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23/01/2019 | FRANCE | N°17-18771

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 janvier 2019, 17-18771


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 20 décembre 1996 en qualité de chauffeur livreur poids-lourds par la société BSA international, aux droits de laquelle vient la société Frigo transports 91, a été victime, le 23 mai 2013, d'un accident du travail ; que le 19 novembre 2013, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ; qu'ayant été déclaré inapte à son poste par le médecin du travail à l'issue de deux examens des 22 mai et 10 j

uin 2014, le salarié a été licencié, le 16 janvier 2015, pour inaptitude ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., engagé le 20 décembre 1996 en qualité de chauffeur livreur poids-lourds par la société BSA international, aux droits de laquelle vient la société Frigo transports 91, a été victime, le 23 mai 2013, d'un accident du travail ; que le 19 novembre 2013, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail ; qu'ayant été déclaré inapte à son poste par le médecin du travail à l'issue de deux examens des 22 mai et 10 juin 2014, le salarié a été licencié, le 16 janvier 2015, pour inaptitude et impossibilité de reclassement ;

Sur le troisième moyen :

Attendu qu'il n'y pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen annexé qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande en paiement de rappels d'indemnité de repas, de nettoyage et de transport alors, selon le moyen, que le salaire correspondant à l'emploi que le salarié déclaré occupait avant la suspension de son contrat de travail, dont l'employeur doit reprendre le paiement à l'expiration du délai d'un mois à compter de l'avis d'inaptitude, d'origine professionnelle ou non, comprend l'ensemble des éléments constituant la rémunération du salarié s'il avait travaillé, sans que ne puisse lui être opposé le fait qu'il n'a pas travaillé ; qu'en déboutant le salarié de sa demande au motif que celui-ci n'avait pas travaillé pendant la période considérée, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-4 et L. 1226-11 du code du travail, ensemble l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable ;

Mais attendu qu'ayant relevé que les indemnités de repas, de salissure et de remboursement de frais de transport correspondaient au remboursement de frais engagés par le salarié pour exécuter sa prestation de travail, en sorte qu'elles ne constituaient pas un élément de la rémunération, la cour d'appel en a exactement déduit que l'intéressé ne pouvait solliciter un rappel de salaire au titre de l'article L. 1226-11 du code du travail ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le premier moyen :

Vu l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, en leur rédaction applicable en la cause ;

Attendu que pour débouter le salarié de ses demandes au titre de la résiliation judiciaire du contrat de travail, l'arrêt retient que l'employeur produit le règlement intérieur ainsi qu'un tableau de suivi des vêtements de travail pour les années 2013 à 2016 sur lequel sont mentionnés les noms de salariés, la date et la nature du vêtement fourni, dont les chaussures de sécurité, que toutefois le nom du salarié n'apparaît pas sur ce tableau, qu'en tout état de cause, l'intéressé ne fournit aucun élément, aucun témoignage, sur les circonstances de survenue de l'accident du 23 mai 2013 et qu'en l'état des pièces versées aux débats, la cour ignore si ce dernier était doté ou non de chaussures de sécurité, défectueuses ou non, lors de cet accident, que la preuve d'un manquement de l'employeur n'est donc pas démontrée ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il appartenait à l'employeur de démontrer qu'il avait pris les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé du salarié, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation des chefs de dispositif relatifs à la résiliation judiciaire du contrat de travail entraîne la cassation de l'arrêt en ce qu'il rejette les demandes au titre d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le deuxième moyen :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de M. X... au titre de la résiliation judiciaire du contrat de travail et d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 29 mars 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne la société Frigo transport 91 aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Frigo transport 91 à payer à M. X... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. X....

