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18/05/2017 | FRANCE | N°16/01267

France | France, Cour d'appel de Rouen, Chambre de la proximité, 18 mai 2017, 16/01267


R. G. : 16/ 01267

COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DE LA PROXIMITÉ Section PARITAIRE
ARRET DU 18 MAI 2017
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX D'EVREUX du 01 Mars 2016

APPELANTS :
Monsieur Jean Rodolphe X...né le 08 Mai 1986 à LOUVIERS (27400) ...
Comparant en personne assisté de Me Caroline VARLET-ANGOVE, avocat au barreau de PARIS
Société DU HAZEY Le Hazey-27022 LE VAL D'HAZEY
Représentée par Me Caroline VARLET-ANGOVE, avocat au barreau de PARIS
INTIME :
Monsieur Jean-Luc X...né le 22 Janvier 1973 Ã

  MONTAURE (27400) ...
Représenté par Me Jean-christophe GARIDOU de la SCP MGH ASSOCIES, avocat au barr...

R. G. : 16/ 01267

COUR D'APPEL DE ROUEN
CHAMBRE DE LA PROXIMITÉ Section PARITAIRE
ARRET DU 18 MAI 2017
DÉCISION DÉFÉRÉE :
Jugement du TRIBUNAL PARITAIRE DES BAUX RURAUX D'EVREUX du 01 Mars 2016

APPELANTS :
Monsieur Jean Rodolphe X...né le 08 Mai 1986 à LOUVIERS (27400) ...
Comparant en personne assisté de Me Caroline VARLET-ANGOVE, avocat au barreau de PARIS
Société DU HAZEY Le Hazey-27022 LE VAL D'HAZEY
Représentée par Me Caroline VARLET-ANGOVE, avocat au barreau de PARIS
INTIME :
Monsieur Jean-Luc X...né le 22 Janvier 1973 à MONTAURE (27400) ...
Représenté par Me Jean-christophe GARIDOU de la SCP MGH ASSOCIES, avocat au barreau D'EURE

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats et du délibéré :
Madame BRYLINSKI, Président Madame LABAYE, Conseiller Madame DELAHAYE, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Mme NOEL DAZY, Greffier

DEBATS :

A l'audience publique du 13 Mars 2017, où l'affaire a été mise en délibéré au 18 Mai 2017

ARRET :

