LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 4 décembre 2008), que la société Teris, devenue la société Teris spécialités (la société Teris), a confié à la société CT environnement (la société CTE) l'installation d'une plate-forme de déchets ; que la réception est intervenue le 1er mars 2002 ; que la société CTE a été mise en redressement judiciaire le 23 juillet 2002 puis en liquidation judiciaire le 3 septembre 2002, Mme X... étant désignée liquidateur ; que le 13 janvier 2003, un sinistre est survenu sur l'installation sous l'effet du gel en raison de malfaçons affectant le système de purge ; que la société Teris, qui avait été condamnée en référé à consigner le solde restant dû sur le montant des travaux, a assigné la société CTE, les assureurs de celle-ci et le liquidateur, et demandé d'une part, la réparation de son préjudice et d'autre part, la réduction du prix des travaux ;
Attendu que la société Teris fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes formées contre la société CTE et de l'avoir condamnée à payer au liquidateur la somme de 421 823,95 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 21 octobre 2005 et ordonné la déconsignation au profit du liquidateur de cette somme, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en cas d'exécution fautive d'un contrat engageant la responsabilité d'un contractant, son cocontractant peut demander, à titre de réparation, la réfaction du prix restant à verser ; qu'en relevant, pour faire échec à l'action en responsabilité menée par la société Teris, que la mise en cause de la responsabilité contractuelle de la société CTE ne peut pas donner lieu à la réfaction du prix mais au versement de dommages-intérêts, la cour d'appel a violé les articles 1184 et 1147 du code civil ;
2 / que les juges du fond sont tenus de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; que la cour d'appel a expressément relevé que la responsabilité contractuelle de la société CTE était engagée en l'espèce et justifiait l'allocation de dommages-intérêts ; qu'en relevant, pour condamner à paiement la société Teris du solde des travaux, que cette dernière demandait la réfaction du prix, à laquelle elle ne pouvait prétendre, et non l'allocation de dommages-intérêts, la cour d'appel a violé l'article 12 du code de procédure civile ;
3°/ que seules les créances ayant leur origine antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective sont soumises à déclaration ; qu'en l'espèce, la créance de la société Teris est résultée d'un sinistre ayant eu lieu en janvier 2003 qui a mis en évidence des malfaçons affectant le système de purge de l'installation fournie par la société CTE et, partant, ses défauts de conception et d'exécution ; qu'en relevant dès lors, pour débouter la société Teris de sa demande en paiement, que sa créance découle de l'inexécution du contrat originaire et était soumise à déclaration cependant que le sinistre, cause de la demande en paiement de la société Teris et partant de sa créance, a eu lieu en janvier 2003, soit postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective de la société CTE en date du 23 juillet 2002, convertie en liquidation judiciaire le 3 septembre 2002, la cour d'appel a violé l'article L 621-40 du code de commerce dans sa rédaction alors applicable ;
4°/ que les manquements contractuels de la société CTE justifient une diminution du prix convenu au titre de ses prestations et non une déclaration de créance de la société Teris à son passif ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L 621-40 du code de commerce dans sa rédaction alors applicable ;
Mais attendu que lorsque le contractant défaillant a été mis en procédure collective, la créance née, avant le jugement d'ouverture, de l'exécution défectueuse ou tardive de prestations convenues ne peut être invoquée par le cocontractant pour obtenir une réduction du prix ou se compenser avec le prix de ces prestations qu'à la condition d'avoir été déclarée ; qu'ayant constaté que le système de purge ne fonctionnait pas correctement, que l'exécution défectueuse par la société CTE des prestations convenues était antérieure au jugement d'ouverture de sa procédure collective et que la créance née de cette exécution n'avait pas été déclarée par la société Teris, l'arrêt retient exactement que cette société était tenue de payer la totalité de ce qu'elle restait devoir à la société CTE au titre du contrat ; que par ces seuls motifs, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen, inopérant en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Teris spécialités aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Teris spécialités à payer à la société Hdi-Gerling industrie Versicherung AG la somme de 1 200 euros et à Mme X..., ès qualités, la somme de 2 500 euros et rejette sa demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars deux mille dix.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société Teris spécialités
