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19/05/2015 | CEDH | N°001-154598

CEDH | CEDH, AFFAIRE PETKOV ET PARNAROV c. BULGARIE, 2015, 001-154598


QUATRIÈME SECTION

AFFAIRE PETKOV ET PARNAROV c. BULGARIE

(Requête no 59273/10)

ARRÊT

STRASBOURG

19 mai 2015

DÉFINITIF

19/08/2015

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Petkov et Parnarov c. Bulgarie,

La Cour européenne des droits de l’homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :

Guido Raimondi, président,
Päivi Hirvelä,
George Nicolaou,
Ledi Bianku,
Paul Ma

honey,
Krzysztof Wojtyczek,
Yonko Grozev, juges,
et de Françoise Elens-Passos, greffière de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil ...

QUATRIÈME SECTION

AFFAIRE PETKOV ET PARNAROV c. BULGARIE

(Requête no 59273/10)

ARRÊT

STRASBOURG

19 mai 2015

DÉFINITIF

19/08/2015

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Petkov et Parnarov c. Bulgarie,

La Cour européenne des droits de l’homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :

Guido Raimondi, président,
Päivi Hirvelä,
George Nicolaou,
Ledi Bianku,
Paul Mahoney,
Krzysztof Wojtyczek,
Yonko Grozev, juges,
et de Françoise Elens-Passos, greffière de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 21 avril 2015,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 59273/10) dirigée contre la République de Bulgarie et dont deux ressortissants de cet État, MM. Plamen Petkov Petkov et Petar Danailov Parnarov (« les requérants »), ont saisi la Cour le 30 septembre 2010 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Les requérants sont représentés par Mes I. Vasileva et N. Atanasov, avocats à Sofia. Le gouvernement bulgare (« le Gouvernement ») est représenté par son agent, Mme Y. Stoyanova, du ministère de la Justice.

3. Les requérants allèguent qu’ils ont fait l’objet de mauvais traitements de la part de la police et que les autorités n’ont pas mené une enquête effective à la suite de leur plainte.

4. Le 18 décembre 2013, la requête a été communiquée au Gouvernement.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. Les requérants sont nés respectivement en 1982 et 1978 et résident à Sofia.

A. L’incident de la nuit du 3 juillet 2009

6. Selon la version des faits exposée par les requérants, dans la nuit du 3 au 4 juillet 2009, vers 1 heure 30 du matin, en sortant d’un bar situé aux abords d’un parc dans le centre de Sofia, ils furent témoins de l’agression de deux jeunes filles par quatre jeunes hommes. Le premier requérant tenta de s’interposer et fut frappé à la tête, poussé à terre et roué de coups de pied. Le deuxième requérant, armé d’un bâton en bois qu’il avait ramassé dans le parc, parvint à faire fuir les agresseurs.

7. Une patrouille de police qui se trouvait à proximité se rendit sur les lieux. Le premier requérant, blessé au visage, tenta d’expliquer ce qui c’était passé et indiqua aux deux policiers qu’ils devaient poursuivre les agresseurs. Le policier lui cria : « Qui êtes-vous pour nous dire quoi faire ? Venez par ici ! ». Les requérants demandèrent aux policiers pourquoi ils se comportaient de la sorte et les sommèrent de montrer leurs cartes de police. Les policiers les mirent alors à terre et les menottèrent dans le dos.

8. Les policiers commencèrent à donner des coups de pied et à frapper les requérants. Trois autres patrouilles de police arrivèrent, soit environ douze policiers, mais ne firent rien pour arrêter leurs collègues. Selon les requérants, leur passage à tabac dura 10 à 15 minutes. Ils furent ensuite fouillés et conduits au commissariat. Le bâton en bois laissé par le deuxième requérant fut ramassé par la police. Dans la voiture de police, le deuxième requérant demanda à ce que ses menottes soient desserrées car elles lui causaient de la douleur, mais le policier, qui était celui qui l’avait battu, les serra d’avantage.

B. Les poursuites pour trouble à l’ordre public et la détention des requérants

9. À 2 heures 20 du matin, les requérants furent placés en garde à vue, le motif indiqué sur l’ordre d’arrestation étant l’infraction de trouble à l’ordre public (хулиганство). À 15 heures, ils furent présentés à un procureur qui les mit en examen pour trouble à l’ordre public. Il leur fut reproché d’avoir insulté deux agents de police en service, A.Y. et V.K., d’avoir refusé d’obtempérer à l’ordre de se coucher à terre, d’avoir frappé l’agent A.Y. avec un bâton dans le dos et avec les poings dans la poitrine.

10. Par une ordonnance du procureur du même jour, les requérants furent placés en détention en application de l’article 64, alinéa 1, du code de procédure pénale, en vue de leur présentation devant un juge qui décide de leur placement en détention provisoire. Le 7 juillet 2009, à l’issue du délai légal maximum de 72 heures pour ce type de détention, le procureur décida de ne pas demander le placement en détention provisoire, ordonna une mesure de cautionnement et fixa le montant à verser par les intéressés. Il ordonna leur remise en liberté immédiate.

