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04/04/2019 | FRANCE | N°16/05621

France | France, Cour d'appel de Rennes, 4ème chambre, 04 avril 2019, 16/05621


4ème Chambre








ARRÊT N°137





N° RG 16/05621


N° Portalis DBVL-V-B7A-NFCE













































































Copie exécutoire délivrée





le :





à :











RÉPUBLIQUE FR

ANÇAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE RENNES


ARRÊT DU 04 AVRIL 2019








COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :





Président : Madame Hélène RAULINE, Présidente de chambre,


Assesseur : Madame Florence BOURDON, Conseillère,


Assesseur : Madame Catherine MENARDAIS, Conseillère,





GREFFIER :





Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé








DÉBATS :





A ...

4ème Chambre

ARRÊT N°137

N° RG 16/05621

N° Portalis DBVL-V-B7A-NFCE

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 04 AVRIL 2019

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Hélène RAULINE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Florence BOURDON, Conseillère,

Assesseur : Madame Catherine MENARDAIS, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Françoise DELAUNAY, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 26 Février 2019, devant Madame Hélène RAULINE, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 04 Avril 2019 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur C... K...

[...]

Représenté par Me Frédéric-Pierre VOS de la SCPA GRANRUT AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

Représenté par Me Sylvie PELOIS de la SELARL AB LITIS, Postulant, avocat au barreau de RENNES

INTIMÉS :

Madame G... I... épouse M...

[...]

[...]

Représentée par Me Eric LECARPENTIER de la SCP A.KALIFA-C.LOMBARD-E.LECARPENTIER, Plaidant, avocat au barreau de LORIENT

Représentée par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Monsieur X... M...

[...]

[...]

Représenté par Me Eric LECARPENTIER de la SCP A.KALIFA-C.LOMBARD-E.LECARPENTIER, Plaidant, avocat au barreau de LORIENT

Représenté par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Compagnie d'assurances CAISSE REGIONALE D'ASSURANCES MUTUELLES AGRICOLES BRETAGNE PAYS DE LOIRE Entreprise régie par le Code des Assurances, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège. [...]

Représentée par Me Christophe DAVID de la SELARL LE PORZOU, DAVID, ERGAN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES

***

Monsieur et madame X... M... ont confié à M. C... K... la pose d'une nouvelle couverture en ardoises 27 x18, 1er choix, classe A sur leur maison d'habitation sise à [...]. Les travaux ont donné lieu à l'établissement d'une facture d'un montant de 20 998,40 € TTC le 2 août 2004.

En janvier 2010, les époux M... ont déclaré à leur assureur un phénomène de condensation altérant l'isolation et la charpente. Une expertise amiable a été réalisée au terme de laquelle la CRAMA Bretagne Pays de Loire, assureur décennal de M. K..., a refusé sa garantie.

Une expertise judiciaire a été ordonnée par le juge des référés du tribunal de grande instance de Lorient le 12 avril 2011. M. E... a déposé son rapport le 27 juillet suivant.

Par acte d'huissier en date du 24 mars 2015, les époux M... ont fait assigner M. K... et la CRAMA devant le tribunal de grande instance de Lorient qui, par un jugement en date du 4 juillet 2016 assorti de l'exécution provisoire, a :

- constaté l'absence de désordre de nature décennale affectant les travaux de couverture,

- prononcé la mise hors de cause de la CRAMA,

- déclaré M. K... responsable des non-conformités des travaux de couverture,

- condamné M. K... à payer aux époux M... la somme de 35 000 € TTC au titre des travaux de reprise à actualiser sur l'indice BT 01,

- rejeté les demandes de dommages-intérêts et d'amende civile,

- condamné M. K... à payer aux époux M... la somme de 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens comprenant les frais de référé et d'expertise judiciaire,

- condamné les époux M... à verser la somme de 1 000 € à la CRAMA en application de l'article 700 du code de procédure civile.

M. K... a interjeté appel de cette décision le 24 avril 2015.

Par une ordonnance en date du 4 mai 2016, le conseiller de la mise en état a débouté M. K... de sa demande de consignation et ordonné la radiation de l'affaire en application de l'article 526 du code de procédure civile.

