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18/10/2011 | FRANCE | N°09/06413

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 18 octobre 2011, 09/06413


1ère Chambre





ARRÊT N°399



R.G : 09/06413













DIRECTION GENERALE DES IMPOTS



C/



M. [P] [R]































Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 18 OCTOBRE 2011





COMPOSITION DE LA COUR LORS

DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Xavier BEUZIT, Président, entendu en son rapport,

Madame Anne TEZE, Conseiller,

Madame Odile MALLET, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 13 Septembre 2011



ARRÊT :



Contradictoire, prono...

1ère Chambre

ARRÊT N°399

R.G : 09/06413

DIRECTION GENERALE DES IMPOTS

C/

M. [P] [R]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 18 OCTOBRE 2011

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Xavier BEUZIT, Président, entendu en son rapport,

Madame Anne TEZE, Conseiller,

Madame Odile MALLET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 13 Septembre 2011

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Xavier BEUZIT, Président, à l'audience publique du 18 Octobre 2011, date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANTE :

DIRECTION GENERALE DES IMPOTS

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représentée par la SCP Jean-Loup BOURGES - Luc BOURGES, avoués

INTIMÉ :

Monsieur [P] [R]

né le [Date naissance 1] 1944 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représenté par la SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, avoués

assisté de Me Raymond BONDIGUEL, avocat

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Monsieur [P] [R] a fait l'objet en 2005 d'une procédure de redressement au titre de rappels à l'Impôt de solidarité sur la fortune ( I.S.F.), l'administration ayant considéré que la valeur des parts de la SARL HOLIDAY HOMES qu'il détenait entrait dans l'assiette de l'ISF, leur contestant le caractère de biens professionnels.

Monsieur [P] [R] a contesté tant le principe de l'assujettissement à l'ISF que l'évaluation pratiquée par le service d'assiette.

Sa réclamation, après avis de la commission départementale de conciliation du 16 mars 2006, ayant été rejetée par l'administration, Monsieur [R] a par acte du 3 décembre 2007 saisi le tribunal de grande instance de SAINT-MALO qui par jugement du 28 août 2009 a :

dit irrégulière au regard du principe de la contradiction la procédure de rectification ouverte à l'encontre de Monsieur [P] [R] ;

prononcé la décharge des rappels contestés ;

condamné Monsieur le directeur des services fiscaux d'[Localité 6] ès qualités à payer à Monsieur [P] [R] une somme de 2000€ par application de l'article 700 du code de procédure civile ;

l'a condamné ès qualités aux entiers dépens comprenant les frais de signification de l'assignation, des conclusions du demandeur et du jugement.

La Direction générale des Impôts a interjeté appel du jugement.

Dans ses dernières conclusions déposées le 9 mars 2011, auxquelles il convient de se référer pour l'exposé des moyens, elle demande à la cour de :

réformer le jugement entrepris ;

dire irrecevable la demande en restitution aux époux [R] ;

condamner Monsieur [P] [R] aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile .

Dans ses conclusions déposées le 3 février 2011, Monsieur [P] [R] demande à la cour de :

1°) vu l'article L 57 du L.P.F. :

- constater que Monsieur [R] n'a pas eu la possibilité, avant la mise en recouvrement des rappels, de présenter des observations sur le taux de capitalisation de 10 % qui lui est opposé par la Direction des Services Fiscaux d'[Localité 6] ;

En conséquence, confirmer le jugement déféré en ce qu'il a prononcé la décharge des rappels contestés ;

2°) vu l'article L 59 et le principe du contradictoire :

- constater que Monsieur [R] n'a été informé de la décision de la direction des services fiscaux d'[Localité 6] d'utiliser un taux de capitalisation de 10 % qu'au cours de la séance de la commission départementale de conciliation du 16 mars 2006, ce qui viole le principe du contradictoire ;

- en conséquence, prononcer la décharge des rappels contestés ;

3°) vu les articles 885 O bis et 885 O ter du CGI et l'article L 80 A du LPF :

- dire que les parts sociales détenues par Monsieur [R] dans la SARL HOLIDAY HOMES constituent des biens professionnels exonérés en tant que tels de l'ISF ;

- en conséquence, confirmer la décharge des rappels d'ISF, d'un montant total de 18 430 € ;

4°) vu l'article 885 S du CGI et l'article L 80 A du LPF :

- dire que la valeur des parts sociales détenues par Monsieur [R] au 1er janvier de chacune des années 2001 à 2004 est nulle ;

- en conséquence, prononcer la décharge des rappels d'ISF d'un montant total de 18 430 € ;

5 °) vu l'article 700 du code de procédure civile :

- condamner Monsieur le Directeur des services fiscaux d'[Localité 6], ès qualités, au titre de l'instance d'appel, à verser la somme de 5 000 € à Monsieur [R] ;

6°) sur les dépens :

Condamner le même aux dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le caractère contradictoire de la procédure de redressement

