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20/12/2016 | FRANCE | N°405054

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 20 décembre 2016, 405054


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 15 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération, demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté la demande du président de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération du 7 juillet 2016 tendant à l'abrogation de l'annexe visée à l'article

47.2 g) du cahier des charges introduit par l'avenant n° 12, approuvé par un déc...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 15 novembre 2016 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération, demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de la décision implicite par laquelle le Premier ministre a rejeté la demande du président de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération du 7 juillet 2016 tendant à l'abrogation de l'annexe visée à l'article 47.2 g) du cahier des charges introduit par l'avenant n° 12, approuvé par un décret en date du 21 août 2015, à la convention de concession passée entre l'Etat et la société SANEF ;

2°) d'enjoindre au Premier ministre, sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard à compter de la date fixée par la décision à intervenir, de suspendre l'exécution de cet article 47.2 g) du cahier des charges en tant qu'il rend impossible la mise en oeuvre du projet déclaré d'utilité publique le 27 juillet 2012 ou d'enjoindre au Premier ministre de réexaminer la demande d'abrogation formulée par le président de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la condition d'urgence est remplie, dès lors que la décision implicite litigieuse, en rendant impossible la réalisation du barreau routier indispensable au désengorgement du trafic sur le territoire des communes de Bailly-Romainville, Villiers-sur-Morin et Coutrevoult préjudicie de manière grave et immédiate à l'intérêt public s'attachant à la réalisation de ce barreau routier ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision implicite contestée ;

- la décision litigieuse méconnaît l'opération déclarée d'utilité publique par arrêté du 27 juillet 2012 en rendant impossible la réalisation du barreau routier A4/RN36 sur le territoire de la commune de Bailly-Romainvilliers ;

- elle aboutit à une modification substantielle de la déclaration d'utilité publique du 27 juillet 2012.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2016, la société SANEF conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la requérante la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la requête est irrecevable, que la condition d'urgence n'est pas remplie et que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2016, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la requête est manifestement irrecevable, que la condition d'urgence n'est pas remplie et que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le décret n° 2015-1046 du 21 août 2015 ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération, d'autre part, le Premier ministre, la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat et la société SANEF ;

Vu le procès-verbal de l'audience publique du 8 décembre à 10 heures au cours de laquelle ont été entendus :

- Me Bouzidi, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération ;

- les représentants de la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération ;

- les représentants de la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat ;

- Me Nicolaÿ, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la société SANEF ;

- les représentants de la société SANEF ;

et à l'issue de laquelle le juge des référés a clos l'instruction ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. Il résulte de ces dispositions que le prononcé de la suspension d'un acte administratif est subordonné notamment à une condition d'urgence. L'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire.

3. Le président de la communauté d'agglomération du Val d'Europe agglomération a demandé au Premier ministre, par un courrier du 7 juillet 2016, d'abroger l'annexe visée au paragraphe 2, g), de l'article 47 de l'avenant n° 12 au contrat de concession conclu entre l'Etat et la société SANEF, approuvé par le décret du 21 août 2015 qui prévoit la reconfiguration de l'échangeur n° 14 de l'autoroute A4 au motif que sa mise en oeuvre rendrait impossible la réalisation de la portion du barreau routier reliant cet échangeur de l'autoroute A4 à la RN36 et du giratoire permettant le raccordement à l'échangeur qui ont été déclarés d'utilité publique par arrêté du 27 juillet 2012. La communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération demande la suspension de l'exécution de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le Premier ministre sur cette demande.

4. Pour justifier de l'urgence à suspendre l'exécution de la décision contestée, la requérante soutient que celle-ci porterait atteinte de manière grave et immédiate à sa situation au motif qu'en faisant obstacle à la réalisation du barreau devant relier l'échangeur n°14 de l'autoroute A4 à la RN36, elle empêcherait le désengorgement du trafic routier sur la commune de Bailly-Romainvilliers.

5. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'avenant n° 12 du contrat de concession conclu entre l'Etat et la société SANEF en tant qu'il se rapporte à l'échangeur n° 14 de l'autoroute A4 ne constitue pas une renonciation de l'Etat à la réalisation du barreau de raccordement entre cet autoroute A4 et la RN36. D'une part, l'annexe 5 à cet avenant à laquelle renvoie l'article 47, 2, g), relatif à cet échangeur prévoit un échelonnement des travaux en deux phases. Elle précise la nature des travaux à réaliser dans le cadre de la première phase en vue de la reconfiguration de l'échangeur 14 et mentionne que la seconde phase dépendra de la réalisation du barreau de raccordement à la RN36. D'autre part, il ne peut être reproché à l'Etat de ne pas avoir pris d'engagement dans le cadre de ce contrat, qui le lie exclusivement à la SANEF, pour la réalisation du barreau de raccordement dès lors que la réalisation de celui-ci relève de la compétence du département de Seine-et-Marne. Il est donc inexact de soutenir que la reconfiguration de l'échangeur 14 de l'autoroute A4 telle qu'elle a été précisée par cet avenant reposerait sur l'hypothèse que le barreau de raccordement ne se fera pas.

6. En outre, si la requérante soutient que l'aménagement d'un bassin de rétention d'eaux pluviales sur la parcelle YA7, autorisé par un arrêté du 12 avril 2016, fait obstacle à la réalisation du barreau de raccordement, ni la conception ni la localisation du bassin ne sont fixées par le contrat de concession. Par suite, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'avenant arrêterait le tracé de la construction de cet échangeur et la localisation des ouvrages inhérents à cette construction de telle sorte qu'ils feraient matériellement obstacle à la réalisation du barreau de raccordement à la RN36 telle qu'il a été déclaré d'utilité publique et préjudicieraient de manière grave et immédiate à sa réalisation.

7. Il résulte de tout ce qui précède qu'en l'état de l'instruction, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les fins de non recevoir relatives à la recevabilité de la requête au fond, que la condition d'urgence n'est pas remplie. Par suite, la demande de suspension présentée par la communauté d'agglomération Val d'Europe agglomération doit être rejetée, y compris ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge le versement à la société SANEF de la somme que celle-ci demande au titre des mêmes dispositions.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de la communauté d'agglomération du Val d'Europe agglomération est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société SANEF au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la communauté d'agglomération du Val d'Europe agglomération, à la ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat et à la société SANEF.

Copie en sera adressée pour information au Premier ministre.


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 405054
Date de la décision : 20/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 déc. 2016, n° 405054
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN ; SCP BOUZIDI, BOUHANNA

Origine de la décision
Date de l'import : 03/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2016:405054.20161220
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