AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le sept juin deux mille six, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le rapport de Mme le conseiller ANZANI, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;
Statuant sur le pourvoi formé par :
- DE X...
Y... Alexandre, partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 4e section, en date du 26 mai 2005, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée des chefs d'abus de faiblesse et vol, a constaté l'extinction de l'action publique par la prescription ;
Vu l'article 575, alinéa 2, 3 du code de procédure pénale ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 575, alinéa 2, 3 du code de procédure pénale, 6, 7 et 8, 614, 617, 593 du même code, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a constaté la prescription de l'action publique ;
"aux motifs que " l'action introduite suivant plainte dont l'enregistrement au cabinet du doyen des juges d'instruction de Paris le 27 mai 2002 lui donne date certaine, était prescrite, une année révolue le 26 mai 2002, 24 heures s'étant écoulées après l'arrêt de la Cour de cassation du 27 mai 1999 ayant constaté le désistement d'un pourvoi formé sur l'arrêt de la chambre de l'instruction de Bordeaux retenant l'incompétence territoriale du juge d'instruction saisi à l'origine d'une plainte avec constitution de partie civile déposée par Alexandre De X...
Y... " ;
"alors, d'une part, que la prescription ne commence à courir que le lendemain du jour où se produit l'événement, en l'occurrence l'arrêt de la Cour de cassation rendu le 27 mai 1999, servant de point de départ au délai de la prescription de trois années de l'action publique, soit le 28 mai 1999, en sorte que le délai de trois années révolues n'avait pas pris fin à la date du dépôt de la plainte, le 27 mai 2002, puisqu'il expirait, précisément, ce 27 mai 2002 à minuit, et non la veille comme l'indique inexactement la chambre de l'instruction, qui méconnaît le sens et la portée des textes susvisés ;
"alors, d'autre part, que c'est en principe la notification régulièrement faite de l'arrêt de la Cour de cassation, et non l'arrêt lui-même, ayant constaté le désistement, qui était à prendre à compte dans le calcul de la prescription ; qu'en décidant, ainsi, que la prescription courait du jour même du prononcé de l'arrêt de la Cour de cassation, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés" ;
Vu les articles 7 et 8 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte des articles 7 et 8 précités que l'action publique en matière de délit se prescrit après trois années révolues à compter du jour où les infractions ont été commises ou, si dans l'intervalle il en a été fait, à compter du dernier acte d'instruction ou de poursuite ;
que ce délai se calcule de quantième à quantième et expire le dernier jour à minuit ;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué qu'Alexandre de X...
Y... a porté plainte et s'est constitué partie civile le 27 mai 2002 en dénonçant des abus de faiblesse et vol dont aurait été victime son frère Eugène, lors de la cession, courant 1996, de parts détenues dans plusieurs sociétés et lors de la renonciation de ce dernier à sa part dans l'indivision familiale ; que cette plainte faisait suite à une précédente portée devant le juge d'instruction de Bordeaux ayant donné lieu à une décision d'incompétence confirmée par arrêt de la chambre d'accusation, en date du 6 octobre 1998 ; que la partie civile a formé contre cet arrêt un pourvoi dont elle s'est par la suite désistée ;
Attendu que, pour déclarer l'action publique éteinte, l'arrêt énonce que le délai de prescription triennale a commencé à courir le 27 mai 1999, jour où a été rendu l'arrêt de la Cour de cassation constatant le désistement du pourvoi d'Alexandre de X...
Y..., et qu'il a expiré le 26 mai 2002 à minuit ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que c'est le 27 mai 2002 à minuit qu'était venu à expiration le délai de la prescription, la chambre de l'instruction a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens proposés,
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 26 mai 2005, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article L. 131-6, alinéa 4, du code de l'organisation judiciaire : M. Cotte président, Mme Anzani conseiller rapporteur, M. Joly conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;