11. Après leur remise en liberté, les requérants introduisirent un recours contre l’ordonnance du 4 juillet 2009 concernant leur placement en détention pour 72 heures. Par une décision du 13 novembre 2009, le tribunal de la ville de Sofia déclara la détention des requérants illégale. Le tribunal considéra que le but de la détention de 72 heures était de présenter les personnes concernées à un juge dans les cas où les conditions d’un placement en détention provisoire étaient réunies. Or ces conditions n’étaient pas réunies en l’espèce et le procureur n’avait d’ailleurs rien entrepris pour formuler une demande de placement en détention provisoire ; dans ces conditions, la détention des requérants pour 72 heures n’était pas justifiée.

12. Le 22 décembre 2009, les charges contre les requérants furent modifiées et le procureur précisa que le premier requérant avait insulté les policiers et frappé A.Y. avec les poings sur la poitrine, alors que le deuxième requérant avait crié et insulté les policiers et frappé A.Y. avec un bâton dans le dos. Les requérants auraient notamment crié « Ne t’occupe pas de ces clowns », « Vous n’êtes pas des policiers », « Ordures » et proféré des injures obscènes.

13. À une date non précisée en 2010, les requérants furent renvoyés en jugement. Par un jugement du tribunal de district de Sofia du 8 juillet 2010 qui, en l’absence de recours, devint définitif le 24 juillet 2010, les requérants furent relaxés des charges ainsi soulevées.

C. La plainte déposée par les requérants

14. Après leur remise en liberté, le 8 juillet 2009, les requérants se firent examiner par un médecin légiste. Selon les certificats médicaux délivrés, le premier requérant présentait plusieurs abrasions de la peau sur ses deux jambes et ses deux bras, d’une dimension de quatre centimètres sur un, ainsi que des égratignures jusqu’à huit centimètres de longueur. Le deuxième requérant présentait une ecchymose de vingt centimètres sur douze dans le dos, au niveau de l’omoplate, une autre plus petite sur l’épaule gauche, ainsi que plusieurs abrasions de la peau et des ecchymoses sur les deux bras et le genou droit. Le médecin conclut que les lésions constatées avaient provoqué de la douleur physique et avaient pu être causées de la manière et au moment décrits par les requérants, qui avaient indiqués avoir été battus le 4 juillet 2009.

15. Le 22 juillet 2009, les requérants déposèrent une plainte au parquet. Ils y exposèrent les évènements survenus dans la nuit du 3 au 4 juillet et demandèrent la réalisation d’une enquête et l’ouverture de poursuites pénales s’il y avait lieu. Ils demandèrent que les policiers présents soient identifiés et que les enregistrements des caméras de surveillance d’un magasin proche du lieu de l’incident soient visionnés. Les requérants joignirent à leur plainte les certificats médicaux délivrés.

16. Une enquête préliminaire fut effectuée et les requérants furent entendus. Selon les requérants, on leur demanda simplement s’ils confirmaient leurs dires exposés dans la plainte. Les agents de police ne furent apparemment pas entendus dans le cadre de cette enquête. Les éléments de la procédure pénale contre les requérants pour trouble à l’ordre public furent joints au dossier.

17. À l’issue de l’enquête préliminaire, aucune décision formelle concernant l’ouverture ou non de poursuites pénales à la suite de la plainte des requérants ne fut prise par le procureur. En revanche, le procureur estima que les éléments du dossier justifiaient l’ouverture de poursuites pour dénonciation calomnieuse (набедяване) à l’encontre des requérants (voir les paragraphes 19-22 ci-dessous).

18. Le 15 avril 2010, les requérants adressèrent des lettres aux différentes autorités du parquet, au Conseil supérieur de la magistrature et à son Inspection pour s’enquérir de l’issue donnée à leur plainte. Ils y firent valoir que les autorités n’avaient pas respecté leur obligation de mener une enquête efficace et qu’en l’absence de décision formelle, ils ne pouvaient faire usage de leur droit de recours contre un éventuel refus du procureur d’engager des poursuites. Ils furent informés que leur courrier avait été transféré par le parquet de cassation au parquet de la ville de Sofia et de ce dernier au parquet de district, considéré comme compétent pour se prononcer, mais ne reçurent aucune réponse par la suite.

D. La procédure pénale pour dénonciation calomnieuse contre des requérants

19. Dans le cadre de l’enquête pour dénonciation calomnieuse ouverte à l’encontre des requérants, les deux policiers, A.Y. et V.K., furent entendus comme témoins. Ils nièrent avoir battu les requérants. Le 15 avril 2010, les requérants furent mis en examen pour dénonciation calomnieuse, pour avoir dénoncé les agents A.Y. et V.K. auprès des autorités de poursuites en les accusant de leur avoir causé un dommage corporel léger – infraction réprimée par l’article 131, alinéa 1 (2), en relation avec l’article 130, alinéa 2, du code pénal, en ayant conscience que les intéressés n’avaient pas commis l’infraction en question.

