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20/11/2014 | FRANCE | N°14BX00620

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 20 novembre 2014, 14BX00620


Vu la requête, enregistrée le 26 février 2014, présentée pour M. A...C...demeurant..., par MeB... ;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1303384 du 17 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 avril 2013 par lequel le préfet de la Dordogne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;



3°) de surseoir à statuer dans l'attente de l'avis de la Cour de justice de l'Union euro...

Vu la requête, enregistrée le 26 février 2014, présentée pour M. A...C...demeurant..., par MeB... ;

M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°1303384 du 17 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 avril 2013 par lequel le préfet de la Dordogne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté ;

3°) de surseoir à statuer dans l'attente de l'avis de la Cour de justice de l'Union européenne relativement au droit d'être entendu ;

4°) d'enjoindre au préfet de la Dordogne de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de réexaminer sa situation en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler sous les mêmes conditions de délai et d'astreinte ;

5°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord du 9 octobre 1987 modifié entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2014 :

- le rapport de Mme Michèle Richer, président ;

- et les conclusions de M. Nicolas Normand, rapporteur public ;

1. Considérant que M.C..., ressortissant marocain, fait appel du jugement du 17 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Dordogne du 19 avril 2013 refusant de lui délivrer un titre de séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français à destination de son pays d'origine ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum (...) reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " (...) " ; que selon l'article 9 du même accord : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. (...). " ; qu'aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail, dont les dispositions en vigueur au 1er mai 2008 ont repris celles de l'ancien article L. 341-2 du même code : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : (...) / 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail. " ; qu'en vertu des dispositions combinées du 6° de l'article R. 5221-3 et des articles R. 5221-11, R. 5221-15 et R. 2221-17 du même code, lorsque l'étranger est déjà présent sur le territoire national, la demande d'autorisation de travail est adressée au préfet de son département de résidence et la décision est prise par le préfet ; qu'enfin, aux termes de l'article R. 5221-20 du même code : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : / 1° La situation de l'emploi dans la profession et dans la zone géographique pour lesquelles la demande est formulée, compte tenu des spécificités requises pour le poste de travail considéré, et les recherches déjà accomplies par l'employeur auprès des organismes de placement concourant au service public du placement pour recruter un candidat déjà présent sur le marché du travail ; / 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule ; / 3° le respect par l'employeur, l'utilisateur, l'entreprise d'accueil ou l'employeur, l'utilisateur mentionné à l'article L. 1251-1 ou l'entreprise d'accueil de la législation relative au travail et à la protection sociale ; / 4° Le cas échéant, le respect par l'employeur, l'utilisateur, l'entreprise d'accueil ou le salarié des conditions réglementaires d'exercice de l'activité considérée ; / 5° Les conditions d'emploi et de rémunération offertes à l'étranger, qui sont comparables à celles des salariés occupant un emploi de même nature dans l'entreprise ou, à défaut, dans la même branche professionnelle " ;

3. Considérant qu'il résulte des termes mêmes de la décision en litige que si M. C...a sollicité son admission exceptionnelle au séjour, le préfet de la Dordogne a néanmoins statué sur sa demande sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 dont les modalités d'application sont régies par les dispositions précitées du code du travail ; que la décision attaquée est motivée par l'absence de production par l'intéressé d'un contrat de travail visé par les services de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) ; qu'il ressort, toutefois, des dispositions précitées que c'est le préfet lui-même qui est l'autorité administrative compétente pour délivrer l'autorisation de travail, constituée par un titre de séjour délivré en qualité de salarié ; que le requérant soutient sans être contredit qu'une demande de visa de son contrat de travail avait été déposée par lui-même et son employeur auprès de la DIRECCTE et qu'il a été invité à présenter sa demande aux services préfectoraux ; qu'il établit également avoir déposé à la préfecture une demande de titre de séjour accompagnée d'un dossier de demande d'autorisation de travail comportant notamment l'imprimé CERFA n° 13653*01 intitulé " Demande d'autorisation de travail pour un salarié étranger - contrat de travail simplifié ", signé des deux parties et constituant un contrat de travail, ainsi que l'imprimé CERFA intitulé " Annexe " sur lequel l'employeur déclarait être informé de l'obligation de verser à l'agence nationale de l'accueil des étrangers et des migrations la redevance et la contribution forfaitaire pour l'emploi d'un salarié étranger en France ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que le préfet de la Dordogne ait examiné cette demande d'autorisation de travail sollicitée en faveur de M. C... par la société SCI Marie et Cindy en vue d'occuper un emploi d'homme d'entretien ; qu'en effet, il n'a pas pris en compte les éléments d'appréciation dont notamment la situation de l'emploi ou l'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes et l'emploi auquel le requérant postule en méconnaissance des dispositions de l'article R. 5221-20 du code du travail ; que, dans ces conditions, le préfet de la Dordogne, auquel il appartenait de faire instruire la demande d'autorisation de travail par les services compétents du ministère du travail ou d'examiner lui-même cette demande, ne pouvait pas légalement refuser la délivrance du titre sollicité au motif que M. C...n'avait pas produit à l'appui de sa demande un contrat de travail visé par l'autorité administrative compétente ; qu'il a ce faisant entaché sa décision d'une erreur de droit ;

4. Considérant que, pour fonder légalement la décision attaquée, le préfet de la Dordogne invoque, dans son mémoire en défense d'appel, communiqué à M.C..., deux autres motifs que celui indiqué par la décision litigieuse, tirés de l'absence d'un visa de long séjour et de l'absence de document l'autorisant au séjour au sens des dispositions de l'article R. 5221-14 du code du travail ; que, toutefois, cette seule circonstance ne suffit pas en l'espèce, et eu égard notamment à la possibilité pour le préfet de décider de manière discrétionnaire d'une mesure de régularisation, à procéder à la substitution de motifs demandée ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la décision de refus de séjour est illégale, ainsi que, par voie de conséquence, celles portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination et que M. C...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Considérant qu'eu égard au motif énoncé ci-dessus, le présent arrêt implique seulement que le préfet de la Dordogne statue à nouveau sur la demande de titre de séjour présentée par M. C... ; qu'il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Dordogne de procéder à un nouvel examen de la situation du requérant dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'en revanche, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat le versement au conseil de M.C... la somme de 1 500 euros sous réserve qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle ;

DECIDE

Article 1er : Le jugement n° 1303384 du tribunal administratif de Bordeaux du 17 décembre 2013 et l'arrêté du préfet de la Dordogne du 19 avril 2013 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Dordogne de statuer à nouveau sur la demande de titre de séjour présentée par M. C...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à Me B...en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État à l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 14BX006202


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 14BX00620
Date de la décision : 20/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Emploi des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme RICHER
Rapporteur ?: Mme Michèle RICHER
Rapporteur public ?: M. NORMAND
Avocat(s) : HUGON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2014-11-20;14bx00620 ?
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