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01/12/2011 | FRANCE | N°11/02546

France | France, Cour d'appel de Rennes, Chambre des baux ruraux, 01 décembre 2011, 11/02546


Chambre des Baux Ruraux





ARRÊT N° 60



R.G : 11/02546













M. [L] [W]

Mme [I] [T] épouse [W]



C/



M. [G] [E]

















Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours















Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PE

UPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 01 DECEMBRE 2011





COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président,

Madame Agnès LAFAY, Conseiller,

Madame Catherine LE FRANCOIS, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Françoise FOUVILLE, lors des débats et lors du p...

Chambre des Baux Ruraux

ARRÊT N° 60

R.G : 11/02546

M. [L] [W]

Mme [I] [T] épouse [W]

C/

M. [G] [E]

Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 01 DECEMBRE 2011

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Gabrielle LAURENT, Président,

Madame Agnès LAFAY, Conseiller,

Madame Catherine LE FRANCOIS, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Françoise FOUVILLE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 06 Octobre 2011

devant Madame Catherine LE FRANCOIS, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par l'un des magistrats ayant participé au délibéré, à l'audience publique du 01 Décembre 2011, date indiquée à l'issue des débats

****

APPELANTS :

Monsieur [L] [W]

[Adresse 15]

[Localité 10]

Représenté par la SCP LAHALLE/DERVILLERS, avocats

Madame [I] [T] épouse [W]

[Adresse 12]

[Localité 8]

Représentée par la SCP LAHALLE/DERVILLERS, avocats

INTIMÉ :

Monsieur [G] [E]

[Adresse 16]

[Localité 9]

Représenté par la SA AVOXA, représenté par Me BOUESSEL DU BOURG, avocat

*****************

EXPOSE DU LITIGE

Suivant acte authentique en date du 1er octobre 1993, reçu par Maître [C], notaire à HEDE, Monsieur [F] [E] et Madame [P] [Y] son épouse ont donné à bail à Monsieur [L] [W] et à Madame [I] [T] épouse [W] diverses parcelles de terres situées sur les communes de [Localité 18] et [Localité 17] d'une superficie de 25 hectares environ pour une durée de 18 années du 29 septembre 1993 au 29 septembre 2011.

Monsieur [G] [E], fils des bailleurs qui s'était vu consentir une donation en nue propriété pour une partie des parcelles d'une superficie de 16 ha 61 a et 45 ca est devenu plein propriétaire à la suite d'un acte de renonciation à usufruit reçu par Maître [M] , notaire à HEDE , en date du 20 juin 2009.

Par exploit d'huissier en date du 8 mars 2010, Monsieur [G] [E] a donné un congé aux preneurs à fin de reprise pour exploitation personnelle pour certaines des parcelles objets du bail pour une surface de 16 ha 61 a et 45 ca pour le 29 septembre 2011.

Monsieur et Madame [W], ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux de RENNES d'une demande de nullité du congé.

Par jugement en date du 11 mars 2011, le tribunal paritaire des baux ruraux de RENNES a débouté Monsieur et Madame [W] de leur demande de nullité du congé , a dit que Monsieur [L] [W] et Madame [I] [T] devront libérer les terres pour le 29 septembre 2011 et qu'à défaut ils pourront être expulsés, si besoin avec le concours de la force publique et les a condamné au paiement d'une somme de 1200 € au titre des frais irrépétibles outre les entiers dépens.

Le tribunal a exposé en substance que Monsieur [E] remplissait les conditions pour prétendre à la reprise personnelle des parcelles louées et que l'existence d'une atteinte grave à l'équilibre économique de l'ensemble de l'exploitation assurée par le preneur n'était pas démontrée.

Monsieur [L] [W] et Madame [I] [T] épouse [W] ont fait appel de cette décision.

Monsieur [E] demande la confirmation du jugement du 11 mars 2011 et la condamnation de Monsieur et Madame [W] à lui payer la somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile .Il expose qu'il a les compétences pour reprendre les terres et qu'il dispose du cheptel et du matériel nécessaires et précise qu'il n'a pas besoin d'une autorisation d'exploiter.

