LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen relevé d'office après avertissement donné aux parties :
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Montpellier, 4 septembre 2009) et les pièces de la procédure, que M. X...
X..., de nationalité colombienne, en situation irrégulière en France, a été interpellé en gare de Cerbère dans le train en provenance de Montpellier et à destination de Barcelone (Espagne) sur le fondement de l'article 78-2, alinéa 4, du code de procédure pénale ; qu'il a fait l'objet d'une mesure de reconduite à la frontière et de placement en rétention administrative ; qu'un juge des libertés et de la détention a prolongé cette rétention ; que le préfet des Pyrénées-Orientales fait grief à l'ordonnance d'avoir infirmé cette décision et dit n'y avoir lieu à prolonger la rétention ;
Attendu que, par arrêt du 22 juin 2010, la Cour de justice de l'Union européenne a dit pour droit que l'article 67 paragraphe 2 du TFUE et les articles 20 et 21 du règlement (CE) n° 562/ 2006, du Parlement européen et du Conseil, du 15 mars 2006, établissant un code communautaire relatif au régime de franchissement des frontières par les personnes (code frontières Schengen), s'opposent à une législation nationale conférant aux autorités de police de l'État membre concerné la compétence de contrôler, uniquement dans une zone de vingt kilomètres à partir de la frontière terrestre de cet État avec les parties à la convention d'application de l'accord de Schengen, du 14 juin 1985, entre les gouvernements des États de l'Union économique Benelux, de la République fédérale d'Allemagne et de la République française relatif à la suppression graduelle des contrôles aux frontières communes, signé à Schengen (Luxembourg) le 19 juin 1990, l'identité de toute personne, indépendamment du comportement de celle-ci et des circonstances particulières établissant un risque d'atteinte à l'ordre public, en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévus par la loi, sans prévoir l'encadrement nécessaire de cette compétence garantissant que l'exercice pratique de ladite compétence ne puisse pas revêtir un effet équivalent à celui des vérifications aux frontières ;
Attendu que l'article 78-2, alinéa 4, du code de procédure pénale n'étant assorti d'aucune disposition offrant une telle garantie, les contrôles opérés sur le fondement de ce texte sont irréguliers ; que par ce motif de pur droit, substitué à celui critiqué, la décision se trouve légalement justifiée ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois février deux mille onze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Delaporte, Briard et Trichet, avocat aux Conseils, pour le préfet des Pyrénées-Orientales
IL EST FAIT GRIEF à l'ordonnance attaquée d'avoir infirmé l'ordonnance entreprise, et, statuant à nouveau, annulé la procédure et ordonné la remise en liberté de Monsieur X...
X...,
AUX MOTIFS QU'« il convient de ne statuer que sur le moyen tiré de la violation de l'article 78-2 alinéa 3 du Code de procédure pénale (et non pas alinéa 8 comme mentionné par erreur) tel que celui-ci appert du mémoire de l'appelant annexé au dossier ; que l'article précité prévoit le contrôle d'identité à bord d'un train effectuant une liaison internationale sur la portion du trajet entre la frontière et le premier arrêt qui se situe au-delà des vingt kilomètres de la frontière ; que l'arrêté du 26 avril 2006 désignant les arrêts sur les liaisons ferroviaires internationales pouvant donner lieu à l'application de l'article 78-2 du Code de procédure pénale précise expressément que, pour les liaisons franco-espagnoles empruntant la ligne ferroviaire entre Port-Bou (Espagne) et Montpellier (Hérault), le premier arrêt se situe en gare de Montpellier ; que cet arrêté vise explicitement la ligne ferroviaire uniquement dans le sens Port-Bou/ Montpellier ; que, par ailleurs, l'article précité précise que le contrôle peut être opéré entre le premier arrêt qui se situe audelà des vingt kilomètres de la frontière ; qu'il est évident que ces textes ont été promulgués pour permettre d'effectuer des contrôles frontaliers, par dérogation aux accords de Schengen ; que, partant, il est logique de considérer que ne sont concernées que les personnes qui entrent sur le territoire français, et non celles qui en sortent ; qu'enfin, il n'est pas inutile de rappeler que ces textes sont d'application stricte et qu'il en résulte que les contrôles de police prévus par l'article 78-2 du Code de procédure pénale ne peuvent s'opérer sur la ligne ferroviaire internationale que pour le train circulant dans le sens Port-Bou/ Montpellier ; qu'au cas particulier, le contrôle ayant été opéré en gare de Cerbere (66) dans un train circulant de France vers l'Espagne, il est évident que l'intéressé s'apprêtait à quitter le territoire national, et que son interpellation est irrégulière ; ce qui entraîne la nullité de la procédure, sans qu'il soit nécessaire d'examiner d'autres moyens ; »
ALORS QUE les articles 78-2 alinéa 3 du Code de procédure pénale (issu de la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006) et 1er-3° de l'arrêté du 26 avril 2006 étendant la possibilité de procéder à un contrôle d'identité à bord des trains internationaux ne comportent aucune restriction d'application relative au sens de circulation des trains, et ne mentionnent, pour le premier, qu'une zone géographique autour de la frontière, et, pour le second, les deux terminus de la ligne (« ligne ferroviaire entre Port-Bou (Espagne) et Montpellier (Héraut, 34) : gare de Perpignan (Pyrénées-Orientales, 66) ») ; que la Cour d'appel, qui a estimé que l'arrêté du 26 avril 2006 n'ouvrait la possibilité de contrôles sur la ligne ferroviaire concernée que dans le sens PORT-BOU/ MONTPELLIER, a méconnu les textes précités en leur ajoutant une condition qu'ils ne comportaient pas.