Contradictoire
Prononcé publiquement le 18 Mai 2017, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,
Signé par Madame BRYLINSKI, Président et par Mme NOEL DAZY, Greffier présent à cette audience.
**- **
FAITS ET PROCEDURE
M. Jean-Luc X..., en vertu de l'acte de partage de la succession de ses parents du 29 décembre 1992, est propriétaire de parcelles de terre situées sur la commune de Louviers cadastrées ...et sur la commune du Mesnil Jourdain cadastrées ...pour une contenance totale de 7 ha 73 a. Son frère Patrick X...bénéficiait depuis la fin des années 1970 d'un bail rural verbal consenti par ses parents ; le 8 avril 1997 il a constitué avec son épouse Mme Brigitte X...l'EARL du Hazay, et a mis les parcelles à disposition de cette dernière. M. Patrick X...est décédé le 2 septembre 2000, laissant pour lui succéder son épouse et leurs cinq enfants dont M. Jean-Rodolphe X...; l'EARL du Hazay a poursuivi l'exploitation des parcelles et par acte du 25 avril 2013 a été transformée en SCEA du Hazay.
M. Jean-Luc X...a saisi le tribunal paritaire des baux ruraux d'une demande de résiliation du bail rural, par une première requête dirigée à l'encontre de la SCEA du Hazay puis par une seconde dirigée à l'encontre de M. Jean-Rodolphe X...; les procédures ont été jointes.
Le tribunal paritaire des baux ruraux d'Evreux, par jugement rendu le 1er mars 2016 dont il a ordonné l'exécution provisoire, a-déclaré irrecevables les demandes formées à l'encontre de la SCEA du Hazay par M. Jean-Luc X...;- reconnu à M. Jean-Rodolphe X...le bénéfice d'un bail rural sur les parcelles cadastrées ...située sur la commune de Mesnil Jourdain et ...situées sur la commune de Louviers, du fait de la transmission de ce droit survenue au décès de M. Patrick X...;- prononcé la résiliation du bail consenti sur les parcelles appartenant à M. Jean-Luc X..., cadastrées ...située sur la commune de Mesnil Jourdain et ...situées sur la commune de Louviers, au motif de l'irrégularité de la mise à disposition des terres au profit d'une personne morale ;- ordonné à M. Jean-Rodolphe X...de libérer les parcelles litigieuses de toute occupation de son chef, à compter de la réalisation des derniers travaux de récolte engagés au titre de l'année culturale en cours à la date du jugement, sous astreinte de 50 € par jour de retard à compter de cette date ;- à défaut, autorisé l'expulsion de M. Jean-Rodolphe X..., ainsi que de tout occupant de son chef, au besoin avec le concours de la force publique ;- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;- condamné M. Jean-Rodolphe X...aux entiers dépens.
***
M. Jean-Rodolphe X...et la société du Hazay ont interjeté appel et, aux termes de leurs dernières écritures déposées le 23 février 2017, oralement soutenues à l'audience et auxquelles il convient de se reporter, par application des dispositions de l'article 446-2 alinéa 2 du code de procédure civile, pour l'exposé détaillé des moyens développés, demandent à la cour, sous le visa des articles L. 411-34 et L. 411-37 du code rural et de la pêche maritime, de
-confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a : * déclaré irrecevables les demandes formées à l'encontre de la SCEA du Hazay par M. Jean-Luc X...; * reconnu à M. Jean-Rodolphe X...le bénéfice d'un bail rural sur les parcelles cadastrées ...située sur la commune de Mesnil Jourdain et ... situées sur la commune de Louviers, du fait de la transmission de ce droit survenue au décès de M. Patrick X...;- infirmer le jugement entrepris pour le surplus et statuant à nouveau,- débouter M. Jean-Luc X...de ses entières demandes ;- condamner M. Jean-Luc X...à payer à la SCEA du Hazay la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;- condamner M. Jean-Luc X...aux entiers dépens.
