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21/04/2015 | CEDH | N°001-153920

CEDH | CEDH, AFFAIRE DANIS ET ASSOCIATION DES PERSONNES D'ORIGINE TURQUE c. ROUMANIE, 2015, 001-153920


TROISIÈME SECTION

AFFAIRE DANIS ET L’ASSOCIATION DES PERSONNES D’ORIGINE TURQUE c. ROUMANIE

(Requête no 16632/09)

ARRÊT

STRASBOURG

21 avril 2015

DÉFINITIF

21/07/2015

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Danis et l’Association des personnes d’origine turque c. Roumanie,

La Cour européenne des droits de l’homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :

Josep Casadevall, pré

sident,
Luis López Guerra,
Ján Šikuta,
Dragoljub Popović,
Kristina Pardalos,
Valeriu Griţco,
Iulia Antoanella Motoc, juges,
et de Step...

TROISIÈME SECTION

AFFAIRE DANIS ET L’ASSOCIATION DES PERSONNES D’ORIGINE TURQUE c. ROUMANIE

(Requête no 16632/09)

ARRÊT

STRASBOURG

21 avril 2015

DÉFINITIF

21/07/2015

Cet arrêt est devenu définitif en vertu de l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Danis et l’Association des personnes d’origine turque c. Roumanie,

La Cour européenne des droits de l’homme (troisième section), siégeant en une chambre composée de :

Josep Casadevall, président,
Luis López Guerra,
Ján Šikuta,
Dragoljub Popović,
Kristina Pardalos,
Valeriu Griţco,
Iulia Antoanella Motoc, juges,
et de Stephen Phillips, greffier de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 31 mars 2015,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (no 16632/09) dirigée contre la Roumanie et dont un ressortissant de cet État et une association de droit roumain, M. Sabit Danis et l’Association des personnes d’origine turque (Asociaţia etnicilor turci) (« respectivement le requérant et la requérante »), ont saisi la Cour le 20 mars 2009 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Les requérants ont été représentés par Me P. Matei, avocat à Bucarest. Le gouvernement roumain (« le Gouvernement ») a été représenté par son agente, Mme C. Brumar, du ministère des Affaires étrangères.

3. Les requérants allèguent en particulier avoir subi une discrimination en ce qui concerne leur droit à se porter candidats aux élections parlementaires.

4. Le 11 mars 2013, la requête a été communiquée au Gouvernement.

EN FAIT

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

5. Le requérant est né en 1963 et réside à Constanţa. La requérante est une association de droit roumain constituée en 2004 et ayant son siège à Constanţa. Le requérant était le candidat de la requérante à un mandat de député lors des élections de novembre 2008 (paragraphe 9 ci-dessous).

6. Par une décision avant dire droit du 27 janvier 2004, le tribunal de première instance de Constanţa reconnut la personnalité morale de la requérante et ordonna son inscription dans le registre des associations et des fondations. Selon les statuts de la requérante, le but de l’association est essentiellement politique puisque celle-ci vise la représentation politique des citoyens roumains d’origine turque.

7. La requérante participa aux élections parlementaires du 28 novembre 2004 où elle obtint 7 396 votes. Une autre association de la minorité turque ayant obtenu 7 715 votes, le siège de député au titre de la minorité turque fut attribué au candidat de cette dernière association.

8. Le 16 mars 2008, une nouvelle loi électorale (« la loi no 35/2008 ») entra en vigueur ; celle-ci introduisit une nouvelle condition d’éligibilité pour les organisations des minorités nationales non représentées au Parlement, mais désireuses de présenter leur candidature, à savoir être déclarées d’utilité publique (paragraphe 19 ci-dessous).

9. L’association requérante décida de participer aux élections parlementaires du 30 novembre 2008. Le requérant était le candidat proposé pour la fonction de député. La requérante ne demanda pas le statut d’utilité publique faute de remplir les conditions exigées par l’ordonnance du gouvernement no 26/2000 sur les associations et les fondations afin d’obtenir le statut d’utilité publique, notamment celle relative à l’activité significative déployée au cours des trois années ayant précédé la demande visant à l’obtention de ce statut.

10. Par une décision du 16 octobre 2008, le Bureau électoral central (« le BEC ») rejeta la candidature, au motif que la requérante n’avait pas apporté, dans les délais légaux, la preuve de remplir les conditions d’éligibilité.

11. Les requérants contestèrent la décision du BEC devant le tribunal départemental de Bucarest et soulevèrent une exception d’inconstitutionnalité des dispositions légales conditionnant les candidatures des organisations des minorités nationales non représentées au Parlement à l’acquisition du statut d’utilité publique. Le tribunal départemental sursit à statuer et renvoya l’affaire devant la Cour constitutionnelle.

