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18/03/2004 | FRANCE | N°99PA02750

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5eme chambre - formation b, 18 mars 2004, 99PA02750


Vu, I°, enregistrée au greffe de la cour le 13 août 1999 sous le n° 99PA02750, la requête présentée pour M. et Mme X, demeurant ... par Me BATAILLON, avocat ; les requérants demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9705834/5 du 20 mai 1999 par lequel le tribunal administratif de Melun n'a que partiellement fait droit à leur demande de décharge des compléments d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre des années 1987 et 1988 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 50 000 F au titre

de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu, I°, enregistrée au greffe de la cour le 13 août 1999 sous le n° 99PA02750, la requête présentée pour M. et Mme X, demeurant ... par Me BATAILLON, avocat ; les requérants demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 9705834/5 du 20 mai 1999 par lequel le tribunal administratif de Melun n'a que partiellement fait droit à leur demande de décharge des compléments d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre des années 1987 et 1988 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat à leur verser la somme de 50 000 F au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

............................................................................................................

Classement CNIJ : 19-04-02-01-06-01

C

Vu, II°, enregistrée au greffe 23 août 1999 sous le n° 99PA02853, la requête présentée pour les époux X par Me BATAILLON, avocat, ladite requête tendant à ce que soient prescrits la suspension des effets et le sursis à exécution du jugement du 20 mai 1999 par lequel le tribunal administratif de Melun n'a que partiellement fait droit à leur demande de décharge des compléments d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre des années 1987 et 1988 ; ils font valoir qu'ils ont présenté des moyens sérieux d'annulation et que l'exécution du jugement leur causerait un grave préjudice ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 mars 2004 :

- le rapport de M. VINCELET, premier conseiller,

- les observations de Me BONIFASSI, pour les requérants,

- et les conclusions de Mme ESCAUT, commissaire du Gouvernement ;

Considérant que les requêtes présentées pour M. et Mme X et enregistrées sous les n°99PA2750 et 99PA2853 tendent respectivement à l'annulation et au sursis à l'exécution ainsi qu'à la suspension provisoire des effets du jugement du 20 mai 1999 par lequel le tribunal administratif de Melun n'a que partiellement fait droit à leur demande de décharge des compléments d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre des années 1987 et 1988 ; que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie demande, par voie de recours incident, le rétablissement des requérants au rôle de l'impôt sur le revenu des années en cause à raison des dégrèvements prononcés, selon lui, à tort par le tribunal ; qu'eu égard à la connexité de ces requêtes, il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt ;

Sur les conclusions à fin de sursis à exécution et de suspension provisoire des effets du jugement :

Considérant que la cour se prononçant, par le présent arrêt, sur le fond du litige, les conclusions susvisées deviennent sans objet ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant que les requérants font valoir que le mémoire en défense présenté devant le tribunal administratif par le directeur des services fiscaux, daté du 8 février 1999, leur a été notifié le 8 mars suivant et qu'un délai de deux mois leur a été accordé aux fins de présenter une éventuelle réplique ; que cette affirmation n'est démentie par aucune pièce du dossier de première instance ; qu'ainsi, les intéressés sont fondés à soutenir qu'en fixant au 6 mai 1999, soit avant l'expiration du délai dont ils disposaient, la date de l'audience au cours de laquelle leur demande serait examinée, les premiers juges ont méconnu le caractère contradictoire de la procédure ; qu'il y lieu, pour la cour, d'annuler pour ce seul motif le jugement attaqué, et de statuer par évocation sur la demande des époux X devant le tribunal administratif de Melun, augmentée de leurs écritures d'appel ;

Sur les conclusions à fin de décharge des impositions contestées :

Sur l'étendue du litige :

Considérant que le directeur des services fiscaux a, par deux décisions respectivement intervenues en cours d'instance devant le tribunal et devant la cour, prononcé, au profit des requérants, des dégrèvements de 82 761 F et 200 000 F sur les impositions supplémentaires mises à leur charge au titre de l'année 1988 ; que les conclusions susvisées sont ainsi devenues sans objet à concurrence de ces dégrèvements ;

Sur le reliquat des impositions contestées :

S'agissant de l'année 1987 :

