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28/05/2020 | FRANCE | N°17/03774

France | France, Cour d'appel de Rennes, 7ème ch prud'homale, 28 mai 2020, 17/03774


7ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°



N° RG 17/03774 - N° Portalis DBVL-V-B7B-N6QL













SELARL LIARD ET TANGUY



C/



M. [C] [O]

















Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU N

OM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 28 MAI 2020





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Président : Monsieur Benoît HOLLEAUX, Président de chambre,

Assesseur : Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,



GREFFIER :



...

7ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°

N° RG 17/03774 - N° Portalis DBVL-V-B7B-N6QL

SELARL LIARD ET TANGUY

C/

M. [C] [O]

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 28 MAI 2020

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Monsieur Benoît HOLLEAUX, Président de chambre,

Assesseur : Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère,

Assesseur : Madame Isabelle CHARPENTIER, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Morgane LIZEE, greffier placé

SANS DÉBAT :

l'affaire a été retenue sans audience au visa des dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n°2020-304 du 25 mars 2020 sans opposition des parties dans le délai prescrit de quinze jours suite à l'avis du greffe en date du 10 Avril 2020

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 28 Mai 2020 par mise à disposition au greffe après avis aux représentants des parties le 15 mai 2020

****

APPELANTE :

SELARL LIARD ET TANGUY agissant poursuite et diligence de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Tangi NOEL, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉ :

Monsieur [C] [O]

né le [Date naissance 1] 1977 à [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représenté par Me Eric MARLOT de la SELARL MARLOT, DAUGAN, LE QUERE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTERVENANTE :

POLE EMPLOI [Localité 5]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Adresse 7]

EXPOSE DU LITIGE

Vu le jugement du conseil de prud'hommes de Rennes du 10 avril 2017 ayant :

-condamné la Selarl LIARD ET TANGUY à régler à M. [C] [O] les sommes de :

.9 860,40 € d'indemnité compensatrice conventionnelle de préavis (3 mois de salaires), et 986,04 € de congés payés afférents

.19 720,80 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (6 mois de salaires)

.1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile

-ordonné la remise sans astreinte à M. [C] [O] d'un bulletin de paie rectifié

-débouté M. [C] [O] de ses autres demandes

-ordonné le remboursement par la Selarl LIARD ET TANGUY à Pôle emploi des indemnités de chômage versées à M. [C] [O] dans la limite de six mois

-condamné la Selarl LIARD ET TANGUY aux dépens ;

Vu la déclaration d'appel de la Selarl LIARD ET TANGUY reçue au greffe de la cour le 23 mai 2017 ;

Vu les conclusions du conseil de la Selarl LIARD ET TANGUY adressées au greffe de la cour par le RPVA le 21 août 2017 et auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens, aux fins d'infirmation du jugement entrepris et, statuant à nouveau, de rejet de l'ensemble des demandes de M. [C] [O] qui sera condamné à lui payer la somme de 500 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Vu les conclusions récapitulatives du conseil de M. [C] [O] adressées au greffe de la cour par le RPVA le 16 octobre 2019 et auxquelles il est renvoyé pour l'exposé de ses moyens, aux fins :

-de confirmer le jugement entrepris seulement en ce qu'il a dit sans cause réelle et sérieuse son licenciement pour motif économique, ainsi qu'en ses dispositions de condamnation au titre de l'indemnité compensatrice conventionnelle de préavis (9 860,40 € + 986,04 €)

-de l'infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau, condamner la Selarl LIARD ET TANGUY à lui régler les autres sommes de :

.10 905,96 € de rappel d'heures supplémentaires, et 1 090,59 € de congés payés afférents

.19 720,80 € d'indemnité légale forfaitaire pour travail dissimulé (6 mois de salaires)

.32 000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ou, subsidiairement, pour non-respect des critères d'ordre des licenciements

-d'ordonner à la Selarl LIARD ET TANGUY de lui remettre les bulletins de paie rectifiés sous astreinte

-de la condamner à lui payer la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;

Vu l'ordonnance du 28 janvier 2020 ayant prononcé la clôture de l'instruction avec renvoi pour fixation à l'audience théoriquement prévue le 23 mars suivant ;

Vu l'avis du greffe notifié le 10 avril 2020 aux parties renvoyant aux dispositions de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 qui permettent que la procédure se déroule sans audience et qu'un arrêt soit rendu dans la présente affaire sans débat en l'absence d'opposition de leur part ;