12. Devant la Cour constitutionnelle, les requérants arguèrent qu’ils étaient discriminés par rapport aux organisations des minorités déjà présentes au Parlement, puisque celles-ci n’auraient pas l’obligation de remplir des conditions supplémentaires. Ils soutinrent également que les électeurs de la minorité turque se voyaient privés de la possibilité de faire un choix puisque selon eux, par le jeu des dispositions légales, seule l’organisation déjà représentée au Parlement pouvait se présenter de nouveau aux élections. Par une décision du 6 novembre 2008, la Cour constitutionnelle rejeta l’exception soulevée par les requérants. Elle estima que les conditions requises par la loi étaient constitutionnelles, puisqu’elles auraient relevé de la compétence exclusive du législateur de décider des modalités et des conditions de fonctionnement du système électoral. S’agissant du grief tiré de la discrimination par rapport aux organisations déjà présentes au Parlement, la Cour constitutionnelle considéra que ces dernières n’étaient pas privilégiées, dès lors qu’elles auraient rempli des « conditions beaucoup plus sévères » lors des élections au Parlement en 2004.

13. Par un jugement du 14 novembre 2008, le tribunal départemental de Bucarest rejeta la contestation des requérants contre la décision susmentionnée du BEC. Estimant que le seul moyen des requérants était tiré de l’inconstitutionnalité de la loi sur les élections parlementaires et se référant à la décision du 6 novembre 2008 de la Cour constitutionnelle, le tribunal rejeta la contestation sans aucune analyse sur le fond.

14. Par un arrêt définitif du 15 novembre 2008, la cour d’appel de Bucarest confirma le jugement du tribunal et rejeta le pourvoi en recours de requérants.

15. À la suite des élections du 30 novembre 2008, le mandat de député de la minorité turque fut attribué au candidat de la même organisation qu’en 2004.

II. LE DROIT ET LA PRATIQUE INTERNES ET INTERNATIONAUX PERTINENTS

16. Les dispositions pertinentes de la Constitution sont ainsi libellées :

Article 62

« (1) La Chambre des députés et le Sénat sont élus par vote universel, égal, direct, secret et librement exprimé, selon la loi électorale.

(2) Les organisations de citoyens appartenant aux minorités nationales qui ne réunissent pas lors des élections le nombre de voix pour être représentées au Parlement ont droit à un siège de député, dans les conditions de la loi électorale. Les citoyens d’une minorité nationale ne peuvent être représentés que par une seule organisation.

(3) Le nombre des députés et des sénateurs est établi par la loi électorale, en fonction de la population du pays. »

17. Le système de représentation des minorités nationales au Parlement roumain ainsi que le rapport de la Commission de Venise sur le droit électoral et les minorités nationales sont décrits dans l’affaire Grosaru c. Roumanie (no 78039/01, § 24, CEDH 2010).

18. Les élections de novembre 2004 étaient régies par la loi no 373/2004 sur l’élection de la Chambre des députés et du Sénat, dont les dispositions pertinentes en l’espèce étaient ainsi libellées :

Article 4

« (1) Une minorité nationale au sens de la présente loi est une ethnie représentée au Conseil des minorités nationales (...)

(3) Peuvent se porter candidates les organisations de citoyens des minorités nationales représentées au Parlement.

(4) Peuvent également se porter candidates les autres organisations légalement constituées de citoyens des minorités nationales définies au 1er paragraphe qui présentent au Bureau électoral central, dans un délai de trois jours à compter de la constitution de ce dernier, une liste de leurs membres d’un nombre d’au moins 15 % du nombre total des citoyens qui, lors du dernier recensement, ont déclaré appartenir à la minorité en question. »

19. Les élections de novembre 2008 ont été régies par la loi no 35/2008 sur l’élection de la Chambre des députés et du Sénat modifiant la loi no 67/2004 sur l’élection des autorités de l’administration publique locale, la loi no 215/2001 sur l’administration publique locale et la loi no 393/2004 sur le statut des élus locaux. La loi no 35/2008 est entrée en vigueur le 16 mars 2008. Ses dispositions pertinentes en l’espèce sont ainsi libellées :

Article 2 – Définitions

« Au sens du présent chapitre, les mots et les expressions ci-dessous ont la signification suivante :

(...)

29. une minorité nationale – l’ethnie représentée au Conseil des minorités nationales. »

Article 9

« (1) Les organisations, légalement constituées, de citoyens appartenant à une minorité nationale définie selon l’article 2 § 29 qui n’ont pas obtenu lors des élections au moins un mandat de député ou de sénateur ont droit (...) à un mandat de député si elles ont obtenu, pour tout le pays, un nombre de votes égal à 10 % au moins du nombre moyen de votes valablement exprimés au niveau national pour l’élection d’un député.

(2) Peuvent se porter candidates les organisations de citoyens appartenant aux minorités nationales représentées au Parlement.

