REJET DU POURVOI FORME PAR X... (JACQUES), Y... (ALBERT),
CONTRE UN ARRET DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION DE LA COUR D'APPEL DE PARIS (3E SECTION), EN DATE DU 2 DECEMBRE 1975, QUI, INFIRMANT L'ORDONNANCE DE NON-LIEU DU JUGE D'INSTRUCTION, LES A RENVOYES DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL, DU CHEF D'ABUS DE CONFIANCE.
LA COUR,
VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;
SUR LA RECEVABILITE DU POURVOI ;
ATTENDU QUE LA CHAMBRE D'ACCUSATION, POUR RENVOYER LES DEMANDEURS DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL, A STATUE SUR LE SEUL APPEL DE LA PARTIE CIVILE CONTRE L'ORDONNANCE DU JUGE D'INSTRUCTION PORTANT NON-LIEU EN LEUR FAVEUR, LE MINISTERE PUBLIC N'AYANT PAS USE DE LA MEME VOIE DE RECOURS ;
ATTENDU QU'UN ARRET DE CETTE NATURE, EN CE QU'IL A FAIT DROIT A L'APPEL DE LA PARTIE CIVILE AUSSI BIEN SUR L'ACTION PUBLIQUE QUE SUR L'ACTION CIVILE, CONSTITUE UNE DECISION DEFINITIVE QUE LE TRIBUNAL, SAISI DE LA CONNAISSANCE DE L'AFFAIRE, NE SAURAIT MODIFIER ;
QU'IL ENTRE, PAR SUITE, DANS LA CLASSE DES ARRETS VISES PAR L'ARTICLE 574 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ET SE TROUVE, PAR VOIE DE CONSEQUENCE, SOUMIS AU CONTROLE DE LA COUR DE CASSATION ;
AU FOND ;
SUR LE
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 408 DU CODE PENAL, DES ARTICLES 485, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DENATURATION DE LA CONVENTION DU 6 JUILLET 1971 PASSEE ENTRE LA SOCIETE MESSAGE ECLAIR ET LA SOCIETE EXPRESS UNION, INSUFFISANCE DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE, APRES AVOIR ENONCE QUE PAR CONVENTION EN DATE DU 6 JUILLET 1971, LA SOCIETE EXPRESS UNION DEVRAIT FOURNIR AUX TERMES DU CONTRAT, POUR CHAQUE MESSAGE, DEUX ENVELOPPES, UNE PORTEUSE, UNE DE REPONSE, UN BULLETIN DE COMMANDE, UNE LETTRE, UN DEPLIANT ;QU'IL ETAIT PREVU QU'ENTRE LE 6 SEPTEMBRE 1971 ET LE 1ER OCTOBRE, MESSAGE ECLAIR DEVAIT DIFFUSER 2185000 MESSAGES, QUE MESSAGE ECLAIR S'OBLIGEAIT, EN OUTRE, A LOUER DES ADRESSES A RAISON DE 45 FRANCS LE MILLE, HORS TAXE, METTRE SOUS L'ENVELOPPE PORTEUSE DE CHAQUE MESSAGE LES QUATRE AUTRES ELEMENTS VISES PLUS HAUT, ASSURER LE ROUTAGE, LE TIMBRAGE ET LE DEPOT DES MESSAGES AINSI CONSTITUES A RAISON DE 29 FRANCS LE MILLE, HORS TAXE, ENFIN COLLER DES ETIQUETTES EN CHESHIRE, A RAISON DE 8, 50 FRANCS LE MILLE, ET QU'EN CE QUI CONCERNE L'AFFRANCHISSEMENT, IL ETAIT PREVU QUE L'EXPRESS VERSERAIT UNE AVANCE PROVISIONNELLE DE TIMBRES SUR PRESENTATION DE FACTURES, A CONSIDERE QUE LES DEMANDEURS SE SERAIENT RENDUS COUPABLES D'UN ABUS DE CONFIANCE AU MOTIF QUE LE CONTRAT CONCLU LE 6 JUILLET 1971 ENTRE L'EXPRESS ET MESSAGE ECLAIR EST UNE CONVENTION PORTANT POUR PARTIE SUR UN TRAVAIL SALARIE, QUE L'EXPRESS FOURNISSAIT, EN EFFET, DIVERS DOCUMENTS QUE MESSAGE ECLAIR DEVAIT MANIPULER ET AGENCER POUR EN FAIRE UN MESSAGE PUBLICITAIRE, Y APPOSER DES ADRESSES ET ASSURER LE ROUTAGE, LE TIMBRAGE, LE POSTAGE ET L'ETIQUETAGE ;
