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06/10/2020 | FRANCE | N°19DA01687

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 2e chambre - formation à 3 (quater), 06 octobre 2020, 19DA01687


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le groupe hospitalier du Havre à l'indemniser des préjudices subis du fait de sa prise en charge dans les suites d'une intervention chirurgicale du 21 janvier 2013 et à lui verser, à ce titre, la somme de 54 178,66 euros, dont 8 000 euros à déduire au titre de la provision accordée par le groupe hospitalier du Havre ainsi qu'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Mise en cause, la caiss

e locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Rouen de condamner le groupe hospitalier du Havre à l'indemniser des préjudices subis du fait de sa prise en charge dans les suites d'une intervention chirurgicale du 21 janvier 2013 et à lui verser, à ce titre, la somme de 54 178,66 euros, dont 8 000 euros à déduire au titre de la provision accordée par le groupe hospitalier du Havre ainsi qu'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Mise en cause, la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants d'Auvergne, agissant pour le compte de la caisse locale déléguée pour la sécurité sociale des travailleurs indépendants de Haute-Normandie, a demandé la condamnation du groupe hospitalier du Havre à lui verser la somme de 17 533,10 euros au titre des débours exposés pour M. D..., la somme de 1 066 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1700706 du 23 mai 2019, le tribunal administratif de Rouen a partiellement fait droit aux demandes des parties, a condamné le groupe hospitalier du Havre à verser à M. D..., la somme totale de 11 829,12 euros après déduction de la somme de 8 000 euros versée à titre de provision, et une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à la caisse locale déléguée pour l'assurance maladie des travailleurs indépendants, la somme de 13 520,23 euros et une somme de 1 080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 19 juillet 2019, le 25 mars 2020 et le 27 avril 2020, M. D..., représenté par Me A... B..., demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement en tant qu'il a limité l'indemnisation de ses préjudices par le groupe hospitalier du Havre à la somme de 11 829,12 euros ;

2°) de condamner le groupe hospitalier du Havre à lui verser la somme de 54 178,66 euros, dont 8 000 euros à déduire au titre de la provision accordée par le groupe hospitalier du Havre le 15 avril 2016, en réparation des préjudices subis du fait de sa prise en charge dans les suites de son intervention chirurgicale du 21 janvier 2013 ;

3°) de mettre à la charge du groupe hospitalier du Havre le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Anne Khater, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Bertrand Baillard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Il résulte de l'instruction que le 20 janvier 2013, M. D..., alors âgé de cinquante ans, a été victime d'une chute de vélo à la suite de laquelle il a été admis au service des urgences du centre hospitalier du Havre où le bilan radio-clinique a mis en évidence sur le membre inférieur droit, une fracture spiroïde comminutive du quart supérieur du péroné et une fracture spiroïde du tiers inférieur du tibia. Le 21 janvier 2013, il a subi dans le service de chirurgie orthopédique de cet établissement une première intervention chirurgicale d'ostéosynthèse du tibia centromédullaire avec verrouillage proximal et distal. Dans les suites immédiates de l'opération, bien qu'une rotation excessive du pied fût constatée, M. D... a été autorisé à quitter l'établissement. Le 5 février suivant, il a été revu en consultation au cours de laquelle il a été décidé d'une ré-intervention qui a eu lieu le 8 février 2013, afin de corriger l'excès de rotation externe. M. D... a regagné son domicile avec une botte en résine qui a été retirée dès le 26 février 2013, lors d'une consultation de suivi par le chirurgien orthopédique, l'appui progressif sur le membre inférieur droit ayant alors été autorisé. Des examens complémentaires en mars et avril 2013 ont mis en évidence un raccourcissement du membre inférieur droit d'environ 10 millimètres. Face à la persistance d'une rotation externe importante, M. D... a subi le 3 mars 2014 une intervention chirurgicale d'ostéotomie de dérotation de l'extrémité proximale du tibia à l'hôpital Raymond Poincaré de Garches. Une amélioration de l'état de M. D... a été constatée par la suite. Le 12 novembre 2015, M. D... a subi une dernière intervention pour l'ablation du matériel d'ostéosynthèse. Son état de santé a été regardé comme étant consolidé le 8 février 2016.

