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28/01/2004 | FRANCE | N°02-88471

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 28 janvier 2004, 02-88471


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit janvier deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller DULIN, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE et de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- LA COMMUNE DE GARGES-LES-GONESSE, partie civile,

contre l'arrêt de la

chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 2 octobre 2002, ...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt-huit janvier deux mille quatre, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller DULIN, les observations de la société civile professionnelle BORE, XAVIER et BORE et de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général MOUTON ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- LA COMMUNE DE GARGES-LES-GONESSE, partie civile,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de VERSAILLES, en date du 2 octobre 2002, qui, dans l'information suivie contre Haïm X... et Francis Y..., des chefs de prise illégale d'intérêts et détournement de fonds publics, a déclaré irrecevable sa constitution de partie civile ;

Vu l'article 575, alinéa 2, 2 , du Code de procédure pénale ;

Vu les mémoires produits en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, L. 2122-22 du Code général des collectivités territoriales (ancien article L. 122-20 du Code des communes), 591 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de la commune de Garges-lès-Gonesse ;

"aux motifs que selon l'article L. 122-20 du Code des communes, devenu l'article L. 2122-22 du Code général des collectivités territoriales, le maire peut, par délégation du conseil municipal, être chargé en tout ou partie, et pour la durée de son mandat, d'un certain nombre d'attributions, parmi lesquelles (paragraphe 16 ) celle "d'intenter au nom de la commune les actions en justice ou de défendre la commune dans les actions intentées contre elle, dans les cas définis par le conseil municipal" ; qu'il s'en déduit que si ce texte permet au maire, par délégation du conseil municipal, d'intenter, au nom de la commune, des actions en justice, ce n'est que dans les cas définis par le conseil municipal ; qu'en conséquence sauf à priver de toute portée cette exigence légale, la délibération du conseil municipal ne peut se borner à viser par référence les dispositions de l'article L. 2122-22 (16 ), ou à les reproduire servilement, sans définir les cas de délégation, ou sans indiquer expressément que cette délégation est valable pour l'ensemble du contentieux de la commune ; qu'en l'espèce, la délibération du conseil municipal de Garges-lès-Gonesse du 6 juillet 1995 s'est limitée, sur ce point, en une reproduction du texte de la loi, amputé de sa dernière proposition, texte dont le caractère général a été accentué par le choix d'un article indéfini ("les actions en justice" devenant "des actions en justice"), ce qui contribue à souligner la nécessité d'une différenciation des compétences ainsi déléguées ; que ce faisant, cette délégation n'a pas satisfait à l'impératif de précision requis par la loi ; qu'en conséquence le maire n'a pas reçu délégation valable pour se constituer partie civile, le 18 juillet 1996 devant le doyen des juges d'instruction du tribunal de Pontoise ;

"1 ) alors que le conseil municipal peut déléguer au maire de manière générale et pour toute la durée de son mandat, le droit d'ester en justice au nom de la commune ; que cette délégation de portée générale n'est soumise à aucune forme particulière ; qu'en estimant que pour être régulière une telle délégation devait mentionner expressément qu'elle était valable pour l'ensemble du contentieux de la commune, la chambre de l'instruction a ajouté au texte une condition qu'il ne contient pas et violé les textes susvisés ;

"2 ) alors qu'ainsi que le faisait valoir la commune, l'irrégularité concernant l'habilitation du maire pour agir en justice au nom de la commune peut être couverte à tout moment ; qu'en s'abstenant de rechercher en l'espèce si l'irrégularité dénoncée n'avait pas été régularisée notamment au stade de l'appel, la régularité de l'appel interjeté par la commune représentée par son maire n'ayant fait l'objet d'aucune contestation, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision au regard des textes susvisés" ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, le 18 juillet 1996, le maire de Garges-lès-Gonesse a, en qualité de représentant de ladite commune, porté plainte avec constitution de partie civile pour prise illégale d'intérêts et détournement de fonds publics ; que Haïm X..., ancien maire, et Francis Y..., son adjoint, ont été mis en examen de ces chefs ;