QUE, PAR CONTRE, EN CE QUI CONCERNE L'AFFRANCHISSEMENT, IL ETAIT FORMELLEMENT PREVU AU CONTRAT DU 6 JUILLET 1971 QUE L'EXPRESS DEVAIT REMETTRE A MESSAGE ECLAIR UNE CERTAINE SOMME POUR PERMETTRE A MESSAGE ECLAIR D'ACHETER LES TIMBRES ET D'AFFRANCHIR A 22 CENTIMES CHAQUE MESSAGE ;
QUE C'EST AINSI QUE MESSAGE ECLAIR A PRESENTE LE 9 JUILLET 1971 A L'EXPRESS UNE FACTURE DE 484000 FRANCS CORRESPONDANT A L'ACHAT DE 2200000 TIMBRES A 22 CENTIMES ;
QU'IL RESULTE DE CES DONNEES QUE MESSAGE ECLAIR AVAIT BIEN RECU MANDAT D'ACHETER AVEC LA SOMME QUI LUI AVAIT ETE REMISE PAR L'EXPRESS DES TIMBRES POUR AFFRANCHIR LES MESSAGES, ACHAT TOUT A FAIT DISTINCT DE L'OPERATION DE TIMBRAGE PREVUE PAR LE CONTRAT, TRAVAIL REMUNERE COMME TEL ET DONT LA SOMME REPRESENTANT LE PRIX DE CE TRAVAIL DEVENAIT LA PROPRIETE DE MESSAGE ECLAIR DES QU'ELLE LUI ETAIT VERSEE ;
QUE LA SOMME DE 484000 FRANCS AFFECTEE SPECIALEMENT A L'ACHAT DE TIMBRES N'ETAIT DETENUE DE TOUTE EVIDENCE PAR MESSAGE ECLAIR QU'A TITRE PRECAIRE POUR UN USAGE DETERMINE, QUE SI LA SOCIETE MESSAGE ECLAIR EXPLIQUE QUE L'ADMINISTRATION DES POSTES A BRUSQUEMENT ET SANS PREAVIS BLOQUE LES MACHINES A AFFRANCHIR EN AOUT 1971, EMPECHANT MESSAGE ECLAIR DE PROCEDER A L'AFFRANCHISSEMENT DES MESSAGES PUBLICITAIRES DE L'EXPRESS, IL N'EN RESTE PAS MOINS QU'EN MATIERE D'ABUS DE CONFIANCE, L'IMPOSSIBILITE DE RESTITUER N'EST EXCLUSIVE DE CONDAMNATION QUE SI ELLE EST DUE A UN CAS DE FORCE MAJEURE ET NON SI ELLE A PU ETRE PREVUE, EN L'OCCURRENCE, LORSQUE MESSAGE ECLAIR PRESENTA LE 9 JUILLET 1971, SA FACTURE DE 484000 FRANCS EN VUE D'ACHETER 2200000 TIMBRES A 22 CENTIMES, MESSAGE ECLAIR ETAIT EN ETAT DE CESSATION DE PAIEMENT, DONC DANS UNE SITUATION DESESPEREE ET QU'ELLE LE SAVAIT, ET QUE CES 484000 FRANCS ETAIENT TOMBES DANS LA MASSE ET ONT DONC ETE UTILISES POUR LES BESOINS GENERAUX DE L'ENTREPRISE, CE QUI CONSTITUERAIT L'ELEMENT CARACTERISTIQUE DU DETOURNEMENT ;
ALORS QUE LA COUR N'A PU SANS MECONNAITRE SES PROPRES CONSTATATIONS ET SANS DENATURER LA CONVENTION LITIGIEUSE CONSIDERER QUE LA SOCIETE EXPRESS UNION AVAIT DONNE A MESSAGE ECLAIR MANDAT D'ACHETER, AVEC LA SOMME QUI LUI AVAIT ETE REMISE, DES TIMBRES POUR AFFRANCHIR LES MESSAGES ;
QU'EN EFFET, IL RESULTE DES PROPRES CONSTATATIONS DE L'ARRET, COMME DU RESTE DU CONTRAT LUI-MEME, DENATURE SUR CE POINT QUE LE CONTRAT PASSE ENTRE LES PARTIES ETAIT UN CONTRAT COMPLEXE, ET QUE L'AVANCE PROVISIONNELLE CONCERNANT L'AFFRANCHISSEMENT ETAIT UN SIMPLE MODE DE REGLEMENT DE CELUI-CI REGULARISABLE SUR FACTURES ET NON UN MANDAT D'ACHETER DES TIMBRES ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE LA DEMANDERESSE AYANT FAIT VALOIR QUE L'IMPOSSIBILITE OU ELLE S'ETAIT TROUVEE D'AFFRANCHIR LES MESSAGES PUBLICITAIRES LITIGIEUX ETAIT DUE AU BLOCAGE DE SES MACHINES A AFFRANCHIR, LA COUR D'APPEL AURAIT DU AU MOINS DEMANDER SI C'ETAIT UN VERITABLE ACHAT DE TIMBRES QUI AVAIT ETE PREVU ENTRE LES PARTIES ET NON PAS UNE AVANCE SUR L'AFFRANCHISSEMENT A EFFECTUER GRACE A DES MACHINES ;