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande tendant à la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l'employeur et de l'AVOIR débouté en conséquence de ses demandes tendant au paiement des indemnités de préavis, outre les congés payés afférents, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en réparation du préjudice moral ainsi qu'une indemnité au titre du congés de fin d'activité ;

AUX MOTIFS propres QU'il n'est pas contesté que lorsqu'un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à son employeur tout en continuant à travailler à son service et que ce dernier le licencie ultérieurement pour un motif survenu au cours de la poursuite du contrat doit d'abord rechercher si la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail est justifiée ; que le salarié qui sollicite la résiliation judiciaire de son contrat de travail doit rapporter la preuve que l'employeur a commis des manquements graves à ses obligations de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail. M. X... prétend tout d'abord que l'employeur a unilatéralement modifié son contrat de travail en avril et novembre 2012 puis à compter du mois d'avril 2013, l'employeur modifiant son heure d'embauche, son trajet, le caractère fixe et continu de ses horaires, ces modifications ayant une répercussion sur sa rémunération et sur ses primes de repas. Le contrat de travail, et les avenants contractuels ne comportent aucune mention relative à la répartition des horaires du salarié, il est simplement fait référence à l'horaire pratiqué dans l'entreprise la rémunération étant fixée pour une durée de travail mensuelle de 174 heures. Liminairement on peut observer que la modification prétendue et non démontrée du trajet de la tournée (clients desservis à Orléans au lieu de Villeneuve et Bobigny) relève du pouvoir de direction de l'employeur et ne saurait en aucun cas caractériser une modification du contrat de travail, la détermination de la tournée, non contractualisée, étant par nature susceptible de modifications en fonction des clients de l'entreprise. La modification de la répartition des horaires quotidiens du salarié relève en principe du pouvoir de direction de l'employeur, toutefois le passage d'un horaire de nuit à un horaire de jour, ou inversement, caractérise une modification du contrat de travail qui doit être acceptée par le salarié nonobstant toute disposition contractuelle ou conventionnelle contraire. En l'espèce s'il résulte des pièces produites par le salarié qu'il embauchait, comme il le prétend, régulièrement depuis 2003 entre 17h30 et 18 h 00 avec une amplitude de travail le conduisant à débaucher entre 4 H00 et 6 H 00, il lui arrivait également d'embaucher à d'autres horaires, ainsi le 17 avril et le 01 mai 2006 à 23 h 27, le 08 mai 2006 à 2 H09, le 15 mai 2006 à 0 h 11, le 05 juin 2006 à 23 h 39
M. X... n'était donc pas, contrairement à ses allégations soumis à un horaire fixe, ses horaires de débauche, notamment, étaient irréguliers. Les éléments de preuve qu'il produit accréditent ses explications selon lesquelles l'employeur en avril et novembre 2012 puis à compter de mai/juin 2013 lui a demandé d'embaucher à 22 heures et plus ponctuellement à 17 heures 30, avec des heures de débauche dont il n'est pas contesté qu'elles n'ont pas été modifiées. Cependant M. X... a toujours effectué la majeure partie de ses heures de travail en travail de nuit. Cette modification de l'horaire d'embauche, sans modification de la durée du temps de travail ainsi que le démontre les bulletins de paie du salarié, mais avec des coupures moins longues, caractérise un simplement changement des conditions de travail relevant du pouvoir de direction de l'employeur ainsi que l'a relevé le premier juge et non une modification du contrat de travail supposant l'accord du salarié. En effet contrairement aux prétentions du salarié aucune diminution de rémunération n'est établie en 2012 bien au contraire ; enfin la prime de repas n'est que la contrepartie de frais que le salarié n'engage pas dès lors qu'il embauche à 22 heures, M. X... ne justifie pas d'une perte de rémunération. Enfin l'attestation de sa concubine qui explique que ses propres horaires de travail sont fixés de 8 h00 à 18 H 00 ou 20 h 00 ne permet pas d'établir qu'en embauchant à 22 heures, plutôt qu'à 17 h 30, M. X... a subi une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et personnelle, ces nouveaux horaires lui permettant de partager plus de temps avec sa compagne. Ce manquement de l'employeur à ses obligations n'est pas établi. M. X... invoque le non-respect par l'employeur des visites périodiques tous les six mois prévues pour les travailleurs de nuit, il fait valoir qu'il n'a pas eu de visite médicale entre le 28 février 2010 et le 07 mai 2013. Or, l'employeur justifie, notamment par la production d'échange de fax avec le service de santé au travail, ACMS, par la production de courrier émanant de l'ACMS, que M. X... a bien été convoqué par ce service pour des visites médicales périodiques le 16 mars 2010, le 14 avril 2010, le 07 avril 2011, le 20 février 2013, le 11 mars 2013, le 20 mars 2013, le 12 avril 2013 et qu'il ne s'est pas présenté sans justification ou annulation des rendez-vous. Ce n'est qu'après une troisième inscription qu'il se rendait à l'examen du 07 