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21/06/2019 | FRANCE | N°18/07606

France | France, Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 21 juin 2019, 18/07606


8ème Ch Prud'homale





ARRÊT N°249



R.G : N° RG 18/07606 - N° Portalis DBVL-V-B7C-PKNC













Mme [G] [L] épouse [C]



C/



Société LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER SA

















Appel sur la compétence :

Infirmation















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU

PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 21 JUIN 2019







COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Conseillère,

Monsieur Emmanuel ROCHARD, Conseiller,



GREFFIER :



Monsieur Philippe R...

8ème Ch Prud'homale

ARRÊT N°249

R.G : N° RG 18/07606 - N° Portalis DBVL-V-B7C-PKNC

Mme [G] [L] épouse [C]

C/

Société LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER SA

Appel sur la compétence :

Infirmation

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 21 JUIN 2019

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L'HENORET, Président de chambre,

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Conseillère,

Monsieur Emmanuel ROCHARD, Conseiller,

GREFFIER :

Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 25 Avril 2019

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 21 Juin 2019 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANTE sur la compétence :

Madame [G] [L] épouse [C]

née le [Date naissance 2] 1961 à [Localité 6] (56)

demeurant [Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Maurice RAMUZ, Avocat au Barreau de VANNES

INTIMEE sur appel sur la compétence :

Le LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER SA prise en la personne de ses représentants légaux et ayant son siège social :

[Adresse 5]

[Localité 3]

représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SCP GAUTIER-LHERMITTE, Avocat postulant du Barreau de RENNES et par Me Marie-Laure TREDAN (CMS Bureau Francis Lefebvre), Avocat plaidant du Barreau des HAUTS-DE-SEINE

Mme [G] [C] a été engagée le 29 janvier 2000 par la société SAFIR en qualité d'employée traitement des commandes dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée relevant de la convention collective de la chimie.

Mme [C] a bénéficié d'arrêts de travail successifs du 11 janvier 2001 au 13 octobre 2003. A compter du 16 octobre 2003, la salariée a été placée en temps partiel thérapeutique, pour 75,83 heures mensuelles.

Mme [C] a été classée en invalidité catégorie 2 par la CPAM le 11 janvier 2004 et une rente d'invalidité lui a été attribuée.

A la suite de la fusion-absorption de la société SAFIR et de la société LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER, le contrat de travail de Mme [C] a été transféré à cette dernière.

À compter de 2005, Mme [C] a cessé de percevoir les indemnités de prévoyance dues aux salariés reconnus en invalidité et travaillant à temps partiel prévues par l'article 28 du contrat de prévoyance de l'entreprise.

Le 13 décembre 2013, Mme [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Vannes aux fins de faire condamner la société LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER à lui verser :

A titre principal

- 37.429,55 € au titre de l'indemnité de prévoyance pour la période du 13 décembre 2008 au 31 décembre 2016 et à compter du 1er janvier 2017, sur les mêmes bases,

- 3.742,95 € au titre des congés payés afférents,

A titre subsidiaire

- 16.805,78 € pour la période de janvier 2009 à décembre 2016 à titre de maintien de salaire et à compter de janvier 2017 sur les mêmes bases,

- 1.680,57 € au titre des congés payés afférents,

A titre très subsidiaire

- 9.164,19 € à titre de rappel de salaire et d'indemnité de prévoyance pour la période de janvier 2009 à décembre 2016 et à compter de janvier 2017 sur les mêmes bases,

- 916,41 € au titre des congés payés afférents,

En tout état de cause

- 2.000 € de dommages et intérêts,

- 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La cour est saisie d'un appel régulièrement formé le 24 novembre 2018 par Mme [C] contre le jugement du conseil de prud'hommes de Vannes du 11 octobre 2018, notifié le 17 novembre 2018, lequel a :

' Déclaré irrecevables ses demandes à l'encontre de la société LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER au titre des prestations du régime de prévoyance,

' S'est déclaré incompétent,

' Invité Mme [C] à mieux se pourvoir près le Tribunal de grande instance de Vannes,

' Laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens.