20. Par un jugement du tribunal de district de Sofia du 28 janvier 2011, les requérants furent relaxés des accusations de dénonciation calomnieuse. À la suite de l’appel du parquet, ce jugement fut confirmé par le tribunal de la ville de Sofia le 7 novembre 2011.

21. Sur la base, notamment, des dépositions des requérants et de tous les policiers présents au moment de l’incident, ainsi que des certificats médicaux des requérants, ces juridictions considèrent comme établis les faits suivants : les requérants étaient sortis vers 1 heure du matin d’un bar situé aux abords du parc. Tandis qu’il traversait le parc, le premier requérant fut agressé par des inconnus et le deuxième requérant vit son ami à terre se faire donner des coups de pieds par ces individus, qu’il fit fuir avec un bâton en bois. C’est à ce moment que les deux agents de police A.Y. et V.K., qui étaient en patrouille à proximité, aperçurent les deux requérants courir vers eux. Les requérants leur indiquèrent qu’ils s’étaient fait agresser mais les policiers n’entreprirent aucune action, n’apercevant pas d’individus correspondant au signalement donné par les intéressés. À la suite de la dispute qui éclata entre les requérants et les policiers, ces derniers durent faire usage de techniques d’immobilisation et de menottes pour les maîtriser. Les policiers reconnaissaient avoir fait usage de la force à l’égard des deux requérants mais considéraient celle-ci justifiée par le refus des intéressés d’obtempérer à l’ordre de se mettre à terre. Le tribunal de la ville de Sofia nota que les certificats médicaux délivrés aux requérants immédiatement après leur remise en liberté attestaient qu’ils avaient subi des violences légères et en conclut qu’il était possible que les blessures aient été infligées au moment de l’arrestation. Les autres policiers étaient arrivés sur les lieux lorsque les requérants étaient déjà menottés et n’avaient pas été témoins de l’altercation.

22. Les tribunaux relevèrent également qu’à la suite de la plainte déposée par les requérants au procureur, une enquête avait été confiée à la Direction régionale des affaires intérieures de Sofia, qui n’avait pas constaté de comportement violent ou contraire à la déontologie de la part des policiers. Le parquet avait alors engagé des poursuites pour dénonciation calomnieuse à l’encontre des requérants. Les deux instances de juridiction considérèrent que l’infraction n’était cependant pas constituée, dans la mesure où les requérants avaient pu de bonne foi considérer qu’en procédant à leur arrestation de manière musclée au lieu de leur porter assistance suite à l’incident survenu avec d’autres individus, les policiers avaient outrepassé leurs droits et fait usage d’une force disproportionnée. Dès lors, en demandant une enquête sur l’incident, les requérants avaient agi avec la conviction qu’ils exerçaient leurs droits et non en ayant conscience qu’ils accusaient les policiers d’un délit qu’ils n’avaient pas commis.

23. Par la suite, les requérants introduisirent des actions en application de la loi sur la responsabilité de l’État et demandèrent une indemnisation pour avoir été accusés à tort de dénonciation calomnieuse. Par un jugement du 7 mai 2013, le tribunal de district de Sofia fit partiellement droit à la demande du deuxième requérant et lui alloua 2 000 levs (l’équivalent de 1 022 euros) au titre de dommages et intérêts. Le jugement fut confirmé en appel par le tribunal de la ville de Sofia le 27 mars 2014. Selon les dernières informations fournies par les parties, en juin 2014, la demande du premier requérant était pendante devant le tribunal de district de Sofia.

II. LE DROIT INTERNE PERTINENT

A. Le recours à la force par la police

24. L’article 72 de la loi sur le ministère de l’Intérieur de 2006, en vigueur au moment des faits, disposait en ses parties pertinentes :

« (1) Dans l’exercice de leurs fonctions, les forces de police peuvent faire usage de la force et de moyens auxiliaires lorsque cela est rendu absolument nécessaire, en cas :

1. d’insoumission ou refus d’obtempérer à un ordre légal ;

2. d’arrestation d’un contrevenant à la loi lorsque cette personne refuse d’obtempérer ou résiste aux forces de police ; (...)

5. d’attaque contre des citoyens ou des agents de la force publique ; (...)

7. de trouble à l’ordre public par un groupe d’individus ; (...)

