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15/10/2002 | FRANCE | N°02-82212

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 15 octobre 2002, 02-82212


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quinze octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI, les observations de la société civile professionnelle BOUZIDI, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Franck,

- La SOCIETE KIABI,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 12 février 2002,

qui, pour ventes en soldes en dehors des périodes autorisées, a condamné le premier à 1 500 e...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le quinze octobre deux mille deux, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire AGOSTINI, les observations de la société civile professionnelle BOUZIDI, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAUNAY ;

Statuant sur le pourvoi formé par :

- X... Franck,

- La SOCIETE KIABI,

contre l'arrêt de la cour d'appel de PAU, chambre correctionnelle, en date du 12 février 2002, qui, pour ventes en soldes en dehors des périodes autorisées, a condamné le premier à 1 500 euros d'amende dont 750 euros avec sursis, la seconde à 7 500 euros d'amende et à la publication de la décision ;

Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 310-5 et suivants, L. 310-3 du Code de commerce, 11 du décret 96-1097 du 16 décembre 1996, 388 et suivants, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a condamné les demandeurs à des peines d'amende et la société Kiabi à supporter les frais de la publication par extrait du jugement dans la Dépêche du Midi, édition des Hautes-Pyrénées ;

"aux motifs que les dates visées dans la citation correspondent aux dates des contrôles effectués par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et sont révélées en tant que périodes de soldes (destockage) et non de promotions comme la société Kiabi le prétend ; que les textes visés dans la citation concernent l'infraction consistant à réaliser des soldes en dehors des périodes prévues, soit deux périodes par année civile, dont les dates sont fixées par le préfet ; qu'ainsi, la prévention est clairement définie ;

"alors, d'une part, qu'il était reproché aux demandeurs d'avoir maintenu les 28, 29 avril et 7 juin 1999 sept articles à prix réduit au delà d'une période de promotion et en dehors de la période de solde ; qu'en retenant que les textes visés concernent l'infraction consistant à réaliser des soldes en dehors des périodes prévues, soit deux par année civile dont les dates sont fixées par le préfet, que la prévention est clairement définie et que les dates visées sont des dates de constatation des infractions par le contrôleur, étant reproché non des opérations de promotion mais des opérations de solde cependant que la prévention reprochait seulement le maintien de sept articles à prix réduit au delà de la période de promotion dont la validité était de ce fait retenue, période s'étendant du 21 avril au 30 avril 1999, la cour d'appel, qui a dénaturé cet acte, a violé les textes susvisés ;

"alors, d'autre part, qu'il ressort de la citation qu'il était reproché aux demandeurs d'avoir maintenu sept articles à prix réduit les 28, 29 et 7 juin 1999, au delà d'une période de promotion et en dehors de la période de soldes ; qu'il s'en évinçait, comme le faisait valoir les demandeurs, la validité reconnue de la période qui s'étendait du 21 au 30 avril, ce qui excluait le maintien de prix réduit au delà de cette période, s'agissant des faits relevés les 28 et 29 avril ; qu'en retenant que la prévention est clairement définie et que les dates données sont celles des contrôles effectués, et sont relevées en tant que période de soldes et non de promotion, ce qui n'est absolument pas ce qui est visé à la prévention, la cour d'appel a violé les textes susvisés" ;

Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles L. 310-5 et suivants, L. 310-3 du Code de commerce, 11 du décret 96-1097 du 16 décembre 1996, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motif et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a condamné les demandeurs à des peines d'amende et la société Kiabi à supporter les frais de la publication par extrait du jugement dans la Dépêche du Midi, édition des Hautes-Pyrénées ;

"aux motifs que les dates des 28 et 29 avril 1999 (outre celle du 7 juin) correspondent aux dates de constatations des infractions par le contrôleur car il est reproché d'avoir effectué également les 28 et 29 avril 1999 des opérations de soldes et d'autres promotions sur un certain nombre d'articles ; que la Cour de Cassation, dans un arrêt du 26 avril 2000, a précisé que si la loi de 1966 a abrogé celle de 1906, les faits commis en dehors des périodes de soldes fixées par arrêté préfectoral, n'en demeurent pas moins punissables, dès lors qu'ils entrent dans les prescriptions tant à la fois de l'article 28 de la loi de 1996 que des trois derniers alinéas de l'article 1er de la loi de 1906 ; que la possibilité de considérer que des opérations présentées comme des promotions ordinaires sont en fait des soldes, résulte de trois conditions posées par la loi soit :

