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12/12/2007 | FRANCE | N°07/13085

France | France, Cour d'appel de Paris, 4ème chambre section a, 12 décembre 2007, 07/13085


Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre - Section A

ARRET DU 12 DECEMBRE 2007

(no , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/13085

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Juillet 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 06/05630

APPELANTE

S.A.S MATTEL FRANCE

ayant son siège 27-33, rue d'Antony Silic 145

94150 RUNGIS

agissant en la personne de ses représentants légaux

représentÃ

©e par la SCP BOMMART - FORSTER, avoués à la Cour

assistée de Me Arnaud MICHEL, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

INTIMEE

S.A.R.L. C...

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

4ème Chambre - Section A

ARRET DU 12 DECEMBRE 2007

(no , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 07/13085

Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Juillet 2007 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG no 06/05630

APPELANTE

S.A.S MATTEL FRANCE

ayant son siège 27-33, rue d'Antony Silic 145

94150 RUNGIS

agissant en la personne de ses représentants légaux

représentée par la SCP BOMMART - FORSTER, avoués à la Cour

assistée de Me Arnaud MICHEL, avocat au barreau de PARIS, toque : T03

INTIMEE

S.A.R.L. COEUR DE PRINCESSE

ayant son siège 19, rue du Général Brunet

75019 PARIS

prise en la personne de son gérant

représentée par la SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER, avoués à la Cour

assistée de Me Francine WAGNER-EDELMAN, avocat au barreau de PARIS, toque : C1233

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 09 novembre 2007, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Alain CARRE-PIERRAT, Président

Madame Dominique ROSENTHAL-ROLLAND, Conseiller

Mme Brigitte CHOKRON, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Jacqueline VIGNAL

ARRET : CONTRADICTOIRE

- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du nouveau Code de procédure civile.

- signé par Nous, Alain CARRE-PIERRAT, président et par Nous Jacqueline VIGNAL, greffier à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.

Vu l'appel interjeté, le 19 juillet 2007, par la société MATTEL FRANCE d'un jugement rendu le 4 juillet 2007 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :

* dit que la société COEUR DE PRINCESSE a déposé frauduleusement la marque COEUR DE PRINCESSE no 04 3 314 748, et, en conséquence, prononcé sa nullité pour l'ensemble des produits visés à son enregistrement,

* dit que le jugement devenu définitif sera transmis à l'INPI, sur réquisition du greffier par la partie la plus diligente, aux fins d'inscription sur le registre national des marques,

* dit qu'elle a commis des actes de concurrence déloyale au préjudice de la société COEUR DE PRINCESSE en faisant usage de la dénomination COEUR DE PRINCESSE pour désigner des jouets et produits assimilés,

* condamné la société appelante à payer à la société COEUR DE PRINCESSE la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi

et lui a fait interdiction de faire usage du nom COEUR DE PRINCESSE pour désigner des jouets et des produits similaires sous astreinte de 500 euros par infraction constatée passé le délai de 2 mois à compter de la signification du jugement, le tribunal se réservant la liquidation de l'astreinte,

* débouté les parties du surplus de leurs demandes,

* ordonné l'exécution provisoire du jugement,

* condamné la société appelante à payer à la société COEUR DE PRINCESSE la somme de 8 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens ;

Vu l'ordonnance de référé rendue le 4 septembre 2007 par le délégué du premier président qui, après avoir autorisé la société MATTEL FRANCE à consigner à la caisse des dépôts et consignations les fonds suffisants, en principal, intérêts et frais, pour garantir le paiement des condamnations prononcées à son encontre par le jugement précité, a, au visa de l'article 917 du nouveau Code de procédure civile, fixé l'affaire devant la présente section de la Cour pour y être appelée en priorité ;

Vu les dernières conclusions signifiées le 3 octobre 2005, aux termes desquelles la société MATTEL FRANCE, poursuivant la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a jugé que la société COEUR DE PRINCESSE a déposé frauduleusement la marque COEUR DE PRINCESSE no 04 3 314 748 et a prononcé sa nullité, demande pour le surplus à la Cour de l'infirmer et de condamner la société COEUR DE PRINCESSE à lui verser la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice que lui causent ses agissements et à celle de 25 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel ;

Vu l'assignation à jour fixe, en date du 17 septembre 2007, et les conclusions signifiées le 20 août 2007, par lesquelles la société COEUR DE PRINCESSE, demande, aux termes d'un dispositif comportant une énumération de constatations qui ne saurait constituer des prétentions au sens de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile, à la Cour de :

* confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit que la société MATTEL FRANCE a commis des actes de concurrence déloyale à son préjudice en faisant usage de la dénomination sociale COEUR DE PRINCESSE pour désigner des jouets et produits assimilés et condamné cette société à lui verser la somme de 100 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice par elle subi et prononcé une mesure d'interdiction à son encontre,

* l'infirmer pour le surplus, et statuant à nouveau,

¤ juger que la marque COEUR DE PRINCESSE, déposée le 27 septembre 2004 pour désigner les produits et services relevant des classes 9, 14,16,18, 20, 21,24, 25, 26, 28, 35, 41, 42 et 43, qui correspondent à son objet social des statuts tels que publiés en mars 2003 au registre du commerce et des sociétés, est valide,

¤ juger qu'en désignant des produits identiques ou similaires aux jouets, déguisements, vêtements et autres produits dérivés du film COEUR DE PRINCESSE, et en faisant référence à ce film la société MATTEL FRANCE a usurpé sa dénomination sociale et contrefait la marque COEUR DE PRINCESSE,

¤ interdire à la société MATTEL FRANCE d'utiliser de quelque façon que ce soit le nom COEUR DE PRINCESSE pour désigner directement ou indirectement tous produits dérivés du film COEUR DE PRINCESSE y compris en faisant référence à ce film et interdire expressément l'utilisation du nom COEUR DE PRINCESSE, y compris par Internet et ce, sous astreinte comminatoire de 500 euros par infraction constatée à liquider par la Cour dans le mois de la signification de l'arrêt à intervenir,

¤ condamner la société MATTEL FRANCE à lui payer à titre de provision sur les dommages et intérêts une somme de 1 500 000 euros et non pas seulement de 100 000 euros,

¤ ordonner une expertise aux frais de la société MATTEL FRANCE après communication des éléments comptables certifiés conformes aux livres comptables de cette société pour examiner le chiffre d'affaires réalisé par celle-ci sur les produits dérivés du film et calculer son préjudice en raison de l'usurpation de sa dénomination sociale et de la contrefaçon de la marque COEUR DE PRINCESSE,

¤ ordonner la publication de l'arrêt à intervenir par extraits ou en entier dans cinq revues ou journaux de son choix et aux frais de la société MATTEL FRANCE, sans que chaque insertion puisse dépasser la somme de 10 000 euros H.T.,

¤ condamner la société MATTEL FRANCE à lui payer la somme de 20 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens de première instance et d'appel ;

SUR CE, LA COUR,

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties; qu'il suffit de rappeler que :

* la société MATTEL Inc, société américaine régie par le droit de l'État du Delaware, qui est spécialisée dans la fabrication et la commercialisation de jeux et de jouets de toute nature, exploite, notamment, la poupée BARBIE qui est distribuée en France par l'intermédiaire de sa filiale la société MATTEL FRANCE,

* les aventures de BARBIE, étant régulièrement mises en scène dans des livres, mais également dans des films d'animation, les studios d'animation MATTEL ont, en 2004, produit une comédie musicale dénommée dans les pays anglophones THE PRINCESS AND THE PAUPER et, en France, BARBIE COEUR DE PRINCESSE, et, concomitamment à la sortie du film, la société MATTEL FRANCE a lancé sur le marché français la commercialisation de jouets dérivés de ce film, notamment les poupées représentant les héroïnes de cette production dénommées BARBIE PRINCESSE ANNELIESE et BARBIE PRINCESSE ERIKA, la société MATTEL EUROPA BV étant, quant à elle, chargée du lancement en France de divers autres produits dérivés et notamment des déguisements destinés aux petites filles reproduisant les costumes de ces poupées,

* la société COEUR DE PRINCESSE a, le 27 septembre 2004, déposé auprès de l'INPI, la marque COEUR DE PRINCESSE, enregistrée sous le numéro 04 3 314 748 pour désigner les produits et services relevant des classes 9, 14,16, 18, 20, 21, 24, 25, 26, 28, 35, 41,42 et 43,

* c'est dans ces circonstances, que la société COEUR DE PRINCESSE, estimant être victime d'actes de contrefaçon de marque, d'usurpation de sa dénomination sociale et de concurrence déloyale, a engagé la présente instance à l'encontre de la société MATTEL FRANCE ;

* sur le dépôt frauduleux de la marque COEUR DE PRINCESSE :

Considérant que, pour s'opposer à l'action en contrefaçon engagée à son encontre, la société MATTEL FRANCE, invoquant le caractère frauduleux du dépôt de la marque COEUR DE PRINCESSE, demande à la Cour de confirmer le jugement déféré en ce qu'il en a prononcé la nullité ;

