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05/01/2016 | CEDH | N°001-159765

CEDH | CEDH, AFFAIRE SÜVEGES c. HONGRIE [Extraits], 2016, 001-159765


QUATRIÈME SECTION

AFFAIRE SÜVEGES c. HONGRIE

(Requête no 50255/12)

ARRÊT

(Extraits)

STRASBOURG

5 janvier 2016

FINAL

02/05/2016

Cet arrêt est devenu définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.




En l’affaire Süveges c. Hongrie,

La Cour européenne des droits de l’homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :

Vincent A. De Gaetano, président,
András Sajó,
Boštjan M. Zupančič, r>Nona Tsotsoria,
Krzysztof Wojtyczek,
Egidijus Kūris,
Gabriele Kucsko-Stadlmayer, juges,
et de Françoise Elens-Passos, greffière de section,

Après en avo...

QUATRIÈME SECTION

AFFAIRE SÜVEGES c. HONGRIE

(Requête no 50255/12)

ARRÊT

(Extraits)

STRASBOURG

5 janvier 2016

FINAL

02/05/2016

Cet arrêt est devenu définitif dans les conditions définies à l’article 44 § 2 de la Convention. Il peut subir des retouches de forme.

En l’affaire Süveges c. Hongrie,

La Cour européenne des droits de l’homme (quatrième section), siégeant en une chambre composée de :

Vincent A. De Gaetano, président,
András Sajó,
Boštjan M. Zupančič,
Nona Tsotsoria,
Krzysztof Wojtyczek,
Egidijus Kūris,
Gabriele Kucsko-Stadlmayer, juges,
et de Françoise Elens-Passos, greffière de section,

Après en avoir délibéré en chambre du conseil le 24 novembre 2015,

Rend l’arrêt que voici, adopté à cette date :

PROCÉDURE

1. À l’origine de l’affaire se trouve une requête (n° 50255/12) dirigée contre la Hongrie et dont un ressortissant de cet État, M. Péter Süveges (« le requérant »), a saisi la Cour le 2 août 2012 en vertu de l’article 34 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (« la Convention »).

2. Le requérant a été représenté par Me A.K. Kádár, avocat à Budapest. Le gouvernement hongrois (« le Gouvernement ») a été représenté par son agent, M. Z. Tallódi, du ministère de la Justice.

3. Dans sa requête, M. Süveges se plaignait en les qualifiant de traitement inhumain et dégradant des conditions de l’assignation à résidence dont il avait fait l’objet. Il exposait également que sa détention avait été indûment prolongée et que les procédures concernant ses demandes d’élargissement avaient revêtu un caractère inéquitable au regard de l’article 5 §§ 3 et 4 de la Convention. Il plaidait en outre que la procédure pénale dirigée contre lui s’était étendue sur une durée excessivement longue, en quoi il voyait une violation de son droit à un procès équitable dans un délai raisonnable garanti par l’article 6 § 1. Enfin, il dénonçait, sur le terrain de l’article 8, une restriction de son droit au maintien des liens familiaux et, sous l’angle de l’article 9, une limitation, injustifiée à ses yeux, de son droit de manifester sa religion pendant son assignation à résidence.

4. Le 22 octobre 2014, les griefs concernant les articles 3, 5 §§ 3 et 4, 6 § 1, 8, et 9 ont été communiqués au Gouvernement et la requête a été déclarée irrecevable pour le surplus.

EN FAIT

5. Le requérant est né en 1972 et réside à Budapest. Il affirme être catholique pratiquant. Selon les pièces du dossier, il est de profession enseignant de religion.

I. LES CIRCONSTANCES DE L’ESPÈCE

A. La procédure pénale menée contre le requérant

6. Soupçonné d’utilisation abusive d’explosifs, le requérant fut arrêté le 2 juin 2005.

7. Le 11 mai 2007, le parquet général le renvoya devant le tribunal régional du comté de Pest pour y être jugé des chefs d’incitation à un meurtre aggravé et de détention illégale d’armes à feu et d’explosifs.

(…)

14. Le 28 février 2014, le requérant fut reconnu coupable et condamné à la réclusion à perpétuité avec possibilité de libération conditionnelle après 30 ans.