(3) Peuvent également se porter candidates d’autres organisations, légalement constituées, de citoyens appartenant aux minorités nationales définies à l’article 2 § 29 qui sont reconnues d’utilité publique et qui présentent au Bureau électoral central, dans un délai de trente jours à compter de la date à laquelle les élections ont été arrêtées, une liste de leurs membres comptant au moins 15 % du nombre total des citoyens qui, lors du dernier recensement, ont déclaré appartenir à la minorité en question. »

Article 29

« (...) (3) Les propositions de candidature sont soumises aux bureaux électoraux (...) au moins quarante jours avant la date des élections. »

Article 32

« (...) (2) Le rejet d’une candidature par le bureau électoral de circonscription peut être contesté par le candidat (...) dans un délai de trois jours à compter de la date du rejet (...)

(4) La contestation et la demande de recours doivent être déposées au tribunal compétent, sous peine de nullité.

(5) Les contestations relatives à l’acceptation ou au rejet des candidatures doivent être examinées dans un délai de quarante-huit heures à compter de leur enregistrement par le tribunal dont relève la circonscription électorale (...)

(6) La décision relative à la contestation peut faire l’objet d’un recours dans un délai de vingt-quatre heures à compter du prononcé devant la juridiction supérieure. Le recours doit être examiné dans un délai de vingt-quatre heures à compter de son enregistrement.

(7) La décision rendue en recours est définitive et irrévocable. »

20. Dans l’ordonnance du gouvernement no 26/2000 sur les associations et les fondations (« l’ordonnance no 26/2000 »), les dispositions relatives à l’acquisition du statut d’utilité publique pertinentes en l’espèce étaient ainsi libellées :

Article 38

« (1) Le gouvernement roumain peut déclarer d’utilité publique une association ou une fondation si elle remplit cumulativement les conditions suivantes :

a) son activité sert l’intérêt général ou, le cas échéant, celui d’une collectivité ;

b) l’association ou la fondation a une ancienneté d’au moins trois ans ;

c) elle présente un rapport d’activité qui confirme une activité antérieure significative de par le déroulement de programmes ou de projets spécifiques à son but, rapport accompagné des situations financières annuelles et [de l’état] des revenus et des dépenses pour les trois années ayant précédé la date de la présentation de la demande de reconnaissance du statut d’utilité publique ;

d) la valeur de son actif patrimonial pour chacune des trois dernières années est au moins égale à la valeur du patrimoine initial. »

Article 39

« La déclaration d’utilité publique d’une association ou d’une fondation se fait par arrêté du gouvernement. L’association ou la fondation intéressée présente, à cette fin, une demande au secrétariat général du gouvernement qui la transfère, dans un délai de quinze jours, au ministère ou à l’autorité de l’administration publique centrale compétente. »

Article 40

« (1) L’autorité administrative compétente doit, dans un délai de soixante jours, examiner si la demande remplit les conditions prévues par la loi. Si elle constate que les conditions sont remplies, elle propose au gouvernement roumain la reconnaissance de l’association ou de la fondation. Dans la négative, elle envoie aux demandeurs, dans un délai de trente jours à compter de la date de la décision, une réponse motivée.

(2) Le gouvernement roumain prend une décision quant à la proposition de reconnaissance dans un délai de quatre-vingt-dix jours à compter de la date de la présentation de la demande prévue au paragraphe 1 et de tous les documents nécessaires à la prise de la décision. S’il rejette la proposition, la décision est communiquée à l’association ou à la fondation par l’autorité administrative qui a enregistré la demande de reconnaissance dans un délai de cent vingt jours à compter de la date de la présentation de la demande et des documents nécessaires à la prise de la décision. »

21. Les dispositions du rapport explicatif du code de bonne conduite en matière électorale de la Commission de Venise sont décrites dans l’affaire Tănase c. Moldova ([GC], no 7/08, § 86, CEDH 2010). En particulier, le code recommande d’éviter la « révision répétée [du mode de scrutin] ou intervenant peu avant le scrutin (moins d’un an) » (paragraphe 65 du rapport explicatif).

EN DROIT

I. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 14 DE LA CONVENTION COMBINÉ AVEC L’ARTICLE 3 DU PROTOCOLE No 1 À LA CONVENTION

22. Invoquant l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 3 du Protocole no 1 à la Convention ainsi que l’article 1 du Protocole no 12 à la Convention, les requérants allèguent que leur droit de se porter candidats à des élections parlementaires a été méconnu, dans la mesure où il leur aurait été, objectivement selon eux, impossible de remplir une condition imposée par la loi nouvellement adoptée relativement à leur candidature au Parlement et où, dès lors, ils auraient été défavorisés par rapport à une autre organisation représentant déjà la minorité turque au Parlement roumain.