(2) Les moyens auxiliaires sont : les menottes, (...) les matraques (...). »

B. La répression des actes de mauvais traitement

25. Le Code pénal érige en infraction le fait de causer à autrui un dommage corporel léger, moyennement grave ou grave (articles 128 à 130). Le fait de causer un dommage corporel léger sans détérioration de la santé de la victime est passible d’une peine de six mois d’emprisonnement ou d’une peine de probation (article 130, alinéa 2). Le fait que le dommage corporel a été causé par un fonctionnaire de police constitue une circonstance aggravante de l’infraction qui est alors passible d’une peine d’emprisonnement d’un an ou d’une peine de probation (article 131, alinéa 1 (2)).

26. Le code de procédure pénale de 2005 dispose que le procureur décide de l’ouverture de poursuites pénales pour les infractions poursuivies par la voie de l’action publique lorsqu’il dispose d’un motif légal (законен повод) et d’éléments suffisants indiquant qu’une infraction a été commise (достатъчно данни). Le refus du procureur d’ouvrir une procédure pénale est notifié à la victime de l’infraction alléguée ou aux personnes ayant effectué le signalement. Il est susceptible d’un recours auprès du procureur hiérarchiquement supérieur, qui peut annuler l’ordonnance de refus et ordonner l’ouverture d’une procédure (articles 207 et 213 du code).

C. La responsabilité délictuelle de l’État

27. La loi de 1988 sur la responsabilité de l’État et des communes pour dommage (Закон за отговорността на държавата и общините за вреди) dispose en son article 1, alinéa 1 :

« L’État et les communes sont responsables des dommages causés aux particuliers ou aux personnes morales du fait des actes, actions ou inactions illégaux de leurs autorités ou agents dans le cadre ou à l’occasion de l’accomplissement de leurs fonctions en matière administrative. (...) »

28. L’article 2 de la loi prévoit que l’État est responsable du dommage causé par les organes de l’instruction, du parquet et par les juridictions du fait, notamment, d’une détention illégale, d’une accusation pénale, lorsque l’intéressé est ensuite relaxé, ou encore d’une condamnation qui est par la suite annulée.

29. Le principe général de la responsabilité délictuelle est prévu à l’article 45 de la loi sur les obligations et les contrats (Закон за задълженията и договорите), aux termes duquel toute personne est responsable du dommage causé à autrui par sa faute.

EN DROIT

I. SUR LES VIOLATIONS ALLÉGUÉES DE L’ARTICLE 3 DE LA CONVENTION

30. Invoquant l’article 3 de la Convention, les requérants se plaignent d’avoir été soumis à des traitements inhumains et dégradants de la part des agents de police qui ont procédé à leur arrestation. Au regard des articles 3 et 13, ils se plaignent de l’absence d’enquête effective sur leur plainte, alors qu’eux-mêmes ont été poursuivis pour dénonciation calomnieuse. La Cour considère qu’il convient d’examiner les griefs ainsi soulevés sous l’angle de l’article 3 de la Convention, ainsi libellé :

« Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. »

A. Sur la recevabilité

1) Sur l’épuisement des voies de recours

31. Le Gouvernement excipe du non-épuisement des voies de recours internes. Il fait valoir que les requérants auraient pu introduire une action en réparation du préjudice subi sur le fondement de l’article 1, alinéa 1, de la loi sur la responsabilité de l’État ou bien en application du régime général de responsabilité délictuelle prévu à l’article 45 de la loi sur les obligations et les contrats.

32. Les requérants répliquent que les actions invoquées par le Gouvernement ne sont pas applicables en l’espèce. Ils font valoir que l’article 1 de la loi sur la responsabilité de l’État concerne l’action des autorités publiques dans l’accomplissement de leurs fonctions administratives, domaine qui n’inclut pas l’obligation du parquet d’enquêter sur d’éventuelles infractions pénales. Quant au régime général de responsabilité délictuelle, celui-ci ne serait pas applicable à la responsabilité d’une institution telle que le parquet, alors que les procureurs individuels disposeraient, eux, d’une immunité. Les requérants soutiennent par ailleurs que de telles actions peuvent aboutir uniquement à l’octroi d’une compensation et ne sont dès lors pas en mesure de satisfaire aux obligations positives découlant pour l’État de l’article 3 de la Convention de mener une enquête effective sur leurs allégations de mauvais traitements subis aux mains de la police.

33. La Cour rappelle qu’aux termes de l’article 35 § 1 de la Convention, elle ne peut être saisie qu’après l’épuisement des voies de recours internes. La finalité de cette disposition est de ménager aux États contractants l’occasion de prévenir ou de redresser les violations qui leur sont imputées avant que la Cour n’en soit saisie. Néanmoins, cette disposition ne prescrit l’épuisement que des recours qui sont à la fois relatifs aux violations incriminées, disponibles et adéquats. Ceux-ci doivent exister à un degré suffisant de certitude non seulement en théorie mais aussi en pratique, sans quoi leur manquent l’effectivité et l’accessibilité voulues. Il incombe par ailleurs à l’État défendeur de démontrer que ces exigences se trouvent réunies (voir, parmi beaucoup d’autres, Mifsud c. France (déc.) [GC], no 57220/00, § 135, CEDH 2002‑VIII).