2. Estimant sa prise en charge au centre hospitalier du Havre défaillante, M. D... a, après rejet de sa demande d'indemnisation préalable, saisi le juge des référés du tribunal administratif de Rouen qui, par une ordonnance du 12 mars 2014, a ordonné une expertise médicale confiée au docteur Lance qui a déposé son rapport le 9 février 2015. Le groupe hospitalier du Havre a accordé, à titre amiable, à M. D... une provision de 8 000 euros à valoir sur le montant de son préjudice. M. D... a ensuite saisi le tribunal administratif de Rouen qui, par un jugement du 23 mai 2019, a condamné le groupe hospitalier du Havre à lui verser la somme totale de 19 829,12 euros, ramenée à 11 829,12 euros après déduction de la provision de 8 000 euros, et une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à la caisse locale déléguée pour l'assurance maladie des travailleurs indépendants la somme de 13 520,23 euros et une somme de 1 080 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et rejeté le surplus des conclusions des parties. M. D..., d'une part, et la caisse locale déléguée pour l'assurance maladie des travailleurs indépendants, d'autre part, estimant les sommes allouées insuffisantes, relèvent appel de ce jugement.

Sur la responsabilité du groupe hospitalier du Havre :

3. Il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 3 et 4 de leur jugement, d'ailleurs non contestés par les parties, de juger que la responsabilité du groupe hospitalier du Havre est engagée sur le fondement des dispositions du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, dès lors que le centre hospitalier a commis une première faute médicale à la suite de l'intervention du 8 février 2013, en immobilisant le membre supérieur droit par une botte en résine alors que l'immobilisation aurait dû être faite par un plâtre cruro-pédieux afin de maintenir la correction de l'axe tibial puis une seconde faute médicale en autorisant une remise en charge trop précoce, la botte en résine ayant été retirée dès le 26 février 2013 alors qu'à cette date, le foyer fracturaire était encore insuffisamment solide. Ces fautes ont eu pour conséquence de pérenniser un cal-vicieux en rotation externe qui a nécessité une nouvelle intervention de reprise chirurgicale, réalisée le 3 mars 2014, d'enfoncer la partie proximale du tibia sur le clou, de majorer la rotation externe, et de créer un raccourcissement du membre inférieur d'environ 10 millimètres. Ces deux manquements doivent donc être regardés comme constitutifs de fautes de nature à engager la responsabilité du groupe hospitalier du Havre ainsi que l'ont estimé à juste titre les premiers juges.

Sur les préjudices de M. D... :

4. Il résulte de l'instruction et, notamment, du rapport d'expertise du docteur Debelle du 26 juillet 2016 que l'état de santé de M. D... peut être regardé comme consolidé le 8 février 2016.

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux temporaires :

S'agissant des dépenses de santé avant consolidation :