Vu les courriers des conseils des deux parties, datés du 16 avril 2020 pour l'appelante et du 17 avril pour l'intimé, acceptant expressément que la procédure se déroule sans audience jusqu'au prononcé d'un arrêt ;

MOTIFS :

La Selarl LIARD ET TANGUY a engagé M. [C] [O] en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein (151,67 heures mensuelles ou 35 heures hebdomadaires) ayant pris effet le 30 août 2004 pour y occuper les fonctions de dessinateur au niveau II-position 2-coefficient 300 de la convention collective nationale des entreprises d'architecture, moyennant en contrepartie un salaire de 1 758,10 € bruts mensuels, porté à 2 733,70 € bruts mensuels par un avenant du 1er septembre 2009 lui conférant la qualité de collaborateur d'architecte au coefficient conventionnel 405.

Par une lettre du 4 mai 2015, la Selarl LIARD ET TANGUY a convoqué M. [C] [O] à un entretien préalable prévu le 18 mai, avant de lui notifier le 4 juin 2015 son licenciement pour motif économique « à défaut d'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle ».

M. [C] [O] a adhéré au dispositif sur le contrat de sécurisation professionnelle (CSP) le 4 juin 2015.

Dans le dernier état de la relation contractuelle de travail, M. [C] [O] occupait au sein de la Selarl LIARD ET TANGUY, qui avait un effectif de moins de 11 salariés, les fonctions de collaborateur d'architecte, catégorie cadre-échelon III-coefficient 440, avec une rémunération en moyenne de 3 286,80 € bruts mensuels.

Sur le rappel d'heures supplémentaires

Au soutien de sa demande en paiement d'un rappel d'heures supplémentaires, M. [C] [O] expose pour l'essentiel qu'il effectuait tout comme ses collègues de travail 40 heures de travail par semaine, soit 8 heures par jour sur cinq jours (9h/13h ' 14h/18h) ; qu'en contrepartie de ce dépassement des 35 heures hebdomadaires initialement convenues il leur était octroyé une compensation partielle en repos ; que par ailleurs il n'a jamais été arrêté le principe d'un travail sur une base de 35 heures hebdomadaires annualisées ; qu'il ne saurait lui être opposé le fait que ce système était accepté par les salariés puisqu'il n'aboutissait qu'à une compensation partielle des heures effectivement réalisées ; qu'il n'aurait rien réclamé de plus à ce titre si l'employeur avait retenu une compensation intégrale en repos ; qu'en tout état de cause si le paiement d'heures supplémentaires peut faire l'objet de récupération ou de compensation il doit être tenu compte des majorations légales afférentes, majorations dont il n'a pas bénéficié ; qu'il ne réclame en définitive que le seul paiement des heures supplémentaires dans le cadre du système de compensation partielle qui ne permettait cependant pas de le remplir intégralement de ses droits dans la tranche comprise sur la semaine entre 35 et 40 heures ; et qu'il lui est dû en conséquence sur la période de juin 2011 à mai 2015 inclus un rappel salarial qu'il évalue au vu de son décompte récapitulatif à la somme de 10 905,96 € (+ 1 095,59 €).

En réponse, la Selarl LIARD ET TANGUY précise que l'agence a fonctionné en interne « sur la base de 35 heures / semaines mais annualisées » en ce que les salariés réalisent « 40 heures / semaine sur 43 semaines » ; qu'en contrepartie de cette annualisation il a été décidé d'accorder aux salariés quatre semaines de congés supplémentaires ainsi que tous les ponts et jours fériés ; qu'aucun des salariés n'a d'ailleurs sollicité de prendre ses congés payés en dehors des 9 semaines (5 + 4) ainsi prévues dans l'organisation de l'agence ; que ce système est conforme à la convention collective applicable rappelant que l'organisation du travail doit faire l'objet d'une concertation en interne et que : « Dans la limite de 46 H/semaine, les heures effectuées au-delà de la durée légale (35 h) ne sont pas des heures supplémentaires » ; que d'une manière générale les heures supplémentaires doivent recevoir l'accord de l'employeur et conserver un caractère exceptionnel ; que ladite convention collective prévoit un principe de modulation avec l'établissement d'un calendrier par l'employeur qui prend en compte notamment les aspirations des salariés ; et que le décompte de M. [C] [O] en toute hypothèse est erroné.