34. En l’espèce, la Cour observe que les requérants ont déposé une plainte pénale auprès du procureur et ont demandé l’ouverture d’une enquête pénale. La plainte pénale étant la voie de recours normalement disponible en droit bulgare en cas d’allégations de mauvais traitements de la part de la police (Ivan Vassilev c. Bulgarie, no 48130/99, § 57, 12 avril 2007), il ne saurait être reproché aux requérants d’avoir tenté de la mettre en œuvre. Concernant la possibilité, invoquée par le Gouvernement, d’engager une action civile sur le fondement de l’article 1 de loi sur la responsabilité de l’État ou de l’article 45 de la loi sur les obligations et contrats, la Cour observe qu’une telle action, à la supposer applicable à des faits de maltraitance par les forces de l’ordre, est de nature à fournir uniquement une indemnisation aux requérants et ne constitue pas un recours permettant d’identifier et de punir les responsables des mauvais traitements allégués (Dimitar Dimitrov c. Bulgarie, no 18059/05, § 32, 3 avril 2012). De plus, cette voie de droit ne pourrait de toute évidence pas porter sur le manquement allégué du parquet de mener une enquête effective, les cas de responsabilité de cette autorité étant limités par l’article 2 de la loi sur la responsabilité de l’État (voir le paragraphe 28 ci-dessus). Le Gouvernement ne fournit au demeurant aucun exemple de jurisprudence établissant le contraire. Dans ces circonstances, les requérants ayant tenté de mettre en œuvre les moyens que leur offrait la justice pénale, la Cour considère qu’ils n’étaient pas tenus, pour satisfaire aux exigences de l’article 35 § 1, d’engager une procédure civile en dédommagement (Ivan Vassilev, précité, § 57). Il convient dès lors de rejeter l’exception tirée du non-épuisement des voies de recours internes.

2) Sur le respect du délai de six mois

35. Le Gouvernement soutient qu’en tout état de cause, dans la mesure où les requérants considèrent que les voies de recours mentionnées ci-dessus n’étaient pas effectives, ils auraient dû saisir la Cour dans un délai de six mois à compter de la survenance des faits litigieux, en juillet 2009, et que la requête serait donc irrecevable pour non-respect du délai de six mois.

36. Les requérants répliquent qu’ils ne pouvaient pas prévoir, en déposant une plainte au procureur en juillet 2009, que cette voie de recours se révèlerait inefficace. Ils soulignent qu’ils ont saisi la Cour lorsqu’ils se sont rendu compte qu’aucune suite n’était donnée à leur plainte alors qu’ils étaient, eux, mis en examen pour dénonciation calomnieuse.

37. La Cour rappelle qu’en règle générale le délai de six mois prévu à l’article 35 § 1 commence à courir à la date de la décision définitive intervenue dans le processus normal de l’épuisement des voies de recours internes. Lorsqu’il est clair d’emblée que le requérant ne dispose d’aucun recours effectif, le délai de six mois court à partir de la date des actes ou mesures dénoncés ou de la date à laquelle l’intéressé en prend connaissance ou en ressent les effets ou le préjudice (Dennis et autres c. Royaume-Uni (déc.), no 76573/01, 2 juillet 2002). L’article 35 § 1 ne saurait cependant être interprété d’une manière qui exigerait qu’un requérant saisisse la Cour avant que la situation relative à ses griefs n’ait fait l’objet d’une décision définitive au niveau interne. Par conséquent, lorsqu’un requérant utilise un recours apparemment disponible et ne prend conscience que par la suite de l’existence de circonstances qui le rendent ineffectif, il peut être indiqué de considérer comme point de départ de la période de six mois la date à laquelle le requérant a eu ou aurait dû avoir pour la première fois connaissance de cette situation (Varnava et autres c. Turquie [GC], nos 16064/90, 16065/90, 16066/90, 16068/90, 16069/90, 16070/90, 16071/90, 16072/90 et 16073/90, § 157, CEDH 2009).

38. En l’espèce, la Cour observe que les requérants ont déposé une plainte pénale en juillet 2009. Ils ont été entendus par les enquêteurs et pouvaient raisonnablement s’attendre à ce que le procureur réponde à leur plainte soit par l’ouverture d’une procédure pénale, soit par une décision motivée de non-lieu, qui aurait été susceptible d’un recours devant le procureur supérieur (voir le paragraphe 26 ci-dessus). Neuf mois plus tard, le 15 avril 2010, les requérants ont été mis en examen pour dénonciation calomnieuse et, par une lettre du même jour, ils se sont renseignés auprès des autorités de la suite donnée à leur plainte, sans jamais obtenir de réponse. Dans ces circonstances la Cour n’est pas convaincue que les intéressés auraient dû, avant le 15 avril 2010, se rendre compte du caractère ineffectif de l’enquête. Notant que les intéressés ont introduit la présente requête moins de six mois après cette date, la Cour considère que le délai prévu à l’article 35 § 1 a été respecté. Il convient de rejeter l’exception formulée par le Gouvernement.

