Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 octobre 2006), que la société Jesta Fontainebleau (SJF), adjudicataire d'un ensemble immobilier saisi au préjudice de la société Noga hôtels Cannes (NHC), a pris possession des locaux exploités à usage d'hôtel ; que la société NHC, soutenant avoir été dépossédée par voie de fait, a saisi le juge des référés d'une demande de réintégration ;
Attendu que la société SJF fait grief à l'arrêt d'avoir accueilli la demande, alors, selon le moyen :
1°/ que le transfert d'une unité économique conservant son identité emporte transfert des contrats de travail, en application de l'article L. 122-12 du code du travail ; qu'ainsi, une société commerciale dont les salariés ont été transférés à l'adjudicataire d'un immeuble à usage d'hôtel ne peut prétendre occuper cet immeuble par l'intermédiaire des salariés transférés, seuls présents dans les lieux lors de leur prise de possession par l'adjudicataire ; qu'en jugeant cependant, pour en déduire que la société NHC occupait l'immeuble litigieux, à usage d'hôtel, que le personnel de cette société occupait cet immeuble dont la société SJF avait été désignée adjudicataire, tandis que ce personnel avait été transféré de plein droit à la société SJF par l'effet du jugement d'adjudication, la cour d'appel a violé les articles L. 122-12 du code du travail et 809 du nouveau code de procédure civile ;
2°/ que le trouble résultant de la prise de possession d'un immeuble par son adjudicataire n'est pas manifeste lorsque le débiteur saisi, qui se prétend victime d'une voie de fait, n'occupe pas cet immeuble lors de la prise de possession ; que la subsistance d'une simple domiciliation de siège social n'équivaut pas à une occupation des lieux ; que ne subit par conséquent aucun trouble la société commerciale qui, ayant perdu tout droit sur les lieux à la suite d'une saisie immobilière et dont l'intégralité du personnel exploitant les lieux à usage d'hôtel a été transférée de plein droit au nouvel occupant, adjudicataire, n'occupe plus les lieux au jour de l'entrée en possession de ce dernier ; qu'en jugeant néanmoins que la société SJF avait commis une voie de fait en occupant l'immeuble dont elle avait été désignée adjudicataire, tandis qu'en conséquence de l'absence d'occupation de l'immeuble par la société NHC, cette voie de fait n'était pas manifeste, la cour d'appel a violé l'article 809 du nouveau code de procédure civile ;
3°/ que la tentative de signification d'un acte au seul lieu indiqué par la personne morale destinataire comme étant soi-disant celui de son siège social n'emporte pas, pour l'auteur de l'acte, renonciation à contester la réalité de l'occupation des locaux correspondant à la domiciliation indiquée par le destinataire, mais manifeste seulement la volonté de tenter une signification régulière ; qu'en jugeant néanmoins que la société NHC occupait les locaux dont la société SJF avait été désignée adjudicataire, au motif inopérant que cette dernière société avait fait délivrer plusieurs actes à la société NHC à l'adresse de ces locaux, la cour d'appel a violé l'article 809 du nouveau code de procédure civile ;
Mais attendu qu'une contestation sérieuse sur le fond du droit n'interdit pas au juge des référés de prendre les mesures prévues à l'article 809, alinéa 1er, du nouveau code de procédure civile pour faire cesser un trouble manifestement illicite ;
Et attendu qu'après avoir énoncé que le litige sur l'existence au profit de la société NHC d'un fonds de commerce d'hôtel et sur le transfert de ce fonds à l'adjudicataire ne relevait pas de la compétence de la juridiction des référés, l'arrêt retient que les propres indications fournies par la société SJF à un huissier de justice mandaté pour faire des constatations sur place, la présence du personnel de la société NHC attestée par l'officier ministériel et la signification dans les mêmes locaux d'actes de procédure destinés à cette société établissaient qu'elle occupait les lieux ; que de ces constatations et énonciations relevant de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve, la cour d'appel a pu déduire que la prise de possession des locaux par la société SJF sans signification préalable du jugement d'adjudication et d'un titre d'expulsion constituait une voie de fait, caractéristique d'un trouble manifestement illicite ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Jesta Fontainebleau aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette la demande de la société Jesta Fontainebleau ; la condamne à payer à la société Noga hôtels Cannes la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept juin deux mille sept.