15. Le 2 juillet 2015, la juridiction de deuxième instance annula ce jugement et renvoya l’affaire devant la juridiction de première instance, où elle est actuellement pendante.

B. La détention provisoire du requérant et son assignation à résidence

16. Dans le cadre de la procédure ci-dessus, le tribunal de district de Kaposvár ordonna le placement du requérant en détention provisoire.

(…)

24. Le 2 février 2012, la détention provisoire du requérant atteignit la durée légale maximum de quatre ans. Le 23 janvier 2012, le tribunal métropolitain de Budapest assigna le requérant à résidence, avec surveillance policière constante, dans l’appartement de Mme I.T, une proche du requérant. Aux termes de la décision, le requérant était autorisé à quitter l’appartement de 8 heures à 16 heures tous les deuxièmes mercredis du mois. Le tribunal estima que les motifs justifiant la détention du requérant demeuraient valables et que l’application d’une mesure moins restrictive n’était due qu’à l’expiration de la durée légale maximum de quatre ans de la détention provisoire. Il rejeta également la demande d’élargissement du requérant, dans laquelle ce dernier s’engageait à ne pas quitter son domicile, estimant que les arguments relatifs aux problèmes de santé de sa mère et à la situation financière modeste de son hôte ne pouvaient servir de fondement à une demande de mesure moins restrictive.

(…)

39. Le 21 décembre 2012, le tribunal de Budapest rejeta la demande du requérant visant à l’obtention de l’autorisation de quitter le lieu de son assignation à résidence tous les dimanches de 7 heures à 11 heures pour se rendre à la messe, ainsi que les 27 et 28 décembre 2012 et les 2 et 4 janvier 2013. Relevant que le requérant était de profession enseignant de religion, le tribunal estima que la restriction apportée à l’exercice par l’intéressé de ses convictions religieuses n’était pas disproportionnée. La cour d’appel confirma cette décision le 24 janvier 2013. Elle considéra que les convictions religieuses du requérant ne justifiaient pas que lui soit accordée l’autorisation de quitter le domicile où il était assigné à résidence et que de telles autorisations étaient généralement le reflet d’un changement intervenu dans la situation personnelle du détenu. Elle précisa qu’une telle demande ne pouvait être accordée que si elle concernait un lieu et un but précis.

(…)

51. Le requérant fut assigné à résidence jusqu’au 8 novembre 2013, date à laquelle il fut placé en détention provisoire dans le cadre d’une procédure pénale concernant une autre infraction.

52. Le requérant fut de nouveau placé en détention provisoire à partir du 2 juillet 2015, après la décision de la juridiction de deuxième instance d’annuler sa condamnation et de renvoyer à la juridiction de première instance.

II. LE DROIT INTERNE PERTINENT

53. La loi XIX de 1998 sur le code de procédure pénale est ainsi libellée :

Article 129

« (2) La mise en détention provisoire d’un prévenu ne peut être ordonnée au cours d’une procédure relative à une infraction passible d’emprisonnement qu’aux conditions suivantes : (…)

b) si, en raison d’un risque de fuite ou d’évasion, ou pour toute autre raison, il existe un motif raisonnable de croire que la participation du prévenu aux actes de procédure ne peut être garantie autrement,

c) s’il existe un motif raisonnable de croire que, s’il restait en liberté, le prévenu pourrait empêcher, entraver ou compromettre l’administration de la preuve, en particulier par subornation ou intimidation des témoins ou par destruction, falsification ou obscurcissement de preuves matérielles ou de documents, (…)

d) s’il existe un motif raisonnable de croire que, s’il restait en liberté, le prévenu pourrait achever l’infraction tentée ou planifiée ou commettre une autre infraction passible d’emprisonnement. »

Article 130

« (2) À la place de la détention provisoire, le tribunal peut ordonner une détention domiciliaire, une assignation à résidence ou une ordonnance restreignant la liberté de mouvement du prévenu. »

(…)

Article 138

« (1) En cas d’assignation à résidence, le prévenu ne peut quitter l’habitation désignée par le tribunal et l’espace clos adjacent que dans le respect des motifs, horaires et distances précisés par la décision du tribunal, en particulier pour pourvoir à ses besoins quotidiens élémentaires ou pour se faire soigner.