présence de publicité, annonce d'écoulement accéléré de stocks, réductions de prix, étant, en outre, parfois précisé que l'opération s'applique à un stock prédéterminé, intangible et non renouvelable (cass. 19 janvier 1993) ; que, comme indiqué par la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes sur le maintien de sept articles à prix réduit au delà de la période de promotion : il est entendu et mentionné dans le procès-verbal que seuls trois articles présents en rayon le 7 juin 1999 avaient été maintenus à prix réduit en conservant le double étiquetage ; le chiffre 7, ainsi qu'il est indiqué par les enquêteurs, résulte de l'état informatique des stocks consultés par Franck X... ; le fait de laisser perdurer le double étiquetage témoigne de la volonté du commerçant d'écouler rapidement son stock : en effet, le maintien du prix réduit aurait pu être réalisé en affichant le prix net sans annonce de réduction, ce qui est le cas lorsqu'une vraie promotion est terminée... 24 articles présents le 29 avril 1999 étaient absents le 7 juin 1999, ce qui montre à l'évidence qu'ils ont été vendus et qu'il n'y a pas eu de réapprovisionnement ; le niveau de rabais est élevé (entre 20 et 40 %)... les articles concernés n'ont pas fait l'objet d'un réapprovisionnement ; l'application de ces rabais n'avait donc pas d'autre finalité que l'écoulement accéléré du stock ; c'est d'ailleurs ainsi que l'a compris le directeur local Franck X... en faisant paraître une publicité annonçant l'opération comme un destockage ;

que le fait de procéder à des soldes en dehors des périodes autorisées constitue un délit ; la responsabilité pénale de la société Kiabi pour le compte de laquelle les ventes sont effectuées peut être retenue dans la mesure où l'opération publicitaire initiale se révèle être une opération de soldes déguisée ; Franck X... qui qualifie lui-même l'opération en question de destockage se devait de respecter la réglementation des soldes ainsi qu'il résulte de la délégation de pouvoir qu'il a reçu ; que la publicité opérée par Franck X... dans l'hebdo Bigorre du 20 au 26 avril 1999 mentionne "opération destockage" ce qui ne fait que révéler la finalité exacte de cette opération, réalisée dans tous les magasins Kiabi, à savoir l'écoulement d'un stock sans réapprovisionnement (opération décidée par le siège) ; que Franck X... a voulu relayer cette opération nationale par une publicité locale de sa propre initiative, sans consultation préalable, quant à la rédaction de cette annonce, des services centraux de sa société ; que c'est la finalité réelle de l'opération qui est prise en compte, comme constitutive du délit, la rédaction personnelle de Franck X... ne faisait que "lever le masque" par des termes considérés comme une maladresse par la société Kiabi (étant précisé que les rabais annoncés étaient réels) ; que, de plus, l'opération concernait des articles de printemps alors que la collection d'été devait rapidement prendre le relais ; que la période de soldes d'été 1999 n'était pas encore fixée par arrêté préfectoral, ce dernier étant intervenu le 19 mai 1999 fixant la période de soldes d'été du vendredi 2 juillet 1999 au jeudi 12 août 1999 ; que, lors de son audition, M. Y... a déclaré que la "parution de la publicité a été conseillée par la centrale" même si les termes de la rédaction auraient pu susciter de cette dernière des réticences (ce qui est également confirmé par Franck X...) ; que M. Z... mentionne dans sa déclaration :

"par saison, nous proposons à la vente près de 5 000 modèles dans nos divers magasins avec une quantité d'articles en stock de 60 000 pièces environ, et en permanence ; qu'il peut arriver qu'une légère erreur - nul n'est infaillible - puisse être relevée lors d'un contrôle ; à mes yeux, ce constat ne constitue pas un acte de concurrence déloyale et de faute grave" ; que Franck X... a déclaré "en ce qui concerne les prix, ceux-ci me sont imposés par la Direction générale et, pour ma part, seul le fait d'avoir utilisé le terme de destockage peut être retenu à mon encontre, je reconnais l'infraction" étant rappelé, cependant, que ce n'est pas la rédaction de la publicité mais la réalité de l'opération, soldes en dehors des périodes autorisées, qui est poursuivie ;

"alors, d'une part, que sont considérés comme soldes les ventes accompagnées ou précédées de publicité et annoncées comme tendant, par une réduction de prix, à l'écoulement accéléré de marchandises en stock ; que c'est donc la publicité qui doit contenir ces éléments d'information ; qu'en retenant que l'infraction est constituée à la date du 7 juin 1999 tout en relevant que la publicité a porté sur la période du 21 au 30 avril 1999, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses propres constatations, dont il ressortait que les éléments constitutifs de l'infraction n'étaient pas réunis et, partant, elle a violé les textes susvisés ;

