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04/04/2013 | FRANCE | N°12LY00373

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 6ème chambre - formation à 3, 04 avril 2013, 12LY00373


Vu la requête, enregistrée le 8 février 2012, présentée pour l'association départementale de sauvegarde de l'enfant à l'adulte (ADSEA) de l'Ain, représentée par son président en exercice, dont le siège est 526 rue Paul Verlaine à Péronnas (01960) ;

L'ADSEA de l'Ain demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906608 du 6 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville du 24 août 2009 annulant la décision de l'inspectrice du trav

ail et autorisant le licenciement de M. C...B...;

2°) de rejeter la demande prés...

Vu la requête, enregistrée le 8 février 2012, présentée pour l'association départementale de sauvegarde de l'enfant à l'adulte (ADSEA) de l'Ain, représentée par son président en exercice, dont le siège est 526 rue Paul Verlaine à Péronnas (01960) ;

L'ADSEA de l'Ain demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0906608 du 6 décembre 2011 par lequel le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville du 24 août 2009 annulant la décision de l'inspectrice du travail et autorisant le licenciement de M. C...B...;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que le refus de M. B...de fournir le rapport d'activité et de renseigner le logiciel de suivi de son activité caractérise une faute d'insubordination d'une gravité suffisante pour justifier une mesure de licenciement ;

- que M. B...s'est absenté au-delà de ses heures de délégation à trois reprises en décembre 2008 sans fournir de justification crédible quant à la nécessité de l'utilisation de ces heures de délégation ; que de telles absences injustifiées constituent des fautes de nature à justifier le licenciement d'un salarié protégé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 28 juin 2012, présenté pour M.B..., qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que le signataire de la décision en litige ne justifie pas de sa compétence ;

- que ladite décision est insuffisamment motivée ;

- que s'il n'a pas produit la note qui lui était demandée, c'est en raison d'une importante charge de travail ; que le fait qu'il n'a pas produit cette note n'a eu aucune incidence sur le renouvellement de la convention passée par l'association avec le département ;

- que contrairement à ce que soutient son employeur, le logiciel EVA, relatif au suivi d'activité, n'est nullement un moyen pour l'employeur de vérifier l'activité des salariés ; qu'il convient en outre de relever, comme l'ont fait les premiers juges, que l'ADSEA ne lui a adressé des rappels à l'ordre concernant l'absence de renseignement de la base EVA que postérieurement à la demande d'autorisation de licenciement ;

- que les trois absences qui lui sont reprochées ont toutes été justifiées par l'utilisation de ses heures de délégation dont il n'appartenait pas à son employeur d'apprécier le bien-fondé ;

- qu'il existe un lien entre la demande d'autorisation de licenciement et le mandat dont il est titulaire, qu'il exerce activement, alors que l'employeur privilégie ses relations avec un autre syndicat ;

Vu le mémoire, enregistré le 25 octobre 2012, présenté pour l'ADSEA de l'Ain, qui conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance du 9 janvier 2013 prise sur le fondement des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative, fixant au 25 janvier 2013 la date de clôture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 23 janvier 2013, présenté pour M.B..., qui conclut aux mêmes fins que précédemment, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du Gouvernement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 14 mars 2013 :

- le rapport de M. Poitreau, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pourny, rapporteur public ;

- et les observations de Me Berlet, avocat de l'association départementale de sauvegarde de l'enfant à l'adulte de l'Ain, et de M.B... ;

1. Considérant que l'association départementale de sauvegarde de l'enfant à l'adulte (ADSEA) de l'Ain a présenté, le 8 janvier 2009, une demande d'autorisation de licenciement pour faute de M.B..., animateur socio-éducatif détenant les mandats de délégué syndical et représentant syndical au comité d'entreprise ; qu'un refus lui a été opposé le 24 février 2009 par l'inspectrice du travail ; que, saisi par l'ADSEA d'un recours hiérarchique, le ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville a, le 24 août 2009, annulé la décision de l'inspectrice du travail et a accordé l'autorisation sollicitée ; que l'ADSEA fait appel du jugement par lequel, sur la demande de M.B..., le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du ministre ;

2. Considérant qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ; qu'en outre, pour refuser l'autorisation sollicitée, l'autorité administrative a la faculté de retenir des motifs d'intérêt général relevant de son pouvoir d'appréciation de l'opportunité, sous réserve qu'une atteinte excessive ne soit pas portée à l'un ou l'autre des intérêts en présence ;