L'affaire a été rétablie le 4 juillet 2016. Les parties ont conclu. L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 février 2019.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Dans ses dernières conclusions en date du 1er février 2019, M. K... demande à la cour de :

- débouter les époux M... de toutes leurs demandes,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté les époux M... de leur demande au titre de la responsabilité décennale et de leur demande au titre du préjudice de jouissance,

- l'infirmer pour le surplus,

- dire que la présence de champignons sur la charpente est antérieure à son intervention, que les désordres de condensation relèvent de la responsabilité des époux M... du fait des travaux d'isolation qu'ils ont réalisés, que le marché ne faisait pas référence au DTU 40.11, que le préjudice de jouissance n'est justifié ni dans son montant ni dans son quantum, que l'action engagée par les époux M... est abusive et outrancière,

- débouter les époux M... de l'ensemble de leurs demandes, les condamner à lui payer 15000 € à titre de dommages-intérêts, une amende de 3 000 €, une indemnité de 7 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Dans ses dernières conclusions en date du 30 janvier 2017, la CRAMA Bretagne Pays de Loire demande à la cour de confirmer le jugement, de débouter les époux M... de leurs demandes, de condamner toute partie succombante à lui payer 3 000 € au titre de ses frais irrépétibles d'appel, de condamner M. K... ou les époux M... à lui payer 2 500 € au titre de ses frais irrépétibles d'appel et aux dépens.

Dans leurs dernières conclusions en date du 4 janvier 2019, monsieur et madame M... demandent à la cour de :

- infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leur demande sur le fondement de l'article 1792 du code civil, condamner solidairement M. K... et la CRAMA à réparer leur entier préjudice,

- subsidiairement, confirmer le jugement,

- condamner M. K... et sa compagnie d'assurance, ou l'un à défaut de l'autre, à leur payer 6 000 € de dommages-intérêts, 4 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

MOTIFS

Sur les demandes de M. et Mme M...

Les époux M... reprochent au tribunal d'avoir écarté la responsabilité décennale du couvreur et les conclusions du rapport d'expertise de leur assureur non démenties par l'expert judiciaire qui imputent la cause des désordres aux travaux de couverture. Subsidiairement, ils sollicitent la confirmation du jugement au motif que toute non conformité oblige à réparation, même sans désordre, à tout le moins, au titre de la non conformité de la taille des ardoises qui les obligera à la déclarer à leur acquéreur lorsqu'ils revendront la maison et donc à diminuer le prix de vente.

M. K... fait valoir que les manquements au DTU 40.11 relevés par l'expert judiciaire ne sont pas à l'origine des désordres dénoncés par les maîtres de l'ouvrage et ne leur ont causé aucun dommage de sorte qu'ils ne sauraient donner lieu à réparation, le DTU n'étant pas obligatoire dans les marchés privés conformément à l'article 17 du décret 2009-697 du 16 juin 2009 relatif à la normalisation et n'ayant pas été contractualisé avec les époux M... .

La facture du 2 août 2004 ayant été réglée sans réserve, c'est à cette date que sera fixée la réception tacite des travaux.

Il ressort du rapport d'expertise que :

- le phénomène de condensation est consécutif à des défauts de mise en oeuvre de l'isolation (absence de ventilation entre l'isolant et la sous-face de l'écran de sous-toiture, défaut d'étanchéité à l'air et discontinuité du pare-vapeur, présence d'un pare-vapeur sous la première couche extérieure isolante, communication entre l'intérieur de l'habitation chauffée et les combles non chauffés) imputables aux époux M... qui ont réalisé ces travaux ;

- il n'y a pas de relation de cause à effet entre l'absence de ventilation en sous-face des éléments de couverture, non conforme au DTU 40-11, et le phénomène de condensation car l'écran a pour fonction d'évacuer vers l'extérieur l'eau tombée entre les éléments de couverture à l'occasion d'événements climatiques particuliers ;

- la non-conformité au DTU 40-11 de la dimension des ardoises n'a entraîné aucun dommage.

Le désordre lié au phénomène de condensation est de nature décennale en ce qu'il affecte le clos et le couvert mais il est imputable aux travaux d'isolation réalisés par les maîtres de l'ouvrage. Contrairement à ce que ces derniers font plaider, l'expert judiciaire a contredit formellement les conclusions de leur expert et exclu de manière claire et circonstanciée tout lien entre les deux manquements au DTU imputables à M. K... et les désordres.