3) Conclusion sur la recevabilité

39. La Cour constate par ailleurs que la requête n’est pas manifestement mal fondée au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité. Il convient donc de la déclarer recevable.

B. Sur le fond

1) Sur les mauvais traitements allégués

a) Arguments des parties

40. Les requérants soutiennent qu’ils ont été battus par la police alors qu’ils étaient menottés et allongés à terre, sans que cela n’ait été justifié par leur comportement, et qu’ils ont été arrêtés, placés en garde à vue puis accusés de trouble à l’ordre public sans aucun motif. Ils considèrent que les violences et humiliations dont ils ont fait l’objet sont constitutives d’un traitement inhumain et dégradant, prohibé par l’article 3.

41. Le Gouvernement considère que les allégations des requérants n’ont pas été prouvées et invite la Cour à considérer leur version des évènements avec circonspection, étant donné qu’au moment des faits, les intéressés sortaient d’un bar et étaient vraisemblablement sous l’effet de l’alcool. Le Gouvernement soutient que la force utilisée par les agents de police était proportionnée et que leur comportement pourrait être qualifié de brusque mais en aucun cas d’inhumain ou dégradant, de manière à atteindre le seuil de gravité requis par l’article 3 de la Convention.

b) Appréciation de la Cour

42. La Cour rappelle que l’article 3 de la Convention consacre l’une des valeurs fondamentales des sociétés démocratiques et prohibe en termes absolus la torture et les peines ou traitements inhumains ou dégradants. Pour tomber sous le coup de l’article 3, un mauvais traitement doit atteindre un minimum de gravité. L’appréciation de ce minimum est relative par essence ; elle dépend de l’ensemble des circonstances propres à l’affaire, telles que la durée du traitement ou ses effets physiques ou psychologiques et, dans certains cas, du sexe, de l’âge et de l’état de santé de la victime (voir, parmi beaucoup d’autres, Kudła c. Pologne [GC], no 30210/96, § 91, CEDH 2000-XI, et Berliński c. Pologne, nos 27715/95 et 30209/96 § 59, 20 juin 2002). La Cour a toujours souligné que la souffrance et l’humiliation infligées doivent en tout cas aller au-delà de celles que comporte inévitablement une forme donnée de traitement ou de peine légitimes (Kudła, précité, § 92).

43. À cet égard, la Cour a estimé qu’un traitement était « inhumain », notamment pour avoir été appliqué avec préméditation pendant des heures et avoir causé des lésions corporelles ou de vives souffrances physiques et morales. Elle a par ailleurs considéré et qu’un traitement était « dégradant » en ce qu’il était de nature à créer en ses victimes des sentiments de peur, d’angoisse et d’infériorité propres à les humilier et à les avilir (Kudła, précité, loc. cit.).

44. Les allégations de mauvais traitement doivent être étayées devant la Cour par des éléments de preuve appropriés. Pour l’établissement des faits, celle-ci se rallie au principe de la preuve « au-delà de tout doute raisonnable » ; une telle preuve peut néanmoins résulter d’un faisceau d’indices ou de présomptions non réfutées, suffisamment graves, précises et concordantes (Irlande c. Royaume-Uni, 18 janvier 1978, § 161 in fine, série A no 25, et Berliński, précité, § 60). En cas d’allégations sur le terrain de l’article 3 de la Convention, la Cour doit se livrer à un examen particulièrement approfondi. Lorsqu’il y a eu une procédure interne, il n’appartient pas en principe à la Cour de substituer sa propre vision des choses à celle des cours et tribunaux internes, sauf en cas d’éléments convaincants pour pouvoir s’écarter des constatations auxquelles ils sont parvenus (Gäfgen c. Allemagne [GC], no 22978/05, § 93, CEDH 2010, et Dembele c. Suisse, no 74010/11, § 40, 24 septembre 2013).

45. En cas de recours à la force au cours d’une arrestation ou d’un contrôle effectué par la police, la Cour doit rechercher si la force utilisée était strictement nécessaire et proportionnée au vu des circonstances de l’espèce et si l’Etat doit être tenu pour responsable des blessures infligées (Berliński, § 64, Dembele, § 41, et Dimitar Dimitrov, § 38, arrêts précités). Pour répondre à cette question, elle doit prendre en compte les blessures occasionnées et les circonstances dans lesquelles elles l’ont été (Osman c. Bulgarie, no 43233/98, § 60, 16 février 2006, et R.L. et M.-J.D. c. France, no 44568/98, § 68, 19 mai 2004).