ET SUR LE
SECOND MOYEN DE CASSATION :
PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 408 DU CODE PENAL, 485, 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE ;EN CE QUE LA DECISION ATTAQUEE A DECLARE LE SIEUR X... COMME GERANT ET LE SIEUR Y... COMME GERANT DE FAIT DE LA SOCIETE MESSAGE ECLAIR RESPONSABLES DU PRETENDU ABUS DE CONFIANCE COMMIS AU PREJUDICE DE LA SOCIETE EXPRESS UNION, MAIS SANS PRECISER LA PART QUI AURAIT ETE PRISE PAR L'UN OU L'AUTRE AU DETOURNEMENT ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE SI LE GERANT D'UNE SOCIETE A RESPONSABILITE LIMITEE EST, LORSQU'IL AGIT AU NOM DE CELLE-CI, RESPONSABLE PENALEMENT DES INFRACTIONS QU'IL COMMET, ENCORE FAUT-IL QUE L'ARRET PRECISE SA PARTICIPATION QUI AURAIT ETE COMMISE AU SEIN DE LA SOCIETE, SAUF LORSQU'IL S'AGIT D'UNE INFRACTION RESULTANT DE L'INACCOMPLISSEMENT D'UNE OBLIGATION ENTRANT DANS LA SPHERE DES POUVOIRS DES MANDATAIRES SOCIAUX, NON SUSCEPTIBLES D'ETRE DELEGUES ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE LE GERANT DE FAIT D'UNE SOCIETE NE PEUT EN AUCUN CAS ETRE DECLARE RESPONSABLE D'UNE INFRACTION COMMISE AU SEIN DE CELLE-CI, SAUF LORSQUE SA PARTICIPATION EST EXPRESSEMENT CARACTERISEE ;
LES MOYENS ETANT REUNIS ;
ATTENDU QU'IL EST DE PRINCIPE QUE LE PREVENU NE PEUT SE POURVOIR EN CASSATION CONTRE L'ARRET DE LA CHAMBRE D'ACCUSATION QUI LE RENVOIE DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL ;
QUE, DANS CE CAS, L'ARRET N'EST QU'INDICATIF ET NON ATTRIBUTIF DE JURIDICTION ;
QU'IL LAISSE ENTIERS LES DROITS DE LA DEFENSE ET QUE LA JURIDICTION CORRECTIONNELLE CONSERVE LE DROIT, APRES AVOIR VERIFIE SA COMPETENCE, DE DONNER AUX FAITS LEUR INTERPRETATION LEGALE ;
QUE CETTE REGLE NE SOUFFRE EXCEPTION QUE SI, SELON LES TERMES DE L'ARTICLE 574 PRECITE, L'ARRET A STATUE SUR LA COMPETENCE OU S'IL PRESENTE, COMME EN L'ESPECE, DES DISPOSITIONS QUE LE TRIBUNAL, SAISI DE LA PREVENTION, N'A PAS LE POUVOIR DE MODIFIER ;
QU'IL N'EN EST PAS AINSI DE CELLES DES DISPOSITIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE CRITIQUENT LES MOYENS REUNIS, LESQUELS SE BORNENT A DISCUTER LE BIEN-FONDE DES CHARGES QUE LA CHAMBRE D'ACCUSATION A ESTIME DEVOIR RETENIR CONTRE LES PREVENUS POUR MOTIVER LEUR RENVOI DEVANT LE TRIBUNAL CORRECTIONNEL, CHARGES A L'EGARD DESQUELLES LES DROITS DE LA DEFENSE DEMEURENT ENTIERS ;
QU'IL SUIT DE LA QUE LES MOYENS NE SONT PAS RECEVABLES ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LE POURVOI.