mai 2013. M. X... ne peut prétexter l'erreur matérielle manifeste affectant les convocations qui lui étaient adressées sous la mention "Madame Pierre X..." pour justifier ses absences alors que l'exactitude des prénom et nom, la contrariété évidente entre le genre de son prénom et le titre de civilité, ne laissent aucun doute sur le fait qu'il était bien le destinataire de ces convocations. Dans ces conditions, et alors que l'employeur justifie avoir été en relation avec le service de l'ACMS lequel rencontrait des difficultés d'organisation des visites périodiques en raison de " la pénurie actuelle de temps médical selon l'expression de l'ACMS, l'organisation d'une seule visite médicale en 2011 et le défaut de visite médicale périodique en 2012, ou encore le fait que la visite périodique du 07 mai 2013 ait été fixée à 10 h 15 alors que le salarié a débauché à 3 h 55, constituent un manquement de l'employeur à ses obligations, ayant un caractère ancien dont le degré de gravité doit être largement tempéré par les propres carences du salarié. Le salarié reproche à l'employeur de ne pas l'avoir équipé de chaussures de sécurité le 23 mai 2013 ce qui serait à l'origine de l'accident du travail à l'occasion duquel son orteil droit aurait été percuté par une palette ce qui a justifié des soins jusqu'au 8 juin 2013 puis un arrêt maladie. L'employeur rétorque que le règlement intérieur de la société interdit de travailler sur les quais sans être équipé de chaussures de sécurité lesquelles sont fournies ou remboursées aux salariés sur demande. A l'appui de ses affirmations la société produit le règlement intérieur ainsi qu'un tableau de suivi des vêtements de travail pour les années 2013 à 2016 sur lequel sont mentionnés les noms de salariés et la date et la nature du vêtement fourni, dont les chaussures de sécurité. Toutefois le nom de Monsieur X... n'apparaît pas sur ce tableau. En tout état de cause Monsieur X... ne fournit aucun élément, aucun témoignage, sur les circonstances de survenue de l'accident du 23 mai 2013 et, en l'état des pièces versées aux débats, la cour ignore si ce dernier était doté ou non de chaussures de sécurité, défectueuses ou non, lors de cet accident. La preuve d'un manquement de l'employeur n'est donc pas démontrée. M. X... indique également qu'entre les 03 et 06 avril 2012 il a réalisé un temps de service de plus de 10 heures pendant 4 jours l'employeur ne respectant pas la durée totale de conduite. Il justifie qu'entre le mardi 03 avril et le vendredi 06 avril 2012 il a travaillé entre 10 h 38 et 10 heures 88 incluant des temps de conduite compris entre 4 heures 58 et 5 heures 58. Aux termes de la convention collective et de l'accord sur le travail de nuit en date du 14 novembre 2001 la durée de travail effectif des personnels roulants des entreprises de transport de marchandises ne peut excéder la durée quotidienne prévue à l'article 7 du décret du 26 janvier 1983. Cet article fixe cette durée à 10 heures mais ajoute que pour le personnel roulant la durée quotidienne du travail effectif peut excéder dix heures dans la limite de douze heures, étant observé que la durée de temps de service maximale hebdomadaire est fixée à 52 heures par l'article 6 de ce texte. Or le temps de travail total de M. X... pendant la semaine du 02 au 07 avril est de 51 heures 97, il n'excède donc pas la limite conventionnelle ci-dessus rappelée. On peut observer également que les temps de conduite ne dépassent pas la durée de conduite journalière, telle que fixée à neuf heures au maximum par le règlement du 15 mars 2006, versé aux débats par le salarié, puisque ce temps n'a pas dépassé 5 heures 58 au total. Enfin force est de constater que depuis le 06 avril 2012 et, notamment dès lors que l'heure d'embauche de M. X... a été fixée à 22 heures, la durée quotidienne de travail effectif du salarié n'a pas dépassé 10 heures. Enfin M. X... fait valoir qu'après la visite médicale du 10 juin 2014 le déclarant inapte à son poste l'employeur qui devait reprendre le paiement du salaire à compter du 10 juillet 2014, ne l'a pas intégralement réglé des sommes qui lui étaient dues, soit les heures supplémentaires et les majorations de nuit, il ajoute que si le paiement de ces sommes a été régularisé lors de la paie du mois d'août 2014 l'employeur ne lui a pas payé entre le 10 juillet 2014 et son licenciement des indemnités de repas, la carte orange, l'indemnité de nettoyage des vêtements de travail. Ainsi que le reconnaît le salarié le non-paiement des heures supplémentaires et des majorations de nuit pour la période du 10 au 31 juillet 2014 a été régularisé dans un bref délai. S'agissant des indemnités de repas, de salissure et de remboursement des frais de transport, ces éléments correspondent au remboursement de frais engagés par le salarié pour exécuter sa prestation de travail, or M. X... ne travaillait pas pendant la période considérée. Dès lors il est mal fondé à solliciter un rappel d'indemnités à ces titres, et sa demande sera écartée de ces chefs, le premier juge ayant omis de statuer sur ces points. Au regard de l'ensemble des développements susvisés M. X... ne rapporte pas la preuve de manquement de l'employeur à l'exécution de ses obligations d'un degré de gravité tel qu'il empêchait la poursuite de l'exécution du contrat de travail ;