Considérant qu'il convient, à titre liminaire, d'observer que, contrairement à l'argumentation développée par la société COEUR DE PRINCESSE, seuls doivent être pris en considération les produits et services tels que visés à l'enregistrement de la marque et non pas les conditions dans lesquelles celle-ci est exploitée notamment au regard de l'objet social de la société tel que celui-ci résulte de ses statuts ;

Considérant que le caractère frauduleux du dépôt d'une marque, qui doit être prouvé par la partie qui entend s'en prévaloir, ne vise pas uniquement la violation de droits spécifiques, comme ceux de propriété intellectuelle, mais également les cas dans lesquels, sous une apparence régulière, le dépôt a été effectué dans la seule intention de nuire, et/ou de s'approprier indûment le bénéfice d'une opération légitimement entreprise ou d'y faire obstacle, en opposant à celle-ci la propriété de la marque frauduleusement enregistrée ;

Et considérant qu'il résulte des pièces versées aux débats que :

* le lundi 26 janvier 2004, la société MATTEL FRANCE a annoncé, sur le site Internet ACTUKIDS, la sortie de la nouvelle production vidéo BARBIE COEUR DE PRINCESSE ainsi que le lancement d'une gamme de produits BARBIE dérivés de ce film,

* au mois de mars 2004, elle a confié à son agence de relations publiques, la société SELF IMAGE, le soin d'organiser des opérations marketing destinées à promouvoir le lancement du film et la commercialisation des jouets dérivés de ce film, laquelle a commandé à une agence de création graphique, au mois de mai 2004, les invitations aux manifestations programmées ainsi que les dossiers de presse à remettre aux personnes présentes à ces manifestations (attestation Isabelle G... et confirmation du devis du 17 juin 2004),

* au mois de juillet 2004, la société SELF IMAGE a proposé à divers organes de presse des partenariats basés sur des jeux permettant aux lecteurs de gagner notamment des poupées BARBIE COEUR DE PRINCESSE (pièces 9 à 13),

* 300 invitations pour les journées PORTES OUVERTES MATTEL, qui se sont tenues les 13 et 14 septembre 2004, ont été distribuées dès le 23 août 2004, au cours desquelles les poupées et autres accessoires dérivés du film BARBIE COEUR DE PRINCESSE ont été présentés (pièce 14),

* au mois de septembre 2004, un dossier de presse dénommé NOEL 2004, annonçant notamment le lancement du film BARBIE COEUR DE PRINCESSE, a été distribué (pièce 19), et, à la même époque, la société SELF IMAGE a envoyé à des journalistes, à des personnalités et à des clients de la société MATTEL FRANCE, en particulier des opérateurs intéressés par le monde du jouet, prés de 400 invitations pour la projection en avant-première de la comédie musicale BARBIE COEUR DE PRINCESSE qui a eu lieu, le 17 octobre 2004, à l'opéra de Paris, étant précisé que cette avant-première a été relatée dans la presse (pièces 21,7, 35),

* en outre, la sortie du film a été précédée d'une mise sur le marché, les 15 et 24 septembre 2004, de deux livres BARBIE dans COEUR DE PRINCESSE, les parutions

afférentes à ces deux ouvrages ayant fait l'objet, le 17 septembre 2004, d'un encart publié dans le magazine LIVRES HEBDO (pièces 20, 26, 29, 30),

* l'annonce de la sortie de ces livres a été également faite, début septembre 2004, sur le site Internet ALAPAGE (pièces 16, 26 et 28) ;

Qu'il convient, encore, de relever qu'il se déduit de la pièce 16 (reproduction du site ALAPAGE) communiquée par la société COEUR DE PRINCESSE que celle-ci avait connaissance, le 21 septembre 2004, de la sortie du film BARBIE COEUR DE PRINCESSE ;

Considérant qu'il s'évince de ces éléments que, en déposant la marque éponyme le 27 septembre 2004, à quelques jours de la sortie du film BARBIE COEUR DE PRINCESSE, événement qu'elle ne pouvait méconnaître en raison de la publicité faite notamment en direction du public "coeur de cible" de sa clientèle, la société COEUR DE PRINCESSE a manifestement entendu nuire à la société MATTEL FRANCE, en voulant lui interdire, dès lors qu'elle opposait à cette dernière la marque litigieuse, d'exploiter ce film ainsi que les produits dérivés, puisqu'elle a, par l'intermédiaire de son conseil, adressé une mise en demeure à la société appelante le 3 novembre 2004, à savoir la veille de la sortie nationale du film ;

