La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

31/01/2002 | FRANCE | N°00-13010

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 31 janvier 2002, 00-13010


Attendu que l'arrêt attaqué a condamné le Syndicat mixte des transports en commun de l'agglomération caennaise à rembourser à l'association Croix-Rouge française les sommes payées par celle-ci depuis 1993 au titre du versement de transport sur les rémunérations des salariés qu'elle emploie au sein du conseil départemental, du comité de Caen, de deux centres de soins, d'un établissement d'accueil temporaire de personnes âgées, et du centre Santé Croix-Rouge, chargé de l'hospitalisation à domicile ;

Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu que

le syndicat des transports en commun fait grief à la cour d'appel d'avoir stat...

Attendu que l'arrêt attaqué a condamné le Syndicat mixte des transports en commun de l'agglomération caennaise à rembourser à l'association Croix-Rouge française les sommes payées par celle-ci depuis 1993 au titre du versement de transport sur les rémunérations des salariés qu'elle emploie au sein du conseil départemental, du comité de Caen, de deux centres de soins, d'un établissement d'accueil temporaire de personnes âgées, et du centre Santé Croix-Rouge, chargé de l'hospitalisation à domicile ;

Sur le premier moyen, pris en ses quatre branches :

Attendu que le syndicat des transports en commun fait grief à la cour d'appel d'avoir statué comme il l'a fait quant aux versements effectués au titre des deux centres de soins, alors, selon le moyen :

1° que faute de s'être expliqués sur les modalités de gestion des établissements et d'avoir recherché s'ils ne développaient pas une activité dans les mêmes conditions que les autres établissements ayant des missions identiques ou similaires, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 2333-64 du Code général des collectivités territoriales ;

2° qu'à supposer même que certains soins ou certaines actions soient gratuits ou ne donnent pas lieu à une contrepartie équivalente à leur coût, de toute façon, les juges du fond ne se sont pas expliqués sur le point de savoir si, pour l'essentiel, les activités déployées ne l'étaient pas dans des conditions permettant, sinon de réaliser un gain, du moins de parvenir à un équilibre économique, et ont plus spécialement omis de rapprocher le prix demandé du coût du service ; qu'à cet égard également, l'arrêt est dépourvu de base légale au regard du même texte ;

3° que les juges du fond ne pouvaient se référer à l'article 1er de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 puisque aussi bien les activités qui y sont visées ne sont considérées comme sociales ou médico-sociales qu'au sens de la loi et pour permettre l'application de ses dispositions ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des articles 12 du nouveau Code de procédure civile et L. 2333-64 du Code général des collectivités territoriales ;

4° que loin de justifier le caractère social de l'activité, la circonstance qu'aux termes de la loi n° 91-73 du 18 janvier 1991, l'établissement soit tenu de pratiquer les mêmes tarifs que les praticiens exerçant à titre libéral militait en faveur de l'exclusion du caractère social de l'activité ; que, de ce point de vue, l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article L. 2333-64 du Code des collectivités territoriales ;

Mais attendu que l'arrêt retient que ces établissements dispensent des prestations de vaccination gratuite contre l'hépatite au bénéfice des populations à risque, ainsi que des soins prodigués sans paiement du ticket modérateur, qu'ils participent à des actions de prévention et de lutte contre le SIDA, qu'ils associent aux soins infirmiers purs des prises en charge sociales ainsi que des prestations d'éducation à la santé, et que l'ensemble de ces opérations sont génératrices de déficits dont la compensation a été prise en compte au nombre des objectifs du contrat de la ville de Caen, avec la participation de l'Etat et du conseil général ; qu'abstraction faite des motifs critiqués par les deux dernières branches du moyen, la cour d'appel a ainsi caractérisé le caractère social de leur activité ; qu'elle en a exactement déduit qu'au titre de cette activité, la Croix-Rouge française, association reconnue d'utilité publique à but non lucratif, était exonérée du versement de transport en application de l'article L. 2333-64 du Code des collectivités territoriales ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le troisième moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que le syndicat des transports en commun fait grief à la cour d'appel d'avoir ainsi statué quant aux versements effectués au titre du conseil départemental et du comité de Caen, alors, selon le moyen :

