AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 175 du décret du 27 novembre 1991 ;
Attendu, selon ce texte, que les réclamations concernant le montant des honoraires sont soumises au bâtonnier par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou remise contre récépissé ;
Attendu, selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel, que, courant 1997, Mme X... a confié à Mme Y... la défense de ses intérêts dans un litige porté en justice ; qu'elle a acquitté des sommes importantes au titre des honoraires d'avocats ; que le 15 janvier 2001, elle a adressé au Bâtonnier de l'Ordre des avocats au barreau de Rouen une lettre simple dans laquelle elle exprimait des réserves et dans lequel elle s'interrogeait sur le bien-fondé des honoraires réclamés ; que le 23 janvier 2001, elle a adressé au Bâtonnier un courrier dans lequel elle déclarait retirer sa plainte à l'encontre de Mme Y... ; que lors de son audition par le Bâtonnier en date du 7 février 2001, elle a déclaré maintenir sa contestation envers Mme Y... ;
Attendu que pour déclarer recevable la procédure de taxation engagée par Mme X..., l'ordonnance énonce que la formalité de la lettre recommandée qui n'a qu'un caractère probatoire est sans incidence sur la recevabilité ou la validité de la réclamation ; que dans la lettre considérée du 15 janvier 2001, Mme X... demandait certes des éclaircissements sur la procédure en cours mais mentionnait également l'importance des frais et honoraires versés, l'existence de prélèvements bancaires et la signature d'une convention d'honoraires écrite sous la pression de Mme Y... -que ces dires de la part d'un non-professionnel du droit doivent s'analyser en une contestation d'honoraires ; que c'est en ce sens que le Bâtonnier, dès le 18 janvier 2001, a accusé réception de la demande de Mme X... et avisé les administrateurs du cabinet de Mme Y... - que si Mme X... a par la suite les 23 janvier puis 26 janvier 2001 écrit au Bâtonnier qu'elle voulait se désister de sa contestation rien n'interdit au Bâtonnier d'entendre néanmoins les requérants dès lors qu'il est représentant de l'Ordre, garant de la moralité des membres du Barreau - que l'article 189 du décret du 27 novembre 1991 dispose que le bâtonnier soit de sa propre initiative soit à la demande du Procureur général ou sur plainte de toute personne intéressée procède à une enquête sur le comportement de l'avocat mis en cause - que c'est en ce sens que le Bâtonnier, le 30 janvier 2001, a de nouveau informé les administrateurs du cabinet de Mme Y... des courriers de Mme X... qui n'étaient pas sans susciter quelques interrogations et a procédé à l'audition de Mme X... qui a alors maintenu sa contestation des honoraires versés à Mme Y...
-, que l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971 indique que le Bâtonnier instruit toute réclamation formée par des tiers ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la lettre du 15 janvier 2001 ne satisfaisait à aucune des exigences du texte susvisé, le premier président a violé ce texte ;
Et vu l'article 627 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu qu'il y a lieu de mettre fin au litige en appliquant la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 15 mai 2002, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Rouen ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
DECLARE irrecevable la demande de Mme X... ;
Condamne Mme X... aux dépens exposés tant devant les juges du fond que devant la Cour de cassation ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de Mme Y... ;
Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept mars deux mille cinq.