Les premiers juges en ont justement déduit que la responsabilité décennale de ce dernier n'était pas engagée et mis hors de cause son assureur décennal CRAMA.

L'expert judiciaire a pareillement constaté l'absence de dommage consécutif au non-respect du DTU 40.11 en ce qui concerne la pose des ardoises et leurs dimensions. Or, l'existence d'un dommage est la condition de mise en oeuvre tant des garanties légales que de la responsabilité contractuelle. Il n'en va différemment qu'en présence d'une non conformité aux spécifications contractuelles.

La mise en oeuvre de ce DTU n'avait pas été spécifiée dans le marché. Les époux M... qui affirment le contraire n'en rapportent la preuve, cette mise en oeuvre ne pouvant être implicite. Le préjudice résultant d'une éventuelle moins value lors d'une éventuelle revente est purement hypothétique.

Le jugement est donc infirmé et les époux M... débouté de leur demande en paiement du coût de réfection de la toiture de leur maison et, partant, de leur appel incident sur le trouble de jouissance.

Sur les demandes de M. K...

M. K... expose qu'il travaille depuis 2002 sans avoir jamais rencontré la moindre difficulté, que ce sont les époux M... qui lui ont demandé de poser des ardoises plus petites pour conserver l'aspect ancien, qu'ils tentent de lui faire supporter les conséquences de leur propre défaillance, que sa situation financière est très précaire, ayant dû souscrire un emprunt pour acquitter les causes du jugement, que leur comportement est déloyal.

Les époux M... qualifient d'allégations mensongères les déclarations de l'appelant sur la taille des ardoises et répliquent que l'exercice d'une action en justice constitue un droit qui ne dégénère en abus qu'en cas de malice, mauvaise foi ou erreur grossière, lesquelles ne sont pas établies puisqu'ils se fondent sur le rapport d'expertise de leur assureur.

Les maîtres de l'ouvrage ont pris le risque d'assigner le couvreur malgré un rapport d'expertise judiciaire défavorable, rapport clair et motivé dont aucune constatation ou conclusion n'est sujette à interprétation. Invoquer le rapport de l'expert de leur compagnie d'assurance est contraire au principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même. La cour observe à cet égard qu'un délai de presque quatre ans s'est écoulé entre le dépôt du rapport d'expertise judiciaire et la délivrance de l'assignation.

M. K... est fondé à soutenir que ce comportement téméraire lui a causé un préjudice moral résultant des tracas inhérents à une telle procédure et un préjudice financier compte tenu de la décision des époux M... de mettre à exécution la décision de première instance à leurs risques et périls.

Il lui sera alloué la somme de 4 000 € à titre de dommages-intérêts, toutes causes de préjudice confondues.

Sur les dépens et frais irrépétibles

La disposition du jugement ayant alloué une indemnité de procédure à la CRAMA est confirmée, les autres dispositions relatives aux dépens et frais irrépétibles étant infirmées.

Les époux M... qui succombent en toutes leurs prétentions sont condamnés aux dépens de première instance et d'appel et à payer à M. K... une somme de 5 000 € au titre de ses frais irrépétibles et à la CRAMA, une somme de 1 000 €.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement :

CONFIRME le jugement en ce qu'il a dit que le désordre de nature décennale n'était pas imputable aux travaux de couverture et condamné les époux M... à verser la somme de 1 000 € à la CRAMA en application de l'article 700 du code de procédure civile,

L'INFIRME pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

DEBOUTE M. et Mme M... de toutes leurs demandes à l'encontre de M. K...,

CONDAMNE M. et Mme M... à payer à M. K... les sommes suivantes :

- 4 000 € à titre de dommages-intérêts,

- 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. et Mme M... à payer à la CRAMA Bretagne Pays de Loire la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. et Mme M... aux dépens de première instance comprenant les frais de référé et d'expertise et aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier Le Président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16/05621
Date de la décision : 04/04/2019

Références :

Cour d'appel de Rennes 04, arrêt n°16/05621 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2019-04-04;16.05621 ?
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