a examiné la situation de l'intéressée au regard des dispositions de l'article 17 du règlement n° 604/2013. Si l'appelant soutient que, dans cet examen, le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation du fait de son état de santé, il ne l'établit pas par la seule production de certificats d'une psychologue clinicienne et d'un médecin généraliste attestant qu'il souffre d'un syndrome de stress post-traumatique nécessitant une prise en charge psychologique régulière, et d'un rapport et d'articles de presse évoquant la situation des migrants en Italie. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 17 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit être écarté.

Sur l'assignation à résidence :

8. Il résulte de ce qui précède que l'unique moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de la décision portant transfert aux autorités italiennes doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.°761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2019 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président,

Mme C..., président-assesseur,

Mme Florence Madelaigue, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 3 octobre 2019.

Le rapporteur,

Frédérique C...Le président

Éric Rey-Bèthbéder

Le greffier,

Caroline Brunier

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 19BX00284
Date de la décision : 03/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03-03


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : GALINON

Origine de la décision
Date de l'import : 15/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-10-03;19bx00284 ?
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