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13/01/2020 | FRANCE | N°18BX00332

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 6ème chambre, 13 janvier 2020, 18BX00332


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... A... a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'office de tourisme communautaire Pau Pyrénées Tourisme à lui verser une indemnité de 842 626,72 euros assortie des intérêts au taux légal en réparation des préjudices causés.

Par un jugement n° 1601798 du 1er décembre 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 janvier 2018 et le 28 février 2019, M. G... A..., repr

senté par Me F..., demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce juge...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... A... a demandé au tribunal administratif de Pau de condamner l'office de tourisme communautaire Pau Pyrénées Tourisme à lui verser une indemnité de 842 626,72 euros assortie des intérêts au taux légal en réparation des préjudices causés.

Par un jugement n° 1601798 du 1er décembre 2017, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 26 janvier 2018 et le 28 février 2019, M. G... A..., représenté par Me F..., demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Pau du 1er décembre 2017 ;

2°) de condamner l'office de tourisme Pau Pyrénées Tourisme à lui verser une indemnité de 855 278,45 euros en réparation des préjudices causés assortie des intérêts au taux légal à compter du 20 juin 2016 ;

3°) de mettre à la charge de l'office de tourisme Pau Pyrénées Tourisme la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande est correctement dirigée puisque les compétences de l'office de tourisme de Pau ont été transférées à l'office de tourisme intercommunal le 1er janvier 2012 ;

- l'action n'est pas prescrite. En effet, la saisine du préfet le 23 janvier 2012, puis la saisine du tribunal administratif, puis les réclamations adressées à l'office de tourisme ont interrompu le délai de prescription ;

- c'est à tort que le tribunal a rejeté sa demande comme étant irrecevable. Le contentieux a été lié par le rejet de sa réclamation préalable et l'office de tourisme a défendu au fond sans opposer de fin de non-recevoir. Il pouvait donc valablement invoquer la faute tirée de la méconnaissance de l'obligation de reprise des clauses contractuelles antérieures quand bien même cette faute ne figurait pas dans sa réclamation préalable ;

- il a été recruté par un contrat de droit public en tant que directeur de l'office de tourisme intercommunautaire et non en tant que directeur par intérim, ce poste n'existant pas au regard du droit applicable. Cela ressort de l'article 2 du contrat, de l'analyse qui en a été faite par le préfet dans le cadre du contrôle de légalité et du jugement du tribunal administratif de Pau du 7 novembre 2013 devenu définitif. Comme il occupait le poste de directeur, il n'a pas à démontrer une perte de chance sérieuse d'être recruté pour occuper ce poste ;

- son contrat est illégal comme l'a reconnu le tribunal administratif de Pau dans le jugement du 7 novembre 2013. La durée de son contrat était inférieure aux 3 ans prévus par l'article R. 133-11 du code du tourisme. Cette illégalité constitue une faute qui l'a privée du bénéfice d'un contrat de travail d'une durée de trois ans ;

- ses qualités professionnelles ont été reconnues. Il n'a jamais fait l'objet de poursuites disciplinaire et sa candidature n'a donc pas été retenue que pour des raisons politiques. Or un refus de renouvellement du contrat de travail ne peut se fonder sur des motifs étrangers à l'intérêt du service ;

- il a ainsi perdu une chance sérieuse que son contrat de travail soit renouvelé puis converti en contrat de travail à durée indéterminée et de mener ainsi une carrière de directeur de l'office de tourisme intercommunal Pau Pyrénées Tourisme ;

- les conditions de son éviction ont terni sa réputation et l'ont empêché de retrouver un emploi équivalent. Cette situation a également affecté son état de santé lui causant ainsi un préjudice moral estimé à 50 000 euros ;

- son préjudice consiste à tout le moins en la perte de salaire jusqu'au terme légal de son contrat, soit jusqu'au 31 décembre 2014, ce qui représente la somme de 114 401,58 euros. Les pertes de salaire sont justifiées, ses revenus ultérieurs étant inférieurs.