*

Lors de l'embauche de M. [C] [O] courant 2004 aux conditions rappelées ci-dessus, il n'a jamais été fait référence à une annualisation du temps de travail qui, en toute hypothèse, ne sera permise qu'avec la loi n° 2008-789 du 20 août 2008 - article L. 3122-2 et suivants du code du travail - disposant que seul un accord collectif d'entreprise ou, à défaut, une convention ou un accord de branche, peut définir les modalités d'aménagement du temps de travail et organiser la répartition de la durée du travail sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année.

Durant la période d'application de la loi précitée correspondant aux dernières années de la relation contractuelle de travail entre les parties, force est de relever que la Selarl LIARD ET TANGUY ne se prévaut d'aucun texte conventionnel qu'elle aurait pu valablement opposer à M. [C] [O] sous la forme d'un dispositif d'annualisation du temps de travail, cela « sur la base de 35 heures / semaines mais annualisées » comme elle le prétend.

*

La convention collective précitée retient par ailleurs la possibilité d'un principe de modulation - articles VII.3.3 et VII.3.3.1 - dès lors que l'activité des entreprises d'architecture peut comporter des périodes de plus ou moins grande intensité au cours de l'année, se traduisant périodiquement par des variations du temps de travail, modulation d'une amplitude de nature variable avec cette indication que : « Dans la limite de 46 heures par semaine, les heures effectuées au-delà de la durée légale (35 heures) ne sont pas des heures supplémentaires » - article VII.3.3.2.

Au regard de ces dispositions conventionnelles dont relève la société appelante et que reprennent les parties au cours des débats, s'agissant précisément de la modulation du temps de travail tant dans son principe que dans son amplitude, il convient de rappeler que bien que celle-ci ait été fusionnée par la loi n°2008-789 du 20 août 2008 avec le temps partiel modulé, les cycles de travail et l'annualisation sous forme de jours de RTT, les accords collectifs l'ayant mise en 'uvre sur la base des dispositions légales antérieures au dit texte ont été sécurisés, ce qui suppose donc l'existence d'une convention ou d'un accord collectif étendu, d'un accord collectif d'entreprise ou d'établissement, ce dont ne peut pas davantage se prévaloir la Selarl LIARD ET TANGUY qui, par voie de conséquence, est mal fondée à opposer à l'intimé l'article VII.3.3.2 précité.

*

Au surplus, la même convention collective dont relève la société appelante, en ses articles VII.2.4 à VII.2.4.5, précise que le paiement majoré de la totalité ou d'une partie des heures supplémentaires effectuées avec l'accord de l'employeur peut être remplacé par un repos d'une durée équivalente - repos compensateur de remplacement -, que le contingent annuel d'heures supplémentaires est fixé à 80% du contingent légal, que les heures supplémentaires s'imputent sur le contingent d'heures supplémentaires à partir de la 36ème heure, que les heures supplémentaires effectuées au-delà du contingent ouvrent droit en plus de leur rémunération majorée à un repos compensateur obligatoire avec un mode de calcul différent selon l'effectif de l'entreprise, et que l'activité des entreprises du secteur peut comporter des périodes de suractivité imprévues sur le planning de charge nécessitant de réorganiser le temps de travail avec cette autre indication que les heures supplémentaires dites de suractivité conduisent à un repos compensateur de remplacement bonifié sans imputation sur le contingent annuel - article VII.3.2.

Il est constant que la Selarl LIARD ET TANGUY, comme l'a relevé l'intimé à juste titre, sans véritablement être contredit sur ce point, a favorisé la mise en place d'une organisation du temps de travail ne permettant pas une compensation intégrale des heures supplémentaires au-delà de 35 heures hebdomadaires avec les majorations obligatoires prévues, en ce que le système retenu au sein de l'agence avec l'octroi aux salariés de quatre semaines de congés payés en plus ne pouvait pas permettre en toute hypothèse une juste compensation des cinq heures supplémentaires réalisées dans la semaine - entre la 36ème et la 40ème heure - sans application des majorations légales.