Vu l'ordonnance du 5 décembre 2018 au visa des articles 84 et suivants, 917 et suivants du code de procédure civile autorisant Mme [C] à faire délivrer assignation à jour fixe avant le 21 décembre 2018 à la société LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER et fixant la clôture de la procédure au 25 janvier 2019 et l'audience de plaidoiries au 7 février 2019.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 8 avril 2019, Mme [C] demande à la Cour de :

' Annuler le jugement entrepris,

' En toute hypothèse, réformer le jugement en ce qu'il a :

- déclaré irrecevables ses demandes à 1'encontre de la société LABORATOIRES DE BIOLOGIE VÉGÉTALE YVES ROCHER au titre du régime de prévoyance,

- s'est déclaré incompétent,

- l'a invitée à mieux se pourvoir près le Tribunal de Grande Instance de VANNES,

- l'a déboutée de ses autres demandes,

- laissé à chaque partie la charge de ses propres dépens

Et statuant à nouveau,

' Dire que le conseil de prud'hommes de Vannes est compétent pour statuer sur ses demandes à l'encontre de la société LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER,

' Renvoyer l'affaire devant le conseil de Prud'hommes de Vannes, sauf à faire application de l'article 88 du Code de procédure civile,

' Décerner acte qu'elle s'en rapporte à Justice aux fins de déterminer s'il y a lieu d'évoquer devant la Cour d'appel de Rennes le fond, si la Cour estime de bonne justice de donner à l'affaire une solution définitive après avoir ordonné, le cas échéant, une mesure d'instruction,

' Condamner la société LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER à lui verser la somme de 2.500 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile, pour la présente procédure d'appel,

' Condamner la société LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER à lui verser la somme de 2.500 € par application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile, pour les frais engagés afférents à la discussion sur la recevabilité de l'appel ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par la voie électronique le 20 février 2019, la société LABORATOIRES DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER demande à la Cour de :

À titre principal,

' Déclarer irrecevable l'appel de Mme [C],

A titre subsidiaire,

' Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Vannes du 11 octobre 2018 en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes formulées par Mme [C] à son encontre au titre des prestations du régime de prévoyance,

' Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Vannes du 11 octobre 2018 en ce qu'il s'est déclaré par conséquent incompétent,

' Inviter Mme [C] à mieux se pourvoir près le Tribunal de Grande Instance de Vannes,

En tout état de cause,

' Condamner Mme [C] à lui verser la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,

' Confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Vannes du 11 octobre 2018 en ce qu'il a débouté Mme [C] de ses autres demandes.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions notifiées par la voie électronique.

***

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l'appel

La SA LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER soulève l'irrecevabilité de l'appel au motif que la requête aux fins d'assigner à jour fixe a été adressée au greffe central par la voie électronique le 25 novembre 2018 ; qu'en application des articles 84 alinéa 2 et 85 du Code de procédure civile, l'appelant doit remettre au premier président sa requête contenant les pièces et les conclusions ; qu'en application de l'article 930-1 du code de procédure civile, seuls les actes de procédure destinés à la cour d'appel doivent être remis par la voie électronique ; que le premier président n'est pas juridiction d'appel mais une juridiction distincte de la cour de sorte qu'il n'est pas permis de communiquer par la voie électronique avec le premier président ; que de surcroît l'appel n'est pas motivé et il n'est pas joint de conclusions ; que la sanction est l'irrecevabilité de l'appel.

Mme [C] conclut qu'il n'existe aucune irrégularité dans la remise de la requête au premier président par la voie électronique au motif que l'article 748-1 du Code de procédure civile prévoit que les envois, remises et notifications des actes de procédure peuvent être effectués par la voie électronique ; qu'aucun texte n'interdit la saisine du Premier Président par la voie électronique ; que l'employeur ne justifie d'aucun grief.

L'article 84 du Code de procédure civile dispose qu'en cas d'appel, l'appelant doit, à peine de caducité de la déclaration d'appel, saisir, dans le délai d'appel, le premier président en vue, selon le cas, d'être autorisé à assigner à jour fixe ou de bénéficier d'une fixation prioritaire de l'affaire.

Si les dispositions de l'article 917 du Code de procédure civile qui gouvernent la procédure à jour fixe n'entrent pas dans la liste dressée par les articles 2 et 3 de l'arrêté du 30 mars 2011, il n'en demeure pas moins qu'aucun texte ne prohibe la voie électronique comme mode de transmission de la requête aux fins d'autorisation d'assigner à jour fixe ou n'exclut tout mode de saisine autre que la remise au greffe de la requête sur un support "papier".

Il s'ensuit que le premier président a été valablement saisi de la requête aux fins d'autorisation d'assigner à jour fixe et qu'il y a lieu de rejeter l'exception d'irrecevabilité tenant à la saisine par la voie électronique.

A la déclaration d'appel est joint un document détaillant les chefs du jugement critiqués. Il convient donc de rejeter l'exception tenant au défaut de motivation de l'appel.

L'appel de Mme [C] est donc recevable.