AUX MOTIFS adoptés QUE le salarié, pour invoquer, sur le fondement de l'article 1184 du Code Civil, la résiliation judiciaire en matière de contrat de travail, doit justifier de manquements suffisamment graves de la part de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail ; que les modifications d'horaires de la tournée de Monsieur X... ne constituent pas une modification de son contrat de travail ; que les manquements reprochés par Monsieur X... à son employeur son infondés ou ne sont pas suffisamment graves pour justifier une résiliation judiciaire de contrat de travail aux torts de l'employeur ;

1° ALORS QUE l'employeur est légalement tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, dont il doit assurer l'effectivité et dont il lui appartient de prouver la satisfaction en justifiant avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ; qu'il en résulte que lorsqu'un salarié victime d'un accident du travail demande la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur en invoquant un manquement à l'obligation de sécurité, il incombe à celui-ci de rapporter la preuve qu'il a satisfait à cette obligation en ayant pris toutes les mesures de prévention nécessaires et suffisantes pour éviter l'accident ; qu'en déboutant le salarié qui avait fait valoir que l'accident de travail dont il avait été victime résultait du manquement de l'employeur à son obligation de sécurité, faute pour ce dernier de lui avoir fourni des chaussures de sécurité, aux motifs que la preuve d'un manquement de l'employeur n'est pas démontrée par le salarié, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a ainsi violé les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, ensemble l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable ;

2° ALORS, en outre, QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, le salarié faisait valoir le manquement de l'employeur à son obligation légale de sécurité constitué par le défaut de remise de chaussures de sécurité ; que celui-ci ne satisfait à son obligation légale de sécurité en se bornant à prévoir dans le règlement intérieur la remise de chaussures de sécurité sur demande du salarié ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3° ALORS, encore, QUE l'employeur est légalement tenu d'une obligation de sécurité de résultat en matière de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs dans l'entreprise, dont il doit assurer l'effectivité et dont il lui appartient de prouver la satisfaction en justifiant avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail ; que l'arrêt attaqué a constaté que le règlement intérieur interdit de travailler sur les quais sans être équipé de chaussures de sécurité lesquelles sont fournies ou remboursées aux salariés sur demande, que la société produit un tableau de suivi des vêtements de travail pour les années 2013 à 2016 mentionnant les noms de salariés et la date et la nature du vêtement fourni, dont les chaussures de sécurité, sur lequel le nom de Monsieur X... n'apparaît pas ; qu'il s'en déduisait la violation par l'employeur de son obligation de sécurité ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, ensemble l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable ;

