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15/07/2010 | FRANCE | N°09BX01513

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre (formation à 3), 15 juillet 2010, 09BX01513


Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er juillet 2009, présentée pour M. et Mme Bernard A, demeurant ..., par Me Bancel ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0403478 et 0501543 en date du 19 mai 2009, par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a, d'une part, donné acte de leur désistement concernant leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2000 et, d'autre part, rejeté leur demande tendant à la décharge des complément

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Vu la requête, enregistrée au greffe de la Cour le 1er juillet 2009, présentée pour M. et Mme Bernard A, demeurant ..., par Me Bancel ; M. et Mme A demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 0403478 et 0501543 en date du 19 mai 2009, par lequel le Tribunal administratif de Toulouse a, d'une part, donné acte de leur désistement concernant leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2000 et, d'autre part, rejeté leur demande tendant à la décharge des compléments d'impôt sur le revenu auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2000 ;

2°) d'annuler partiellement leur avis d'imposition complémentaire ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 18 juin 2010, présentée pour M. et Mme A ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 juin 2010 :

- le rapport de M. Braud, premier conseiller ;

- les observations de Me Bancel, pour M. et Mme A ;

- et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;

La parole ayant à nouveau été donnée aux parties ;

Considérant que M. et Mme A ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle portant sur les années 1998, 1999 et 2000 ; que, dans le cadre de ce contrôle, l'administration fiscale a notamment remis en cause la déduction opérée en 2000 sur le fondement de l'article 163 tervicies du code général des impôts ; que M. et Mme A ont donc été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2000 ; que, par un jugement en date du 19 mai 2009, le Tribunal administratif de Toulouse a, d'une part, donné acte du désistement concernant la demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire de contributions sociales à laquelle M. et Mme A ont été assujettis au titre de l'année 2000 et, d'autre part, rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de cette même année ; que M. et Mme A doivent être regardés comme relevant appel de ce jugement en tant qu'il rejette leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2000 ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

Considérant qu'aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction alors en vigueur : " Ne peuvent être opposés à l'administration des impôts les actes qui dissimulent la portée véritable d'un contrat ou d'une convention à l'aide de clauses : a) Qui donnent ouverture à des droits d'enregistrement ou à une taxe de publicité foncière moins élevés ; b) Ou qui déguisent soit une réalisation, soit un transfert de bénéfices ou de revenus ; c) Ou qui permettent d'éviter, en totalité ou en partie, le paiement des taxes sur le chiffre d'affaires correspondant aux opérations effectuées en exécution d'un contrat ou d'une convention. L'administration est en droit de restituer son véritable caractère à l'opération litigieuse. En cas de désaccord sur les redressements notifiés sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité consultatif pour la répression des abus de droit. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité dont les avis rendus feront l'objet d'un rapport annuel (...) " ;

Considérant qu'en estimant que les conditions requises par les dispositions de l'article 163 tervicies du code général des impôts n'étaient pas remplies, notamment celle tenant à l'exploitation directe des matériels objets des investissements productifs, l'administration n'a pas écarté les contrats conclus entre la société en nom collectif (SNC) Solar Energie et la société à responsabilité limitée (SARL) Solarinox Gestion, d'une part, et entre cette dernière et l'utilisateur final, d'autre part, comme ne lui étant pas opposables, mais s'est bornée à estimer que le contrat de location de chauffe-eau solaires liant la SNC Solar Energie à la SARL Solarinox Gestion était assorti de prestations annexes et que les contrats liant la SARL Solarinox Gestion aux utilisateurs n'étaient pas des contrats de fourniture d'énergie mais des contrats de sous-location de chauffe-eau solaires ; qu'elle n'a pas davantage estimé que la conclusion de ces contrats constituait un montage conçu dans le but exclusif d'éluder l'impôt ; que, par suite, le moyen tiré de ce que l'administration aurait dû mettre en oeuvre la procédure prévue par les dispositions précitées de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales ne peut qu'être écarté ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