23. La Cour examinera ce grief sous l’angle de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 3 du Protocole no 1 à la Convention (Özgürlük ve Dayanışma Partisi (ÖDP) c. Turquie, no 7819/03, § 23, CEDH 2012).

L’article 14 de la Convention est ainsi libellé :

« La jouissance des droits et libertés reconnus dans la (...) Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l’origine nationale ou sociale, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. »

L’article 3 du Protocole no 1 dispose :

« Les Hautes Parties contractantes s’engagent à organiser, à des intervalles raisonnables, des élections libres au scrutin secret, dans les conditions qui assurent la libre expression de l’opinion du peuple sur le choix du corps législatif. »

A. Sur la recevabilité

24. Le Gouvernement excipe du non-épuisement des voies de recours internes, dans la mesure où les requérants n’auraient ni invoqué directement devant les tribunaux internes l’article 3 du Protocole no 1 à la Convention ni saisi le Conseil national de lutte contre la discrimination sur la base des dispositions de l’ordonnance du gouvernement no 137/2000 relative à la prévention et la lutte contre toutes les formes de discrimination. S’agissant notamment de cette dernière voie de recours, le Gouvernement soutient qu’elle est accessible et adéquate, puisque le Conseil national de lutte contre la discrimination serait une autorité indépendante rendant des décisions obligatoires et exécutoires et, de surcroît, susceptibles de faire l’objet d’un recours devant les tribunaux internes.

25. Les requérants répliquent qu’ils ont utilisé les voies de recours prévues par la loi no 35/2008 : lors de cette procédure, ils se seraient plaints d’une violation de leur droit à se porter candidats aux élections parlementaires de 2008. Selon eux, toute autre procédure ne prévoyant pas des délais courts et la possibilité d’obtenir une décision judiciaire avant la date des élections aurait été inefficace. S’agissant de la possibilité suggérée par le Gouvernement de saisir le Conseil national de lutte contre la discrimination, les requérants estiment qu’elle n’avait pas d’utilité pratique puisque, dans leur cas, la Cour constitutionnelle aurait déjà rejeté leur grief tiré de la discrimination. Ils précisent que, en outre, cette procédure n’aurait pu aboutir, dans le meilleur des cas, qu’à une simple sanction contraventionnelle.

26. La Cour rappelle que l’article 35 de la Convention n’exige l’épuisement que des recours accessibles, adéquats et relatifs aux violations incriminées (Tsomtsos et autres c. Grèce, 15 novembre 1996, § 32, Recueil des arrêts et décisions 1996‑V, et Nada c. Suisse [GC], no 10593/08, § 140, CEDH 2012.

27. Il incombe au Gouvernement excipant du non-épuisement de convaincre la Cour qu’un recours était effectif et disponible tant en théorie qu’en pratique à l’époque des faits, c’est-à-dire qu’il était accessible, qu’il était susceptible d’offrir au requérant la réparation de ses griefs et qu’il présentait des perspectives raisonnables de succès (V. c. Royaume-Uni [GC], no 24888/94, § 57, CEDH 1999‑IX, et D.H. et autres c. République tchèque [GC], no 57325/00, § 115, CEDH 2007‑IV).

28. De surcroît, un requérant qui a utilisé une voie de droit apparemment effective et suffisante ne saurait se voir reprocher de ne pas avoir essayé d’en utiliser d’autres qui étaient disponibles mais ne présentaient guère plus de chances de succès (Manoussakis et autres c. Grèce, 26 septembre 1996, § 39, Recueil 1996‑IV, et Aquilina c. Malte [GC], no 25642/94, § 39, CEDH 1999‑III).

29. En l’espèce, la Cour note que la loi no 35/2008 met à la disposition des candidats intéressés une procédure de contestation des décisions d’acceptation ou de rejet de leur candidature qui se déroule devant deux degrés de juridiction et qui prévoit des délais brefs (paragraphe 19 ci‑dessus). Les requérants se sont prévalus de cette procédure. Ils ont expressément présenté tant devant le tribunal départemental de Bucarest que devant la Cour constitutionnelle roumaine des arguments tirés de l’impossibilité de se porter candidats aux élections parlementaires due, à leurs dires, à des dispositions discriminatoires d’une loi électorale nouvellement adoptée (paragraphes 11 et 12 ci-dessus).

30. Dès lors, la Cour considère que les intéressés ont épuisé les voies de recours internes et qu’ils n’étaient pas tenus de former une nouvelle action devant le Conseil national de lutte contre la discrimination, comme le suggère le Gouvernement. Partant, elle rejette l’exception du Gouvernement.

31. Constatant par ailleurs que ce grief n’est pas manifestement mal fondé au sens de l’article 35 § 3 a) de la Convention et qu’il ne se heurte à aucun autre motif d’irrecevabilité, la Cour le déclare recevable.

