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23/02/2022 | FRANCE | N°21/01958

France | France, Cour d'appel de Rennes, 5ème chambre, 23 février 2022, 21/01958


5ème Chambre





ARRÊT N°-58



N° RG 21/01958 - N° Portalis DBVL-V-B7F-RPPO













M. [C] [S]



C/



S.A.R.L. FIN'OCEANE



















Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours













Copie exécutoire délivrée



le :



à :







RÉPUBLIQUE FRANÇAISE>
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 23 FEVRIER 2022





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Anne DESPORT, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Catherine VI...

5ème Chambre

ARRÊT N°-58

N° RG 21/01958 - N° Portalis DBVL-V-B7F-RPPO

M. [C] [S]

C/

S.A.R.L. FIN'OCEANE

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 23 FEVRIER 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Pascale LE CHAMPION, Présidente,

Assesseur : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Anne DESPORT, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 08 Décembre 2021

devant Madame Pascale LE CHAMPION et Madame Virginie PARENT, magistrats rapporteurs, tenant seules l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui ont rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 23 Février 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [C] [S]

né le 24 juillet 1956 à VALLET (44)

18 rue des Rois

44330 VALLET

Représenté par Me Arnaud DELOMEL, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉE :

S.A.R.L. FIN'OCEANE

10 bis rue de la Platine

44120 Vertou

Représentée par Me Vianney DE LANTIVY DE TREDION de la SELARL ARMEN, Postulant, avocat au barreau de NANTES

Représentée par Me Benjamin PORCHER de la SELAS PORCHER & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

**********

M. [C] [S], souhaitant placer une partie de ses économies pour financer sa retraite, est entré en relation avec le cabinet de courtiers C.C.F.I.

Ce dernier lui a proposé de souscrire un contrat de placement auprès de la société Madeleine Finance.

Le 17 février 2000, M. [C] [S] a signé son adhésion à un contrat collectif d'assurance sur la vie à capital variable et en francs dénommé Madeleine Privilège souscrit auprès d'Axiva devenue Axa.

Il a versé à la conclusion de ce contrat la somme de 250 000 francs, soit 38 112,25 euros.

La société Fin'Oceane a repris le suivi du contrat d'assurance vie de M [C] [S] au début de l'année 2009 à la suite de la cession, par la société C.C.F.I., d'une partie de sa clientèle.

Constatant les pertes financières dans le placement opéré, M [C] [S] a par courriel du 3 février 2019 sollicité des informations auprès de la société Fin'Oceane et a demandé la restitution de son capital augmenté de 2 % d'intérêts.

Il a réitéré cette demande par deux courriers recommandés des 23 juillet et 24 août 2019 et devant le refus de la société Fin'Oceane, a fait assigner cette dernière devant le tribunal judiciaire de Nantes par exploit d'huissier en date du 28 mai 2020.

Par ordonnance en date du 18 mars 2021, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Nantes a :

- déclaré irrecevable l'action engagée par M. [S] à l'encontre de la SARL Fin'Oceane, comme étant prescrite,

- condamné M. [S] à payer à la société Fin'Oceane la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [S] aux entiers dépens.

Le 29 mars 2021, M. [C] [S] a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 11 novembre 2021, il demande à la cour de :

- infirmer les dispositions de l'ordonnance rendue le 18 mars 2021 par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Nantes, s'agissant de la prescription et de l'irrecevabilité de l'action prononcée à l'encontre de M. [S],

- débouter la société Fin'Oceane de ses demandes,

- renvoyer le dossier à la mise en état du tribunal judiciaire de Nantes, enregistré devant la 1ère Chambre ' Section A du tribunal judiciaire

- condamner la société Fin'Oceane à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Fin'Oceane aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 17 novembre 2021, la SARL Fin'Oceane demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance rendue par le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Nantes datée le 18 mars 2021 ;

- en tout état de cause, de condamner M. [S] à régler à la société Fin'Oceane une somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et au paiement des entiers dépens, dont distraction au profit de Me Vianney de Lantivy, qui affirme en avoir fait la plus grande avance.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 novembre 2021.

MOTIFS DE LA DÉCISION

L'appelant sollicite l'infirmation de l'ordonnance du juge de la mise en état et conteste toute prescription de son action.

Il demande à la cour de fixer le point de départ de celle-ci au 5 avril 2019, date à laquelle il a eu, selon lui, connaissance du dommage, cette date correspondant à la réponse de la société Fin'Océane à sa demande de rachat du contrat souscrit.

L'intimée sollicite la confirmation de la décision. Elle soutient que M. [S] a eu connaissance du dommage dès la conclusion du contrat, sachant qu'il constituait un placement à risques, qu'à tout le moins il ne pouvait ignorer dès le 31 décembre 2002 que son contrat avait perdu 60 % de sa valeur. Elle entend souligner que la demande formée par lui en 2019 ne s'analyse pas en une demande de rachat, mais en une demande de versement de la prime initiale assortie de 2% d'intérêts. Elle rappelle avoir indiqué par mail à M. [S] qu'il pouvait racheter son contrat à sa valeur actuelle et souscrire un nouveau contrat, qu'il n'a pas formulé une telle demande. Elle ajoute que la date du 5 avril 2019 ne peut correspondre au point de départ de la prescription.