Considérant qu'aux termes de l'article 163 tervicies du code général des impôts applicable en l'espèce : " I. Les contribuables peuvent déduire de leur revenu net global une somme égale au montant hors taxes des investissements productifs, diminué de la fraction de leur prix de revient financée par une subvention publique, qu'ils réalisent dans les départements et territoires d'outre-mer et dans les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon, dans le cadre d'une entreprise exerçant une activité dans les secteurs de l'industrie, de la pêche, de l'hôtellerie, du tourisme, des énergies nouvelles, de l'agriculture, du bâtiment et des travaux publics, des transports, de l'artisanat, de la maintenance au profit d'activités industrielles, de la production et de la diffusion audiovisuelles et cinématographiques ou réalisant des investissements nécessaires à l'exploitation d'une concession de service public local à caractère industriel et commercial. Les dispositions du premier alinéa s'appliquent également aux investissements réalisés par une société soumise au régime d'imposition prévu à l'article 8 ou un groupement mentionné aux articles 239 quater ou 239 quater C. En ce cas, la déduction est pratiquée par les associés ou membres dans une proportion correspondant à leurs droits dans la société ou le groupement. La déduction prévue au premier alinéa est opérée au titre de l'année au cours de laquelle l'investissement est réalisé. Si, dans le délai de cinq ans de son acquisition ou de sa création ou pendant sa durée normale d'utilisation si elle est inférieure, l'investissement ayant ouvert droit à déduction est cédé ou cesse d'être affecté à l'activité pour laquelle il a été acquis ou créé, ou si l'acquéreur cesse son activité, les sommes déduites sont ajoutées, au titre de l'année au cours de laquelle cet événement est intervenu, au revenu net global du ou des contribuables ayant pratiqué la déduction (...) " ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SNC Solar Energie a fait l'acquisition, le 22 mai 2000, de 190 chauffe-eau solaires auprès de la SARL Solarinox Gestion ; que M. A, associé unique de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL) Cyclamen, elle-même détentrice de parts de la SNC Solar Energie, a déduit de son revenu net global de l'année 2000 l'investissement ainsi réalisé à proportion des droits détenus par l'EURL Cyclamen dans la SNC Solar Energie ; que, par un contrat signé le 12 juillet 2000, la SNC Solar Energie a donné en location pour une durée de cinq ans les 190 chauffe-eau solaires à la SARL Solarinox Gestion ; que cette dernière a ensuite, par des contrats de " fourniture d'énergie ", mis à la disposition d'utilisateurs les chauffe-eau solaires pour une durée de cinq ans ; que ces contrats ne facturent pas l'énergie consommée par les utilisateurs mais l'énergie produite par le chauffe-eau solaire ainsi que le montant de l'amortissement de l'appareil ; que les stipulations des articles 2.3 et 6 desdits contrats évoquent respectivement le paiement d'un loyer et le versement d'un dépôt de garantie ; que d'autres stipulations prévoient également qu'il incombe à l'utilisateur d'assurer la garde et la protection du chauffe-eau solaire, d'acquitter les primes concernant l'assurance du chauffe-eau solaire contre divers risques et proposent à l'utilisateur d'acquérir le chauffe-eau solaire au terme du contrat ; que ces contrats doivent dès lors être regardés, nonobstant leur intitulé, comme des contrats de sous-location des chauffe-eau solaires ; que, dans ces conditions, l'investissement réalisé par la SNC Solar Energie en vue de l'activité de location de chauffe-eau solaires doit être regardé comme ayant, à la date de signature des contrats de sous-location, cessé d'être affecté à l'activité pour laquelle il avait été réalisé en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 163 tervicies du code général des impôts ; que cet évènement étant intervenu l'année même de la réalisation de l'investissement, M. A ne pouvait régulièrement, sur le fondement dudit article, déduire de son revenu global de l'année 2000 une part de l'investissement réalisé par la SNC Solar Energie ; que, par suite, le moyen tiré de la violation de l'article 163 tervicies du code général des impôts doit être écarté ;

En ce qui concerne l'application de la doctrine administrative :

Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente " ;

Considérant, d'une part, que M. et Mme A ne peuvent utilement se prévaloir de l'instruction 4 A-8-86 du 7 novembre 1986 et de l'instruction 4 A-9-92 du 16 juin 1992 qui ne concernent pas le mécanisme de déduction prévu par l'article 163 tervicies du code général des impôts ;

Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'instruction 5 B-15-99 du 20 juillet 1999 : " (...) 39. En principe, l'entreprise individuelle, la société ou le groupement qui réalise l'investissement doit l'exploiter dans le cadre d'une activité éligible. Toutefois, lorsque la personne qui réalise l'investissement en est propriétaire mais ne l'exploite pas, il est admis que l'entrepreneur individuel, les associés de la société ou les membres du groupement concerné puissent néanmoins pratiquer la déduction (...) 41. Cette solution afférente aux biens donnés en location n'est pas applicable aux biens qui sont détenus dans le cadre d'un contrat de crédit-bail et qui font l'objet d'une sous-location. Il en est de même lorsque le bien donné à bail par son propriétaire est sous-loué par le locataire à l'utilisateur final (...) " ; qu'il résulte de ce qui précède que les chauffe-eau solaires acquis par la SNC Solar Energie et loués à la SARL Solarinox Gestion ont fait l'objet de sous-location aux utilisateurs ; que, dès lors, M. et Mme A ne peuvent utilement se prévaloir de cette instruction pour déduire de leur revenu imposable la somme concernant cet investissement ;

Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L. 80 A est applicable : 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal (...) " ;

Considérant que l'abandon, par l'administration fiscale, des redressements envisagés à l'encontre de la SNC Solar Energie, qui n'est pas motivé, ne constitue pas une prise de position formelle sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal dont M. et Mme A puissent se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ;

En ce qui concerne le principe d'égalité devant l'impôt :

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'imposition en litige a été établie conformément à la loi fiscale ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que l'administration fiscale, en prenant des positions différentes à l'égard des autres associés de la SNC Solar Energie et à l'égard d'autres SNC placées dans la même situation que la SNC Solar Energie, aurait méconnu le principe d'égalité devant l'impôt est inopérant ;

Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Toulouse a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2000 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme demandée par M. et Mme A au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A est rejetée.

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N° 09BX01513


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 09BX01513
Date de la décision : 15/07/2010
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Contentieux fiscal

Analyses

19-04-01-02-03-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES. IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. RÈGLES GÉNÉRALES. IMPÔT SUR LE REVENU. DÉTERMINATION DU REVENU IMPOSABLE. CHARGES DÉDUCTIBLES. - INVESTISSEMENTS OUTRE-MER (RÉGIME DE L'ARTICLE 163 TERVICIES DU CODE GÉNÉRAL DES IMPÔTS).

19-04-01-02-03-04 Une société a fait l'acquisition de chauffe-eau solaires pour les donner en location. Dès lors que ces appareils ont fait ensuite l'objet de contrats de sous-location, l'investissement doit être regardé comme ayant cessé d'être affecté à l'activité pour laquelle il avait été réalisé. Il n'est donc pas éligible au régime d'aide fiscale à l'investissement prévu à l'article 163 tervicies du code général des impôts.


Composition du Tribunal
Président : TEXIER
Rapporteur ?: Paul-André BRAUD
Rapporteur public ?: M. LERNER
Avocat(s) : BANCEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2010-07-15;09bx01513 ?
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