Que les arguments avancés par la société intimée, pour tenter de justifier la date à laquelle le dépôt de la marque a été effectué, étant dépourvus de toute pertinence, dès lors qu'elle avait la possibilité de la déposer dès la constitution de la société dans la mesure où, comme elle l'indique elle-même dans ses écritures, aucune marque antérieure ne pouvait lui être opposée, si ce n'est une marque D.S. PRINCESS OF HEARTYS - PRINCESS DES COEURS, mais dont il convient de relever, à l'examen des pièces produites par la société COEUR DE PRINCESSE, que cette dernière a pris l'attache du titulaire de cette marque le 29 septembre 2004, c'est-à-dire postérieurement au dépôt de la marque litigieuse; que c'est tout aussi vainement que la société intimée entend se prévaloir d'un courrier, en date du 27 janvier 2005, de la NEF lui conseillant de déposer la marque COEUR DE PRINCESSE dès lors que cette recommandation été faite alors que la marque était déjà déposée, circonstance qu'elle s'était gardée de communiquer à son interlocuteur ;

Qu'il s'ensuit que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité de la marque COEUR DE PRINCESSE, enregistrée sous le no 04 3 314 748 ;

* sur la concurrence déloyale :

Considérant que la société COEUR DE PRINCESSE poursuit la confirmation du jugement déféré en ce qu'il a reconnu la société MATTEL FRANCE coupable d'actes de concurrence déloyale en raison de la confusion engendrée par la commercialisation de jouets et produits similaires sous le nom COEUR DE PRINCESSE ; que, à cette fin, elle fait valoir que la société MATTEL FRANCE s'est livrée à une véritable usurpation de sa

dénomination sociale dès lors que, selon elle, la société appelante connaissait forcément son existence notamment parce qu'elles avaient en commun le même fournisseur, la société CESAR ;

Considérant que l'action en concurrence déloyale doit s'apprécier au regard de l'activité réelle, et non par référence à celle mentionnée aux statuts, ainsi que le soutient la société intimée, des sociétés en conflit ;

Or considérant qu'il ne peut être sérieusement contesté que la société COEUR DE PRINCESSE a, ainsi qu'il en résulte des pièces qu'elle produit aux débats, pour unique activité la conception et la vente de déguisements; qu'en effet :

* les devis et factures portent sur la confection de déguisements (intitulés LA BALLERINE, LA PRINCESSE, LA FEE, LA MARQUISE)

* le diplôme du concours Lépine remis, en 2004, à la gérante de la société vise des costumes de fillettes,

* une lettre de la direction du développement économique et de l'emploi de la mairie de Paris, en date du 17 septembre 2004, décrit la société COEUR DE PRINCESSE comme étant une société qui développe des collections de déguisements destinés aux enfants de 3 à 11 ans,

* le bordereau intitulé Plaquette COEUR DE PRINCESSE présentée sur le salon du jouet de janvier 2004, concerne les quatre modèles de déguisements précités, présentés en plusieurs couleurs, étant précisé qu'en dernière page de cette plaquette la société intimée décrit son activité de la manière suivante : Conception, Création et Fabrication de Costumes,

* la lettre de mise en demeure adressée le 3 novembre 2004, par le conseil de la société COEUR DE PRINCESSE, à la société MATTEL FRANCE, fait référence à une activité de conception et de commercialisation de vêtements de déguisements pour enfants,

* seule l'activité de création de costumes est mentionnée dans les documents comptables de la société intimée,

* les articles de presse présentent la société COEUR DE PRINCESSE comme spécialisée dans les déguisements pour enfants ;

Qu'il convient de relever que la société COEUR DE PRINCESSE tente vainement de démontrer qu'elle aurait diversifié son activité en produisant aux débats l'impression de pages écran de son site Internet par lesquelles elle propose des jouets, des vêtements, des bijoux, ainsi que des costumes de déguisements originaux (...) ou encore que ses prestations englobent : (...) la création de jouets, dès lors que les impressions écrans de ce site sont datées du 16 février 2007; que l'attestation de Valérie K..., en date du 7 octobre 2005, est inopérante dès lors que, en la forme, aucune pièce d'identité n'est jointe et que, au fond, elle fait état de projets personnels à Fadila L... et non de la société COEUR DE PRINCESSE qui, au demeurant, n'avait, pour la personne qui atteste, aucune existence légale puisqu'elle mentionne que Fadila L... avait l'intention de créer une société COEUR DE PRINCESSE ;