Sur la compétence et la recevabilité des demandes

Pour infirmation de la décision entreprise, Mme [C] soutient en substance qu'en application de l'article 79 du Code de procédure civile, le jugement est nul comme ne distinguant pas dans son dispositif la question de fond et la question de la compétence ; qu'elle est recevable à agir devant la juridiction prud'homale à l'encontre de son employeur au titre de l'exécution du contrat de prévoyance en ce qu'il constitue un avantage social complémentaire et accessoire au contrat de travail; que l'employeur engageant sa responsabilité, la réparation prend la forme de ce que le salarié aurait dû percevoir, à savoir une forme de réparation en nature, par l'exécution par l'employeur fautif de ce qui est dû au titre du contrat de prévoyance; que les demandes formulées par Mme [C] à l'encontre de son employeur ne peuvent l'être que devant le conseil de prud'hommes.

Pour confirmation de l'irrecevabilité des demandes et l'incompétence de la juridiction prud'homale, la SA LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER expose que dans le cadre d'un régime de prévoyance, elle a souscrit un contrat avec la société d'assurance France ASSURANCES aux droits de laquelle vient la société GENERALI VIE ; que ce régime est financé par des cotisations dont le montant est réparti entre les salariés et l'employeur ; que l'organisme assureur perçoit les cotisations et doit servir le montant des prestations garanties ; que Mme [C] ne peut donc pas demander à la SA LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER de lui verser un maintien de salaire au titre des garanties du régime de prévoyance lesquelles sont à la charge de l'organisme assureur ; que le litige relatif au versement d'une prestation par un organisme assureur ne relève pas de la compétence prud'homale.

En application des articles L.1411-1 et suivants du Code du travail, le conseil de prud'hommes est compétent pour statuer sur les différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail soumis aux dispositions du Code du travail entre les employeurs et les salariés qu'ils emploient.

Il est constant que le différend opposant un salarié à son employeur, né de l'exécution du contrat d'assurance souscrit par ce dernier au profit de l'ensemble de son personnel, lequel constitue un avantage social complémentaire et accessoire au contrat de travail, relève de la compétence de la juridiction prud'homale.

Aux termes de l'article L.1411-6 du code du travail, lorsqu'un organisme se substitue habituellement aux obligations légales de l'employeur, il peut être mis en cause au côté de celui-ci en cas de litige entre l'employeur et les salariés qu'il emploie.

Il est constant que lorsqu'est mis en cause au côté de l'employeur un organisme de prévoyance débiteur de prestations en vertu d'un engagement unilatéral de l'employeur et non en application d'une obligation légale au sens de l'article L.1411-6 du Code du travail, la juridiction prud'homale n'est pas compétente pour connaître du litige, l'institution de prévoyance mise en cause ne se substituant pas aux obligations légales de l'employeur.

En l'espèce, Mme [C] ne formule aucune demande à l'encontre de la société d'assurance auprès de laquelle son employeur a souscrit unilatéralement un régime de prévoyance au bénéfice de ses salariés et cette société d'assurance n'est pas dans la cause.

Le différend qui l'oppose exclusivement à son employeur est né de l'exécution du contrat d'assurance souscrit au bénéfice des salariés de la SA LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER, lequel constitue un avantage social complémentaire et accessoire au contrat de travail.

En conséquence, c'est à tort que les premiers juges se sont déclarés incompétents pour en connaître. La décision entreprise sera infirmée de ce chef.

Il appartient à la juridiction de jugement de redonner l'exacte qualification des faits et des actes litigieux sans s'arrêter à la dénomination que les parties auraient proposée et de statuer sur l'ensemble des demandes. Si Mme [C] a sollicité devant le conseil de Prud'hommes la condamnation de l'employeur à lui verser des indemnités de prévoyance, elle a également formulé des demandes subsidiaires tendant à voir obtenir des rappels de salaire et des dommages et intérêts. Compte tenu de l'existence d'un intérêt à agir contre la SA LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER, ses demandes sont recevables et le bien fondé devra être examiné par la juridiction du 1er degré.

Sur les frais irrépétibles

la SA LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER sera tenue aux dépens et devra verser à Mme [C] la somme de 1.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

DIT que l'appel est recevable,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

DIT que le Conseil de prud'hommes de Vannes est compétent,

DIT que les demandes formulées par Mme [C] à l'encontre de la SA LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER sont recevables,

CONDAMNE la SA LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER aux entiers dépens,

CONDAMNE la SA LABORATOIRE DE BIOLOGIE VEGETALE YVES ROCHER à verser à Mme [C] la somme de 1.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 8ème ch prud'homale
Numéro d'arrêt : 18/07606
Date de la décision : 21/06/2019

Références :

Cour d'appel de Rennes 08, arrêt n°18/07606 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-06-21;18.07606 ?
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