Par deux mémoires en défense, enregistrés le 22 août 2018 et le 25 juillet 2019 à 11h50, l'office de tourisme Pau Pyrénées Tourisme, représenté par Me H..., conclut :

- au rejet de la requête ;

- à ce que soit mise à la charge de M. A... la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la requête est irrecevable car la décision arrêtant la durée du contrat de travail n'a pas été prise par l'office de tourisme intercommunal mais par l'office de tourisme communal. La réclamation préalable aurait donc dû être adressée à ce dernier. La requête étant mal dirigée, elle est irrecevable ;

- le fait générateur de la réclamation indemnitaire remonte à l'année 2011, l'action indemnitaire aurait donc dû être engagée avant le 31 décembre 2015. Son action est donc prescrite ;

- l'illégalité du refus de renouvellement n'était pas invoquée dans la réclamation préalable, ce moyen est donc irrecevable dans la présente instance ;

- les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 20 juin 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 juillet 2019 à midi.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du tourisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. I... B...,

- les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public,

- et les observations de Me E..., représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a été recruté le 23 décembre 2008 par la ville de Pau par un contrat de travail d'un an en qualité de chargé de mission tourisme. Puis, il a été recruté le 15 avril 2009 par l'office de tourisme et des congrès de Pau par un contrat de travail de trois ans en qualité de directeur de cet office de tourisme. Toutefois, avant le terme de ce contrat, un arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 10 août 2011 a transféré, à compter du 1er janvier 2012, la compétence tourisme à la communauté d'agglomération Pau-Pyrénées. En conséquence, le conseil municipal de Pau a, par une délibération du 28 novembre 2011, décidé de prononcer la dissolution de l'office de tourisme et des congrès de Pau au 31 décembre 2011 et d'affecter le personnel de cet office au nouvel office de tourisme communautaire à compter du 1er janvier 2012. Puis le comité directeur de l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme " a, par une délibération du 3 janvier 2012, notamment autorisé son président à signer avec M. A... un contrat de travail pour une durée de six mois à compter du 1er janvier 2012 pour exercer les fonctions de directeur général par intérim. Après avoir appris, par courrier du 20 mars 2012, que sa candidature au poste de directeur de l'office de tourisme communautaire n'avait pas été retenue et peu avant le terme de contrat, M. A... a sollicité devant le tribunal administratif de Pau l'annulation de la délibération du comité directeur de l'office de tourisme communautaire du 3 janvier 2012 en tant qu'elle autorisait la signature d'un contrat de travail d'une durée de six mois au motif que la durée de ce contrat était inférieure aux trois ans prévu par l'article R. 133-11 du code du tourisme. Après avoir obtenu l'annulation de cette délibération par un jugement du tribunal administratif de Pau en date du 7 novembre 2013 devenu définitif, M. A... a sollicité en vain sa réintégration puis a adressé à l'office de tourisme communautaire le 15 juin 2016 une réclamation préalable tendant au versement d'une indemnité de 842 626,72 euros en réparation des préjudices causés par " l'illégalité de la délibération du conseil communautaire du 3 janvier 2012 ". A la suite du rejet implicite de sa réclamation, M. A... a réitéré sa demande devant le tribunal administratif de Pau. M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Pau du 1er décembre 2017 rejetant sa demande indemnitaire.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative dans sa rédaction alors en vigueur : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. "

3. Par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté comme irrecevables les conclusions tendant à l'engagement de la responsabilité de l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme " sur le fondement de la responsabilité contractuelle au motif que le contentieux n'avait pas été lié sur ce point. Il résulte dans l'instruction que dans sa réclamation préalable datée du 15 juin 2016, M. A... sollicite " la réparation intégrale des préjudices résultant de l'illégalité de la délibération du conseil communautaire du 3 janvier 2012 ". Si dans cette réclamation M. A... fait mention de " l'illégalité " de son contrat, il n'invoque nullement la méconnaissance d'obligations contractuelles. Toutefois, eu égard au lien de connexité entre les motifs d'illégalité de la délibération invoqués dans la réclamation préalable, lesquels concernent notamment la durée du contrat, et le manquement afférent à la validité du contrat invoqué pour la première fois devant le tribunal administratif de Pau, qui concerne également la durée du contrat signé le 3 janvier 2012, il y a lieu de regarder le contentieux comme ayant été lié sur le différent afférent à la durée du contrat. Par suite, c'est à tort que les premiers juges ont rejeté les conclusions de M. A... tendant à l'engagement de la responsabilité contractuelle de l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme " comme étant irrecevables pour défaut de liaison du contentieux.

4. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur les conclusions indemnitaires présentées sur le fondement de la responsabilité contractuelle et de statuer par la voie de l'effet dévolutif sur les autres conclusions présentées par M. A... devant le tribunal administratif de Pau.