46. En l’espèce, les requérants ont produit des certificats médicaux, qui n’ont pas été contestés par le Gouvernement, faisant état de plusieurs abrasions et ecchymoses à divers endroits de leurs corps (paragraphe 14 ci‑dessus). Ces blessures apparaissent à la Cour suffisamment sérieuses pour entrer dans le champ d’application de l’article 3.

47. Il n’est en outre pas contesté, en particulier au vu des faits établis par les juridictions nationales (voir les paragraphes 21-22 ci-dessus), que les deux agents de police ont fait usage de la force à l’égard des requérants. Il reste donc à établir si la force utilisée était proportionnée et si l’État doit être tenu pour responsable des blessures occasionnées. La Cour rappelle à cet égard que lorsqu’il y a eu usage de la force de la part des force de l’ordre, il incombe normalement au Gouvernement d’apporter des preuves pertinentes démontrant que le recours à la force était à la fois proportionné et nécessaire (Rehbock c. Slovénie, no 29462/95, §§ 72-76, CEDH 2000‑XII, et Ivan Vassilev, précité, § 79).

48. La Cour relève qu’en l’espèce, si les circonstances de l’incident ont été établies dans les jugements rendus dans le cadre de la procédure pénale pour dénonciation calomnieuse à l’encontre des requérants, cette procédure n’avait pas pour objet et n’a pas cherché à déterminer si le recours à la force était justifié et proportionné au comportement des requérants. Les autorités internes ne se sont pas non plus prononcées sur ce point dans le cadre de la plainte déposée par les intéressés (voir le paragraphe 54 ci-dessous). Certes, le Gouvernement soutient que les requérants étaient sous l’effet de l’alcool, qu’ils ont refusé d’obtempérer, voire qu’ils ont donné des coups aux policiers, et que la force utilisée à leur encontre était dès lors justifiée et proportionnée. La Cour observe cependant qu’aucun élément produit devant elle n’atteste de l’état d’ébriété des requérants ni d’éventuelles blessures qui auraient été constatées sur les corps des deux policiers ; il n’apparaît d’ailleurs pas qu’un contrôle d’alcoolémie ou des examens médicaux aient été effectués dans le cadre de l’enquête.

49. Au vu de ces considérations, la Cour considère qu’il n’a pas été établi en l’espèce que la force utilisée à l’égard des requérants était nécessaire et proportionnée dans les circonstances. Il s’ensuit qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention dans son aspect matériel.

2) Sur le caractère effectif de l’enquête menée

a) Arguments des parties

50. Les requérants dénoncent l’absence d’enquête sur leurs allégations de mauvais traitements, notamment que le procureur n’a pas tenu compte de leur demandes de rassembler des preuves et n’a pris aucune décision formelle sur leur plainte. Ils font valoir qu’en l’absence de décision formelle sur leur plainte d’ouvrir ou non des poursuites, ils ne pouvaient faire usage de la possibilité offerte par le droit interne d’introduire un recours contre une éventuelle décision de non-lieu du procureur. Au lieu d’enquêter sur les allégations des requérants, le parquet a décidé d’engager des poursuites contre eux pour dénonciation calomnieuse.

51. Le Gouvernement met en avant que la plainte des requérants a été enregistrée, que les intéressés ont été entendus, de même que les agents impliqués, et que les certificats médicaux produits ont été examinés. Le procureur a toutefois estimé que leur plainte était calomnieuse et a engagé des poursuites à leur encontre. À la suite de l’examen de l’affaire par les tribunaux, les requérants ont été relaxés et ils avaient la possibilité, dont le deuxième requérant a fait usage, de recevoir une indemnisation pour ce motif.

b) Appréciation de la Cour

52. La Cour rappelle que lorsqu’un individu affirme de manière défendable avoir subi des traitements contraires à l’article 3 de la part de la police ou d’autres services comparables de l’État, cette disposition, combinée avec le devoir général imposé à l’État par l’article 1 de la Convention de reconnaître à toute personne relevant de sa juridiction les droits et libertés définis dans la Convention, requiert, par implication, qu’il y ait une enquête officielle effective. Cette enquête doit pouvoir mener à l’identification et à la punition des responsables (voir Assenov et autres c. Bulgarie, 28 octobre 1998, § 102, Recueil des arrêts et décisions 1998‑VIII, et, plus récemment, Dembele, précité, § 62). Pour être effective, l’enquête menée doit être suffisamment approfondie et objective. Les autorités doivent prendre toutes les mesures raisonnables à leur disposition pour obtenir les preuves relatives aux faits en question. Une exigence de célérité et de diligence raisonnable est également implicite dans ce contexte (Batı et autres c. Turquie, nos 33097/96 et 57834/00, §§ 134-136, CEDH 2004‑IV (extraits), Dembele, précité, § 63).