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné, après déconsignation, la Société TERIS SPECIALITES à payer à Me X..., ès-qualités, la somme de 421.823,95 € avec intérêts au taux légal à compter du 21 octobre 2005 et d'AVOIR débouté la Société TERIS SPECIALITES de toutes ses demandes dirigées à l'encontre de la Société CT ENVIRONNEMENT ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE : "la Société TERIS SPECIALITES n'a pas déclaré sa créance au passif de la procédure collective de la Société CT ENVIRONNEMENT ; que l'absence de déclaration de créance fait obstacle à la compensation, même entre créances connexes découlant du même contrat ; que la Société TERIS SPECIALITES reste tenue de payer la totalité de ce qu'elle reste devoir à la Société CT ENVIRONNEMENT au titre du contrat et ne peut déduire sa prétendue créance de dommages intérêts, bien que cette créance découle de l'exécution de ce contrat ; que d'ailleurs, la Société TERIS SPECIALITES précise qu'il est bien clair qu'elle ne se prétend pas créancière de dommages et intérêts mais qu'elle demande simplement que le prix contractuel soit diminué pour tenir compte du fait que les prestations dues n'ont pas été complètement et correctement fournies ; qu'elle demande en conséquence que Maître X..., ès-qualités, soit condamnée à lui payer la somme de 179.652,38 € ; qu'il ressort de l'expertise que le système de purge ne fonctionnait pas correctement car les vannes n'étaient pas placées aux points les plus bas et que certaines d'entre elles étaient inaccessibles pour avoir été cachées par le calorifugeage ; que l'expertise ni aucun autre élément du dossier ne vient démontrer que l'installation n'a pas été complètement fournie, conformément aux devis visés par le marché ; que dès lors la totalité du prix doit être versée ; que les malfaçons affectant le système de purge engage la responsabilité contractuelle de la Société CT ENVIRONNEMENT et se traduisent pas l'octroi de dommages-intérêts mais ne peuvent donner lieu à la réduction du prix ; qu'il convient en conséquence de débouter la Société TERIS SPECIALITES de sa demande en réfaction du prix ; que la Société TERIS SPECIALITES a demandé l'autorisation de consigner la somme de 441.410,11 € correspondant à la somme qu'elle reste devoir au titre du marché ; que ce montant n'est pas contesté par Me X..., ès-qualités, non plus que sa réduction à la somme de 421.823,95 €, après le paiement d'un sous-traitant à hauteur de 19.856,16 € ; qu'il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu'il a implicitement condamné la Société TERIS SPECIALITES à payer à Maître X..., ès-qualités, la somme de 421.823, 95 € et en ce qu'il a explicitement ordonné la déconsignation de cette somme au profit de Maître X... ès-qualités ; que le jugement doit également être confirmé en ce qu'il a condamné la Société TERIS SPECIALITES à payer à Me X..., ès-qualités, les intérêts au taux légal sur la somme de 421.823,95€ à compter du 21 octobre 2005" ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE " les sommes mises en séquestre auprès de Monsieur le Bâtonnier des Hauts de Seine représentent le solde du prix des prestations de CTE dû par TERIS dans le cadre du contrat de l'usine de Roussillon ; que le quantum n'est pas contesté, pour un montant final de 421.823,95 € après règlement des sous traitants intervenue en action directe ; qu'en conséquence, le Tribunal ordonnera la déconsignation des sommes mises en séquestre auprès de Monsieur le Bâtonnier des Hauts de Seine et leurs remises à Me X... ès-qualités, pour la somme de 421.823,95 €, et condamnera TERIS à payer à Me X... ès-qualités les intérêts au taux légal sur cette même somme à compter du 21 octobre 2005, date de l'acte introductif de la présente instance" ;
ALORS 1°) QUE : en cas d'exécution fautive d'un contrat engageant la responsabilité d'un contractant, son cocontractant peut demander, à titre de réparation, la réfaction du prix restant à verser ; qu'en relevant, pour faire échec à l'action en responsabilité menée par la Société TERIS SPECIALITES, que la mise en cause de la responsabilité contractuelle de la Société CT ENVIRONNEMENT ne peut pas donner lieu à la réfaction du prix mais au versement de dommages-intérêts, la Cour d'appel a violé les articles 1184 et 1147 du Code civil ;
ALORS 2°) QUE : les juges du fond sont tenus de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables ; que la Cour d'appel a expressément relevé que la responsabilité contractuelle de la Société CT ENVIRONNEMENT était engagée en l'espèce et justifiait l'allocation de dommages-intérêts ; qu'en relevant, pour condamner à paiement la Société TERIS SPECIALITES du solde des travaux, que cette dernière demandait la réfaction du prix, à laquelle elle ne pouvait prétendre, et non l'allocation de dommages-intérêts, la Cour d'appel a violé l'article 12 du Code de procédure civile ;
ALORS 3°) QUE : seules les créances ayant leur origine antérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective sont soumises à déclaration ; qu'en l'espèce, la créance de la Société TERIS SPECIALITES est résultée d'un sinistre ayant eu lieu en janvier 2003 qui a mis en évidence des malfaçons affectant le système de purge de l'installation fournie par la Société CT ENVIRONNEMENT et, partant, ses défauts de conception et d'exécution ; qu'en relevant dès lors, pour débouter la Société TERIS SPECIALITES de sa demande en paiement, que sa créance découle de l'inexécution du contrat originaire et était soumise à déclaration cependant que le sinistre, cause de la demande en paiement de la Société TERIS SPECIALITES et partant de sa créance, a eu lieu en janvier 2003, soit postérieurement au jugement d'ouverture de la procédure collective de la Société CT ENVIRONNEMENT en date du 23 juillet 2002, convertie en liquidation judiciaire le 3 septembre 2002, la Cour d'appel a violé l'article L.621-40 du Code de commerce dans sa rédaction alors applicable ;
ALORS 4°) QUE : les manquements contractuels de la Société ENVIRONNEMENT justifient une diminution du prix convenu au titre de ses prestations et non une déclaration de créance de la Société TERIS SPECIALITES à son passif ; qu'en jugeant le contraire, la Cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L.621-40 du Code de commerce dans sa rédaction alors applicable.