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11/10/2011 | FRANCE | N°09/08590

France | France, Cour d'appel de Rennes, 1ère chambre, 11 octobre 2011, 09/08590


1ère Chambre





ARRÊT N°392



R.G : 09/08590













Société DE RAGUENES SCI



C/



Mme [X] [P] épouse [E]































Copie exécutoire délivrée

le :



à :





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 11 OCTOBRE 2011





COMPOSITION DE LA

COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :



Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Madame Anne TEZE, Conseiller,

Madame Odile MALLET, Conseiller,



GREFFIER :



Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé



DÉBATS :



A l'audience publique du 05 Septembre 2011

devant Monsieur Xavier BEUZIT, magistrat rapporteur, tenant seul l'...

1ère Chambre

ARRÊT N°392

R.G : 09/08590

Société DE RAGUENES SCI

C/

Mme [X] [P] épouse [E]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 11 OCTOBRE 2011

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Xavier BEUZIT, Président,

Madame Anne TEZE, Conseiller,

Madame Odile MALLET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Claudine PERRIER, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l'audience publique du 05 Septembre 2011

devant Monsieur Xavier BEUZIT, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé par Monsieur Xavier BEUZIT, Président, à l'audience publique du 11 Octobre 2011, date indiquée à l'issue des débats.

****

APPELANTE :

Société DE RAGUENES SCI

[Adresse 3]

[Localité 5]

poursuites et digilences de son gérant, Monsieur [O] [E], pour ce domicilié de droit audit siège

représentée par la SCP CASTRES COLLEU PEROT LE COULS BOUVET, avoués

assistée de Me Jean Pierre NABONNE, avocat

INTIMÉE :

Madame [X] [P] épouse [E]

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par la SCP SCP BAZILLE Jean-Jacques, avoués

assistée de la Société d'Avocats DESTREMEAU

EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

La SCI de RAGUENES est propriétaire à NEVEZ au hameau de RAGUENES de deux bâtiments et de leurs dépendances, achetés le 28 septembre 1937 à usage d'hôtel.

Par acte du 5 mars 1979, la SCI de RAGUENES, prise en la personne de son gérant, [U] [E], a donné à bail mixte à Madame [X] [P] épouse de [U] [E] ces immeubles pour y exploiter le commerce de chambres meublées.

Monsieur [U] [E] est décédé le [Date décès 2] 1985 laissant pour lui succéder ses trois enfants issus de son premier mariage, sa fille issue de son second mariage et son épouse survivante, Madame [X] [P].

La SCI de RAGUENES contestant à Madame [X] [P] son droit au maintien dans les lieux a demandé au tribunal de grande instance de QUIMPER, par acte du 7 novembre 2008, de prononcer la résiliation du bail avec toutes conséquences de droit et de condamner Madame [X] [P] à payer la somme de 220 000 € en réparation des préjudices subis du fait de l'inexécution des obligations contractuelles nées du bail

Par jugement du 20 octobre 2009, le tribunal de grande instance de QUIMPER a :

prononcé la résiliation du bail mixte conclu le 5 mars 1979 entre la SCI de RAGUENES et madame [X] [P] avec effet du 7 novembre 2008

ordonné l'expulsion de madame [P] et de tous occupants de son chef des lieux qui lui étaient précédemment loués au besoin avec l'assistance de la force publique

fixé à 300 € par mois le montant de l'indemnité d'occupation que Madame [P] sera condamnée à payer à la SCI de RAGUENES jusqu'à son départ effectif des lieux

débouté les parties de leurs autres demandes

fait masse des dépens et dit que chacune des parties les supportera par moitié.

