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02/12/2003 | FRANCE | N°03-85460

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 02 décembre 2003, 03-85460


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux décembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI, les observations de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Désiré,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de POITIERS, en date du 2 septembre 2003, qu

i, dans l'information suivie contre lui du chef d'infractions à la législation sur les stu...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le deux décembre deux mille trois, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI, les observations de la société civile professionnelle MONOD et COLIN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général COMMARET ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Désiré,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de POITIERS, en date du 2 septembre 2003, qui, dans l'information suivie contre lui du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 141-2, 145-1 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt a rejeté la demande en nullité de l'ordonnance du 7 août 2003 ;

"aux motifs qu'il n'y a pas lieu de tenir compte, pour le calcul de la période de quatre mois à l'expiration de laquelle le juge peut prolonger la détention provisoire par ordonnance motivée, de la durée de la détention provisoire accomplie antérieurement à la révocation du contrôle judiciaire ; qu'en l'espèce, l'ordonnance de mise en détention provisoire après révocation du contrôle judiciaire a été rendue le 11 avril 2003 ; que le débat contradictoire et l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire sont intervenus le 7 août 2003, avant le délai de quatre mois imparti par la loi ;

"alors qu'en matière correctionnelle, la détention provisoire ne peut, en principe, excéder quatre mois ; qu'à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut décider de prolonger la détention provisoire au-delà de quatre mois mais que dans ce cas, la décision de prolongation ou de renouvellement de prolongation de la détention provisoire doit être nécessairement précédée d'un débat contradictoire, à peine de nullité ; qu'en refusant de tenir compte, dans la computation du délai de quatre mois au terme duquel le juge ne peut prolonger la détention sans organiser un débat contradictoire, de la période de détention provisoire accomplie antérieurement à la révocation du contrôle judiciaire, la cour d'appel a violé les dispositions précitées" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, mis en examen, notamment pour trafic de stupéfiants, et placé en détention provisoire le 3 décembre 2001, Désiré X... a été mis en liberté sous contrôle judiciaire le 20 décembre suivant ; qu'en raison de la révocation de ce contrôle, il a de nouveau été détenu provisoirement à compter du 14 octobre 2002 ; que la détention a été prolongée par décision du 13 février 2003 dont le mis en examen a interjeté appel ; que, par arrêt du 25 février, la chambre de l'instruction a constaté que l'intéressé avait été libéré sous contrôle judiciaire par ordonnance du juge d'instruction du 20 février ; que, le contrôle judiciaire ayant été révoqué le 11 avril, le juge des libertés et de la détention, par ordonnance du 7 août, a prolongé la détention pour une période de quatre mois à compter du 10 août ;

Attendu que, devant la chambre de l'instruction, Désiré X... a fait valoir que, compte tenu de la détention provisoire subie du 3 au 20 décembre 2001 et du 14 au 20 février 2003, le débat contradictoire préalable à une éventuelle prolongation aurait dû être tenu le 19 juillet 2003 au plus tard ;

Attendu que, pour refuser d'annuler l'ordonnance entreprise, l'arrêt énonce que, pour le calcul de la période de quatre mois à l'expiration de laquelle la détention provisoire peut être prolongée, il n'y a pas lieu de tenir compte de la durée accomplie antérieurement à la révocation du contrôle judiciaire ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, et dès lors que ne sont pas applicables en l'espèce les dispositions de l'article 141-3 du Code de procédure pénale, qui ont trait à la durée maximale de la détention prévue respectivement aux articles 145-1 et 145-2, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 137-3, 144 et 593 du Code de procédure pénale, de la présomption d'innocence et de l'article 6 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a prolongé la détention provisoire de Désiré X... pour une durée de quatre mois à compter du 10 août 2003 ;

"aux motifs que Désiré X... a délibérément enfreint l'interdiction de se rendre à Niort qui lui avait été faite dans le cadre du contrôle judiciaire dont il faisait l'objet ; que, lors de sa dernière interpellation, le 12 avril 2003, il a été trouvé porteur d'une somme d'argent importante dont il a été incapable de justifier de manière vraisemblable la possession ; qu'il a poursuivi son activité délictueuse et démontré par son propre comportement qu'un contrôle judiciaire, même strict, est totalement insuffisant au regard des fonctions définies par l'article 137 du Code de procédure pénale et que la prolongation de la détention provisoire est l'unique moyen de prévenir le renouvellement de l'infraction ; que, par ailleurs, il est impliqué dans un trafic important de stupéfiants comportant des ramifications dans la région parisienne, ce qui justifie la poursuite des investigations et a indiqué lui-même que des menaces étaient exercées dans le réseau dans lequel il était impliqué ; que, dès lors, la détention est l'unique moyen d'empêcher concertation et pression avec des coauteurs ;