5. La caisse locale déléguée pour l'assurance maladie des travailleurs indépendants demande, au titre des dépenses de santé avant consolidation, le remboursement des frais médicaux et pharmaceutiques exposés du 12 février 2013 au 8 février 2016 pour un montant de 2 236,26 euros. Ces débours exposés en faveur de M. D... ont été nécessaires à la surveillance du patient après l'intervention du 8 février 2013 et doivent donc être remboursés à la caisse locale déléguée pour l'assurance maladie des travailleurs indépendants. La caisse locale demande également le remboursement des frais d'hospitalisation engagés pour la reprise chirurgicale du 8 février 2013, pour un montant de 117,15 euros. Toutefois, ces frais qui ne sont pas imputables aux fautes engageant la responsabilité du groupe hospitalier du Havre qui tiennent à l'immobilisation inadaptée par une botte en résine et la remise en charge trop précoce après l'intervention du 8 février 2013, ne peuvent donner lieu à remboursement. La caisse locale demande le remboursement des frais d'hospitalisation du 2 mars 2014 au 7 mars 2014, pour un montant de 8 938,06 euros. Ces frais ayant été exposés pour l'opération d'ostéotomie de dérotation du foyer tibial en date du 3 mars 2014 sont imputables aux fautes du centre hospitalier et doivent donner lieu à remboursement par le groupe hospitalier du Havre. La caisse locale demande en dernier lieu le remboursement des frais d'hospitalisation du 12 novembre 2015 au 15 novembre 2015 pour un montant de 5 131,72 euros. Toutefois, il résulte de l'instruction, et notamment du compte-rendu opératoire du 13 novembre 2015 qui n'est contredit par aucune autre pièce médicale du dossier, que cette intervention avait pour seul but de retirer le matériel d'ostéosynthèse de l'intervention initiale qui gênait M. D... et dont aucun élément de l'instruction ne permet de considérer qu'elle n'aurait pas eu lieu d'être réalisée en l'absence de faute du centre hospitalier. C'est donc à juste titre que les premiers juges n'en ont pas accordé le remboursement à la caisse locale. Par suite, il y a lieu de condamner le groupe hospitalier du Havre à rembourser à la caisse locale déléguée pour l'assurance maladie des travailleurs indépendants, au titre des dépenses de santé avant consolidation, la somme de 11 174,32 euros.

6. M. D... établit avoir supporté des dépenses de santé restées à sa charge d'un montant total de 1 809,28 euros au titre des consultations médicales du 10 septembre 2013, du 16 septembre 2013, du 7 novembre 2013, et de l'intervention chirurgicale du 3 mars 2014, réalisée par un chirurgien de l'hôpital Raymond Poincaré. Il y a lieu, ainsi que l'ont considéré les premiers juges, de condamner le groupe hospitalier du Havre à lui rembourser cette somme. En revanche, pour les mêmes motifs qu'exposés au point précédent du présent arrêt, les dépenses de santé restées à la charge du requérant au titre de l'année 2015 ne sont pas imputables aux fautes commises par le centre hospitalier et ne doivent donc pas donner lieu à remboursement.

S'agissant des frais d'assistance par une tierce personne avant consolidation :

7. M. D... demande, à ce titre, l'indemnisation de deux heures quotidiennes d'assistance par une tierce personne du 21 mars 2013 au 30 juin 2013 puis du 8 mars 2014 au 19 juin 2014 et d'une heure par jour en juillet 2013 puis du 20 juin 2014 au 15 juillet 2014, dont à déduire l'assistance d'une heure par jour du 21 mars 2013 au 20 mai 2013 qui aurait été nécessaire indépendamment des fautes commises par le centre hospitalier. Toutefois, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, il résulte du rapport d'expertise judiciaire que seuls les besoins d'assistance par une tierce personne au titre de l'année 2014, soit du 8 mars au 19 juin 2014 à raison de deux heures par jour et du 20 juin au 15 juillet 2014 à raison d'une heure par jour, sont imputables aux fautes commises par le groupe hospitalier du Havre. Par ailleurs, l'assistance non spécialisée dont a eu besoin M. D... lui a été apportée dans un cadre familial. Dès lors, compte tenu du coût horaire global d'une assistance par une tierce personne, qui peut être fixé à 13 euros par heure, c'est par une juste appréciation que les premiers juges ont évalué ce préjudice à la somme de 3 042 euros.

S'agissant des frais d'obtention du dossier médical, les frais d'expertises amiable et judiciaire :

8. C'est par une juste appréciation, qui n'est pas contestée par les parties, que les premiers juges ont alloué à M. D..., au titre des frais d'obtention du dossier médical, la somme de 4,76 euros et au titre des frais d'expertise amiable, la somme de 977,50 euros, les frais d'expertise judiciaire ne pouvant donner lieu à indemnisation.