***

M. Jean-Luc X..., aux termes de ses dernières écritures déposées le 23 novembre 2016, oralement soutenues à l'audience et auxquelles il convient de se reporter, par application des dispositions de l'article 446-2 alinéa 2 du code de procédure civile, pour l'exposé détaillé des moyens développés, demande à la cour, sous le visa de l'article L. 411-37 du code rural, dans sa rédaction antérieure à la loi no99-574 du 09 juillet 1999 et dans son actuelle rédaction, de :
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a résilié le bail de M. Jean-Rodolphe X...et ordonné à ce dernier de libérer les parcelles litigieuses de toute occupation de son chef, sous astreinte de 50 € par jour de retard ;- infirmer le jugement en ce qu'il a considéré que M. Jean-Rodolphe X...était titulaire d'un bail rural du fait de la transmission de ce droit survenue au décès de M. Patrick X...et statuant à nouveau,- constater, au besoin dire et juger : * que l'information préalable au bailleur par lettre recommandée avec accusé de réception – s'agissant de la mise à disposition des parcelles à l'EARL du Hazay – fait en l'espèce défaut ; * que s'agissant d'une mise à disposition antérieure à la loi du 09 juillet 1999, l'information préalable était obligatoire ; qu'à défaut, l'opération caractérise l'existence d'une cession prohibée du bail ; * qu'en tout état de cause, l'avis du propriétaire quant à cette mise à disposition, ainsi que sa volonté de ne pas être entendu par la commission compétente ont été faussement renseignés par le preneur des terres ; et que la signature de l'intimé a été usurpée pour faciliter l'opération litigieuse ; * qu'en tout état de cause, M. Jean-Rodolphe X...n'est pas titulaire du bail (faute d'autorisation du bailleur ou du tribunal) et qu'il ne peut dans ces conditions mettre à disposition les terres litigieuses à la SCEA du Hazay ; * qu'en conséquence, M. Jean-Rodolphe X...n'est pas titulaire du bail ; partant, qu'il ne pouvait valablement le mettre à disposition de la SCEA du Hazay ; Subsidiairement, * que l'EARL du Hazay a manqué à son obligation d'exploiter personnellement les terres en confiant par contrat à l'ETA Ragault Vincent l'intégralité des travaux de culture, de sorte qu'elle n'a nullement participé à l'exploitation permanente et effective desdites terres ; * que M. Jean-Rodolphe X...est l'auteur du même manquement pour être domicilié à Paris et y exercer la gérance d'une SAS commerciale ;- prononcer en conséquence la résiliation du bail rural dont M. Jean-Rodolphe X...se prétend titulaire et ordonner la restitution des parcelles objet du litige à M. Jean-Luc X..., au plus tard à la fin de l'année culturale en cours ;- enjoindre à M. Jean-Rodolphe X...de laisser les parcelles libres de toute occupation à la fin de l'année culturale en cours sous astreinte de 50 € par jour de retard et ordonner son expulsion, au besoin avec le concours de la force publique, en cas de refus de quitter les lieux loués ;- condamner les appelants à payer à M. Jean-Luc X...la somme de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre celle de 2 000 € pour les frais engagés en cause d'appel ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