B. Sur le fond

1. Thèses des parties

32. Les requérants indiquent que le Gouvernement a modifié la loi électorale quelques mois avant les élections et qu’il a introduit des conditions à remplir par les seules organisations non représentées au Parlement. Ils allèguent que, ce faisant, il a favorisé l’organisation de la minorité turque qui y était déjà représentée. Ils soutiennent que la volonté de l’électorat a ainsi été faussée, puisque, un seul candidat pour la minorité turque s’étant présenté, les électeurs n’auraient pas pu faire un choix réel. Par ailleurs, ils reprochent au Gouvernement d’avoir persisté dans cette attitude puisqu’il aurait une nouvelle fois modifié la loi électorale peu de temps avant les élections de décembre 2012 et qu’il aurait ainsi rendu le système d’octroi du statut d’utilité publique encore plus difficile.

33. Le Gouvernement expose que les conditions imposées par la loi no 35/2008 aux organisations des minorités nationales qui souhaitaient être représentées au Parlement étaient minimes, qu’elles poursuivaient un but légitime et qu’elles n’étaient pas disproportionnées. Il soutient que les conditions en question relevaient de la large marge d’appréciation de l’État, puisqu’elles auraient eu comme but d’assurer un certain degré de représentativité de ces organisations – dont devait témoigner le nombre de signatures à l’appui de la candidature – et d’éviter ainsi un éventuel exercice abusif du droit d’être élu. Il soutient que les requérants n’ont pas fait la preuve de leur représentativité, faute d’avoir demandé le statut d’utilité publique et d’avoir fourni la liste de signatures exigée. Il ajoute que, en vertu selon lui de l’ordonnance no 26/2000, toute organisation ayant eu une activité soutenue lors des trois dernières années avait vocation à obtenir le statut d’utilité publique dans un délai de cent vingt jours à compter de l’introduction de sa demande auprès de l’autorité compétente.

34. Indiquant s’appuyer sur la décision que la Cour constitutionnelle a rendue en l’espèce, le Gouvernement conclut que les requérants n’ont pas subi de discrimination dans leur droit de se porter candidats au Parlement par rapport aux organisations des minorités nationales qui y auraient déjà été représentées. En effet, à ses dires, en évitant les candidatures des organisations constituées dans les seuls buts de participer aux élections et de bénéficier des avantages prévus par la loi en faveur des représentants des minorités, la loi no 35/2008 vise à protéger l’intérêt des minorités nationales.

2. Principes généraux

35. La Cour rappelle que la discrimination consiste à traiter de manière différente sans justification objective et raisonnable des personnes placées dans des situations comparables. Un traitement différencié est dépourvu de « justification objective et raisonnable » lorsqu’il ne poursuit pas un « but légitime » ou qu’il n’existe pas un « rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé » (voir, parmi beaucoup d’autres, Sejdić et Finci c. Bosnie-Herzégovine [GC], nos 27996/06 et 34836/06, § 42, CEDH 2009). L’étendue de la marge d’appréciation dont les Parties contractantes jouissent à cet égard varie selon les circonstances, les domaines et le contexte (Andrejeva c. Lettonie [GC], no 55707/00, § 82, CEDH 2009).

36. Par ailleurs, la Cour rappelle que l’article 3 du Protocole no 1 à la Convention consacre un principe fondamental dans un régime politique véritablement démocratique et qu’il revêt donc dans le système de la Convention une importance capitale (Mathieu-Mohin et Clerfayt c. Belgique, 2 mars 1987, § 47, série A no 113). Le rôle de l’État, en tant qu’ultime garant du pluralisme, implique l’adoption de mesures positives pour « organiser » des élections démocratiques dans des « conditions qui assurent la libre expression de l’opinion du peuple sur le choix du corps législatif » (idem, § 54).

37. La Cour rappelle également que les mots « libre expression de l’opinion du peuple » signifient que les élections ne sauraient comporter une quelconque pression sur le choix d’un ou de plusieurs candidats et que, dans ce choix, l’électeur ne doit pas être indûment incité à voter pour un parti ou pour un autre (Yumak et Sadak c. Turquie [GC], no 10226/03, § 108, CEDH 2008 ; voir également en ce sens Ždanoka c. Lettonie [GC], no 58278/00, § 104, CEDH 2006‑IV). Le mot « choix » implique qu’il faut assurer aux différents partis politiques des possibilités raisonnables de présenter leurs candidats aux élections (Yumak et Sadak précité, § 108).

