STATUANT SUR LE POURVOI DE :
1°) X... JEAN-PIERRE,
2°) Y... THIERRY,
CONTRE UN ARRET DE LA COUR D'APPEL DE ROUEN, CHAMBRE CORRECTIONNELLE, EN DATE DU 24 JUIN 1981 QUI LES A CONDAMNES POUR HOMICIDE INVOLONTAIRE, LE PREMIER, A 3 MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, LE SECOND, A 2 MOIS D'EMPRISONNEMENT AVEC SURSIS, ET A STATUE SUR LES INTERETS CIVILS ;
VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;
SUR LE
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
, PRIS DE LA VIOLATION DES ARTICLES 319 ET SUIVANTS DU CODE PENAL, DES DISPOSITIONS DE LA LOI DU 17 DECEMBRE 1926 PORTANT CODE DISCIPLINAIRE ET PENAL DE LA MARINE MARCHANDE, NOTAMMENT L'ARTICLE 85, DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE LES DEMANDEURS COUPABLES D'HOMICIDE PAR IMPRUDENCE ;
AUX MOTIFS NOTAMMENT QUE LES PREVENUS SOLLICITAIENT LEUR RELAXE, LE TRIBUNAL N'AYANT PAS DISTINGUE LES FAUTES EVENTUELLES DANS LA CONDUITE DU VOILIER ET QUI AURAIENT RELEVE LES UNES DE LA COMPETENCE DU TRIBUNAL CORRECTIONNEL, LES AUTRES DE LA COMPETENCE DES TRIBUNAUX MARITIMES ;
QUE CEPENDANT, EN L'ESPECE, IL N'ETAIT PAS ETABLI QUE LES PREVENUS EUSSENT COMMIS DES INFRACTIONS AUX DISPOSITIONS DU CODE DISCIPLINAIRE ET PENAL DE LA MARINE MARCHANDE AUXQUELLES IL EUT FAIT ALLUSION ;
QUE, PAR CONTRE, LES MALADRESSES, IMPRUDENCES, INATTENTIONS, NEGLIGENCES OU INOBSERVATIONS DES REGLEMENTS COMMISES EN L'OCCURRENCE PAR LES DEMANDEURS ET RELEVANT DE LA SEULE COMPETENCE DU TRIBUNAL CORRECTIONNEL ETAIENT ETABLIES PAR LA PROCEDURE ;
ALORS QUE NE REPOND PAS AUX CONCLUSIONS DES DEMANDEURS L'ARRET ATTAQUE QUI SE BORNE A AFFIRMER QU'IL N'EST PAS ETABLI QU'ILS EUSSENT COMMIS DES INFRACTIONS AUX DISPOSITIONS DU CODE DISCIPLINAIRE ET PENAL DE LA MARINE MARCHANDE DES LORS QUE LES DEMANDEURS DEMANDAIENT A LA COUR DE CONSTATER QUE LES FAUTES TELLES QU'ELLES AVAIENT ETE RETENUES PAR LE TRIBUNAL CONSTITUAIENT BIEN DES INFRACTIONS AU CODE DISCIPLINAIRE ET PENAL DE LA MARINE MARCHANDE ET RELEVAINT AINSI DE LA COMPETENCE DES TRIBUNAUX MARITIMES ;
SUR LE
SECOND MOYEN DE CASSATION :
, AINSI REDIGE ;LE MOYEN CRITIQUE L'ARRET EN CE QU'IL A DECLARE LES DEMANDEURS COUPABLES DU DELIT D'HOMICIDE INVOLONTAIRE ;
AUX MOTIFS, ADOPTES DES PREMIERS JUGES, QUE L'EMPANNAGE, CAUSE IMMEDIATE DE LA CHUTE DE LA VICTIME A LA MER, EST UN RISQUE PERMANENT PAR VENT ARRIERE, DONT LA PROBABILITE EST D'AUTANT PLUS GRANDE ET LES CONSEQUENCES D'AUTANT PLUS REDOUTABLES QUE LE VENT EST FORT ET LA MER AGITEE ;
QUE L'EVITER DEMANDE UNE GRANDE VIGILANCE A LA BARRE ;
QU'AU MOMENT DE L'ACCIDENT, LA FORCE DU VENT ETAIT DE 6 BEAUFORT ET LES CREUX DES VAGUES DE L'ORDRE DE 2,50 M ET LE ROULIS IMPORTANT ET QU'IL ETAIT IMPRUDENT DE GARDER L'ALLURE VENT ARRIERE SANS RETENUE DE BOME PENDANT UNE MANOEUVRE DE CHANGEMENT DE VOILES ;
QU'IL FALLAIT MODIFIER LEGEREMENT LE CAP POUR PRENDRE UNE ALLURE PLUS CONFORTABLE TELLE QUE LE LARGUE OU LE GRANDE LARGUE ;