1° que pour retenir le caractère social de l'activité au regard des règles régissant la taxe sur les transports, il ne suffisait pas de relever que l'activité consistait essentiellement dans des missions d'accueil, d'assistance ou de collecte et de distribution à finalité sociale ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué est dépourvu de base légale au regard de l'article L. 2333-64 du Code général des collectivités territoriales ;

2° que si les juges du fond ont constaté que l'intervention était gratuite pour les soins et l'assistance de première urgence, ils ne se sont pas prononcés sur les conditions de l'activité, s'agissant des autres missions, et notamment sur le point de savoir si les établissements en cause oeuvraient dans des conditions différentes d'autres établissements à but lucratif assurant des missions similaires ; qu'entre autres, ils n'ont pas établi de rapprochement entre le prix du service et son coût ; qu'à cet égard également, l'arrêt attaqué est dépourvu de base légale au regard du même texte ;

3° que la circonstance que les établissements recourent à des bénévoles à concurrence de 90 % est inopérante dès lors que la taxe sur les transports ne concerne que les salariés ; qu'à cet égard, l'arrêt a également été rendu en violation du même texte ;

Mais attendu que la cour d'appel, ayant constaté que l'action du conseil départemental et du comité, dont l'effectif est constitué pour 90 % de bénévoles, consiste essentiellement, outre l'intervention gratuite pour les soins d'urgence en cas de calamités ou de catastrophes naturelles, dans l'accueil, l'aide et l'assistance matérielle aux personnes démunies et en difficulté, a ainsi caractérisé le caractère social de l'activité de ces organismes, et décidé à bon droit qu'au titre de cette activité, la Croix-Rouge française devait être exonérée du versement de transport ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;

Sur le quatrième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que le syndicat des transports en commun fait grief à la cour d'appel d'avoir statué comme elle l'a fait quant aux versements effectués au titre du Centre santé Croix-Rouge, alors, selon le moyen :

1° que s'il est vrai qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975, les organismes publics ou privés qui mènent des actions de maintien à domicile sont des institutions sociales ou médico-sociales, cette qualification, comme le précise le texte, a seulement pour objet de permettre l'application des dispositions de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 ; qu'en se fondant exclusivement sur cette qualification pour déterminer si une règle étrangère à la loi n° 75-535 du 30 juin 1975 était applicable, les juges du fond ont violé l'article 12 du nouveau Code de procédure civile, ensemble l'article L. 2333-64 du Code général des collectivités territoriales ;

2° que faute de s'être expliqués sur les conditions dans lesquelles est géré l'établissement Santé Croix-Rouge pour déterminer si l'activité pouvait être considérée à caractère social au sens du texte en cause, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 2333-64 du Code général des collectivités territoriales ;

Mais attendu que la cour d'appel a retenu à juste titre que, dès lors qu'il relevait des dispositions de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975, qui organise le contrôle de la création et de l'activité des institutions à caractère social et médico-social, le Centre Santé Croix-Rouge, qui ne gère aucun établissement de soins, exerçait une activité sociale et devait être exonéré du versement de transport ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le deuxième moyen, pris en ses trois branches :

Vu l'article L. 2333-64 du Code général des collectivités territoriales ;

Attendu que, pour exonérer du versement de transport les salaires afférents à la Maison d'accueil de personnes âgées, l'arrêt retient qu'en application d'une convention conclue avec le département, cet établissement accueille, en contrepartie d'une subvention, des personnes au titre de l'aide sociale, permettant ainsi à ces dernières de bénéficier de prestations dont l'insuffisance de leurs ressources leur interdirait normalement l'accès ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans indiquer en quoi l'accueil des bénéficiaires de l'aide sociale constituait une charge permettant de distinguer la maison d'accueil des établissements à but lucratif recevant des personnes âgées, la cour d'appel n'a pas donné à sa décision de base légale au regard du texte susvisé ;

Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a statué sur les versements relatifs au Centre d'accueil de personnes âgées, l'arrêt rendu le 24 janvier 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rouen.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 00-13010
Date de la décision : 31/01/2002
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

1° TRANSPORTS EN COMMUN - Communes hors région parisienne - Redevance de transport (loi du 11 juillet 1973) - Entreprises exemptées - Fondations et associations reconnues d'utilité publique à but non lucratif - Exercice d'une activité de caractère social - Domaine d'application.

1° Caractérise le caractère social de l'activité de centres de soins gérés par une association reconnue d'utilité publique à but non lucratif, entraînant pour cette association, au titre de cette activité, l'exonération du versement de transport, en application de l'article L. 2333-64 du Code des collectivités territoriales, l'arrêt qui retient que ces établissements dispensent des prestations de vaccination gratuite contre l'hépatite au bénéfice des populations à risque, ainsi que des soins prodigués sans paiement du ticket modérateur, qu'ils participent à des actions de prévention et de lutte contre le SIDA, qu'ils associent aux soins infirmiers purs des prises en charge sociales ainsi que des prestations d'éducation à la santé, et que l'ensemble de ces opérations sont génératrices de déficits dont la compensation a été prise en compte au nombre des objectifs du contrat de la ville de Caen, avec la participation de l'Etat et du conseil général. Caractérise également le caractère social de l'activité du conseil départemental et du comité local de la Croix-Rouge française l'arrêt qui constate que l'action de ces organismes, dont l'effectif est constitué pour 90 % de bénévoles, consiste essentiellement, outre l'intervention gratuite pour les soins d'urgence en cas de calamités ou de catastrophes naturelles, dans l'accueil, l'aide et l'assistance matérielle aux personnes démunies et en difficulté. Dès lors qu'il relevait des dispositions de la loi n° 75-535 du 30 juin 1975, qui organise le contrôle de la création et de l'activité des institutions à caractère social et médico-social, le Centre Santé Croix-Rouge, qui ne gère aucun établissement de soins, exerçait une activité sociale et devait être exonéré du versement de transport.

2° TRANSPORTS EN COMMUN - Communes hors région parisienne - Redevance de transport (loi du 11 juillet 1973) - Entreprises exemptées - Fondations et associations reconnues d'utilité publique à but non lucratif - Exercice d'une activité de caractère social - Recherche nécessaire.

2° Manque de base légale l'arrêt qui, pour exonérer du versement de transport les salaires afférents à la Maison d'accueil de personnes âgées gérée par une association reconnue d'utilité publique à but non lucratif, retient qu'en application d'une convention conclue avec le département, cet établissement accueille, en contrepartie d'une subvention, des personnes au titre de l'aide sociale, permettant ainsi à ces dernières de bénéficier de prestations dont l'insuffisance de leurs ressources leur interdisait normalement l'accès, sans indiquer en quoi l'accueil des bénéficiaires de l'aide sociale constituait une charge permettant de distinguer cette maison d'accueil des établissements à but lucratif recevant des personnes âgées.


Références :

1° :
1° :
Code des collectivités territoriales L2333-64
Loi 75-585 du 30 juin 1975

Décision attaquée : Cour d'appel de Caen, 24 janvier 2000

A RAPPROCHER : (2°). Chambre sociale, 2000-03-09, Bulletin 2000, V, n° 100, p. 78 (cassation)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 31 jan. 2002, pourvoi n°00-13010, Bull. civ. 2002 V N° 48 p. 44
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2002 V N° 48 p. 44

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Sargos .
Avocat général : Avocat général : M. Lyon-Caen.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Ollier.
Avocat(s) : Avocats : M. Foussard, Mme Luc-Thaler.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2002:00.13010
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award