4° ALORS, surtout, QUE les examens médicaux périodiques auxquels doivent être soumis les salariés concourent à la protection de leur santé et de leur sécurité ; que l'initiative des convocations aux visites médicales périodiques incombe à l'employeur et que le refus injustifié du salarié de s'y soumettre justifie une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement ; que le manquement de l'employeur à son obligation de faire passer les visites médicales périodiques est de nature à justifier la rupture du contrat de travail à ses torts, avec toutes conséquences ; qu'après avoir constaté que le salarié n'avait pas été soumis à toutes les visites médicales périodiques obligatoires en sa qualité de travailleur de nuit en raison d'un défaut de convocation ou de son absence injustifiée, la cour d'appel a débouté celui-ci pour la raison que le manquement de l'employeur « avait un caractère ancien dont le degré de gravité devait être largement tempéré par les propres carences du salarié », ; qu'en statuant ainsi par un motif inopérant, quand il ressortait de ses propres constatations que l'employeur n'avait pas réagi à l'absence de convocation à toutes les visites périodiques obligatoires, ni obligé le salarié à s'y rendre, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, ensemble l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable ;

5° ALORS, encore, QUE le salaire correspondant à l'emploi que le salarié déclaré occupait avant la suspension de son contrat de travail, dont l'employeur doit reprendre le paiement à l'expiration du délai d'un mois à compter de l'avis d'inaptitude, d'origine professionnelle ou non, comprend l'ensemble des éléments constituant la rémunération du salarié s'il avait travaillé, sans que ne puisse lui être opposé le fait qu'il n'a pas travaillé ; qu'en déboutant le salarié de sa demande de résiliation judiciaire, au soutien de laquelle il faisait valoir le manquement à l'employeur de l'obligation de reprendre le paiement de la rémunération du salarié déclaré inapte à l'expiration du délai d'un mois à compter de l'avis d'inaptitude, faute de lui avoir versé des indemnités de repas, de salissure et de remboursement des frais de transport, au motif que celui-ci n'avait pas travaillé pendant la période considérée, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-4 et L. 1226-11 du code du travail, ensemble l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable ;

6° ALORS enfin QUE le changement des horaires de travail s'analyse comme une modification du contrat lorsqu'il entraîne une désorganisation importante au regard des horaires de travail auxquels le salarié étaient assujetti depuis plusieurs années, doublée d'une perte de rémunération ; qu'en ayant retenu un simple changement des conditions de travail, après avoir pourtant constaté que depuis 2003 le salarié embauchait régulièrement entre 17h30 et 18h00 et qu'il devait désormais embaucher à 22 heures, avec des coupures moins longues, mais en étant privé de la prime panier, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 1134 et 1184 du code civil, dans leur rédaction applicable ;

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande subsidiaire tendant voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse et de l'AVOIR débouté en conséquence de ses demandes tendant au paiement des indemnités de préavis, outre les congés payés afférents, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en réparation du préjudice moral ainsi qu'une indemnité au titre du congés de fin d'activité ;