Considérant que M. et Mme X ont été taxés d'office à l'impôt sur le revenu, sur le fondement de l'article L.66-1° du livre des procédures fiscales, en raison de l'absence de dépôt de déclaration ; qu'ils invoquent la prescription des impositions mises à leur charge, en contestant avoir reçu avant le 31 décembre 1990, la notification à eux adressée par l'administration ;

Considérant qu'en cas de retour à l'administration fiscale du pli recommandé contenant une notification de redressements, la preuve qui lui incombe d'établir que le contribuable en a reçu notification régulière peut résulter, soit des mentions précises claires et concordantes portées sur les documents retournés à l'expéditeur, soit d'une attestation de l'administration postale ou d'autres éléments de preuve établissant la délivrance par le facteur, conformément à la réglementation postale en vigueur, d'un avis de passage prévenant le destinataire de ce que le pli est à sa disposition au bureau de poste ;

Considérant qu'il résulte de la réglementation postale en vigueur à la date de la présentation du pli contenant la notification de redressements du 10 décembre 1990 qu'en cas d'absence du destinataire, le facteur doit, en premier lieu, porter la date de présentation sur le volet preuve de distribution de la liasse postale, cette date se dupliquant sur les autres feuillets, à savoir l'avis de passage et l'avis de réception, en deuxième lieu, détacher l'avis de passage en y mentionnant le motif de non distribution, le nom et l'adresse du bureau de mise en instance ainsi que la date et l'heure à partir desquelles le pli peut y être retiré, en troisième lieu déposer l'avis dûment complété dans la boîte aux lettres du destinataire, enfin porter sur l'enveloppe le motif de non remise ainsi que le nom et l'adresse du bureau d'instance ;

Considérant qu'il résulte des documents produits par les services fiscaux que l'enveloppe contenant la notification présentée le 17 décembre 1990 au domicile du contribuable comporte uniquement le motif de non distribution, soit la mention non réclamé retour à l'envoyeur , mais ne précise pas les coordonnées du bureau de mise en instance ; que, dans ces conditions, la seule production de l'enveloppe ainsi que de la fiche de distribution et d'une attestation de l'administration postale se bornant à mentionner la date de présentation du pli et celle de son retour dans le service expéditeur ainsi que les motifs de l'absence de délivrance de ce pli, ne suffit pas à établir qu'en l'absence du contribuable de son domicile lors de la présentation du pli recommandé en cause, le facteur lui a délivré un avis de passage l'informant de sa mise en instance ; que, dans ces conditions, la notification du pli recommandé contenant le document ne peut être regardée comme régulière ; qu'ainsi, les époux X sont fondés à soutenir que, faute pour le service d'établir que les redressements afférents à l'année 1987 leur ont été régulièrement notifiés avant le 31 décembre 1990, ceux ci étaient atteints de prescription et à demander la décharge des impositions contestées ainsi que des pénalités les assortissant ;

S'agissant de l'année 1988 :

En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :

Considérant que dans le cadre de l'examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, les époux X ont été taxés d'office à l'impôt sur le revenu sur le fondement des articles L.16 et L.69 du livre des procédures fiscales pour défaut de réponse dans le délai de trente jours qui leur était imparti à une demande de justifications concernant des crédits bancaires ;

S'agissant des vices de procédure invoqués :

Considérant, en premier lieu, que si les requérants font valoir qu'ils n'ont pas reçu la notification de redressements concernant les revenus d'origine indéterminée de l'année 1988, il résulte de l'instruction que ce moyen manque en fait ;

Considérant, en second lieu, que les intéressés n'ayant pas formulé d'observations à la notification du 6 mars 1991, le vérificateur n'était pas tenu de leur adresser une réponse ;

S'agissant du bien fondé des redressements :

Considérant qu'en réponse à la demande de justification du 17 décembre 1990 portant sur l'origine de sommes portées au crédit de trois comptes ouverts à leur nom dans un établissement bancaire, pour un montant total de 482 743 F, les contribuables ont fait valoir que deux montants de 200 000 F et 120 000 F correspondraient à des recettes professionnelles déjà comptabilisées en tant que bénéfices industriels et commerciaux ; que, si l'administration a admis, en appel le bien fondé de l'argumentation des requérants concernant la somme de 200 000 F, aucun document comptable ne corrobore celle relative à la somme de 120 000 F ; que, pour le surplus des crédits, les seuls bordereaux de remise de chèque produits ne sont susceptibles d'établir la réalité, ni des mouvements de compte à compte allégués, ni du remboursement par un assureur à hauteur d'un montant de 3 253 F ; que les requérants n'établissent pas davantage que la somme de 690 F créditée le 14 janvier 1988 proviendrait d'une amie ;

