AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 10 juin 2003) que M. X..., étudiant en chirurgie dentaire, et soumis à ce titre à une obligation de vaccination contre l'hépatite B, a reçu les 30 octobre 1992, 29 novembre 1992 et 2 janvier 1993, trois injections vaccinales à la suite desquelles il a développé une maladie auto-immune ; qu'il a établi le 20 mai 2001 une déclaration d'accident du travail, en produisant un certificat médical du 14 mai 2001, faisant état d'un lien de causalité entre cette pathologie et la vaccination ; que la Caisse primaire centrale d'assurance maladie de Lyon (la Caisse) ayant rejeté sa demande, la cour d'appel a accueilli son recours ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la Caisse fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen, que la prétendue ignorance dans laquelle M. Gérald X... se serait trouvé jusqu'au 14 mai 2001, d'une relation de cause à effet entre la vaccination effectuée fin 1992-début 1993 et l'hépatite auto-immune développée quelques jours après la troisième injection, et mise en lumière par un bilan sanguin effectué le 28 janvier 1993, n'est pas de nature à entraîner la suspension de la prescription résultant de l'article L. 431-2-1 du Code de la sécurité sociale, qui a été violé par la cour d'appel ;
Mais attendu que l'arrêt retient que l'existence du lien de causalité entre la pathologie et la vaccination réalisée fin 1992 et début 1993 n'a été révélée a M. X... que par un certificat médical établi le 14 mai 2001 ; qu'ayant ainsi fait ressortir que, jusqu'à cette date, celui-ci avait été dans l'impossibilité d'agir, pour avoir de manière légitime et raisonnable, ignoré la naissance de son droit, la cour d'appel en a exactement déduit que, jusqu'à cet événement, le délai de prescription n'avait pas couru, et que la demande était recevable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la Caisse fait encore grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué, alors, selon le moyen :
1 ) que ne relève pas de la législation sur les accidents du travail, la pathologie présentée par un étudiant, consécutive à une vaccination obligatoire pour son inscription en faculté dentaire, un tel accident n'étant pas survenu "au cours d'enseignements dispensés en atelier ou en laboratoire ainsi que par le fait ou à l'occasion de stages effectués dans le cadre de sa scolarité ou de ses études" au sens de l'article L. 412-8,2 B du Code de la sécurité sociale, qui a été violé par la cour d'appel ;
2 ) qu'il résulte de l'article L. 3111-9 du Code de la santé publique que, sans préjudice des actions qui pourraient être exercées conformément au droit commun, la réparation d'un dommage imputable à une vaccination obligatoire pratiquée dans les conditions mentionnées au présent chapitre, est supportée par l'Etat , qui est, s'il y a lieu, subrogé dans les droits et actions de la victime contre les responsables du dommage jusqu'à concurrence de l'indemnité qu'il a payée ; que ce mode de réparation exclut la prise en charge au titre de la législation professionnelle, qui présente un caractère forfaitaire, exclusif de toute action en réparation exercée dans les termes du droit commun, d'un dommage consécutif à une vaccination obligatoire subie par un étudiant en application de l'article L. 3111-4 du Code de la santé publique ; et qu'ainsi l'arrêt a violé les articles L. 412-8-2)B du Code de la sécurité sociale et L. 3111-4 et L. 3111-9 du Code de la santé publique ;
Mais attendu, d'une part, que la législation sur les vaccinations obligatoires ne fait pas obstacle à l'action afférente à un accident du travail ;
Et attendu, d'autre part, qu'appréciant souverainement la valeur des éléments de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel a estimé que M. X... avait dû subir cette vaccination à l'occasion des stages hospitaliers qu'il était tenu d'effectuer en sa qualité d'étudiant en chirurgie dentaire et que dès lors il rapportait la preuve qui lui incombait, de ce qu'il avait été victime d'un accident du travail ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la CPAM de Lyon aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la CPAM de Lyon ; la condamne à payer à M. X... la somme de 2 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux mars deux mille cinq et signé par Mme Laumône, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.