3. Considérant, d'une part, que le 5 décembre 2008 le directeur du pôle prévention au sein de l'ADSEA de l'Ain a demandé à M.B..., par courrier électronique, de lui communiquer, pour le 10 décembre au plus tard, une note circonstanciée sur son activité depuis le début de l'année 2008 dans la commune de Bellignat en vue d'une réunion à laquelle il était convoqué le 16 décembre à la mairie de cette commune ; que, dans le même courrier, il a rappelé à M. B...qu'il n'avait toujours pas renseigné la base de données permettant d'assurer un suivi de son activité d'éducateur ; que M. B...n'a pas remis la note qui lui était demandée, sans fournir aucune explication, et n'a renseigné la base de données concernant son activité professionnelle qu'au deuxième trimestre de l'année 2009 ; que, d'autre part, M. B...s'est absenté à trois reprises les 2, 5 et 11 et 12 décembre 2008 et qu'il a justifié ces absences par des heures de délégation, alors qu'il avait dépassé son quota d'heures de délégation ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., dans le cadre de son activité professionnelle, intervenait seul pour le compte de l'ADSEA de l'Ain, sur le territoire de la commune de Bellignat ; que, dans ces conditions, son employeur était en droit d'obtenir de sa part, en vue de la réunion prévue pour le 16 décembre 2008, une note faisant le point sur son activité dans cette commune ; que, compte tenu de la date à laquelle cette réunion était prévue, la demande adressée à M. B...le 5 décembre 2008 revêtait, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, un caractère urgent ; que si M. B...soutient qu'il n'a pas pu répondre à la demande qui lui a été adressée en raison d'une charge de travail trop importante, il n'a pas fait état de ce motif dans le courrier électronique adressé en réponse à la demande formulée par son supérieur hiérarchique et il ne fournit aucun élément propre à établir la surcharge de travail qu'il allègue ; qu'il n'apporte, par ailleurs, aucune justification s'agissant du retard avec lequel il a renseigné la base de données permettant de suivre son activité ; que M. B...ne saurait relativiser le caractère fautif de son comportement d'insubordination au seul motif que l'ADSEA a obtenu le renouvellement de la convention relative au financement de l'action qu'elle conduit dans la commune de Bellignat ; que, s'agissant, enfin, des absences du mois de décembre 2008, si elles ont été justifiées par des heures de délégation, il ressort des pièces du dossier que, comme l'a relevé le ministre, M. B...a fait preuve d'un comportement désinvolte en ne répondant pas à la lettre du 28 novembre 2008 par laquelle son employeur attirait son attention sur le dépassement de son crédit d'heures de délégation ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif, pour annuler la décision en litige, s'est fondé sur le motif tiré de ce que les faits d'insubordination reprochés à M. B...n'étaient pas d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement ;

6. Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel d'examiner les autres moyens soulevés par M. B...devant le tribunal administratif et en appel ;

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er du décret du 27 juillet 2005 susvisé : " A compter du jour suivant la publication au Journal officiel de la République française de l'acte les nommant dans leurs fonctions ou à compter du jour où cet acte prend effet, si ce jour est postérieur, peuvent signer, au nom du ministre ou du secrétaire d'Etat et par délégation, l'ensemble des actes, à l'exception des décrets, relatifs aux affaires des services placés sous leur autorité : (...) 2° Les chefs de service, directeurs adjoints, sous-directeurs (...) " ;

8. Considérant que la décision en litige, du 24 août 2009, a été signée par M. A... D..., adjoint au directeur général du travail, nommé par décret du 25 août 2006 publié au Journal officiel du 26 août 2006 ; que, dès lors, M. D...était compétent pour signer cette décision, au nom du ministre chargé du travail ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que la décision en litige, qui comporte l'indication des articles du code du travail relatifs au licenciement des salariés protégés ainsi que l'énoncé des motifs de faits au regard desquels le ministre s'est prononcé, et notamment l'existence du lien entre les mandats détenus par l'intéressé et la demande d'autorisation de licenciement présentée par son employeur, est suffisamment motivée ;

10. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il existe un lien entre les mandats dont M. B...est titulaire et la demande d'autorisation de le licencier présentée par son employeur ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ADSEA de l'Ain est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Lyon a annulé la décision du ministre du travail, des relations sociales, de la famille, de la solidarité et de la ville du 24 août 2009 ;

12. Considérant que l'Etat n'étant pas, dans la présente instance, la partie perdante, les conclusions de l'ADSEA de l'Ain et de M. B...tendant à ce que l'Etat leur verse une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Lyon du 6 décembre 2011 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par l'ADSEA de l'Ain et par M. B...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association départementale de sauvegarde de l'enfant à l'adulte de l'Ain, au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à M. C...B....

Délibéré après l'audience du 14 mars 2013 à laquelle siégeaient :

M. Clot, président de chambre,

M. Seillet, président-assesseur,

M. Poitreau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 avril 2013.

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N° 12LY00373


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12LY00373
Date de la décision : 04/04/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-02-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour faute. Existence d'une faute d'une gravité suffisante.


Composition du Tribunal
Président : M. CLOT
Rapporteur ?: M. Gérard POITREAU
Rapporteur public ?: M. POURNY
Avocat(s) : SELAS CORNILLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2013-04-04;12ly00373 ?
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