Considérant, toutefois, que les requérants ont justifié que deux sommes de 500 F et 1000 F ont été versées par le père de Mme X ; qu'à hauteur de ce montant de 1 500 F, ils sont en droit de bénéficier de la présomption d'avance à caractère familial et d'obtenir que celui-ci soit soustrait de leur base imposable ;

En ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux :

Considérant qu'en vertu de l'article 38-2bis du code général des impôts, la créance acquise sur un tiers et se rapportant à la fourniture de services doit être rattachée à l'année au cours de laquelle intervient l'achèvement de la prestation ;

Considérant que dans le cadre de la vérification de comptabilité de l'activité de marchand de biens exercée par M. X, le vérificateur a rapporté aux résultats de l'année 1988 une somme de 1 400 000 F TTC représentant le montant d'une commission perçue le 20 avril 1988 ; qu'il résulte toutefois des attestations produites par les requérants que cette somme correspond à la rémunération d'une prestation d'entremise ayant abouti à la conclusion d'une vente sous condition suspensive le 19 novembre 1986, suivie d'une cession définitive le 29 septembre 1987 ; qu'eu égard aux pratiques en vigueur dans la profession du contribuable, la prestation en cause doit être regardée comme achevée au plus tard à cette dernière date et que sa contrepartie, même réglée au cours de l'année 1988, ne pouvait légalement être comprise dans les bases imposables de cette dernière ;

Considérant, en outre, que le ministre conteste le caractère de commission de ladite somme ; que, cependant, en premier lieu, la circonstance que le notaire chargé de la vente n'ait pas mentionné M. X en tant que participant à la vente définitive, est sans incidence dès lors que celui-ci est intervenu effectivement dans le cadre de la transaction provisoire ; qu'en deuxième lieu, contrairement aux observations du service, l'intervention du requérant a porté sur la cession de l'ensemble de l'immeuble ; qu'en troisième lieu, la seule circonstance que le montant de la commission excèderait les pratiques habituelles dans la profession, n'est pas de nature à faire regarder la somme litigieuse comme imposable en 1988 ; qu'ainsi, les requérants sont également fondés à obtenir la décharge du complément d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre de l'année 1988 résultant de l'imposition de la somme susmentionnée ; que, par suite, les pénalités de mauvaise foi les assortissant doivent également être déchargées ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'aux termes de l'article L.761-1 dudit code : Dans toutes les instances, le juge condamne...la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.... ;

Considérant qu'il y a lieu de faire application de ces dispositions et de condamner l'Etat, qui succombe partiellement dans la présente instance, à payer aux requérants une somme de 2 000 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions des requérants tendant au sursis à exécution et à la suspension provisoire des effets du jugement attaqué, ainsi que sur les conclusions en décharge de l'impôt afférent à l'année 1988, à concurrence des dégrèvements de 82 761 F et de 200 000 F prononcés.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Melun n°975834 du 20 mai 1999 est annulé.

Article 3 : Il est accordé décharge, à M. et Mme X, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu mis à leur charge au titre de l'année 1987.

Article 4 : La base d'imposition de M. et Mme X de l'année 1988 est diminuée d'une somme de 1 401 500 F (213 657,30 euros).

Article 5 : La cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu assignée aux époux ABALLE au titre de l'année 1988 est réduite en proportion de la diminution des bases décidée à l'article ci-dessus.

Article 6 : L'Etat paiera à M. et Mme X 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Le surplus des conclusions de la demande des époux X devant le tribunal administratif ainsi que de leur requête d'appel est rejeté.

2

N° 99PA02750 et 99PA02853


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5eme chambre - formation b
Numéro d'arrêt : 99PA02750
Date de la décision : 18/03/2004
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme la Pré SICHLER-GHESTIN
Rapporteur ?: M. VINCELET
Rapporteur public ?: Mme ESCAUT
Avocat(s) : BONIFASSI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2004-03-18;99pa02750 ?
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