38. Cela étant, les droits garantis par l’article 3 du Protocole no 1 ne sont pas absolus. Il y a place pour des « limitations implicites » et les États contractants doivent se voir accorder une large marge d’appréciation en la matière (voir, parmi d’autres, Matthews c. Royaume-Uni [GC], no 24833/94, § 63, CEDH 1999-I, et Labita c. Italie [GC], no 26772/95, § 201, CEDH 2000-IV). Quant au droit de se présenter aux élections, c’est-à-dire l’aspect « passif » des droits garantis par l’article 3 du Protocole no 1, la Cour se montre encore plus prudente dans son appréciation des restrictions dans ce contexte que lorsqu’elle est appelée à examiner des restrictions au droit de vote, c’est-à-dire l’élément « actif » des droits garantis par l’article 3 du Protocole no 1 (Melnitchenko c. Ukraine, no 17707/02, § 57, CEDH 2004‑X, Etxeberria et autres c. Espagne, nos 35579/03, 35613/03, 35626/03 et 35634/03, § 50, 30 juin 2009, et Ždanoka précité, § 115).

39. Cependant, il appartient à la Cour de statuer en dernier ressort sur l’observation des exigences de l’article 3 du Protocole no 1 ; il lui faut s’assurer que les conditions auxquelles sont subordonnés le droit de vote ou le droit de se porter candidat à des élections ne réduisent pas les droits dont il s’agit au point de les atteindre dans leur substance même et de les priver de leur effectivité (Mathieu-Mohin et Clerfayt, précité, § 52).

3. Application en l’espèce des principes susmentionnés

a) Existence d’une différence de traitement

40. La Cour note que la requérante, une association de la minorité turque de Roumanie, s’était déjà portée candidate aux élections parlementaires de 2004 lors desquelles une autre organisation de la minorité turque a remporté un nombre de voix légèrement supérieur et a désigné le député de la minorité turque (paragraphe 7 ci‑dessus). Toutefois, lors des élections de 2008, en application de la loi no 35/2008 nouvellement adoptée, cette autre organisation de la minorité turque a pu renouveler sa candidature sans avoir à remplir d’autres démarches, alors que l’association requérante et le requérant, son candidat au mandat de député, se sont vu imposer une nouvelle condition, à savoir celle de bénéficier du statut d’utilité publique (paragraphe 19 ci-dessus).

41. Il s’ensuit que la loi no 35/2008 a instauré un double système d’évaluation des candidatures des organisations des minorités nationales : d’un côté, les organisations représentées au Parlement ont pu renouveler automatiquement leur candidature, leur représentativité étant présumée du seul fait qu’elles avaient remporté les élections précédentes, et, de l’autre, les organisations non représentées ont été contraintes d’entreprendre des démarches supplémentaires afin d’apporter la preuve de leur représentativité. La candidature des premières a ainsi été facilitée. Partant, la Cour observe que les requérants ont fait l’objet d’une différence de traitement dans l’exercice de leurs droits électoraux protégés par l’article 3 du Protocole no 1 à la Convention à raison de l’adoption de la nouvelle loi électorale (Özgürlük ve Dayanışma Partisi (ÖDP), précité, § 35).

42. Il appartient ensuite à la Cour de rechercher, à la lumière des principes exposés ci-dessus, si cette différence de traitement poursuivait un but légitime et s’il existait un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé. L’application de ces deux critères lui permettra de répondre à la question de savoir si les mesures litigieuses sont constitutives d’une discrimination contraire à l’article 14 de la Convention « et/ou [si elles] ont porté atteinte à la substance même du droit à la libre expression du peuple au sens de l’article 3 du Protocole no 1 à la Convention ».

b) But légitime de la différence de traitement

43. Les parties sont en désaccord sur la question de la légitimité du but poursuivi par la modification législative en cause. Les requérants soutiennent que l’adoption de la loi no 35/2008 visait à favoriser l’organisation de la minorité turque déjà représentée au Parlement, tandis que le Gouvernement soutient que cette modification avait comme finalité d’assurer un certain degré de représentativité des organisations des minorités nationales et d’éviter un éventuel exercice abusif du droit d’être élu.

44. La Cour peut convenir avec le Gouvernement que la nouvelle loi électorale avait pour but de garantir le droit à une représentativité effective des organisations non encore représentées au Parlement et d’éviter les candidatures dépourvues de sérieux (voir, mutatis mutandis, Özgürlük ve Dayanışma Partisi (ÖDP), précité, § 42, et Soukhovetski c. Ukraine, no 13716/02, § 62, CEDH 2006‑VI).

c) Proportionnalité de la différence de traitement

45. La Cour rappelle que les conditions de participation aux élections imposées aux formations politiques font partie des règles électorales fondamentales. Dans les systèmes électoraux qui conditionnent la participation de ces formations à un certain nombre d’exigences spécifiques, l’introduction de nouvelles exigences peu de temps avant la date des élections peut amener, dans des cas extrêmes, à la disqualification d’office de partis et coalitions d’opposition bénéficiant d’un soutien populaire important, et ainsi favoriser les formations politiques au pouvoir. Il va de soi qu’une telle pratique est incompatible avec l’ordre démocratique et qu’elle sape la confiance des citoyens dans les pouvoirs publics de leur pays. La Cour rappelle à cet égard que les conditions de présentation des formations politiques aux élections doivent bénéficier de la même stabilité temporelle que les autres éléments fondamentaux du système électoral (Ekoglasnost c. Bulgarie, no 30386/05, § 69, 6 novembre 2012).

