AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte aux demandeurs au pourvoi principal du désistement partiel de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. Yves X..., M. Franz Johan X... et M. Marten Luis Alonso X... ;
Sur le premier moyen, pris en ses trois branches, des pourvois principal et provoqué, dont les termes sont identiques :
Attendu que les consorts Y... de Z... font grief à l'arrêt attaqué (Paris, 21 décembre 2000) de leur avoir interdit, sous astreinte, d'utiliser le nom "de Bourbon", alors, selon le moyen :
1 / qu'en énonçant que la recevabilité de l'action supposait simplement le port du nom de la part du demandeur, bien que l'intérêt à agir implique en outre un risque de confusion, les juges du fond ont violé l'article 31 du nouveau Code de procédure civile, ensemble les règles régissant la recevabilité de l'action en contestation du nom ;
2 / que faute d'avoir recherché si les demandeurs portant le nom "de Bourbon de Parme", il existait un risque de confusion, les juges du fond ont, en tout état de cause, privé leur décision de base légale au regard des mêmes texte et règles ;
3 / que faute d'avoir recherché si les demandeurs jusitifiaient d'un risque de confusion dans la mesure où le nom "de Bourbon" était apposé au nom de Y... de Z..., les juges du fond ont, de nouveau, privé leur décision de base légale au regard des mêmes texte et règles ;
Mais attendu que la cour d'appel a relevé que le patronyme des défendeurs au pourvoi est "de Bourbon" et que A..., Marie-Hélène, Carlos et Manoel Y... de Z... se présentent respectivement comme A... de Bourbon ou Prince de Bourbon, Princesse Marie-Hélène de Bourbon, Carlos et Manoel de Bourbon, de sorte que le risque de confusion est patent ; qu'ainsi, le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses trois branches, des deux pourvois qui sont identiques :
Attendu que les consorts Y... de Z... reprochent encore à l'arrêt attaqué de leur avoir interdit d'utiliser le nom "de Bourbon", alors, selon le moyen :
1 / que, dans leurs conclusions d'appel (conclusions signifiées le 17 octobre 2000), ils faisaient valoir que deux actes de notoriété avaient été établis les 1er et 5 avril 1977 et le 29 mars 1995, qui constataient leur possession d'état de descendants des Bourbon d'Espagne ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur les effets de cet acte de notoriété, s'agissant de leur filiation, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 311-3 du Code civil ;
2 / que la possession prolongée d'un nom peut en permettre l'acquisition dès lors que la possession n'a pas été déloyale ; qu'en s'abstenant de rechercher si la possession du nom de Bourbon par les consorts Y... de Z... était loyale, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de la règle permettant l'acquisition du nom par possession ;
3 / qu'en exigeant que la possession ne soit pas contestée alors qu'il suffit qu'elle soit suffisamment longue, loyale et publique, les juges du fond, qui ont ajouté aux conditions du droit positif, ont violé la même règle ;
Mais attendu que c'est dans les limites de son pouvoir souverain d'appréciation et sans violer la règle visée au moyen que la cour d'appel a décidé que les consorts Y... de Z... ne justifiaient pas avoir acquis le droit au nom par la possession, celle-ci ayant été très brève puisque ne remontant qu'au début des années 1970, et rapidement contestée par A... de Bourbon de Parme ; qu'ainsi, la décision attaquée échappe aux critiques du moyen ;
Sur les troisième, quatrième et cinquième moyens réunis, le quatrième, pris en ses deux branches, des deux pourvois :
Attendu que les consorts Y... de Z... font grief à l'arrêt attaqué de leur avoir fait interdiction de porter le titre de "Prince de Bourbon", alors, selon les moyens :
1 / que, faute d'avoir recherché, avant d'admettre la recevabilité de l'action, si MM. A... et B... de Bourbon de Parme appartenaient à la famille autorisée à porter le titre espagnol de Prince de Bourbon, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 31 du nouveau Code de procédure civile et des règles régissant la recevabilité des actions relatives aux usages des titres nobiliaires ;
2 / que, dans le cadre d'une contestation portant sur le port d'un titre étranger, les juges du fond ne peuvent se contenter d'énoncer, pour faire droit à l'action, que la partie qui fait usage du titre n'a pas fait l'objet d'une autorisation du président de la République en application du décret des 5-12 mars 1859 ; qu'il leur appartient en effet de se prononcer sur les justifications invoquées par la partie qui porte le titre, indépendamment du point de savoir si elle a obtenu ou non une autorisation du président de la République ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé le décret des 5-12 mars 1859, ensemble les règles régissant les actions en contestation des titres de noblesse et le port des titres étrangers ;
3 / qu'ayant constaté que le titre de "Prince de Bourbon" était un titre espagnol, les juges du fond ne pouvaient statuer comme ils l'ont fait sans rechercher si les lettres patentes du duc d'Anjou et de Ségovie, émises le 3 avril 1968, les autorisaient ou non à porter le titre de "Prince de Bourbon" ; que faute de s'être expliqués sur ce point, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des mêmes règles ;
4 / qu'à supposer que le titre étranger de "Prince de Bourbon" ne puisse être invoqué devant les juridictions françaises que sur présentation d'une autorisation du président de la République, de toute façon, MM. A... et B... de Bourbon de Parme ne pouvaient eux-mêmes se prévaloir du titre espagnol de "Prince de Bourbon" pour faire déclarer leur action recevable qu'en justifiant préalablement d'une autorisation du président de la République ; que faute de constater que tel a été le cas, les juges du fond ont violé le décret de 1859, ensemble les règles régissant la recevabilité desdites actions ;
Mais attendu que la cour d'appel n'a pas tranché la question de la nationalité du titre revendiqué par les consorts Y... de Z... ;
que, pour déclarer l'action recevable, elle a relevé que A... de Bourbon, né en France, portait le titre litigieux à l'état civil et que tous les membres de la famille titrée qui n'ont pas droit au titre, mais dont le nom est honoré par lui, ont un intérêt moral à en faire cesser l'usurpation ;
que, sur le fond, elle s'est bornée à constater que les consorts Y... de Z... ne justifiaient ni d'une investiture par une autorité publique étrangère, ni d'une autorisation du Président de la République à laquelle, par application du décret des 5 et 12 mars 1859, est subordonné le port en France par un Français d'un titre conféré par un souverain étranger ;
d'où il suit que les moyens manquent en fait ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois principal et provoqué ;
Condamne les consorts Y... de Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente septembre deux mille trois.