Il résulte de l'article 2224 du code civil que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Les parties ne discutent pas le délai de prescription de cinq ans applicable conformément aux dispositions susvisées.

Pour une action en responsabilité, le fait permettant à la victime d'exercer son action est la manifestation du dommage, de sorte que le délai de prescription court à compter de la réalisation du celui-ci ou de la date à laquelle il est révélé à la victime si celle-ci établit qu'elle n'en a pas eu précédemment connaissance.

M. [S] a engagé son action contre la société Fin'Océane le 28 mai 2020. Il lui appartient en conséquence de démontrer qu'il a eu connaissance de son dommage au plus tôt le 28 mai 2015.

En l'occurrence, le dommage résultant de manquements de la société de conseil en gestion de patrimoine à son obligation d'information et de conseil, invoquée par M. [S] au soutien de son action, consiste pour le client, dans la perte d'une chance de mieux investir ses capitaux, de sorte que cette perte de chance se réalise dès les investissements litigieux, c'est à dire au moment de la souscription. Cependant, ce dommage ne se manifeste et n'est révélé au client qu'au moment où son préjudice est devenu certain, c'est à dire après la réalisation d'une moins-value ou de la perte définitive de valeur du contrat. En effet, avant cette date, s'agissant d'un contrat de ce type, le préjudice reste hypothétique.

M. [S] a signé le 17 février 2000 un contrat d'assurance vie à capital variable Madeleine Privilège. Il déclare avoir été informé le 16 mai 2000, par son cocontractant de la ventilation des fonds placés en fonds euros et supports étrangers.

M. [S] n'a pas procédé au rachat de ce contrat, conformément aux conditions contractuelles, contrairement à ses allégations mais a sollicité de la société Fin'Océane par mail du 3 février 2019 la restitution de son capital de départ augmenté d'une rémunération minimum de 2% d'intérêts, capitalisés chaque année, demande qui a fait l'objet d'un refus par mail du 5 avril 2019, la société Fin'Océane renouvelant à cette occasion une proposition de sortie par voie de rachat total du contrat Madeleine Privilège pour investir sur des contrats plus ouverts.

Si la société Fin'Océane précise dans ce courriel que le contrat ne bénéficiera pas d'amélioration technique notamment en ce qui concerne la liste des fonds et de sociétés de gestion disponibles, il ne peut en être tiré argument par M. [S] qu'il n'a pris connaissance qu'à cette occasion de son dommage.

En effet, M. [S] n'ignorait pas au regard des informations apportées dès l'année 2000 quant à la ventilation des fonds de son contrat, l'existence d'un risque de pertes financières. Il a été informé chaque année de la valeur de rachat de son contrat, et ces informations lui ont permis de prendre conscience de la perte importante de capital, puisque ces relevés annuels traduisent une diminution des unités de comptes dès l'année 2000, pour atteindre le montant le plus bas au 31 décembre 2002 de 14 936,07 euros pour un capital investi de 38 112,25 euros et un montant le plus haut de 26 856,36 euros au 31 décembre 2017, pour redescendre au 31 décembre 2018 à 22 728,87 euros.

La cour observe également que dans son courriel du 3 février 2019 M. [S] rappelle avoir pris connaissance de la valeur de rachat au 31 décembre de chaque année, pour chacune des années 2000 à 2018. Il écrit avoir à plusieurs reprises fait part de son inquiétude et avoir en juin 2012, joint aux demandes d'arbitrage, un post-it manuscrit demandant de rétablir la situation.

Parfaitement conscient des moins values constantes de son contrat, depuis l'origine, ayant exprimé son inquiétude sur ce point et même sollicité en 2012 un rétablissement de la situation, il convient de considérer que le souscripteur ne démontre pas avoir pris connaissance du dommage dans le temps de la prescription.

La cour confirme la décision déclarant prescrite et donc irrecevable l'action engagée par M. [S].

L'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'intimée. M. [S] sera condamné à lui payer à ce titre une somme de 1 500 euros et supportera les dépens d'appel, les dispositions de l'ordonnance relatives aux frais irrépétibles et aux dépens étant par ailleurs confirmées par la cour.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe,

Confirme l'ordonnance du 18 mars 2021 ;

Y ajoutant,

Condamne M. [C] [S] à payer à la société Fin'Océane la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [C] [S] aux dépens d'appel, dont distraction au profit de Me Vianney de Lantivy.

Le Greffier La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/01958
Date de la décision : 23/02/2022

Références :

Cour d'appel de Rennes 07, arrêt n°21/01958 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-02-23;21.01958 ?
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