C'est d'ailleurs ce que confirme l'attestation produite par. M. [C] [O] et qui émane de l'un de ses collègues de travail en la personne de M. [G] [X] (« ' Mr. [B] [S] et Mr [C] [O] étaient ' présents sur leur lieu de travail durant les 40 heures hebdomadaires exigées par leurs employeurs ' Les contrats de travail étant établis sur la base de 35 h, les 5 heures supplémentaires réalisées hebdomadairement faisaient l'objet d'une récupération partielle sous forme de 4 semaines de congés payés par an ' Régulièrement, notamment pendant les phases de rendu de concours, des dépassements étaient effectués jusqu'à des heures tardives, sans compter les heures de travail effectuées à domicile. Ces heures n'ont jamais été comptabilisées et n'ont jamais fait l'objet de récupération. Les heures de travail, tout comme les périodes de congés ou de récupération n'ont jamais été affichées dans les locaux, ni mentionnées sur les bulletins de salaire », sa pièce 14).

*

Pour l'ensemble de ces raisons et au vu du décompte récapitulatif établi par M. [C] [O] pour étayer pareille demande, décompte suffisamment précis, après infirmation du jugement entrepris, la société appelante sera condamnée à lui régler sur la période de juin 2011 à mai 2015 inclus la somme de 10 905,96 € à titre de rappel d'heures supplémentaires, ainsi que1 090,59 € d'incidence congés payés, avec intérêts au taux légal partant de la date de réception par l'employeur de sa convocation en bureau de conciliation.

Sur le travail dissimulé

Le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de M. [C] [O] en paiement de la somme de 19 720,80 € à titre d'indemnité légale forfaitaire pour travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié au visa des articles L. 8221-5 et L. 8223-1 du code du travail, indemnité égale à six mois de salaires, faute par lui de démontrer la réelle intention coupable de la société appelante.

Sur le licenciement

Au soutien de sa contestation, au visa notamment de l'article L. 1233-67 du code du travail, M. [C] [O] rappelle que dans l'hypothèse, comme en l'espèce, où la rupture du contrat de travail est consécutive à l'acceptation par le salarié du contrat de sécurisation professionnelle, l'employeur doit lui préciser les raisons économiques dans tout document écrit au plus tard au moment de son acceptation ; qu'en l'espèce il a adhéré le 4 juin 2015 au dispositif CSP et qu'à cette même date la Selarl LIARD ET TANGUY lui a notifié par lettre en recommandé avec accusé de réception son « licenciement économique individuel à défaut d'acceptation du contrat de sécurisation professionnelle » ; qu'il est donc avéré qu'il n'a pris connaissance de cette même lettre qu'après son adhésion au dispositif sur le CSP ; et que dans la mesure où il ne lui a pas été notifié par écrit les motifs économiques de la rupture de son contrat de travail, avant ou concomitamment à son adhésion, par ce seul moyen qu'il entend soulever, celle-ci s'analyse nécessairement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

En réponse, la Selarl LIARD ET TANGUY considère que l'acte d'adhésion du salarié au dispositif sur le CSP, document qu'il a lui-même rempli en y apposant la mention du 4 juin 2015, n'a pas « date certaine » ; qu'il n'est d'ailleurs signé que par lui ; et que lors de l'entretien préalable M. [C] [O] n'a jamais contesté la réalité même des difficultés économiques auxquelles était confrontée l'entreprise ; et que l'adhésion de ce dernier au CSP l'a définitivement privé de la faculté de contester la régularité de son licenciement se trouvant ainsi pleinement justifié.

*

Il est admis que lorsque la rupture du contrat de travail résulte de l'acceptation par le salarié d'un contrat de sécurisation professionnelle (CSP) régi par les articles L. 1233-65 et suivants du code du travail l'employeur doit en énoncer le motif économique soit dans le document écrit d'information remis obligatoirement au salarié concerné par le projet de licenciement, soit dans la lettre qu'il est tenu de lui adresser quand le délai dont dispose le salarié pour faire connaître sa réponse à la proposition de CSP expire après le délai d'envoi de la lettre de licenciement légalement imposée, soit encore lorsqu'il n'est pas possible à l'employeur d'envoyer cette même lettre avant l'adhésion du salarié au dispositif CSP, dans tout autre document écrit porté à la connaissance de ce dernier au moment de son acceptation, avec cette indication que si le document d'information ainsi exigé n'a été adressé au salarié que postérieurement à son acceptation du contrat CSP, c'est-à-dire dans l'hypothèse où il en a eu une réelle connaissance qu'après son adhésion, la rupture intervenue s'analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le bulletin d'acceptation du CSP, daté du 4 juin 2015, porte la signature de M. [C] [O], avec le cachet de l'entreprise, étant relevé que cette même date n'a d'évidence fait aucune difficulté à la Selarl LIARD ET TANGUY lors de l'établissement du certificat de travail où elle y a expressément mentionné : « ' Vous avez acquis 120 heures non utilisées au titre du DIF. Ces heures ont été mentionnées sur l'attestation UNEDIC du Contrat de Sécurisation Professionnelle que vous avez accepté en date de 04/06/2015 que nous avons transmise à l'organisme ' » - pièce 6 du salarié.