Sur la recevabilité de la demande :

5. En premier lieu, l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme " soutient que la requête de M. A... est mal dirigée au motif que la faute à l'origine du dommage ne lui serait pas imputable mais sera imputable à l'office de tourisme et des congrès de Pau. Cependant l'imputabilité d'une faute se rattache au bien-fondé d'une demande indemnitaire et non à sa recevabilité. En outre, contrairement à ce que soutient l'office de tourisme communautaire, l'action de M. A... est correctement dirigée, la réclamation préalable du 15 juin 2016 à l'origine du présent litige ayant été adressée à cet office de tourisme.

6. En second lieu, l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme " soutient que M. A... ne justifie pas d'un intérêt à agir dès lors qu'il a accepté de signer le contrat de travail du 3 janvier 2012. Cependant, et comme indiqué précédemment, le présent litige trouve son origine dans le rejet implicite de la réclamation préalable de M. A... daté du 15 juin 2016. Ce refus implicite privant M. A... de l'indemnité qu'il réclame, ce dernier justifie de son intérêt à obtenir la condamnation de l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme " à lui verser cette indemnité.

Sur l'exception de prescription :

7. L'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme " oppose la prescription " de l'action de M. A... " sans toutefois indiquer la nature de cette prescription ni même préciser la base légale de celle-ci. Dès lors, cette exception de prescription ne peut être regardée comme étant assortie de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

Sur la responsabilité :

8. M. A... invoque l'illégalité de la délibération de la délibération du comité directeur de l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme " du 3 janvier 2012 en tant qu'elle a autorisé son président à signer avec M. A... un contrat de travail d'une durée de six mois en qualité de directeur général par intérim du 1er janvier 2012 au 30 juin 2012. Comme indiqué au point 1, cette délibération a été annulée sur ce point par le jugement du tribunal administratif de Pau du 7 novembre 2013 devenu définitif. L'autorité absolue de chose jugée qui s'attache au dispositif de ce jugement et aux motifs qui en sont le soutien nécessaire fait obstacle à ce que l'office de tourisme communautaire discute à nouveau de la légalité de cette délibération. Par suite, cette illégalité est susceptible d'engager la responsabilité de cet office de tourisme dès lors qu'elle est à l'origine directe et certaine des préjudices invoqués par M. A....

9. Toutefois, la responsabilité de l'administration ne saurait être engagée pour la réparation des dommages qui ne trouvent pas leur cause dans cette illégalité mais découlent directement et exclusivement de la situation irrégulière dans laquelle la victime s'est elle-même placée, indépendamment des faits commis par la puissance publique, et à laquelle l'administration aurait pu légalement mettre fin à tout moment. Or l'autorité absolue de chose jugée ne fait pas obstacle à ce que, dans le cadre de son office, le juge de plein contentieux saisi d'une demande indemnitaire apprécie, au vu des éléments versés à l'instruction, l'existence d'un lien de causalité direct et certain entre l'illégalité fautive censurée par le jugement et les préjudices dont M. A... demande la réparation. En l'espèce, il résulte de l'instruction que M. A... avait connaissance de l'illicéité du contrat du 3 janvier 2012 avant même sa signature. Dès lors, la cause des préjudices dont M. A... demande réparation n'est pas l'illicéité du contrat mais l'accord de ce dernier de signer, en connaissance de cause, un tel contrat. Dès lors, la responsabilité de l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme " ne peut être engagée ni sur le fondement de l'illégalité entachant la délibération du 3 janvier 2002 ni sur le fondement de l'illicéité du contrat.

10. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à solliciter la condamnation de l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme " à lui verser une indemnité de 855 278,45 euros.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme ", qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme demandée par l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme " au même titre.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1601798 du tribunal administratif de Pau du 1er décembre 2017 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. A... tendant à l'engagement de la responsabilité contractuelle de l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme ".

Article 2 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... A... et à l'office de tourisme communautaire " Pau Pyrénées Tourisme ".

Délibéré après l'audience du 16 décembre 2019, à laquelle siégeaient :

M. Pierre Larroumec, président,

Mme D... C..., présidente-assesseure,

M. I... B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 janvier 2020

Le rapporteur,

Paul-André B...

Le président,

Pierre LarroumecLe greffier,

Vanessa Beuzelin

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 18BX00332


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18BX00332
Date de la décision : 13/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. LARROUMEC
Rapporteur ?: M. Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. BASSET
Avocat(s) : CABINET ALDO SEVINO

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-01-13;18bx00332 ?
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