"alors, d'autre part, que sont considérés comme solde les ventes accompagnées ou précédées de publicité et annoncées comme tendant, par une réduction de prix, à l'écoulement accéléré de marchandises en stock ; que c'est la publicité seule qui doit contenir ces éléments d'information ; qu'en retenant que les 28 et 29 avril 1999, des opérations de solde ont été réalisées et non des promotions sur un certain nombre d'articles, motif pris que 7 articles ont été maintenus à prix réduit au delà de la période de promotion annoncée, que seuls trois articles présents en rayon le 7 juin 1999 avaient été maintenus à prix réduit en conservant le double étiquetage, la Direction générale de la concurrence expliquant que le chiffre 7 indiqué par les enquêteurs résulte de l'état informatique des stocks, qu'il ressort des procès-verbaux que le fait de laisser perdurer le double étiquetage témoigne de la volonté du commerçant d'écouler rapidement son stock, que le maintien du prix réduit aurait pu être réalisé en affichant le prix net sans annonce de réduction, ce qui est le cas lorsqu'une vraie promotion est terminée, que 24 articles présents le 29 avril étaient absents le 7 juin 1999, ce qui montre à l'évidence qu'ils ont été vendus et qu'il n'y a pas eu de réapprovisionnement, puis relevé que la publicité opérée par Franck X... mentionne "opération destockage" ce qui ne fait que révéler la finalité exacte de l'opération réalisée dans tous les magasins Kiabi, à savoir l'écoulement d'un stock sans réapprovisionnement, que c'est la finalité réelle de l'opération qui est prise en compte, que l'opération concernait les articles de printemps alors que la collection d'été devait rapidement prendre le relais, sans relever aucun fait de publicité imputable à la société Kiabi, qui faisait valoir que la publicité nationale qu'elle avait fait réalisée ne faisait aucunement état de solde ou de destockage, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors, de troisième part, qu'en retenant que la responsabilité pénale de la société Kiabi pour le compte de laquelle les ventes sont effectuées doit être retenue dans la mesure où l'opération publicitaire initiale se révèle être une opération de solde déguisée, sans constater qu'une publicité avait été faite par la société demanderesse, accompagnant ou précédant l'opération de vente annoncée comme tendant à l'écoulement d'un stock, ni que la société demanderesse aurait donné des instructions à Franck X... en vue de la confection de la publicité réalisée par ce dernier personnellement, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

"alors, de quatrième part, qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni du jugement que les articles litigieux constituaient un stock prédéterminé et non renouvelable, la seule indication selon laquelle il s'agirait d'articles de printemps étant insuffisante, de même que les constatations selon lesquelles le 7 juin, sept articles avaient été maintenus à prix réduit, que vingt-quatre articles présents le 21 avril étaient absents le 7 juin, de tels faits ne permettant pas de caractériser l'existence d'un stock prédéterminé et non renouvelable ; qu'en se fondant sur de tels faits, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;

"alors, de cinquième part, sont considérés comme soldes les ventes accompagnées ou précédées de publicité et annoncées comme tendant, par une réduction de prix, à l'écoulement accéléré de marchandises, que ces éléments doivent être révélés par la publicité ; qu'en se contentant de relever les termes de la citation, c'est-à-dire, le maintien du prix réduit au delà d'une période de promotion et en dehors de la période des soldes pour retenir la qualification de solde, sans constater l'existence d'un stock prédéterminé et non renouvelable, les juges du fond n'ont pas légalement justifié leur décision au regard des textes susvisés ;

"alors, enfin, que les demandeurs faisaient valoir qu'il résultait de la citation que la publicité concernant l'opération ayant commencé le 21 avril 1998 n'était pas visée dans la prévention, seules les dates des 28 et 29 avril étant retenues, étant isolée de la période publicitaire, les demandeurs faisant valoir que le stock avait d'ailleurs été renouvelé, et qu'il ne résultait d'aucun élément des articles de printemps objet de la vente litigieuse et que la collection d'été devait rapidement prendre le relais ; qu'en se prononçant par de tels motifs péremptoires sans relever de circonstances de fait permettant de les vérifier, les juges du fond ont violé les textes susvisés" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société Kiabi a organisé une opération de vente à prix réduits dans tous ses magasins du 21 au 30 avril 1999 ; qu'elle est poursuivie, ainsi que Franck X..., responsable du magasin d'Ibos, pour avoir fait réaliser des soldes en dehors des périodes autorisées, délit prévu et réprimé par les articles L. 310-3, L. 310-5 et L. 310-6 du Code de commerce ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables de l'infraction, les juges d'appel relèvent que l'opération nationale, réalisée en dehors de la période des soldes dans tous les magasins Kiabi, décidée par le siège de la société, offrait des rabais élevés sur des articles de printemps alors que la collection d'été devait rapidement prendre le relais ; que ces articles n'ont pas fait l'objet de réapprovisionnement ; que certains ont continué, après la fin de l'opération, à porter un double étiquetage ; que les juges ajoutent que la publicité locale, qui mentionne une "opération destockage", faite pour relayer la publicité nationale, a été réalisée à l'initiative de Franck X..., mais que sa parution a été conseillée par la centrale et que son libellé révèle la finalité exacte de l'opération commerciale qui était l'écoulement d'un stock sans réapprovisionnement d'articles ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations procédant de son appréciation souveraine des faits et circonstances de la cause, la cour d'appel, qui n'a pas méconnu les termes de sa saisine, a caractérisé en tous ses éléments le délit poursuivi et justifié son imputation aux deux prévenus ;

D'où il suit que les moyens doivent être écartés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Cotte président, Mme Agostini conseiller rapporteur, MM. Roman, Blondet, Palisse, Le Corroller conseillers de la chambre, Mmes Beaudonnet, Gailly, MM. Valat, Lemoine, Mmes Menotti, Salmeron conseillers référendaires ;

Avocat général : M. Launay ;

Greffier de chambre : M. Souchon ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 02-82212
Date de la décision : 15/10/2002
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Pau, chambre correctionnelle, 12 février 2002


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 15 oct. 2002, pourvoi n°02-82212


Composition du Tribunal
Président : Président : M. COTTE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:02.82212
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