AUX MOTIFS propres QUE M. X... fait valoir que son inaptitude est imputable à l'employeur au regard de l'absence de visites médicales périodiques, or lors de la visite périodique du 07 mai 2013 M. X... a été déclaré apte à son poste sans aucune restriction par le médecin du travail. Les pièces qu'il produit, notamment son dossier médical, ne permet nullement de faire un lien entre son inaptitude et l'absence de convocation à des visites médicales périodiques en 2012. M. X... se contente de procéder par voie d'affirmation. Le lien entre son inaptitude et des manquements de l'employeur à ses obligations n'est pas établi. Enfin le salarié conteste le respect par l'employeur de son obligation de reclassement. L'employeur justifie par la production de la consultation des délégués personnels du 18 septembre 2014 et du procès-verbal de réunion des délégués du personnel du même jour, avoir satisfait à ses obligations de consultation des instances représentatives du personnel dans le cadre de l'obligation de reclassement. En application des dispositions combinées des articles L. 1226-10 et L. 1226-12 du code du travail l'employeur dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié victime d'un accident du travail, et déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment ne peut prononcer le licenciement pour inaptitude que s'il justifie de son impossibilité de proposer au salarié, à l'intérieur du groupe auquel il appartient, un emploi approprié à ses capacités physiques et aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutation, transformation de poste ou aménagement du temps de travail. En l'espèce le médecin du travail a déclaré M. X... inapte au poste de chauffeur poids lourds mais apte à un poste "à temps très partiel en télétravail". Il est constant que la société Frigo Transports 91 est une entreprise de transports routiers frigorifiques qui comporte principalement des postes de chauffeurs routiers de manutentionnaires et agents sur les quais, de préparateurs de commandes, les postes administratifs supposant, soit des compétences spécifiques, soit une présence physique dans l'entreprise (notamment pour le traitement de bordereaux de livraison par les opérateurs de saisie
). Le transport de denrées périssables n'est pas compatible avec le télétravail. Dans ce contexte le salarié ne peut faire grief à l'employeur de l'avoir interrogé par lettres des 04 juillet et 19 août 2014 sur son projet professionnel et sur ses souhaits éventuels de formation et/ou de mobilité, et de lui avoir demandé le 23 juin 2014 de lui envoyer un curriculum vitae. L'employeur justifie être revenu vers le médecin du travail le 23 juin 2014 et avoir interrogé toutes les entreprises appartenance au même groupe le 16 juin 2014 en spécifiant le profil professionnel de l'intéressé et les restrictions émises par le médecin du travail, il justifie des réponses négatives reçus et de l'échec de la recherche de reclassement opérée au niveau du groupe par le service des ressources humaines groupe, exprimé dans une lettre du 29 octobre 2014. C'est par une juste appréciation des éléments de fait et de droit de la cause que le premier juge a considéré que l'employeur justifiait avoir loyalement recherché le reclassement du salarié et l'impossibilité de procéder audit reclassement, et, considérant son licenciement comme bien fondé, l'a débouté de toutes ses demandes subséquentes dont sa demande de perte de la chance de bénéficier du dispositif dit "CFA" ;

AUX MOTIFS adoptés QUE que le médecin du travail, par lettre recommandée avec accusé de réception du 10 juin 2014, précise que « Monsieur Pierre X... suite à la visite de pré-reprise du 22 mai 2014 et de l'étude de poste ainsi que l'avis spécialisé est inapte à son poste et apte à un poste à temps partiel en télétravail » ; qu'une demande de recherche de reclassement a été engagée le 23 juin 2014, en relation avec Monsieur X... et le médecin du travail ; qu'au sein du groupe DELANCHY TRANSPORTS, les sociétés en activité ont reçu, de la part de la SARL FRIGO TRANSPORT 91, la demande de possibilité de reclassement ; que ces sociétés consultées n'ont pu proposer un poste vacant en considération des restrictions médicales ; qu'en conséquence le reclassement de Monsieur X... était manifestement impossible ; qu'en conséquence Monsieur X... n'était pas fondé à contester son licenciement pour inaptitude ; que Monsieur X... ne fournit pas d'éléments suffisants pour étayer ses demandes » ;

1° ALORS QU'est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement d'un salarié motivé par son inaptitude, lorsque un manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité dont il doit assurer l'effectivité a contribué de manière déterminante à la dégradation de santé ayant conduit le médecin du travail à constater l'inaptitude ; que le non respect de la périodicité du suivi médical légalement requise pour le travailleur de nuit est un manquement légalement de nature à caractériser une telle contribution ; qu'en ayant retenu la cause réelle et sérieuse du licenciement aux motifs inopérant d'un avis d'aptitude prononcé avant l'avis d'inaptitude quand elle a constaté l'absence de toutes les visites médicales obligatoires entre ces avis, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1 et l. 4121-2, L. 3122-42 R. 3122-21 dans leur rédaction applicable, ensemble l'article L. 1232-1 du code du travail.