La SCI de RAGUENES a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses conclusions en date du 8 avril 2010, auxquelles il convient de se reporter pour l'examen des moyens, la SCI de RAGUENES demande à la cour de :

confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail, ordonné l'expulsion de Madame [P] et fixé à sa charge une indemnité d'occupation ;

réformer pour le surplus la décision entreprise,

condamner Madame [X] [P] à payer à la SCI de RAGUENES la somme de 220 000 € et ce avec intérêts au taux légal à compter du jour de l'assignation en réparation des préjudices subis du fait de l'inexécution des obligations contractuelles nées du bail ;

condamner Madame [X] [P] à payer à la SCI de RAGUENES la somme de 762,24 € en règlement des loyers impayés et ce avec intérêts au taux légal à compter du jour de l'assignation ;

condamner Madame [X] [P] à payer à la SCI de RAGUENES la somme de 120 € par jour à titre d'indemnité d'occupation du jour de la résiliation jusqu'à complète libération des lieux ;

débouter Madame [X] [P] de toutes ses demandes ;

condamner Madame [X] [P] à payer à la SCI de RAGUENES la somme de 3 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamner Madame [T] [P] aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code procédure civile

Dans ses conclusions en date du 15 juin 2010, auxquelles il convient également de se reporter pour l'examen des moyens, Madame [X] [P] Veuve [E] a demandé à la cour de :

confirmer le jugement en ce qu'il a jugé que le défaut d'entretien du bien loué et la cessation d'activité n'était pas imputable à madame [E] ;

confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la SCI de ses demandes de condamnation de Madame [E] à lui verser la somme de 220 000 € en réparation des préjudices subis du fait de l'inexécution des obligations contractuelles nées du bail et la somme de 762,24 € en règlement des loyers impayés ;

infirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail mixte et ordonné l'expulsion de Madame [E] et de tous occupants de son chef des lieux qui lui étaient précédemment loués au besoin avec l'assistance de la force publique et fixé à sa charge une indemnité d'occupation

condamner la SCI de RAGUENES à verser à Madame [X] [E] une somme de 20 000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

condamner la SCI de RAGUENES à verser à Madame [X] [E] une somme de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel qui seront recouvrés selon les modalités de l'article 699 du code de procédure civile

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la résiliation du bail

Considérant que le bail consenti le 1er avril 1979 à madame [X] [E], qualifié de bail commercial et mixte lui permettait d'exercer dans les lieux loués décrits comme étant 'un ancien hôtel saisonnier comprenant deux bâtiments et dépendances sur un grand terrain de 4555 m2 (...)' 'une activité de commerce de chambres meublées et toutes extensions annexes audit commerce (...)' ; qu'une clause particulière du bail prévoyait expressément que : ' la preneuse pourra renoncer sans perdre le droit au bail à l'exploitation telle qu'elle est prévue par sa patente actuelle pour consacrer l'immeuble à une exploitation non commerciale telle que foyer-club-hospice-colonie de vacances -maison familiale de loisirs civils ou clinique'

Considérant qu'il n'est pas contesté que depuis la fin de l'année 1986, l'exploitation du fonds de commerce de location de chambres meublées a cessé en raison de l'état de vétusté des lieux et de leur non conformité aux règles imposées aux établissements recevant du public ; que la non exploitation commerciale des lieux se prolonge ainsi depuis de nombreuses années ; que si la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail ne visait pas expressément la fermeture prolongée du fonds de commerce comme cause de résiliation du bail, celui-ci n'était cependant accordé qu'à la condition que le preneur exerce dans les lieux l'activité de commerce de chambres meublées ; que le preneur n'exerçant plus durablement cette activité ne remplit plus son obligation d'exercer son activité dans les lieux loués ; que dès lors, la cessation d'activité entraîne la résiliation du bail ;

Considérant que madame [X] [E] n'a pas davantage, à la cessation de son activité commerciale, mis en oeuvre la condition particulière l'autorisant en cas de cessation de l'exploitation prévue au contrat, à consacrer l'immeuble à l'une des activités d'hébergement énoncées dans les clauses particulières ; que cette exception démontre au demeurant que le droit au bail ne pouvait subsister en cas de cessation de l'activité commerciale que si était substituée à celle-ci une des activités d'hébergement énoncées ;