Que, enfin, les autres documents produits aux débats sont également postérieurs au mois de novembre 2004, à savoir le répertoire officiel des jouets et jeux (2005), les devis relatifs au montage d'un robot (septembre et novembre 2006), prestations au parc Astérix (29 janvier 2007) et catalogue de poupées (2005) ;

Or, considérant que, en premier lieu, la société MATTEL FRANCE a pour seule activité la commercialisation en France de jeux et jouets et en aucun cas de déguisements ;

Que, en second lieu, les poupées commercialisées par la société appelante ne sont pas des poupées COEUR DE PRINCESSE mais deux poupées BARBIE dérivées du film d'animation BARBIE COEUR DE PRINCESSE représentant les deux héroïnes du film, à savoir PRINCESSE ANNELISE et PRINCESSE ERIKA; qu'elles sont donc clairement identifiées aux yeux des fillettes qui manifestent le désir de posséder les héroïnes du film, de sorte qu'à leurs yeux, mais également à ceux des adultes susceptibles d'acquérir ces poupées qui, au surplus, ne sauraient ignorer la notoriété, au demeurant non contestée, des poupées BARBIE; que, au regard des uns et des autres qui constituent le consommateur moyen de la catégorie du produit concerné, normalement informé et raisonnablement attentif et avisé, il ne saurait exister le moindre risque de confusion, d'une part, entre les produits opposés et, d'autre part, avec celui allégué de la dénomination sociale de la société intimée ;

Qu'il convient, en outre, de relever que l'argument tiré par la société COEUR DE PRINCESSE, pour la première fois en cause l'appel, de ce que l'une des poupées, à savoir PRINCESSE ERIKA, lui causerait un préjudice au motif que, en 2006, elle aurait fourni des déguisements pour un défilé d'enfants organisé à la Ligue d'enseignement en présence de la chanteuse Princesse ERIKA, est dénué de toute pertinence dès lors que cette manifestation est postérieure au lancement, en novembre 2004, du film BARBIE COEUR DE PRINCESSE ;

Qu'enfin, s'agissant des déguisements dont la vente sur Internet a été constatée par l'huissier de justice, il est acquis aux débats, par la production du contrat de licence en date du 11 octobre 2004, qu'ils sont fabriqués et commercialisés par la société française CESAR, sous licence de la société MATTEL EUROPA BV, personne morale distincte de la société MATTEL FRANCE ;

Qu'il s'ensuit qu'aucun acte de concurrence déloyale à l'égard de la société COEUR DE PRINCESSE ne peut être imputé à la société MATTEL FRANCE, de sorte que, sur ce point, le jugement déféré sera infirmé ;

* sur les autres demandes :

Considérant que les manoeuvres opérées par la société COEUR DE PRINCESSE, en déposant frauduleusement la marque COEUR DE PRINCESSE pour, en tentant de s'opposer à la vente des produits dérivés du film BARBIE COEUR DE PRINCESSE s'attirer des avantages indus, caractérisent, au sens de l'article 1382 du Code civil, une faute délictuelle ayant causé un préjudice certain à la société MATTEL FRANCE, notamment en raison du trouble créé dans l'organisation de la commercialisation de ses modèles de poupées et des tracas causés à son service administratif par les mises en demeure non fondées, notifiées à la requête de la société intimée ;

Que, eu égard aux éléments de la procédure, il convient d'allouer à la société MATTEL FRANCE une somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;

Considérant qu'il résulte du sens de l'arrêt que la société COEUR DE PRINCESSE ne saurait bénéficier des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile; que, en revanche, l'équité commande de la condamner, sur ce même fondement, à verser à la société MATTEL FRANCE une indemnité de 15 000 euros ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré, sauf en ce qui concerne les condamnations prononcées au titre de l'annulation de la marque COEUR DE PRINCESSE, enregistrée sous le no 04 3 314 748,

Et, statuant à nouveau,

Déboute la société COEUR DE PRINCESSE de l'ensemble de ses prétentions,

Y ajoutant,

Dit que la société COEUR DE PRINCESSE a commis des agissements fautifs à l'égard de la société MATTEL FRANCE et la condamne à lui verser la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

Condamne la société COEUR DE PRINCESSE à verser à la société MATTEL FRANCE une indemnité de 15 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne la société COEUR DE PRINCESSE aux dépens de première instance et d'appel qui pour ces derniers seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre section a
Numéro d'arrêt : 07/13085
Date de la décision : 12/12/2007

Références :

ARRET du 10 juillet 2012, Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 10 juillet 2012, 08-12.010, Publié au bulletin

Décision attaquée : Tribunal de grande instance de Paris, 04 juillet 2007


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.paris;arret;2007-12-12;07.13085 ?
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