(2) En tant que mesure coercitive, la décision d’assignation à résidence, de même que sa durée, son maintien et sa cessation, est régie par les dispositions applicables à la décision de placement en détention provisoire, à son prolongement, à son maintien et à sa cessation. »

Article 210

« (1) Le juge d’instruction tient une audience si la demande concerne les questions suivantes :

a) la [première] décision de mesure coercitive impliquant une restriction ou une privation de la liberté personnelle (...),

b) le prolongement d’une mesure de détention provisoire ou d’assignation à résidence, si de nouveaux éléments [par rapport aux décisions précédentes] ont été avancés [par le parquet] pour justifier le prolongement de la mesure (...) »

(…)

54. Le décret commun no 6/2003. (IV. 4.) IM–BM du ministère de la Justice et du ministère de l’Intérieur est ainsi libellé :

Article 1

« (1) Si le tribunal ordonne l’assignation à résidence de l’accusé, il désigne l’habitation et l’espace clos environnant qui constitueront le lieu habituel de résidence de l’accusé en tant que lieu d’exécution de l’assignation à résidence.

(2) S’il ordonne l’assignation à résidence, le tribunal informe l’accusé qu’il ne peut quitter l’habitation que dans le respect des motifs, horaires et destinations précisés dans la décision du tribunal. »

EN DROIT

(…)

V. SUR LA VIOLATION ALLÉGUÉE DE L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

147. Le requérant soutient que le refus de l’autorité judiciaire de lui accorder le droit de quitter le lieu de son assignation à résidence pour se rendre à la messe a porté atteinte à sa liberté de manifester sa religion, telle qu’elle est prévue par l’article 9 de la Convention. Cette disposition est ainsi libellée :

« 1. Toute personne a droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ; ce droit implique la liberté de changer de religion ou de conviction, ainsi que la liberté de manifester sa religion ou sa conviction individuellement ou collectivement, en public ou en privé, par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites.

2. La liberté de manifester sa religion ou ses convictions ne peut faire l’objet d’autres restrictions que celles qui, prévues par la loi, constituent des mesures nécessaires, dans une société démocratique, à la sécurité publique, à la protection de l’ordre, de la santé ou de la morale publiques, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »

Le Gouvernement s’oppose à cette thèse.

(…)

B. Sur le fond

1. Arguments des parties

149. Le requérant expose que l’exercice de la religion catholique inclut un élément collectif important. Il plaide que le refus de lui accorder l’autorisation de se rendre à la messe une fois par semaine allait au-delà de ce qui pouvait être considéré comme proportionné et nécessaire dans une société démocratique.

150. Le Gouvernement ne conteste pas qu’il ait été porté atteinte aux droits du requérant garantis par l’article 9 de la Convention. Il soutient toutefois que la mesure était prévue par la loi et qu’elle poursuivait un but légitime, à savoir la protection de l’ordre public et des droits d’autrui. Il plaide en outre qu’elle revêtait un caractère proportionné, expliquant que dès lors qu’il était de profession enseignant de religion, le requérant aurait pu exercer sa religion sans se rendre à l’église.

2. Appréciation de la Cour

151. La liberté religieuse relève d’abord du for intérieur. Énoncé par l’article 9 § 1, le droit d’avoir des convictions religieuses et de changer de religion ou de conviction est absolu et inconditionnel. La même disposition précise toutefois que la liberté de religion comprend celle de manifester sa conviction non seulement individuellement et en privé mais aussi collectivement et en public. Une conviction religieuse peut se manifester par le culte, l’enseignement, les pratiques et l’accomplissement des rites. Le témoignage, en paroles et en actes, se trouve lié à l’existence de convictions religieuses (Leyla Şahin c. Turquie [GC], no 44774/98, § 105, CEDH 2005‑XI). Néanmoins, l’article 9 ne protège pas n’importe quel acte motivé ou inspiré par une religion ou conviction (Kalaç c. Turquie, 1er juillet 1997, § 27, Recueil des arrêts et décisions 1997‑IV, et Kosteski c. l’ex-République yougoslave de Macédoine, no 55170/00, § 37, 13 avril 2006). Pour constituer une « manifestation » au sens de l’article 9 de la Convention, un acte donné doit être étroitement lié à la religion ou aux convictions dont il est question. Tel est le cas par exemple des actes de culte ou de dévotion qui relèvent de la pratique d’une religion ou de convictions sous une forme généralement reconnue. Toutefois, la « manifestation » d’une religion ou d’une conviction ne se limite pas aux actes de ce type : l’existence d’un lien suffisamment étroit et direct entre un acte et la conviction qui en est à l’origine doit être établie au vu des circonstances de l’espèce. En particulier, il n’est pas requis du requérant qu’il établisse qu’il a agi conformément à un commandement de la religion en question (Cha’are Shalom Ve Tsedek c. France [GC], no 27417/95, §§ 73-74, CEDH 2000‑VII ; Leyla Şahin, précité, § 78).