QU'APRES LA CHUTE DE LA VICTIME, LE PREMIER GESTE A ACCOMPLIR DEVAIT ETRE DE LANCER UNE BOUEE DE SAUVETAGE LUMINEUSE DANS SA DIRECTION ;
QU'IL IMPORTAIT PEU QUE CETTE BOUEE EUT AMERRI A UNE DISTANCE DE 30 METRES DE LA VICTIME DONT LES EFFORTS AURAIENT PU ETRE ENCOURAGES PAR L'APPARITION DE CET OBJET DE SAUVETAGE ;
QU'IL Y AVAIT LIEU EGALEMENT DE REMEDIER IMMEDIATEMENT A L'INADEQUATION DE LA VOILURE ;
QUE, SANS DOUTE, LE FOC N° 1, VOILE LA MIEUX ADAPTEE POUR LE TEMPS QU'IL FAISAIT, ETAIT TOMBE A LA MER AVEC LA VICTIME, MAIS QU'IL FALLAIT RETABLIR LE FOC INTER DONT LA DECHIRURE N'AFFECTAIT PAS LA SOLIDITE ;
QU'AUCUNE FUSEE DE DETRESSE N'AVAIT ETE LANCEE BIEN QUE LE VOILIER EN EUT ETE POURVU, LES PREVENUS AYANT CRU DEVOIR PREJUGER DE LEUR INEFFICACITE ;
QUE, CEPENDANT, LE SECTEUR DE LA MANCHE EST PARTICULIEREMENT FREQUENTE AU MOIS D'AOUT PAR LES PLAISANCIERS ;
QUE CES FAUTES AVAIENT UNE RELATION CAUSALE AVEC LE DECES ;
ALORS QUE, D'UNE PART, L'ARRET ATTAQUE NE POUVAIT, SANS CONTRADICTION, CONSTATER QUE L'EMPANNAGE EST UN RISQUE PERMANENT PAR VENT ARRIERE, DONT LA PROBABILITE EST D'AUTANT PLUS GRANDE ET LES CONSEQUENCES D'AUTANT PLUS REDOUTABLES LORSQUE, COMME EN L'ESPECE, LE VENT EST FORT ET LA MER AGITEE, QUE L'EVITER DEMANDE UNE GRANDE VIGILANCE A LA BARRE ET CONSTATER NEANMOINS QUE L'AMPANNAGE NE SE SERAIT PAS PRODUIT, SAUF MALADRESSE INEXCUSABLE DU BARREUR, SI, AU LIEU DE GARDER L'ALLURE DU VENT ARRIERE, LE CAP AVAIT ETE MODIFIE LEGEREMENT POUR PRENDRE UNE ALLURE PLUS CONFORTABLE TELLE QUE LE GRAND LARGUE OU LE LARGUE ;
ALORS QUE, DE SECONDE PART, LA THESE DES JUGES DU FOND SELON LAQUELLE L'EMPANNAGE AURAIT PU ETRE EVITE, SI, AU LIEU DE GARDER L'ALLURE DU VENT ARRIERE, AVAIT ETE ADOPTEE UNE ALLURE PLUS CONFORTABLE ET MOINS DANGEREUSE, SUPPOSE QUE L'EMPANNAGE AIT EU POUR SEULE CAUSE LA FORCE DU VENT, EN SORTE QUE MANQUE DE BASE LEGALE AU REGARD DE L'ARTICLE 319 DU CODE PENAL L'ARRET ATTAQUE QUI N'EXAMINE PAS SI, DANS L'HYPOTHESE POURTANT PAR LUI ENVISAGEE OU L'EMPANNAGE AURAIT EU POUR CAUSE NON LA FORCE DU VENT, MAIS LE DEFERLEMENT D'UNE VAGUE, CET EMPANNAGE AURAIT PU ETRE EGALEMENT EVITE DANS LES CONDITIONS RELEVEES PAR LES JUGES DU FOND ;
ALORS QUE, DE TROISIEME PART, NE PEUT CONSTITUER UNE FAUTE D'IMPRUDENCE LE FAIT DE N'AVOIR PAS REMIS LE FOC INTER QUI VENAIT PRECISEMENT D'ETRE CHANGE PARCE QU'IL ETAIT DECHIRE ;
QUE, PAR AILLEURS, UNE TELLE FAUTE, A LA SUPPOSER ETABLIE, N'AVAIT AUCUNE RELATION DE CAUSALITE, FUT-CE MEDIATE, AVEC LE DECES, RIEN NE PERMETTANT DE PENSER ET N'ETANT D'AILLEURS PAS CONSTATE PAR LES JUGES DU FOND QU'UNE VOILURE PLUS ADEQUATE AURAIT, DES LORS QUE LE MOTEUR ETAIT DEFAILLANT, PERMIS DE SE RAPPROCHER DE LA VICTIME AVANT QU'ELLE AIT PERDU LA VIE ;