46. Elle rappelle en outre que, si l’introduction d’une nouvelle condition peut ne pas poser en soi un problème au regard de la Convention (Ekoglasnost, précité, § 67), il lui revient d’examiner avec un soin particulier toute mesure adoptée dans le domaine de la législation électorale qui semble opérer, seule ou à titre principal, au détriment de l’opposition. Cela est d’autant plus vrai si, de par sa nature, la mesure compromet les chances mêmes des partis ou des formations d’opposition de parvenir un jour au pouvoir (Parti populaire démocrate-chrétien c. Moldova, no 28793/02, § 67, CEDH 2006, Tănase précité, § 177, et Ekoglasnost, précité, § 68).

47. Enfin, lorsqu’elle examine la proportionnalité d’une modification législative mise en cause, la Cour prend aussi en considération les recommandations de la Commission de Venise selon laquelle il convient d’éviter la révision du mode de scrutin dans l’année qui précède les élections (paragraphe 21 ci‑dessus ; voir également Tănase, précité, § 179, Parti travailliste géorgien c. Géorgie, no 9103/04, § 88, CEDH 2008, et Ekoglasnost, précité, §§ 69-70).

48. Se tournant vers les faits d’espèce, la Cour note d’abord que la loi no 35/2008, qui régissait les élections du 30 novembre 2008, est entrée en vigueur le 16 mars 2008. Selon l’article 29 de cette nouvelle loi, les candidatures devaient être présentées au moins quarante jours avant les élections, soit le 20 octobre 2008 au plus tard (paragraphe 19 ci‑dessus). Il en résulte que les requérants ont disposé d’environ sept mois pour présenter leur candidature.

49. Elle note ensuite que la loi no 35/2008 exigeait des seules organisations des minorités nationales non représentées au Parlement de remplir des conditions d’éligibilité, à savoir bénéficier du statut d’utilité publique et présenter une liste de leurs membres (paragraphe 19 ci-dessus). Alors que la législation électorale en vigueur en 2004 prévoyait déjà la condition relative à la présentation de la liste des membres, la condition relative à la reconnaissance du statut d’utilité publique n’a été introduite que par la loi no 35/2008 (paragraphes 18 et 19 ci-dessus). Le grief des requérants ne visant que la modification législative opérée en 2008, la Cour limitera son analyse à la nouvelle condition relative à la reconnaissance du statut d’utilité publique.

50. À cet égard, la Cour note que, selon l’article 38 § 1 c) de l’ordonnance du Gouvernement no 26/2000, l’un des critères de reconnaissance du statut d’utilité publique suppose une « activité antérieure significative » pendant les trois années ayant précédé la demande de reconnaissance de ce statut (paragraphe 20 ci-dessus).

51. Elle constate que les requérants n’ont pas demandé la reconnaissance du statut d’utilité publique pour l’association requérante, faute de remplir le critère relatif à l’activité antérieure significative (paragraphe 9 ci‑dessus), mais se pose la question de savoir si ce manquement est imputable aux requérants ou s’il a été une conséquence insurmontable de l’adoption de la nouvelle loi électorale. Dans ce contexte, la Cour doit aussi tenir compte de la marge d’appréciation dont l’État bénéficie pour réglementer l’aspect « passif » du droit de vote (Melnitchenko précité, § 57, Etxeberria et autres précité, § 50, et Ždanoka précité, § 115).

52. La Cour note que, en application de l’ordonnance du Gouvernement no 26/2000, le caractère significatif de l’activité antérieure exigée des organisations désireuses d’obtenir le statut d’utilité publique s’appréciait en fonction du fait d’avoir « déroulé des programmes ou des projets spécifiques à [leur] but » (paragraphe 20 ci-dessus). Elle estime que, même si cette législation ne définit pas les termes « programmes » ou « projets », ces notions ne peuvent relever de la catégorie des obligations légales d’une organisation, telle, par exemple, l’obligation de présenter ses rapports financiers à la Cour des comptes (voir, a contrario, Ekoglasnost, précité, § 65). Au contraire, la conduite de tels programmes et projets relève du choix de l’organisation en cause et il appartient à celle-ci de décider de leurs objectifs, de leur durée et des activités qu’ils comportent, en fonction de ses buts et des ressources disponibles.