Considérant que Monsieur [R] reproche à l'administration d'avoir fixé un nouveau taux de capitalisation de 10% fondé sur une nouvelle méthode d'évaluation en retenant un taux de risque variable et d'avoir ainsi modifié de façon déterminante les modes de calcul des rappels d'imposition sans le mettre en mesure de présenter ses observations sur cet élément ;

Que l'administration fiscale réplique qu'elle a, au vu des observations précédemment formulées par le contribuable sur la proposition de rectification, proposé de maintenir un taux de capitalisation de 10 % non plus sur un taux uniforme de 60 % mais un taux variant selon les années entre 85 et 140 % ;

Considérant qu'il résulte des pièces communiquées par les parties qu'une proposition de rectification notifiée le 6 juillet 2005 a permis à Monsieur [R], au vu de la motivation développée par l'administration dans ce document, de formuler lui-même ses observations le 2 août 2005 ; que dans celles-ci le contribuable a contesté la méthode utilisée pour valoriser les parts sociales ; qu'une nouvelle discussion s'est instaurée entre l'administration et le contribuable devant la commission départementale de conciliation sur l'évaluation des parts et la méthode adoptée pour y parvenir ; que l'administration, après que la commission ait rendu son avis, a retenu de nouvelles bases puis mis en recouvrement les rappels d'imposition;

Considérant que même si dans le cours de la procédure suivie l'administration a modifié ses bases de calcul pour valoriser les parts sociales, cette modification a été opérée dans le cadre d'un débat contradictoire ayant eu lieu tant après la proposition de rectification ayant provoqué les observations du contribuable que dans le cadre de la phase de conciliation ;

Considérant que l'administration ayant retenu un taux de capitalisation différent de celui retenu par la commission de conciliation en a ainsi informé le contribuable et motivé auprès de celui-ci sa position sans pour autant qu'alors que le contribuable avait déjà fait connaître une position différente de la sienne, elle ait eu à nouveau l'obligation de recueillir ses observations réitérées avant de procéder à la mise en recouvrement ;

Sur le respect du contradictoire devant la commission

Considérant que Monsieur [R] reproche à l'administration de l'avoir privé devant la commission d'un débat contradictoire en ne mettant pas à sa disposition les documents qu'elle souhaitait lui opposer dans le délai de vingt jours précédant le réunion ;

Considérant cependant que si l'administration fiscale n'a informé le contribuable qu'au cours de la séance de la commission départementale de conciliation du 16 mars 2006 qu'elle tenait compte d'un taux de risque différent de celui initialement proposé, les documents contenant la méthode retenue initialement (productions n°1 et 2) avaient été remis plus de vingt jours avant la réunion de la commission et la prise en compte d'un nouveau taux de risque résultait d'un débat contradictoire au cours duquel le contribuable avait présenté ses observations ;

Qu'en conséquence, le changement de méthode annoncé par l'administration lors de la réunion respectait le principe du contradictoire sans que celle-ci ait eu à mettre à la disposition du contribuable de nouveaux documents dans le délai de vingt jours prévu par l'article L 59 du Livre des procédures fiscales ;

Considérant que dès lors, le jugement sera infirmé en ce qu'il a dit irrégulière, au regard du principe de la contradiction, la procédure ouverte à l'encontre de Monsieur [P] [R] par l'administration fiscale ;

Sur le caractère professionnel des biens

Considérant que l'article 885 O ter du code général des impôts dispose que seule la fraction de la valeur des parts sociales correspondant aux éléments du patrimoine social nécessaires à l'activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société est considérée comme un bien professionnel ;

Considérant que l'article 885 O quater du code général des impôts dispose que ne sont pas considérées comme des biens professionnels les parts ou actions de sociétés ayant pour activité principale la gestion de leur propre patrimoine immobilier ;

Qu'il en résulte que pour que les parts d'une société soient qualifiées de bien professionnel, l'activité de celle-ci doit être commerciale et non de nature civile ;

Considérant que la société Holiday Homes acquiert des bâtiments commerciaux qu'elle transforme ensuite pour les adapter à l'activité des locataires ; qu'ainsi, elle ne se bornerait pas à acquérir des bâtiments pour les louer ; qu'elle déploie une activité consistant à effectuer des travaux, emploie des salariés et dispose de matériels et outillages ; que pour exercer son activité elle doit à la fois avoir recours à l'emprunt, ceux-ci s'élevant à plus de 2 millions d'euros, et obtenir un rendement de ses immobilisations en fournissant à une clientèle spécifique des locaux adaptés aux besoins de celle-ci ;

Que cette activité nécessite compte tenu du caractère limité du marché et de ses spécificités un véritable savoir-faire qui ne peut s'acquérir que par une connaissance précise des besoins des locataires et ne peut perdurer que par à la fois une rentabilisation des investissements et le soutien d'une activité constante, nécessitant l'emploi de salariés et l'acquisition de matériels et matériaux pour la réalisation de travaux de réparation et d'entretien ;

Considérant cependant qu'une entreprise de location d'immeubles a une nature civile, à moins qu'elle ne soit l'accessoire d'une activité commerciale ; que la location d'immeuble n'est pas réputée par la loi être un acte de commerce ;