2° ALORS QU'est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement d'un salarié motivé par son inaptitude, lorsque un manquement de l'employeur à l'obligation de sécurité dont il doit assurer l'effectivité a contribué de manière déterminante à la dégradation de santé ayant conduit le médecin du travail à constater l'inaptitude ; que le non respect de la périodicité du suivi médical légalement requise pour le travailleur de nuit est un manquement légalement de nature à caractériser une telle contribution ; qu'en ayant retenu la cause réelle et sérieuse du licenciement aux motifs que les pièces produites par le salarié n'établissent pas un lien entre son inaptitude et l'absence de convocation à des visites médicales en 2012 quand elle a constaté le défaut de certains visites obligatoires durant les années antérieures, la cour d'appel a violé les articles L. 4121-1 et l. 4121-2, L. 3122-42 R. 3122-21 dans leur rédaction applicable, ensemble l'article L. 1232-1 du code du travail.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour non respect des visites médicales périodiques ;

AUX MOTIFS propres QUE Au regard des développements susvisés il apparaît que M. X... n'a pas été convoqué pour bénéficier d'une visite médicale périodique en 2012 et qu'il ne l'a été qu'une fois en 2011 alors qu'il travaillait de nuit. En revanche il est démontré qu'entre 2010 et mai 2013 il ne s'est pas présenté, sans motif, à sept convocations de l'ACMS pour des visites périodiques dont celle organisée en 2011. Il appartient au salarié qui prétend à la réparation d'un préjudice de justifier de sa réalité et de son étendue. M. X... est totalement défaillant dans son rapport probatoire, dès lors il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté ce chef de demande ;

AUX MOTIFS adoptés QUE Monsieur X... ne fournit pas d'éléments suffisants pour étayer ses demandes ;

1° ALORS QUE la violation de l'obligation de suivi médical du travailleur de nuit cause nécessairement un préjudice au salarié ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les article L 3122-42 et R 3122-21 du code du travail alors applicables ;

2° ALORS à tout le moins QUE le pouvoir d'appréciation souverain des juges du fond sur l'existence et le montant du préjudice subi par le salarié en raison de manquements de l'employeur à ses obligations, parmi lesquelles les visites périodiques obligatoires, ne dispense pas le juge de l'obligation de motiver ses décisions ; qu'en déboutant le salarié au seul motif que celui-ci est totalement défaillant dans son rapport probatoire, alors que ce dernier avait fait valoir plusieurs certificats médicaux qui établissaient les conséquences du défaut de prévention médicale, la cour d'appel, qui a procédé par voie d'affirmation, a violé les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté le salarié de ses demandes tendant au paiement de rappels d'indemnités de repas, de nettoyage et de transport ;

AUX MOTIFS propres QUE s'agissant des indemnités de repas, de salissure et de remboursement des frais de transport, ces éléments correspondent au remboursement de frais engagés par le salarié pour exécuter sa prestation de travail, or M. X... ne travaillait pas pendant la période considérée ; que dès lors il est mal fondé à solliciter un rappel d'indemnités à ces titres, et sa demande sera écartée de ces chefs, le premier juge ayant omis de statuer sur ces points ;

ALORS QUE le salaire correspondant à l'emploi que le salarié déclaré occupait avant la suspension de son contrat de travail, dont l'employeur doit reprendre le paiement à l'expiration du délai d'un mois à compter de l'avis d'inaptitude, d'origine professionnelle ou non, comprend l'ensemble des éléments constituant la rémunération du salarié s'il avait travaillé, sans que ne puisse lui être opposé le fait qu'il n'a pas travaillé ; qu'en déboutant le salarié de sa demande au motif que celui-ci n'avait pas travaillé pendant la période considérée, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-4 et L. 1226-11 du code du travail, ensemble l'article 1184 du code civil, dans sa rédaction applicable.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 17-18771
Date de la décision : 23/01/2019
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 29 mars 2017


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 jan. 2019, pourvoi n°17-18771


Composition du Tribunal
Président : Mme Farthouat-Danon (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin, SCP Thouvenin, Coudray et Grévy

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2019:17.18771
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