53. À cet égard, la Cour note que l’association requérante s’est présentée aux élections de 2004 et qu’elle a obtenu un nombre de voix légèrement inférieur à celui de l’association qui a remporté le siège de la minorité turque (paragraphe 7 ci-dessus). Elle en déduit qu’en 2004 la requérante remplissait toutes les conditions d’éligibilité requises par le droit interne et qu’elle a organisé son activité ultérieure en fonction des dispositions légales applicables à ce moment-là. Il ne saurait donc être reproché aux requérants de ne pas avoir prévu que, sept mois avant les élections de 2008, il leur serait demandé de remplir un nouveau critère, à savoir avoir mené des programmes ou des projets spécifiques pendant au moins trois ans.

54. La Cour estime donc que, en modifiant la législation électorale sept mois avant les élections parlementaires de 2008, les autorités n’ont pas donné aux requérants l’occasion d’organiser leur activité afin de pouvoir se voir reconnaître le statut d’utilité publique. Il s’ensuit que les requérants ont été placés dans une impossibilité objective d’obtenir le statut d’utilité publique et de remplir ainsi une condition d’éligibilité requise par la nouvelle loi électorale.

55. Au vu des considérations qui précèdent, elle estime que la nouvelle condition d’éligibilité imposée aux requérants pour pouvoir présenter leur candidature aux élections parlementaires, à la différence des organisations des minorités nationales qui étaient déjà représentées au Parlement, s’analyse en une mesure disproportionnée par rapport au but légitime poursuivi.

56. Partant, il y a eu violation de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 3 du Protocole no 1 à la Convention.

II. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 6 DE LA CONVENTION

57. Les requérants dénoncent en outre une violation de leur droit à un procès équitable en ce qui concerne la procédure de contestation de la décision du Bureau électoral central. Ils invoquent à cet égard l’article 6 de la Convention, ainsi libellé :

« Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement (...) par un tribunal (...), qui décidera (...) des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil (...) »

58. La Cour rappelle que les procédures concernant le contentieux électoral ne portent pas sur des droits et obligations de caractère « civil » et que, partant, elles échappent au champ d’application de l’article 6 § 1 (Pierre-Bloch c. France, 21 octobre 1997, §§ 49-52, Recueil 1997‑VI, et Ždanoka c. Lettonie (déc.), no 58278/00, 6 mars 2003).

59. Il s’ensuit que ce grief est incompatible ratione materiae avec les dispositions de la Convention et qu’il doit être rejeté, en application de l’article 35 §§ 3 et 4 de la Convention.

III. SUR L’APPLICATION DE L’ARTICLE 41 DE LA CONVENTION

60. Aux termes de l’article 41 de la Convention,

« Si la Cour déclare qu’il y a eu violation de la Convention ou de ses Protocoles, et si le droit interne de la Haute Partie contractante ne permet d’effacer qu’imparfaitement les conséquences de cette violation, la Cour accorde à la partie lésée, s’il y a lieu, une satisfaction équitable. »

A. Dommage

61. Dans leur formulaire de requête, les requérants réclament une somme d’environ un million euros (EUR) pour préjudice matériel, montant qui représenterait les fonds du budget de l’État alloués aux organisations des minorités nationales, à utiliser pour les intérêts de leur communauté. Le requérant réclame également 20 000 EUR pour préjudice moral en raison de l’impossibilité qui lui aurait été faite de représenter les intérêts de la minorité turque au Parlement roumain. L’association requérante réclame quant à elle 100 000 EUR pour dommage moral.

62. Le Gouvernement se dit opposé à l’octroi d’une quelconque somme aux requérants. À titre subsidiaire, il est d’avis que le constat d’une violation représenterait en soi une satisfaction équitable.

63. La Cour n’aperçoit pas de lien de causalité entre la violation constatée et le dommage matériel allégué et rejette cette demande. Quant aux sommes réclamées pour préjudice moral, elle estime que le constat d’une violation représente en soi une satisfaction équitable suffisante pour tout dommage moral pouvant avoir été subi par les requérants.

B. Frais et dépens

64. Les requérants n’ont pas présenté de demande de remboursement des frais et dépens qu’ils auraient exposés pendant la procédure.

PAR CES MOTIFS, LA COUR, À L’UNANIMITÉ,

1. Déclare la requête recevable quant au grief tiré de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 3 du Protocole no 1 à la Convention, et irrecevable pour le surplus ;

2. Dit qu’il y a eu violation de l’article 14 de la Convention combiné avec l’article 3 du Protocole no 1 à la Convention ;

3. Dit que le constat d’une violation fournit en soi une satisfaction équitable suffisante pour le dommage moral subi par les requérants ;

4. Rejette la demande de satisfaction équitable pour le surplus.

Fait en français, puis communiqué par écrit le 21 avril 2015, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement.

Stephen PhillipsJosep Casadevall
GreffierPrésident


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