S'agissant des frais de trajet pour se rendre à l'hôpital de Garches :

9. C'est également par une juste appréciation, qui n'est pas contestée par les parties, que les premiers juges ont alloué la somme de 1 538,42 euros à M. D... au titre des frais de trajet pour se rendre à l'hôpital Raymond Poincaré de Garches le 16 septembre 2013, le 7 novembre 2013, le 11 février 2014, le 29 avril 2014 et le 28 novembre 2014 et pour son hospitalisation pour l'opération de dérotation du 2 au 7 mars 2014, en tenant compte de la puissance fiscale de son véhicule, du montant de l'indemnité kilométrique applicable en 2013 et 2014, du montant des frais de péage dont il a été justifié et compte tenu également de la production d'une facture pour un hébergement du 6 au 7 novembre 2013 pour un montant de 90 euros. C'est également à juste titre qu'il n'a pas été fait droit à la demande d'indemnisation des frais de trajet exposés en 2015 pour se rendre aux consultations et à l'hospitalisation pour ablation du matériel d'ostéosynthèse, en l'absence d'imputabilité aux fautes commises par le groupe hospitalier du Havre.

S'agissant du préjudice économique :

10. M. D... exerce la profession de coiffeur dans le cadre d'une entreprise individuelle au Havre qui employait, au titre des années 2013 et 2014, trois salariés. Il soutient qu'il a subi une perte de chiffre d'affaires pendant les périodes d'arrêt de travail, du fait d'une perte de clientèle puisqu'il assure, au même titre que ses employés, des prestations de coiffure et, par voie de conséquence, une perte de bénéfices. Il invoque, en particulier, une perte de chiffre d'affaires du 20 mars 2013 au 30 juin 2013 qu'il chiffre à la somme de 4 845,60 euros, du 2 mars 2014 au 19 juin 2014, qu'il chiffre à 10 970,04 euros et du 11 novembre 2015 au 30 novembre 2015, qu'il chiffre à 2 675 euros. Pour les mêmes motifs qu'énoncés précédemment, l'éventuel préjudice économique subi au titre de cette dernière période ne peut en tout état de cause donner lieu à indemnisation dès lors que cet arrêt de travail n'est pas imputable aux fautes commises par le centre hospitalier. S'agissant des deux autres périodes invoquées, du 20 mars 2013 au 30 juin 2013 et du 2 mars 2014 au 19 juin 2014, il résulte de l'instruction qu'aucune des pièces comptables produites au dossier ne permet de quantifier ni même d'admettre le principe même d'une baisse de chiffre d'affaires sur les mois considérés imputable à l'absence de M. D.... La seule pièce produite dont M. D... tire une évaluation chiffrée des pertes de chiffres d'affaires attendus en comparaison des périodes précédentes pour les mois de mars, avril et mai 2013 puis les mois de mars, avril, mai et juin 2014, est un tableau estimatif établi par M. D... lui-même pour les besoins de la cause et dont les données ne sont corrélées à aucune pièce comptable alors qu'au demeurant, les données comptables produites enregistrent une hausse du chiffre d'affaires pour les deux exercices clos en 2013 et 2014. Dans ces conditions, M. D... n'est pas fondé à se plaindre de ce que le jugement attaqué a mis à la charge du groupe hospitalier du Havre, au titre des pertes de gains professionnels actuels, pour la seule période du 20 mai au 30 juin 2013, la somme de 1 800 euros.

11. La caisse locale déléguée pour l'assurance maladie des travailleurs indépendants justifie avoir versé à M. D... des indemnités journalières pour un montant de 226,27 euros pour la période du 25 mai 2014 au 31 mai 2014 et de 416,80 euros pour la période du 15 novembre 2015 au 4 décembre 2015. En l'absence d'imputabilité aux fautes du centre hospitalier de l'arrêt de travail de novembre 2015, la caisse locale déléguée pour l'assurance maladie des travailleurs indépendants ne peut avoir droit au remboursement de la somme de 416,80 euros. Dans ces conditions, la caisse locale n'est pas fondée à se plaindre de ce que le jugement attaqué a mis à la charge du groupe hospitalier du Havre la somme de 1 810,16 euros au titre des indemnités journalières versées à M. D... entre le 2 mars 2014 et le 31 mai 2014.