Il ajoute que les preneurs invoquent les dispositions de l'article L 411-62 du code rural alors que ce texte n'est pas applicable en l'espèce puisqu'à la date d'effet du congé , à savoir le 29 septembre 2011 , celui-ci ne portera pas sur une partie des terres données à bail dans la mesureoù le bail s'est trouvé fractionné au moment du renouvellement à savoir le 29 septembre 2011, du fait de la donation qui lui a été consentie par ses parents et qu'il a donné congé pour la totalité des terres dont il était propriétaire et qui étaient données à bail aux époux [W]. Il précise enfin que pour apprécier la gravité du déséquilibre économique, l'étude produite par Monsieur et Madame [W] est purement théorique et ne démontre pas qu'il y aura une perte de revenus importante alors qu'il faut en fait tenir compte de l'activité du GAEC au sein duquel travaille Monsieur [W]et qui bénéficie d'une surface de 70 ha et d'un quota de 400 000 litres pour apprécier la situation. Il ajoute que plusieurs agriculteurs voisins vont partir en retraite ce qui permettra au GAEC de retrouver les terres qu'il souhaite.

Monsieur et Madame [W] demandent à la Cour de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de dire nul et de nul effet le congé délivré par Monsieur [G] [E] le 08 mars 2010 et de condamner celui-ci au paiement d'une somme de 3000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Ils exposent que les dispositions de l'article L 411-62 du code rural ont vocation à s'appliquer en l'espèce dans la mesure où même si Monsieur [E] est bien devenu propriétaire des parcelles en 2009, le bail n'a jamais été fractionné puisqu'à la date d'effet du congé le bail n'avait pas été renouvelé. Ils invoquent les conclusions de l'étude du Centre de gestion pour exposer que la reprise engendrerait une perte de ressources importante qu'ils détaillent en précisant que la pression foncière sur les communes de [Localité 18] et [Localité 17] est telle qu'il est impossible d'acquérir des parcelles agricoles. Ils ajoutent que dans l'hypothèse d'une dissolution ou d'un retrait du GAEC plus que probable si la reprise était effective , le préjudice devait être apprécié au regard de la situation personnelle de Monsieur [W] qui perdrait alors 63% de sa superficie et 66% de sa production laitière.

La Cour renvoie au jugement attaqué et aux dernières écritures développées oralement à l'audience et déposées le 06 octobre 2011 tant pour Monsieur [E] que pour Monsieur et Madame [W] pour un plus ample exposé des faits , de la procédure , des prétentions, moyens et arguments des parties.

Lors de l'audience , le conseil de Monsieur [E] demandait à la Cour d'écarter des débats l'étude de préjudice du CER France communiquée tardivement, ce à quoi le conseil des époux [W] s'opposait en exposant qu'il ne s'agissait que d'une actualisation de l'étude précédemment communiquée.

MOTIFS DE LA DECISION

I - Sur l'incident de communication de pièces

Considérant qu'il n'y a pas lieu d'écarter des débats l'étude concernant l'estimation des préjudices qui ne constitue pour l'essentiel qu'une actualisation de l'étude produite devant le tribunal paritaire des baux ruraux de Rennes, qui a été analysée par celui-ci dans sa décision et dont Monsieur [E] a eu connaissance puisqu'elle figure dans ses pièces ;

II-Sur le fond

Considérant que devant la Cour , Monsieur et Madame [W] ne reprennent pas leur moyens concernant la compétence et l'expérience du bailleur ainsi que ceux afférents à l'autorisation d'exploiter;

Considérant que Monsieur [E] prétend que les dispositions de l'article L 411-62 du code rural sur lesquelles Monsieur et madame [W] fondent leur contestation ne seraient plus applicables en l'espèce dés lors que la reprise pour laquelle le congé a été donné ne serait plus partielle mais totale puisque portant sur la totalité des biens dont il est devenu propriétaire dans la mesure où le bail se serait fractionné au moment de son renouvellement;

Mais considérant que si Monsieur [E] est bien devenu en 2009 propriétaire des 16 ha 61 a et 45 ca sur lesquels porte le congé , le bail du 1er octobre 1993 n'a jamais été fractionné puisqu'à la date d'effet du congé , à laquelle il faut se placer pour en apprécier la régularité , le bail de 18 ans ne s'était pas renouvelé dans la mesure où le congé était précisément donné pour sa date d'échéance ;