ALORS QUE, DE QUATRIEME PART, NE CONSTITUE PAS UNE IMPRUDENCE LE FAIT DE N'AVOIR PAS LANCE DE BOUEE DE SAUVETAGE LUMINEUSE, DES LORS QU'IL N'EST PAS CONTESTE PAR L'ARRET ATTAQUE QU'A RAISON DE LA DISTANCE ET DE L'IMPOSSIBILITE DU VOILIER DE REMONTER AU VENT, CETTE BOUEE AURAIT AMERRI A UNE DISTANCE DE 30 METRES AU MOINS DE LA VICTIME ;
QUE, PAR AILLEURS, UNE TELLE FAUTE, A LA SUPPOSER, N'AVAIT AUCUN LIEN DE CAUSALITE, FUT-IL MEDIAT, AVEC LE DECES, PUISQUE, SELON LA MOTIVATION HYPOTHETIQUE DE L'ARRET ATTAQUE, CETTE BOUEE AURAIT SEULEMENT EU POUR EFFET D'ENCOURAGER LES EFFORTS DE LA VICTIME ;
ALORS ENFIN QUE L'ARRET ATTAQUE NE POUVAIT RETENIR A L'ENCONTRE DES DEMANDEURS LA FAUTE AYANT CONSISTE A N'AVOIR PAS LANCE DE FUSEE A LA MER, SANS REPONDRE A LEURS CONCLUSIONS SELON LESQUELLES LE VOILIER ETAIT ALORS A 12 MILLES DU PHARE DES ROCHES DOUVRES ;
QU'AUCUN BATIMENT N'ETAIT EN VUE ;
QUE LE CRACHIN RENDAIT IMPOSSIBLE LA PERCEPTION DE LA FUSEE ;
QUE, PAR AILLEURS, UNE TELLE FAUTE, A LA SUPPOSER ETABLIE, N'AVAIT AUCUN LIEN DE CAUSALITE, FUT-IL MEDIAT, AVEC LE DECES ;
LESDITS MOYENS ETANT REUNIS ;
ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET ATTAQUE QU'AU COURS D'UNE TRAVERSEE EN MER EFFECTUEE SUR UN VOILIER DE CROISIERE COMMANDE PAR JEAN-PIERRE X... ET THIERRY Y..., A L'OCCASION D'UNE PRISE DE RIS, UNE PASSAGERE, SYLVIE X..., A ETE PROJETEE A L'EAU PAR UN MOUVEMENT IMPREVU DE LA BOME ;
QUE LES PREVENUS JUGEANT INUTILE DE LUI LANCER LA BOUEE DE SAUVETAGE MUNIE D'UN FEU, DONT LE BATEAU ETAIT POURVU, ONT SIMPLEMENT TENTE DE REVENIR SUR LES LIEUX AFIN DE LUI PORTER SECOURS ;
QU'AU COURS DE LEUR MANOEUVRE, ILS SONT PARVENUS A ENVIRON 25 METRES DE L'ENDROIT OU ELLE SE TROUVAIT ET LUI ONT MEME ADRESSE LA PAROLE, SANS TOUTEFOIS ESTIMER DEVOIR JETER LA BOUEE DE SAUVETAGE A LA MER ;
QUE MALGRE LEURS EFFORTS ILS SE SONT PROGRESSIVEMENT ELOIGNES DE L'ENDROIT DE LA CHUTE ;
QU'AU BOUT DE 45 MINUTES DE RECHERCHES, ET SANS AVOIR FAIT USAGE DE LA FUSEE DE DETRESSE QU'ILS AVAIENT A LEUR DISPOSITION, ILS ONT QUITTE LES LIEUX POUR REJOINDRE L'ILE DE GUERNESEY, OU ILS ONT SIGNALE LA DISPARITION DE SYLVIE X..., QUI N'A PU ETRE RETROUVEE ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES MOTIFS QUI CARACTERISENT EN TOUS SES ELEMENTS CONSTITUTIFS LE DELIT D'HOMICIDE INVOLONTAIRE DONT LES PREVENUS ONT ETE DECLARES COUPABLES, ET QUI PRECISENT LES FAUTES EN RELATION DE CAUSE A EFFET AVEC LE DECES DE LA VICTIME COMMISES PAR EUX, LA COUR D'APPEL A DONNE UNE BASE LEGALE A SA DECISION ;
QU'AINSI LES JUGES DU FOND, REPONDANT AUX CONCLUSIONS QUI LEUR ETAIENT SOUMISES DANS LESQUELLES JEAN-PIERRE X... ET THIERRY Y... INVOQUAIENT L'EXISTENCE DU DELIT D'OMISSION DE PORTER SECOURS A PERSONNE EN PERIL JUSTICIABLE DE LA JURIDICTION MARITIME DONT LA COUR N'ETAIT PAS SAISIE, ONT STATUE A BON DROIT SUR LA SEULE INFRACTION QUI LEUR ETAIT DEFEREE ;
D'OU IL SUIT QUE LES MOYENS DOIVENT ETRE REJETES ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET ATTAQUE EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LE POURVOI.