53. En l’espèce, il ne fait pas de doute que les requérants ont saisi les autorités d’allégations « défendables » relatives aux mauvais traitements administrés par la police (voir les paragraphes 46-49 ci-dessus). Celles‑ci avaient donc l’obligation de mener une enquête approfondie et effective, capable de mener à l’identification et la punition des responsables.

54. Or il apparaît que si une enquête semble avoir été effectuée à la suite de la plainte des requérants (voir les paragraphes 16 et 22 ci-dessus), le parquet a décidé d’engager des poursuites contre eux pour dénonciation calomnieuse et les investigations se sont concentrées sur la commission ou non de cette infraction pénale par les requérants. Si les policiers impliqués ont bien été entendus, de même que les autres policiers présents, cela a été fait dans le cadre des poursuites contre les requérants. À aucun moment, même après la relaxe des requérants dans le cadre des poursuites menées contre eux pour trouble à l’ordre public et pour dénonciation calomnieuse, les autorités n’ont jugé utile de se pencher sur leurs allégations de mauvais traitements et d’examiner la question de savoir si la force utilisée à leur encontre avait été nécessaire et proportionnée. Aucune décision formelle ne semble avoir été prise sur la plainte des requérants, ce qui les a notamment privés de la possibilité d’introduire un recours auprès du procureur supérieur contre un éventuel refus d’ouvrir des poursuites.

55. Au vu des éléments qui précèdent, la Cour considère que les autorités ont failli à leur obligation de mener une enquête effective sur les allégations de mauvais traitements formulées par les requérants. Il y a donc eu violation de l’article 3 de la Convention de ce chef.

II. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

56. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

57. Les requérants réclament chacun 10 000 euros (EUR) au titre du préjudice moral qu’ils auraient subi.

58. Le Gouvernement soutient que ces prétentions sont mal fondées et en tout cas exagérées. Il considère que le constat de violation fournirait une satisfaction équitable suffisante aux requérants.

59. La Cour considère qu’il y a lieu de faire droit aux prétentions des requérants et leur alloue chacun 6 000 EUR au titre du préjudice moral.

B. Frais et dépens

60. Les requérants demandent également 3 060 EUR pour les frais et dépens engagés devant la Cour. Ils produisent une convention d’honoraires conclues avec leurs avocats et un décompte du travail effectué (51 heures de travail juridique au taux horaire de 60 EUR). Ils demandent que le montant octroyé par la Cour soit versé directement à leurs avocats.

61. Le Gouvernement considère ces prétentions excessives et invite la Cour à accorder un montant conforme à sa jurisprudence.

62. Selon la jurisprudence de la Cour, un requérant ne peut obtenir le remboursement de ses frais et dépens que dans la mesure où se trouvent établis leur réalité, leur nécessité et le caractère raisonnable de leur taux. En l’espèce et compte tenu des documents en sa possession et de sa jurisprudence, la Cour estime raisonnable la somme de 2 000 EUR pour la procédure devant la Cour et l’accorde aux requérants.

C. Intérêts moratoires

63. La Cour juge approprié de calquer le taux des intérêts moratoires sur le taux d’intérêt de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne majoré de trois points de pourcentage.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable ;

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention dans son volet matériel ;

3. Dit qu’il y a eu violation de l’article 3 de la Convention dans son volet procédural ;

4. Dit

a) que l’État défendeur doit verser aux requérants, dans les trois mois à compter du jour où l’arrêt sera devenu définitif conformément à l’article 44 § 2 de la Convention, les sommes suivantes, à convertir en levs bulgares au taux applicable à la date du règlement :

i) 6 000 EUR (six mille euros) à chaque requérant, soit un total de 12 000 EUR, plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt, pour dommage moral ;

ii) 2 000 EUR (deux mille euros), plus tout montant pouvant être dû à titre d’impôt par les requérants, pour frais et dépens, à verser sur le compte désigné par les avocats des requérants ;

b) qu’à compter de l’expiration dudit délai et jusqu’au versement, ces montants seront à majorer d’un intérêt simple à un taux égal à celui de la facilité de prêt marginal de la Banque centrale européenne applicable pendant cette période, augmenté de trois points de pourcentage ;

5. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 19 mai 2015, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Françoise Elens-PassosGuido Raimondi
GreffièrePrésident


Synthèse
Formation : Cour (quatriÈme section)
Numéro d'arrêt : 001-154598
Date de la décision : 19/05/2015
Type d'affaire : au principal et satisfaction équitable
Type de recours : Violation de l'article 3 - Interdiction de la torture (Article 3 - Traitement dégradant;Traitement inhumain) (Volet matériel);Violation de l'article 3 - Interdiction de la torture (Article 3 - Enquête efficace) (Volet procédural)

Parties
Demandeurs : PETKOV ET PARNAROV
Défendeurs : BULGARIE

Composition du Tribunal
Avocat(s) : VASILEVA I. ; ATANASOV N.

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2021
Fonds documentaire ?: HUDOC

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