Considérant que l'article 411-62 du code rural dispose que le bailleur ne peut reprendre une partie des biens qu'il a loués si cette reprise partielle est de nature à porter gravement atteinte à l'équilibre économique de l'ensemble de l'exploitation assurée par le preneur;

Considérant qu'en application de ce texte , l'atteinte à l'équilibre économique invoquée doit être appréciée au regard de l'ensemble de l'exploitation à laquelle participe le preneur c'est à dire en l'espèce du GAEC [W] [O] dont fait partie le preneur;

Considérant que ce GAEC exploite une surface de 70 hectares, qu'il dispose d'une référence laitière de 407 000 litres, de 69 DPU et d'un plan d'épandage de 67 hectares, que la reprise de 16ha,61a et 45 ca a pour conséquence , au vu du rapport du CER produit aux débats, la perte d'une référence laitière de 118 617 litres, soit plus de 25% des références attachées aux terres exploitées par le GAEC , qu'il n'est pas contestable que la reprise entraînerait la non activation de DPU , la révision du plan d'épandage et la perte de production de fourrages et de culture de vente;

Considérant que le rapport du CER produit aux débats fixe les conséquences de la reprise partielle à la somme de 32 774 € de perte d'excédent brut d'exploitation par an, ce qui représente un peu plus de 29 % de l'excédent brut d'exploitation annuel qui s'élève, en moyenne sur une durée de cinq ans, à la somme de 111 000 € ce qui aurait pour conséquence de le réduire à la somme de 78 226 € , qu'il apparaît dès lors que l'EBE qui serait réduit à la somme de 78 226€ serait insuffisant pour couvrir les dépenses du GAEC , comprenant notamment ses remboursements d'emprunt , qui sont évaluées à la somme de 100950 € ;

Considérant que ces chiffres qui ne sont pas théoriques puisqu'établis à partir des résultats du GAEC et de ses charges connues démontrent qu'il résulterait de cette situation une insuffisance de trésorerie annuelle de 21 350€ , ce qui ne permettrait plus les prélèvements des associés et ce qui ne peut que mettre en cause la survie du GAEC;

Considérant qu'alors que les parcelles dont la reprise est envisagée sont situées sur les communes de [Localité 18] et de [Localité 17] c'est à dire en zone de forte pression foncière et que les documents produits par Monsieur [E] sont insuffisants pour établir que les preneurs seraient en mesure de retrouver des terres, à proximité de celles du GAEC, susceptibles de palier sans délai aux pertes subies, il apparaît que la reprise partielle est de nature à compromettre gravement l'équilibre de l'exploitation assurée par le preneur au sens des dispositions de l'article 411-62 du code rural, qu'il y a lieu en conséquence d'infirmer le jugement entrepris et d'annuler le congé délivré par Monsieur [G] [E] à Monsieur et Madame [L] [W] le 08 mars 2010;

Considérant qu'il paraît équitable de laisser à la charge de chacune des parties les frais irrépétibles qu'elles ont exposés;

Considérant que Monsieur [E] supportera les dépens;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement , contradictoirement,

Infirme le jugement déféré ,

Annule le congé délivré le 8 mars 2010 par Monsieur [G] [E] à Monsieur [L] [W] et à Madame [I] [T] épouse [W], portant sur les parcelles situées commune de [Localité 18], lieudit ' La Boulais' , cadastrées ZK [Cadastre 7], ZK[Cadastre 6], et ZI [Cadastre 11] et situées commune de [Localité 17] lieudit '[Adresse 14]', cadastrées section A n° [Cadastre 3],[Cadastre 4],[Cadastre 5],[Cadastre 13],[Cadastre 1] et [Cadastre 2] , pour une contenance totale de 16ha 61a 45ca;

Déboute les parties de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

Condamne Monsieur [G] [E] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Chambre des baux ruraux
Numéro d'arrêt : 11/02546
Date de la décision : 01/12/2011

Références :

Cour d'appel de Rennes BR, arrêt n°11/02546 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-12-01;11.02546 ?
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