DISCUSSION
Le titulaire initial du bail rural était Patrick X.... Celui-ci a constitué avec son épouse Mme Brigitte Y..., en avril 1997, l'EARL du Hazay, dont le capital est réparti à raison de 49 % pour Patrick X...et 51 % pour Mme Brigitte Y...désignée en qualité de gérante. Les statuts de l'EARL du Hazay comportent en annexe 1 une convention de mise à disposition de diverses parcelles faisant l'objet de baux ruraux consentis à M. Patrick X...ou à Mme Brigitte X..., au nombre desquelles les parcelles appartenant à M. Jean-Luc X.... L'EARL du Hazay a déposé une déclaration d'exploiter l'ensemble de ces parcelles, dans laquelle il est fait mention (C : observations particulières) que seule Mme Brigitte X...participe effectivement à l'exploitation ; une signature unique figure sur ce document, facilement identifiable par comparaison avec celles apposées sur les statuts de l'EARL, comme étant celle de Patrick X..., que ce soit à l'emplacement réservé à la signature du déclarant, de l'exploitant antérieur dont l'avis était requis, ou de l'avis du propriétaire.
M. Patrick X...est décédé en 2000.
L'article L. 411-34 du code rural et de la pêche maritime prévoit que " En cas de décès du preneur, le bail continue au profit de son conjoint, du partenaire avec lequel il est lié par un pacte civil de solidarité, de ses ascendants et de ses descendants participant à l'exploitation ou y ayant participé effectivement au cours des cinq années antérieures au décès (...). Le bailleur peut demander la résiliation du bail dans les six mois à compter du jour où le décès est porté à sa connaissance lorsque le preneur décédé ne laisse pas de conjoint, de partenaire d'un pacte civil de solidarité ou d'ayant droit réunissant les conditions énoncées au premier alinéa. " Il résulte de ce texte, qui organise en premier lieu, pour l'attribution du bail rural en cas de décès du preneur, une règle dérogatoire à la règle de dévolution successorale de droit commun au bénéfice du proche ayant participé à l'exploitation, que lorsque le preneur décède sans laisser de conjoint, d'ascendants ou de descendants qui participe à l'exploitation ou qui y a participé effectivement au cours des cinq dernières années qui ont précédé le décès, le droit au bail passe néanmoins à ses héritiers ou à ses légataires universels selon les règles de dévolution successorale de droit commun à défaut de demande de résiliation par le bailleur dans le délai de six mois de la connaissance du décès du preneur.
Par application de ce texte, le bail a continué de plein droit, et ce de façon exclusive, au profit de Mme Brigitte X...épouse de Patrick X..., qui seule avait participé à l'exploitation au cours des cinq années antérieures au décès, étant observé que M. Jean-Rodolphe X...était alors âgé de 14 ans. C'est en cette qualité de preneur bénéficiaire exclusive du bail en continuation de son mari décédé que Mme Brigitte X...a été destinataire des courriers adressés par M. Jean-Luc X...l'interrogeant sur l'identité de l'exploitant effectif des terres. C'est également en cette qualité qu'elle a adressé le 6 novembre 2012 à M. Jean-Luc X...un courriel pour l'aviser qu'elle entendait prendre sa retraite, que M. Jean-Rodolphe X...son fils se proposait de prendre sa suite dans la culture des parcelles et la reprise de la ferme, et sollicitait l'autorisation de cession de bail à son profit.
Le bail ayant été de plein droit transmis à Mme Brigitte X...de façon exclusive par application de l'alinéa 1 de l'article L. 411-34 du code rural et de la pêche maritime, le tribunal ne peut être approuvé en ce qu'il a retenu que M. Jean Rodolphe X...a lui-même de la transmission du même bail à défaut de demande de résiliation dans les six mois de la part du bailleur au décès de son père, dès lors d'une part de ce que la transmission selon les règles de dévolution successorales de droit commun ne s'opère que par défaut, et que d'autre part de ce qu'en tout état de cause la transmission se serait alors opérée au bénéfice de l'ensemble des héritiers de M. Patrick X...qui avait cinq enfants, et non de M. Jean-Rodolphe X...seul qui ne prétend ni à plus forte raison ne justifie avoir été attributaire de l'exploitation dans le cadre du partage de la succession de son père.
M. Jean-Rodolphe X...ne pourrait prétendre avoir la qualité de preneur qu'en conséquence d'une cession du bail par sa mère Mme Brigitte X...à laquelle il avait été transmis au décès de Patrick X...; or il est constant que M. Jean-Luc X...n'a jamais donné son agrément à la cession du bail sollicitée par cette dernière en novembre 2012, et que le tribunal paritaire des baux ruraux n'a pas alors été saisi aux fins de voir autoriser la cession, ainsi que l'impose l'article L. 411-35 alinéa 1 du code rural et de la pêche maritime.
Dans ces conditions, le jugement doit être infirmé en ce qu'il a reconnu à M. Jean-Rodolphe X...la qualité de preneur sur les parcelles cadastrées ...située sur la commune de Mesnil Jourdain et ...situées sur la commune de Louviers initialement données à bail à M. Patrick X....
En l'état il convient d'inviter les parties à s'expliquer sur la recevabilité/ le bien fondé de la demande de M. Jean-Luc X...tendant à obtenir la restitution des terres par M. Jean-Rodolphe X...qui les occuperait de fait du chef de sa mère Mme Brigitte X..., en l'absence de demande de résiliation du bail dirigée à l'encontre de cette dernière.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Statuant publiquement par arrêt partiellement avant dire droit
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a reconnu à M. Jean-Rodolphe X...le bénéfice d'un bail rural sur les parcelles cadastrées ...située sur la commune de Mesnil Jourdain et ...situées sur la commune de Louviers, du fait de la transmission de ce droit survenue au décès de M. Patrick X...
Statuant à nouveau de ce chef,
Dit que M. Jean-Rodolphe X...n'est pas titulaire du bail rural sur les parcelles cadastrées ...située sur la commune de Mesnil Jourdain et ...situées sur la commune de Louviers, que ce soit par transmission directe au décès de M. Patrick X..., ou par cession du chef de Mme Brigitte X...;
Avant dire droit sur le surplus ;
Invite les parties à s'expliquer sur la recevabilité/ le bien fondé de la demande de M. Jean-Luc X...tendant à obtenir la restitution des terres louées, en l'absence de demande de résiliation du bail dirigée à l'encontre de Mme Brigitte X...;
Renvoie à cette fin la cause et les parties à l'audience du 12 juin 2017 à 14 h 15 ;
Réserve les dépens.
Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rouen
Formation : Chambre de la proximité
Numéro d'arrêt : 16/01267
Date de la décision : 18/05/2017
Sens de l'arrêt : Autre décision avant dire droit

Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rouen;arret;2017-05-18;16.01267 ?
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