Vu le recours, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel de Marseille le 5 février 2001 sous le n° 01MA00141, présenté pour le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
Le Ministre demande à la Cour :
1°/ d'annuler le jugement n° 95-3484/96-2919 en date du 28 juin 2000 par lequel le Tribunal administratif de Marseille a déchargé Mme X de l'obligation de payer une somme de 87.163, 73 F notifiée par deux commandements en date du 11 décembre 1995 relatifs à des cotisations d'impôt sur le revenu dues par M. Y et afférentes aux années 1972, 1973, 1974, 1975 et 1978 ;
Classement CNIJ : 19-01-05-02-01
C+
2°/ de la rétablir dans l'obligation de payer ladite somme ;
Le Ministre soutient :
- que le tribunal administratif a méconnu les dispositions de l'article 1685-2 du code général des impôts en refusant de tenir compte du caractère putatif, à l'égard des tiers, du mariage de Mme X annulé par arrêt du 6 septembre 1988 de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence, selon le raisonnement posé par le jugement du TGI de Marseille le 6 juin 1995, confirmé par arrêt de la Cour d'appel d'Aix en Provence le 30 octobre 1996 ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré au greffe le 30 avril 2001, par lequel Mme X Shahla, demeurant ..., conclut au rejet du recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie pour tardiveté ;
Vu le mémoire complémentaire en défense, enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel le 28 mai 2001, par lequel Mme X Shahla confirme ses précédentes écritures par le même moyen et en outre par les moyens que la Cour d'appel d'Aix en Provence, par arrêt du 6 septembre 1988, a précisé que le mariage annulé ne sera putatif à l'égard d'aucune des deux parties, qu'elle n'a jamais eu la qualité d'épouse de M. Y et ne peut être tenue pour responsable solidaire des impositions de ce dernier ; que par l'arrêt du 30 octobre 1996, la Cour d'appel d'Aix en Provence a décliné sa compétence ; qu'elle n'a perçu aucun revenu pour la période de 1972 à 1978, les déclarations de revenus de M. Y n'ayant été signées que par lui ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts ensemble le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 novembre 2003 :
- le rapport de M. DUCHON-DORIS, président assesseur ;
- les observations de Mme X Shahla ;
- et les conclusions de M. BEDIER, premier conseiller ;
Sur la recevabilité du recours du Ministre :
Considérant qu'aux termes de l'article R.811-2 du code de justice administrative : Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R.751-3 et R.751-4 ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué en date du 28 juin 2000 a été notifié au trésorier-payeur général des Bouches-du-Rhône le 20 novembre 2000 ; qu'en application des dispositions précitées de l'article R.200-18 du livre des procédures fiscales, le ministre disposait dès lors d'un délai franc de deux mois expirant, eu égard à la circonstance que le 21 janvier 2001 était un dimanche, le 22 janvier 2001 ; que le recours du ministre a été enregistré au greffe de la Cour administrative d'appel par télécopie le 22 janvier 2001 ; que par suite, Mme X n'est pas fondée à soutenir que le recours du ministre doit être rejeté pour tardiveté ;
Sur le fond du litige :
Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 1685 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années en litige : chacun des époux, lorsqu'ils vivent sous le même toit, est solidairement responsable des impositions assises au nom de son conjoint au titre de l'impôt sur le revenu ;
Considérant que pour décharger Mme X de l'obligation de payer la somme de 87.163, 73 F notifiée par deux commandements en date du 11 décembre 1995 relatifs à des cotisations d'impôt sur le revenu dues par M. Y au titre des années 1972, 1973, 1974, 1975 et 1978, le Tribunal administratif de Marseille a relevé à titre principal que par un arrêt devenu définitif en date du 6 septembre 1988, la Cour d'appel d'Aix-en-Provence avait prononcé l'annulation avec effet rétroactif du mariage de Mme X et de M. Y ;
Considérant toutefois qu'aux termes de l'article 201 du code civil, le mariage qui a été déclaré nul produit néanmoins ses effets à l'égard des époux lorsqu'il a été contracté de bonne foi. Si la bonne foi n'existe que de la part de l'un des époux, le mariage ne produit ses effets qu'en faveur de cet époux ; que par arrêt en date du 6 septembre 1988 la Cour d'appel d'Aix en Provence a accordé le bénéfice de la putativité aux enfants de Mme. X et de M. Y et l'a expressément refusé à Mme X ; que par jugement en date du 6 juin 1995, confirmé sur ce point par l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence en date du 30 octobre 1996, le Tribunal de grande instance de Marseille a considéré que la mauvaise foi de Mme X et de M. Y excluait la putativité et permettait aux tiers trompés par l'apparence d'invoquer en leur faveur la putativité du mariage annulé ; qu'il en a déduit que c'était à juste titre que les trésoriers et receveurs demandaient qu'il soit fait application de l'article 1685 du code général des impôts ; qu'il résulte de ce qui précède que l'annulation du mariage de Mme X et de M. Y ne faisait pas obstacle, eu égard à la mauvaise foi, reconnue par le juge civil en ce qui concerne les effets du mariage de la requérante, à ce que l'administration invoque les dispositions de l'article 1685 du code général des impôts ; que par suite, l'administration est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont prononcé pour ce motif la décharge de l'obligation de payer contestée ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour administrative d'appel, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par Mme X à l'appui de sa demande en décharge ;
Considérant que Mme X soutient que l'action en recouvrement relatif aux impôts sur le revenu des années 1972 à 1978 est atteinte par la prescription dès lors qu'aucun acte interruptif de prescription ne lui a été notifié préalablement aux commandements à payer contestés en date du 11 décembre 1995 ; que l'administration ne développe sur ce point aucune argumentation ; qu'il y a lieu par suite de faire droit à la demande en décharge de Mme X ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Marseille a déchargé Mme X de l'obligation de payer la somme de 87.163, 73F notifiée par commandements de payer en date du 11 décembre 1995 ;
Par ces motifs,
D E C I D E :
Article 1er : Le recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est rejeté.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme X Shahla et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.
Délibéré à l'issue de l'audience du 10 novembre 2003, où siégeaient :
M. BERNAULT, président de chambre,
M. DUCHON-DORIS, président assesseur,
M. DUBOIS, premier conseiller,
assistés de Mme GIORDANO, greffier ;
Prononcé à Marseille, en audience publique le 25 novembre 2003.
Le président, Le rapporteur,
Signé Signé
François BERNAULT Jean-Christophe DUCHON-DORIS
Le greffier,
Signé
Danièle GIORDANO
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
Le greffier,
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N° 01MA00141