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12/12/2012 | FRANCE | N°362392

France | France, Conseil d'État, 1ère sous-section jugeant seule, 12 décembre 2012, 362392


Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 août et 13 septembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. François C, demeurant ... ; M. C demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1203513 du 16 août 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 16 mai 2012 par laquelle le directeur de l'agence régionale

de santé de Lorraine a autorisé le transfert, au sein de la commune de Y...

Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 31 août et 13 septembre 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour M. François C, demeurant ... ; M. C demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1203513 du 16 août 2012 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à la suspension de l'exécution de la décision du 16 mai 2012 par laquelle le directeur de l'agence régionale de santé de Lorraine a autorisé le transfert, au sein de la commune de Yutz, de l'officine de pharmacie appartenant à M. A ;

2°) statuant en référé, de suspendre l'exécution de cet arrêté ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pascal Trouilly, Maître des Requêtes,

- les observations de la SCP Odent, Poulet, avocat de M. C et de Me Bouthors, avocat de M. A,

- les conclusions de M. Alexandre Lallet, rapporteur public ;

La parole ayant été à nouveau donnée à la SCP Odent, Poulet, avocat de M. C et à Me Bouthors, avocat de M. A ;

1. Considérant qu'il appartient au juge des référés qui rejette une demande tendant à la suspension de l'exécution d'une décision administrative au motif qu'il n'est pas fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de cette décision, d'analyser, soit dans les visas, soit dans les motifs de son ordonnance, les moyens développés au soutien de la demande de suspension, afin, notamment, de mettre le juge de cassation en mesure d'exercer son contrôle ;

2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg, et notamment du mémoire introductif d'instance de M. C, que celui-ci avait soutenu que la décision contestée du 16 mai 2012 méconnaissait les dispositions des articles L. 5125-3 et L. 5125-11 du code de la santé publique ; que le juge des référés, qui a seulement indiqué, dans les motifs de son ordonnance, qu'aucun des moyens invoqués n'était, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée, s'est borné, dans les visas de cette ordonnance, à mentionner que " le requérant soutient que la décision attaquée est entachée d'erreur de droit et d'erreur de fait " ; qu'il ne peut ainsi être regardé comme ayant analysé les moyens soulevés par M. C dans les visas ou dans les motifs de sa décision ; que cette ordonnance est, par suite, insuffisamment motivée et doit, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, être annulée ;

3. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de statuer sur la demande de suspension en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;

4. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. (...) " ;

5. Considérant, d'une part, qu'il résulte des éléments versés à la procédure de référé, et notamment des données statistiques et comptables fournies par M. C, que le transfert de l'officine de pharmacie de M. A est susceptible, compte tenu de la localisation envisagée de cette officine à proximité d'un centre médical, de priver rapidement M. C d'une partie significative de sa clientèle et, par suite, de préjudicier de manière grave et immédiate à sa situation ; que, dans ces conditions, la condition d'urgence prévue à l'article L. 521-1 du code de justice administrative doit être regardée comme remplie ;

6. Considérant, d'autre part, que le moyen tiré de ce que la décision du 16 mai 2012 du directeur de l'agence régionale de santé de Lorraine méconnaît les dispositions de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique, faute de répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population du quartier de destination de l'officine qui doit être transférée ainsi que des autres quartiers pour lesquels ce transfert est susceptible de modifier significativement l'approvisionnement en médicaments, apparaît, en l'état de l'instruction, de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de cette décision ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de prononcer la suspension de l'exécution de la décision du 16 mai 2012 du directeur de l'agence régionale de santé de Lorraine ;

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que M. C, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. A la somme demandée par celui-ci au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge tant de l'Etat que de M. A le versement à M. C d'une somme de 1 500 euros chacun au titre des mêmes dispositions ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'ordonnance n° 1203513 du 16 août 2012 du juge des référés du tribunal administratif de Strasbourg est annulée.

Article 2 : L'exécution de la décision du 16 mai 2012 du directeur de l'agence régionale de santé de Lorraine est suspendue.

Article 3 : L'Etat et M. A verseront chacun à M. C la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. A au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5: La présente décision sera notifiée à M. François C, à M. Philippe A et à la ministre des affaires sociales et de la santé.

Copie en sera adressée pour information à l'agence régionale de santé de Lorraine.


Synthèse
Formation : 1ère sous-section jugeant seule
Numéro d'arrêt : 362392
Date de la décision : 12/12/2012
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 12 déc. 2012, n° 362392
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Pascal Trouilly
Rapporteur public ?: M. Alexandre Lallet
Avocat(s) : SCP ODENT, POULET ; BOUTHORS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2012:362392.20121212
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