"alors que, d'une part, viole la présomption d'innocence le juge des libertés et de la détention qui préjugeant de la culpabilité de la personne mise en examen, se fonde sur celle-ci pour prolonger la détention ; qu'en l'espèce, pour justifier la prolongation de la détention, la cour d'appel a retenu, d'une part, que Désiré X... a "prolongé son activité délictueuse" et, d'autre part, qu'il était "impliqué dans le trafic de stupéfiants" dont les auteurs étaient recherchés ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a préjugé de la culpabilité de la personne mise en examen et violé le principe précité, ensemble l'article 6 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

"alors que, d'autre part, Désiré X..., délinquant primaire âgé de 21 ans au moment de l'interpellation du 11 avril 2003, faisait valoir que c'était pour des raisons sentimentales qu'il s'était rendu à Niort malgré l'interdiction qui lui en était faite (il était venu chercher son amie) et que cette raison ayant disparu, une mesure de contrôle judiciaire était suffisante ; que la cour d'appel qui n'a pas répondu à ce moyen péremptoire duquel il ressortait que la violation de l'interdiction de se rendre à Niort était sans rapport avec l'infraction poursuivie, a entaché sa décision d'un défaut de motifs et a violé les dispositions susvisées" ;

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la chambre de l'instruction, qui a répondu comme elle le devait aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie, s'est déterminée par des considérations de droit et de fait répondant aux exigences des articles 137-3, 143-1 et suivants du Code de procédure pénale ;

D'où il suit que le moyen, qui allègue à tort la violation de la présomption d'innocence, doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Farge conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président en remplacement du président empêché, Mme Agostini conseiller rapporteur, MM. Blondet, Palisse, Le Corroller conseillers de la chambre, Mmes Beaudonnet, Gailly conseillers référendaires ;

Avocat général : Mme Commaret ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 03-85460
Date de la décision : 02/12/2003
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CONTROLE JUDICIAIRE - Obligations - Obligations non respectées - Mise en détention provisoire - Prolongation (article 145-1 du Code de procédure pénale).

DETENTION PROVISOIRE - Décision de mise en détention provisoire - Matière correctionnelle - Mis en examen sous contrôle judiciaire - Inobservation volontaire de ses obligations - Prolongation de la détention provisoire (article 145-1 du Code de procédure pénale)

Le mis en examen qui se soustrait aux obligations du contrôle judiciaire peut, en application des dispositions de l'article 141-2 du Code de procédure pénale, être placé sous mandat de dépôt par le juge des libertés et de la détention, quelle que soit la durée de la peine d'emprisonnement encourue et sous réserve des dispositions de l'article 141-3 dudit Code qui n'ont trait qu'à la durée maximale cumulée des détentions. La détention peut être prolongée dans les conditions prévues par les articles 145-1 et 145-2 dudit Code, sans qu'il y ait lieu, pour le calcul de la période respectivement prévue de quatre mois ou un an à l'issue de laquelle le juge des libertés et de la détention peut ordonner cette prolongation, de tenir compte des périodes de détention accomplies antérieurement à la révocation du contrôle judiciaire. Ainsi, justifie sa décision la chambre de l'instruction qui confirme l'ordonnance d'un juge des libertés et de la détention ayant prolongé une détention provisoire ordonnée en révocation d'une mesure de contrôle judiciaire, à l'issue d'une période de quatre mois ne tenant pas compte des deux périodes de détention provisoire précédemment subies à raison des mêmes faits (1).


Références :

Code de procédure pénale 141-2, 141-3, 145-1, 145-2

Décision attaquée : Cour d'appel de Poitiers (chambre de l'instruction), 02 septembre 2003

CONFER : (1°). (1) A rapprocher : Chambre criminelle, 1991-04-15, Bulletin criminel 1991, n° 178, p. 455 (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 02 déc. 2003, pourvoi n°03-85460, Bull. crim. criminel 2003 N° 229 p. 928
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2003 N° 229 p. 928

Composition du Tribunal
Président : M. Farge, conseiller le plus ancien faisant fonction.
Avocat général : Mme Commaret.
Rapporteur ?: Mme Agostini.
Avocat(s) : la SCP Monod et Colin.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2003:03.85460
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