Attendu que ce dernier a contesté la recevabilité de la constitution de partie civile au motif que la délibération du conseil municipal du 12 juillet 1995, autorisant le maire à agir en justice, n'était pas conforme aux dispositions de l'article L. 2122-22,16 , du Code général des collectivités territoriales ;

Attendu que, pour faire droit à la demande, la chambre de l'instruction, après avoir rappelé qu'au regard des exigences de l'article précité, la délibération du conseil municipal ne peut se borner à viser ou reproduire ce texte sans définir les cas de délégation ou sans indiquer expressément que la délégation concerne l'ensemble du contentieux de la commune, relève qu'au cas d'espèce, la délibération, qui a chargé le maire "d'intenter, au nom de la commune, des actions en justice", ne répond pas à l'impératif de précision exigée par la Ioi ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors que la régularité de la délibération doit s'apprécier antérieurement au dépôt de la plainte avec constitution de partie civile, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

DECLARE IRRECEVABLE la demande faite par Francis Y... à l'encontre de la commune de Garges-lès-Gonesse, partie civile au titre de l'article 618-1 du Code de procédure pénale ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, M. Dulin conseiller rapporteur, MM. Pibouleau, Challe, Roger, Mmes Thin, Desgrange, MM. Rognon, Chanut, Mme Palisse conseillers de la chambre, Mme de la Lance, MM. Soulard, Samuel, Chaumont conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Mouton ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-88471
Date de la décision : 28/01/2004
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

1° ACTION CIVILE - Recevabilité - Collectivités territoriales - Commune - Action exercée par le maire (article L - 2 du Code général des collectivités territoriales) - Conditions - Délibération du conseil municipal - Contenu.

1° COMMUNE - Action civile - Recevabilité - Exercice par le maire - Conditions - Délibération du conseil municipal - Contenu.

1° Ne satisfait pas aux exigences de l'article L. 2122-22, 16°, du Code général des collectivités territoriales, la délibération du conseil municipal qui se borne à charger le maire d'intenter, au nom de la commune, des actions en justice, sans préciser les cas de délégation ou sans indiquer, de manière expresse, que la délégation concerne l'ensemble du contentieux de la commune. Dès lors, c'est à bon droit, qu'une chambre de l'instruction déclare irrecevable une plainte avec constitution de partie civile déposée par le maire d'une commune en vertu d'une telle délibération (1).

2° ACTION PUBLIQUE - Mise en mouvement - Partie civile - Plainte avec constitution - Maire - Délibération du conseil municipal - Régularité - Appréciation - Moment.

2° MAIRE - Pouvoirs - Plainte avec constitution de partie civile - Mise en mouvement - Action publique - Délibération du conseil municipal - Régularité - Appréciation - Moment 2° COMMUNE - Action civile - Recevabilité - Exercice par le maire - Conditions - Délibération du conseil municipal - Régularité - Appréciation - Moment 2° INSTRUCTION - Partie civile - Plainte avec constitution de partie civile - Régularité - Appréciation - Moment.

2° La régularité de la délibération du conseil municipal doit s'apprécier antérieurement au dépôt de plainte avec constitution de partie civile. Dès lors, une nouvelle délibération, intervenue postérieurement, est sans effet sur la recevabilité de la constitution de partie civile (2).


Références :

2° :
Code général des collectivités territoriales L.2122-22 16°

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (chambre de l'instruction), 02 octobre 2002

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1996-10-08, Bulletin criminel 1996, n° 348, p. 1035 (rejet et cassation partielle)

arrêt cité. CONFER : (2°). (2) Cf. Chambre criminelle, 1983-12-13, Bulletin criminel 1983, n° 338, p. 872 (cassation sans renvoi) ; Chambre criminelle, 1987-02-18, Bulletin criminel 1987, n° 80, p. 218 (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 28 jan. 2004, pourvoi n°02-88471, Bull. crim. criminel 2004 N° 19 p. 68
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2004 N° 19 p. 68

Composition du Tribunal
Président : M. Cotte
Avocat général : M. Mouton.
Rapporteur ?: M. Dulin.
Avocat(s) : la SCP Boré, Xavier et Boré, la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2004:02.88471
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