152. La Cour observe qu’en lui refusant le droit de quitter le lieu où il était assigné à résidence pour se rendre à la messe, les autorités ont porté atteinte aux droits du requérant découlant de l’article 9. Elle constate que cette mesure était prévue par la loi, plus précisément par le décret commun no 6/2003 relatif à l’assignation à résidence (paragraphe 54 ci-dessus). Elle considère par ailleurs que ladite mesure visait à garantir la présence du requérant tout au long de la procédure pénale et poursuivait un but légitime, à savoir la protection de l’ordre public. Il reste à déterminer si elle était nécessaire dans une société démocratique et proportionnée au but visé.

153. La Cour estime que la restriction apportée à la liberté du requérant d’assister à des cérémonies religieuses, en l’occurrence à la messe, est une conséquence directe de son assignation à résidence. S’il était resté en détention provisoire, il aurait selon toute probabilité pu profiter des offices religieux organisés sur son lieu de détention. Le fait qu’une mesure moins coercitive lui fut appliquée à un certain stade de la procédure a emporté comme conséquence inévitable l’impossibilité pour lui de profiter des offices religieux organisés comme il aurait pu le faire autrement.

154. La Cour relève également que la demande du requérant visant à l’obtention de l’autorisation de quitter le domicile où il était assigné à résidence était formulée en des termes généraux et portait sur de longues périodes de chaque dimanche, sans préciser ni le lieu ni l’église où il comptait se rendre. Il apparaît que cette considération a été déterminante dans la conclusion des juridictions internes selon laquelle cette demande était contraire aux buts de l’assignation à domicile (paragraphe 39 ci‑dessus).

155. La Cour estime établi que l’ingérence litigieuse dans l’exercice par le requérant de son droit à la liberté de culte n’a pas porté atteinte à la substance même des droits de l’intéressé protégés par l’article 9.

156. Eu égard à la marge d’appréciation laissée à l’État défendeur dans ce domaine, la Cour juge que la restriction apportée à la liberté du requérant de manifester sa religion était proportionnée au but légitime que visait son assignation à résidence.

157. En conséquence, il n’y a pas eu violation de l’article 9 de la Convention.

(...)

PAR CES MOTIFS, LA COUR

(…)

6. Dit, par six voix contre une, qu’il n’y a pas eu violation de l’article 9 de la Convention ;

(…)

Fait en anglais, puis communiqué par écrit le 5 janvier 2016, en application de l’article 77 §§ 2 et 3 du règlement de la Cour.

Françoise Elens-PassosVincent A. De Gaetano
GreffièrePrésident

Au présent arrêt se trouve joint, conformément aux articles 45 § 2 de la Convention et 74 § 2 du règlement, l’exposé de l’opinion séparée du juge Wojtyczek.

V.D.G

F.E.P

OPINION EN PARTIE DISSIDENTE DU JUGE WOJTYCZEK

1. Je marque respectueusement mon désaccord avec la majorité sur la question de savoir si les articles 8 et 9 ont été violés en l’espèce.

2. Cette affaire soulève des questions juridiques complexes concernant la relation entre les articles 8 et 9 d’une part, et l’article 5 d’autre part, dans le contexte de la détention provisoire et de l’assignation à résidence. Je suis conscient qu’il existe différentes manières d’aborder ces questions et qu’aucune des solutions possibles n’est pleinement satisfaisante d’un point de vue juridique.

