AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° D 02-60.225 et X 02-60.380 ;
Sur le moyen unique, commun aux deux pourvois :
Attendu que, selon le jugement attaqué (tribunal d'instance de Toulouse, 28 février 2002), les mandats des membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) de la société Sanofi venaient à expiration le 3 juin 2001 ; qu'après en avoir fait l'annonce au comité d'entreprise du 24 avril 2001, l'employeur a convoqué le collège désignatif le 29 mai 2001 ;
Attendu que la société Sanofi, Mmes X..., Y..., MM. Z...
A... font grief au jugement attaqué d'avoir annulé la désignation des membres du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) à laquelle a procédé le collège désignatif réuni le 29 mai 2001, alors, selon le moyen :
1 / qu'en prévoyant qu'en cas de renouvellement du CHSCT, le collège désignatif se réunit dans un délai de quinze jours à compter des dates d'expiration du mandat, l'article R. 236-5 du Code du travail fixe simplement le délai maximal dans lequel doit intervenir ladite réunion afin d'éviter toute vacance prolongée des mandats de membres du CHSCT ; que ce texte n'a pas pour effet d'interdire la tenue d'une réunion antérieurement à l'expiration des mandats en cours, sous réserve en ce cas d'en reporter les effets à la date d'expiration des mandats des membres sortants ; que le juge d'instance tient néanmoins pour irrégulière la réunion du collège désignatif en date du 29 mai 2001 du seul fait qu'elle est intervenue avant le 3 juin 2001, date d'expiration des mandats en cours des membres du CHSCT ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait seulement de reporter le cas échéant la date d'entrée en fonction des nouveaux membres du comité au-delà du 3 juin 2001, le juge d'instance, qui a prononcé l'annulation de la désignation, a violé les articles L. 236-5, R. 236-5 et R. 236-7 du Code du travail ;
2 / qu'une irrégularité dans le déroulement d'une élection ne peut entraîner son annulation que si elle a eu pour effet de fausser le résultat du scrutin ; qu'en l'espèce, à supposer que la réunion du collège désignatif en date du 29 mai 2001 ait été prématurée, cette circonstance ne pouvait, en l'absence de toute incidence sur les résultats du scrutin, justifier le prononcé de l'annulation de la désignation ; qu'en estimant néanmoins que la tenue de la réunion avant l'expiration des mandats en cours imposait à elle seule d'annuler la désignation intervenue à cette date, et ce quel que soit le résultat du vote, le jugement a violé les articles L. 236-5, R. 236-5 et R. 236-7 du code du travail ;
3 / qu'en tout état de cause, la seule circonstance que la réunion du collège désignatif ait eu lieu le 29 mai 2001 et non après le 3 juin 2001 n'a pas pour effet de fausser la sincérité des résultats ; que la société faisait valoir, à cet égard dans ses conclusions, que les absences à cette date de deux représentants du personnel CGT, dont l'un était en congés payés, l'autre en congé maladie, étaient dénuées de toute incidence sur le vote dès lors que le premier était le suppléant d'un élu lui-même présent lors du vote et que l'autre avait un suppléant présent à cette date ; que seul le départ inopiné des représentants de la CGT en début de réunion du collège désignatif du 29 mai 2001 , réunion dont la date était connue des représentants du personnel depuis la convocation à la réunion du comité d'entreprise du 24 avril 2001, avait empêché ces élus de prendre part à la désignation ; qu'en annulant néanmoins le vote intervenu le 29 mai 2001, comme ayant été préjudiciable à la CGT, sans caractériser l'existence d'un quelconque lien entre cet éventuel préjudice et la tenue de la réunion du collège désignatif à la date du 29 mai 2001, le tribunal d'instance n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles L. 236-5, R. 236-5 et R. 236-7 du Code du travail ;
4 / qu'il résulte de l'article L. 236-5 du Code du travail que le juge d'instance a compétence pour connaître de toute contestation relative à la délégation des membres du CHSCT ; que l'absence de signature d'un protocole préélectoral préalable à la désignation des membres n'empêche pas les parties de s'adresser à tout moment au juge de l'élection pour trancher l'éventuel désaccord qui les oppose quant aux conditions de la désignation ; qu'en retenant néanmoins que l'absence de conclusion d'un accord préélectoral rendait impossible la saisine du juge d'instance et aurait ainsi pour effet de conférer un caractère d'ordre public absolu à la date de réunion du collège désignatif arrêtée par l'employeur, le jugement a violé les articles L. 236-5, R. 236-5 et R. 236-7 du Code du travail ;
Mais attendu que les membres de la délégation du personnel au CHSCT sont investis de leurs prérogatives dès la proclamation des résultats et jusqu'à expiration effective de leurs mandats ; qu'il en résulte que tout renouvellement du CHSCT ne peut intervenir qu'à compter du terme de ces mandats ; que le tribunal d'instance, qui a constaté que l'employeur avait organisé le vote par le collège désignatif antérieurement à leur expiration, a, par ce seul motif, légalement justifié sa décision ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande des sociétés Sanofi-Synthelabo et Sanofi Wintroph industrie ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze janvier deux mille quatre.