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux permanents :

12. Il résulte de l'instruction, ce qui n'est pas contesté en appel, que la somme de 14,58 euros pour la réalisation d'une goniométrie le 2 mai 2016 est restée à la charge de M. D.... Il y a lieu de confirmer la condamnation du groupe hospitalier du Havre à lui rembourser cette somme.

13. Il résulte également de l'instruction et, en particulier, du rapport d'expertise du docteur Debelle que, depuis la consolidation de son état de santé, M. D... doit porter une semelle orthopédique, à raison d'un renouvellement deux fois par an, du fait du raccourcissement de sa jambe. Le coût de cet appareillage est justifié à hauteur de 145 euros dont il convient de déduire le remboursement par la sécurité sociale, également justifié, de 14,43 euros et par la mutuelle Harmonie Mutuelle de 127,68 euros, soit une dépense restée à charge de M. D... à hauteur de 2,89 euros par semelle acquise. Ainsi, entre la date de consolidation jusqu'à la date du présent arrêt, le coût resté à charge de M. D... pour l'acquisition de ces semelles orthopédiques s'élève à la somme de 23,12 euros correspondant à un coût annuel de 5,78 euros. Pour les frais postérieurs au présent arrêt, il sera fait une juste appréciation du capital représentatif de ce besoin, sur la base du barème 2018 de capitalisation des rentes de victimes publié par la revue La Gazette du Palais, qui fixe à 23,386 le point de rente viagère pour un homme âgé de cinquante-six ans, en l'évaluant à 135,17 euros. Il y a donc lieu de porter la condamnation du groupe hospitalier du Havre à ce titre à la somme de 158,29 euros.

14. La caisse locale déléguée pour l'assurance maladie des travailleurs indépendants demande le remboursement de dépenses futures pour l'acquisition de cette semelle orthopédique à hauteur de 466,84 euros dont elle justifie par la production du relevé de ses débours et l'attestation d'imputabilité établie par le médecin-conseil du service médical recours contre tiers. Elle n'est donc pas fondée à se plaindre de ce que le jugement attaqué lui a alloué, à ce titre, la somme de 535,75 euros.

En ce qui concerne les préjudices extra-patrimoniaux :

S'agissant du déficit fonctionnel temporaire :

15. Il résulte de l'instruction que si M. D... a été hospitalisé durant la journée du 8 février 2013 pour la reprise chirurgicale, entraînant un déficit fonctionnel temporaire total pour cette journée, cette hospitalisation est liée à l'intervention initiale qui n'est pas fautive. En revanche, il ressort des rapports d'expertise des 9 février 2015 et 26 juillet 2016 que M. D... a subi un déficit fonctionnel temporaire partiel de 50 % entre le 9 février et le 30 juin 2013 soit durant cent quarante-deux jours, alors qu'en l'absence de faute, le déficit fonctionnel temporaire aurait été de 50 % durant quarante jours puis de 25 % durant soixante et un jours puis de 10 % durant quarante et un jours. Il a ensuite subi un déficit fonctionnel temporaire de 25 % du 1er au 31 juillet 2013 alors qu'en l'absence de faute, il n'aurait été que de 10 %. Puis il a subi du 1er août 2013 au 20 janvier 2014 un déficit fonctionnel temporaire à 15 % alors qu'il n'aurait été que de 10 % en l'absence de faute. Du 21 janvier 2014 au 1er mars 2014, le déficit fonctionnel temporaire du requérant été fixé à 15 %, alors qu'il n'aurait subi aucun déficit fonctionnel temporaire durant cette période en l'absence de faute. Du 2 au 7 mars 2014, M. D... a été hospitalisé pour la réalisation d'une intervention chirurgicale de dérotation, ce qui a entraîné un déficit fonctionnel temporaire total durant six jours. Du 8 mars au 19 juin 2014, le déficit fonctionnel temporaire de M. D... a été évalué par l'expertise judicaire à 50 %, alors qu'il aurait été nul en l'absence de faute. Du 20 juin au 15 juillet 2014, le déficit fonctionnel temporaire a été fixé à 25 %, puis à 15 % du 16 juillet 2014 au 1er octobre 2014, puis à 10 % du 2 octobre 2014 au 8 février 2016, alors qu'il n'aurait subi pour ces trois périodes aucun déficit fonctionnel temporaire en l'absence de faute selon le rapport d'expertise du docteur Debelle du 26 juillet 2016. C'est par une juste appréciation, sur la base de 20 euros par jour, que les premiers juges ont alloué à M. D..., à ce titre, la somme de 3 533 euros.