Considérant que comme le soutient l'administration il n'est pas contesté que les locations consenties par la société HOLIDAY HOMES ne sont consenties ni au profit d'une exploitation individuelle de Monsieur [R] ni d'une société d'exploitation dont il déteindrait les parts ; qu'il n'est pas établi ni même allégué que les locations soient accompagnées de fournitures d'équipements ou de prestations de service nécessaires à l'exploitation des locaux ; que si la société HOLIDAY HOMES soutient effectuer des travaux d'entretien sur les bâtiments qui lui appartiennent, elle ne donne pour exemple que ceux relatifs aux toitures dont la réparation incombe nécessairement au propriétaire ;

Considérant en conséquence, que l'activité de location d'immeubles exercée par la société HOLIDAY HOMES, civile par nature, n'excède pas celle de la gestion de son patrimoine ; qu'elle ne se rattache à aucune activité commerciale principale ; qu'en conséquence, la valeur de ses parts ne peut être considérée comme un bien professionnel ;

Sur la valorisation des parts

Considérant que Monsieur [R] soutient en premier lieu que la valeur des parts sociales serait nulle en raison de l'admission du principe de déduction des frais de désamiantage qui selon un devis de la société GT Constructions communiqué devant la commission départementale de conciliation s'élèveraient pour une intervention sur cinq bâtiments à la somme de 685 105 € H.T.;

Considérant que cependant la société HOLIDAY HOMES a acquis ou construit plusieurs immeubles après la mise en place de la législation et de la réglementation sur l'amiante de sorte qu' il a été tenu compte lors de l'acquisition des immeubles de la moins value affectant ceux dont la construction était antérieure, s'il était constaté la présence d'amiante ;

Considérant qu'il ne peut être soutenu par Monsieur [R] qu'il ne se serait interrogé sur l'incidence de l'obligation de désamiantage sur la valeur des parts sociales qu'il détenait qu'au moment du contrôle fiscal alors qu'il ne pouvait ignorer cette obligation dès l'acquisition des immeubles ; qu'ainsi, il ne peut être considéré que le coût du désamiantage qui porte sur cinq bâtiments qui n'ont pas au surplus été clairement identifiés par le contribuable viendrait en déduction de la valeur déclarée ; qu'il n'y a donc pas lieu de pratiquer une décote pour ces frais ;

Considérant en second lieu que monsieur [R] conteste la méthode de valorisation des parts sociales retenue par l'administration ; que si la valeur mathématique qui était proposée par Monsieur [R] a été retenue par l'administration en revanche, Monsieur [R] conteste la valeur de productivité retenue par celle-ci ;

Considérant que cette valeur est égale au montant des bénéfices moyens de chaque année, dont le montant n'est pas contesté, divisé par un taux de capitalisation qui varie suivant un taux de risque sur lequel les parties sont en revanche en désaccord, Monsieur [R] demandant de fixer ce taux à 200 % et l'administration retenant un taux variant entre 85 % et 140 % ;

Considérant en effet que l'administration a à juste titre considéré que pour les années de référence soit 2001 à 2004 les données économiques applicables au secteur de l'immobilier étaient favorables aux placements immobiliers ;

Que si l'activité de location immobilière de la société HOLIDAY HOMES s'exerce dans un secteur délimité et concerne une clientèle restreinte, le nombre de bâtiments qu'elle possède et l'attractivité de la zone économique où ils sont situés, à savoir les zones industrielles et artisanales de villes à bon potentiel économique comme celles de [Localité 7] et [Localité 5], justifient que l'administration puisse considérer que malgré la lourdeur des investissements, la société génère une productivité correspondant à un risque moyen ;

Que ce risque qui est lié à la vacance de locaux ou au non recouvrement de loyers est dilué quand une société comme la société HOLIDAY HOMES loue une trentaine de locaux ;

Considérant en conséquence qu'il sera retenu un taux de capitalisation fondé sur un taux de risque variant entre 85 et 140 % selon les années ;

Que les impositions dont relève Monsieur [R] au titre de rappels d'I.S.F. pour les années 2001, 2002 2003 et 2004 sont celles figurant dans le tableau inséré aux pages 7 et 8 de ses dernières conclusions ;

Considérant que Monsieur [R] supportera la charge des dépens de première instance et d'appel ; qu'il sera débouté de sa demande formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement du tribunal de grande instance de SAINT-MALO en date du 28 août 2009 ;

Statuant à nouveau,

Déclare régulière la procédure de rectification diligentée par la direction des services fiscaux d'[Localité 6] à l'encontre de Monsieur [P] [R] ;

Dit que les parts détenues par Monsieur [P] [R] dans la société HOLIDAY HOMES ne constituent pas des biens professionnels exonérés de l'I.S.F. ;

Déboute Monsieur [R] de sa demande en restitution de la somme de 18 430 € correspondant à l'admission d'une décharge de rappels d'I.S.F. ;

Déboute Monsieur [R] de sa demande formée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne Monsieur [R] aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 09/06413
Date de la décision : 18/10/2011

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°09/06413 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-10-18;09.06413 ?
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