3. Le requérant dénonçait comme contraires à la Convention certaines atteintes à sa vie familiale et à sa liberté de religion qui découlaient de son assignation à résidence.

4. La détention provisoire et l’assignation à résidence s’accompagnent pour les personnes concernées de différents types de restrictions. Celles-ci touchent au cœur même de certains droits de l’homme, en particulier la liberté personnelle et la protection de la vie privée, et elles peuvent parfois entraîner la violation d’autres droits fondamentaux, comme les libertés religieuses des croyants de certaines religions. Les restrictions imposées sont néanmoins admissibles au regard de la Convention si les différentes conditions prévues par ce traité international, en particulier le principe de proportionnalité, sont respectées.

5. Aux fins de l’examen de la présente affaire, il est nécessaire de distinguer deux catégories de limitations découlant en particulier de l’assignation à résidence. La première catégorie englobe les restrictions qui sont détachables de l’assignation à résidence et peuvent être appliquées au cours de la procédure pénale même si cette mesure est levée, comme par exemple l’interdiction de quitter le territoire de l’État. La seconde catégorie contient les restrictions qui ne sont justifiées qu’en tant qu’elles font partie intégrante du régime de l’assignation à résidence. Les restrictions dont le requérant se plaignait en l’espèce appartiennent à cette seconde catégorie. Si l’assignation à résidence est levée, il n’y a aucune raison d’interdire à l’accusé de rendre visite à un membre de sa famille atteint d’une maladie en phase terminale ou de se rendre à des offices religieux.

6. En l’espèce, la Cour a conclu à juste titre que la durée de la privation de liberté subie par le requérant (détention provisoire et assignation à résidence confondues) ne pouvait être qualifiée de raisonnable. Elle a en conséquence jugé que le régime général de la détention provisoire, imposé au requérant, avait emporté violation de la Convention. Cela signifie que l’ensemble des restrictions intrinsèquement liées au régime de détention (détention provisoire ou assignation à résidence) a été considéré comme contraire à la Convention. Dans le même temps, toutefois, certaines mesures particulières, intrinsèquement liées au régime de détention du requérant, ont été déclarées conformes à la Convention. De même, les décisions des autorités nationales de ne pas assouplir le régime de détention ont été déclarées conformes à la Convention.

7. À mes yeux, si l’assignation à résidence en elle-même dure trop longtemps, les différentes restrictions qui sont intrinsèquement liées à cette mesure durent également trop longtemps et elles ne peuvent passer pour justifiées au regard de la Convention.

8. J’ai également des réserves concernant le raisonnement développé sous l’angle de l’article 9. Il est évident que la détention provisoire et l’assignation à résidence entraînent des restrictions à la liberté religieuse de la personne concernée. En outre, les circonstances particulières d’une affaire pénale peuvent justifier une interdiction totale de quitter le lieu de l’assignation à résidence. Dans le même temps, la liberté religieuse exige que les autorités nationales prennent des mesures raisonnables pour garantir l’accès aux offices religieux des personnes assignées à résidence, en tenant compte, dans la mesure du possible, des spécificités de chaque religion et des obligations religieuses des croyants. À mes yeux, il aurait fallu accorder plus d’importance à cette obligation. La détermination de la portée de cette obligation suppose de ménager un juste équilibre entre des biens juridiques en concurrence. Dans cette mise en balance, il est nécessaire de prendre en compte, entre autres facteurs, les difficultés pratiques et les charges pour les autorités.

9. Je ne suis pas sûr que l’impossibilité dans laquelle le requérant s’est trouvé de se rendre à la messe au cours de son assignation à résidence n’ait pas porté atteinte à la substance même de ses droits. Pareille ingérence peut toutefois être compatible avec la Convention dans le cadre de l’assignation à résidence. En l’espèce, il importe de noter, parmi les différents facteurs pertinents, la gravité des accusations qui pesaient sur le requérant et le fait que sa demande d’autorisation de quitter le lieu où il était assigné à résidence pour se rendre à des offices religieux était formulée en des termes généraux.


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