S'agissant des souffrances endurées :

16. Il ressort du rapport d'expertise du 26 juillet 2016 que les souffrances endurées par M. D... ont été estimées à 3,5 sur une échelle 7. C'est par une juste appréciation que les premiers juges ont évalué l'indemnisation de ce préjudice à la somme de 5 000 euros.

S'agissant du préjudice esthétique :

17. Il ressort du rapport d'expertise du 26 juillet 2016 que M. D... a subi un préjudice esthétique temporaire estimé à 3 sur 7 puis à compter de la consolidation, un préjudice esthétique permanent estimé à 1,5 sur 7. C'est par une juste appréciation que les premiers juges ont évalué l'indemnisation de ces deux préjudices à la somme de 2 000 euros, l'indemnisation du préjudice esthétique temporaire pouvant être évaluée à 800 euros alors que celle du préjudice esthétique définitif pouvant l'être à 1 200 euros.

Sur les sommes dues par le groupe hospitalier du Havre :

18. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... est seulement fondé à demander la condamnation du groupe hospitalier du Havre à lui verser la somme totale de 19 877,83 euros, dont 8 000 euros à déduire au titre de la provision accordée par le groupe hospitalier du Havre le 15 avril 2016. La caisse locale déléguée pour l'assurance maladie des travailleurs indépendants n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Rouen a condamné le groupe hospitalier du Havre à lui rembourser la somme de 13 520,23 euros au titre de ses débours définitifs.

Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :

19. Si la caisse locale déléguée pour l'assurance maladie des travailleurs indépendants réitère en appel sa demande de versement de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, le tribunal administratif de Lille lui a alloué, par le jugement attaqué, la somme de 1 080 euros correspondant au plafond fixé par l'arrêté du 27 décembre 2018 alors en vigueur. Ses conclusions aux fins de réévaluation des débours ayant été rejetées, les conclusions de la caisse présentées sur le fondement de l'article L. 376-1 ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

20. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du groupe hospitalier du Havre le versement à M. D... et à la caisse locale déléguée pour l'assurance maladie des travailleurs indépendants, d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 19 829,12 euros que le groupe hospitalier du Havre a été condamné à verser à M. D... est portée à la somme de 19 877,83 euros, dont 8 000 euros à déduire au titre de la provision accordée par le groupe hospitalier du Havre le 15 avril 2016.

Article 2 : Le jugement n° 1700706 du 23 mai 2019 du tribunal administratif de Rouen est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

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N°19DA01687


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 2e chambre - formation à 3 (quater)
Numéro d'arrêt : 19DA01687
Date de la décision : 06/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Service public de santé.

Responsabilité de la puissance publique - Réparation - Évaluation du préjudice.


Composition du Tribunal
Président : Mme Seulin
Rapporteur ?: Mme Anne Khater
Rapporteur public ?: M. Baillard
Avocat(s) : SELARL MARGUET LEMARIE COURBON

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2020-10-06;19da01687 ?
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