Cette date du 4 juin 2015 fait foi jusqu'à inscription de faux et est opposable à la société appelante qui se contente d'affirmer, sans plus d'éléments, que ledit bulletin d'adhésion n'aurait pas « date certaine », alors même qu'elle a envoyé en recommandé avec AR à M. [C] [O] une lettre datée également du 4 juin 2015 pour lui notifier son licenciement pour motif économique, et dans laquelle il est précisé que la suppression de son emploi de collaborateur d'architecte est consécutive à des difficultés financières en lien avec la conjoncture défavorable du moment.

Dès lors que M. [C] [O] a adhéré au dispositif sur le CSP avant que ne lui soit énoncé par écrit le motif économique de la rupture de son contrat de travail, c'est-à-dire avant d'avoir été informé des raisons de nature économique conduisant à cette même rupture, la Selarl LIARD ET TANGUY ne contestant pas le fait que l'intimé n'ait pu être rendu destinataire de la lettre de licenciement que postérieurement au 4 juin 2015, soit au plus tôt le 5 juin, il convient de dire que ladite rupture s'analyse en un licenciement abusif.

En l'absence de motif économique de licenciement, le contrat de sécurisation professionnelle se trouve privé de cause et l'employeur est alors tenu à l'obligation du préavis et des congés payés y afférents.

Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu'il a condamné la Selarl LIARD ET TANGUY à régler à l'intimé les sommes de :

-19 720,80 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif, sur le fondement de l'article L. 1235-5 du code du travail dans sa version alors en vigueur, représentant 6 mois de salaires compte tenu de son âge (38 ans) et de son ancienneté (un peu plus de 10 années) lors de la rupture, avec intérêts au taux légal partant de son prononcé ;

-9 860,40 € d'indemnité compensatrice conventionnelle de préavis (article IV.1.1) égale à trois mois de salaires, et 986,04 € d'incidence congés payés, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation rn bureau de conciliation.

La cour l'infirmera en ce qu'il a ordonné à l'appelante de rembourser à Pôle emploi les indemnités de chômage versées à M. [C] [O] dans la limite de six mois au visa de l'article L. 1235-4 du code du travail, texte en effet seul applicable en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse par renvoi aux dispositions de l'article L. 1235-3.

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

La Selarl LIARD ET TANGUY sera condamnée en équité à payer à l'intimé la somme complémentaire de 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement et par arrêt mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement entrepris sauf en ses dispositions sur le rappel d'heures supplémentaires et le remboursement à Pôle emploi des indemnités de chômage ;

STATUANT à nouveau de ces chefs,

-CONDAMNE la Selarl LIARD et TANGUY à régler à M. [C] [O] la somme de 10 905,96 € à titre de rappel d'heures supplémentaires, et 1 090,59 € d'incidence congés payés, avec intérêts au taux légal partant de la date de réception par l'employeur de sa convocation en bureau de conciliation

-DIT n'y avoir lieu à remboursement à Pôle emploi par la Selarl LIARD ET TANGUY des indemnités de chômage versées à M. [C] [O] ;

Y AJOUTANT,

-ORDONNE à la Selarl LIARD ET TANGUY de remettre à M. [C] [O] les bulletins de paie rectifiés sans le prononcé d'une astreinte

-CONDAMNE la Selarl LIARD ET TANGUY à payer à M. [C] [O] la somme de 2 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la Selarl LIARD ET TANGUY aux dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 7ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 17/03774
Date de la décision : 28/05/2020

Références :

Cour d'appel de Rennes 05, arrêt n°17/03774 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2020-05-28;17.03774 ?
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