Considérant que si le bail a été qualifié de mixte et autorisait implicitement que madame [X] [P] réserve une partie des locaux à son usage personnel pour l'habitation, la cessation de l'exploitation commerciale entraîne également cessation du droit de se maintenir dans les lieux pour la seule habitation ;

Considérant en conséquence que le jugement sera confirmé en ce qu'il a prononcé la résiliation du bail mixte du 5 mars 1979 et ordonné l'expulsion de madame [X] [P] des lieux précédemment loués ;

Considérant que le jugement sera également confirmé en ce qu'il a fixé l'indemnité d'occupation jusqu'au départ effectif des lieux de Madame [E] à la somme de 300 € par mois compte tenu de l'état médiocre des lieux déjà relevé en 2000 par l'expert [H] ;

Sur les manquements de Madame [X] [E] à ses obligations contractuelles et la demande en paiement d'une somme de 220 000 € à titre de dommages-intérêts

- l'état de vétusté

Considérant que si l'état de vétusté des bâtiments appartenant à la SCI de Raguenes n'est pas contesté et qu'il révèle un manque d'entretien suffisant, il importe en premier lieu de déterminer si cet état est la conséquence d'un défaut d'entretien pendant la durée du bail, soit depuis 1979, ou s'il était antérieur ;

Considérant que trois pièces communiquées aux débats montrent que les bâtiments construits au début du XX ème siècle étaient déjà dégradés lorsque madame [E] les a reçus à bail ;

Qu'ainsi l'ancien gérant et mari de madame [E], [U] [E], a laissé deux courriers écrits, l'un en 1945 et l'autre en 1979, montrant que, d'une part, l'immeuble à usage d'hôtel a été fermé pendant six ans durant la guerre et l'occupation et, d'autre part, qu'en 1979 il avait subi les avatars du temps et des tempêtes de sorte que seules les façades en pierre du pays avaient résisté ;

Que Monsieur [E] admettait lui-même que ses revenus hôteliers procurés pendant la courte saison d'été ne permettaient pas d'amortir de gros travaux ;

Que lorsque la commission de sécurité s'est rendue sur place en juin 1982, trois ans après la signature du bail, elle n'a pu que constater la nécessité d'effectuer de nombreux travaux pour la seule mise en conformité de l'hôtel aux normes de sécurité ;

Considérant ainsi que dès avant que madame [P] ne reçoive l'immeuble à bail celui présentait un état de vétusté nécessitant des travaux qui ne pouvaient qu'être à la charge du propriétaire, ce dernier ayant l'obligation de lui délivrer un immeuble permettant son exploitation commerciale ;

Considérant qu'au cours du bail, le bailleur a l'obligation d'entretenir la chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée ;

Considérant que si une clause spéciale manuscrite du contrat de bail a prévu que les travaux de grosses réparations étaient à la charge du preneur, tout en limitant cette charge au clos et au couvert, cette clause était dépourvue d'effet depuis l'assemblée générale du 26 septembre 1987 où il était mentionné que : ' le gérant ( Madame [P]) ne pourra engager de travaux supérieurs à 10 000 Francs sans l'accord préalable de tous les associés' ;

Qu'en subordonnant la réalisation de travaux par le preneur au consentement de tous les associés, la société bailleresse a conditionné leur réalisation à son propre accord de sorte que son gérant actuel ne saurait aujourd'hui imputer à la preneuse l'absence de réalisation de travaux pouvant lui incomber contractuellement ;

- la cessation d'activité

Considérant que la cessation d'activité de madame [X] [E] depuis la saison de 1987 résulte non pas de sa propre faute mais de l'intervention de l'autorité administrative lui interdisant de rouvrir son établissement sans réalisation de travaux imposés et de l'absence d'autorisation délivrée par la SCI d'effectuer de tels travaux dont le montant compte tenu du nombre et de la nature des recommandations de la commission de sécurité ne pouvait qu'excéder la somme de 10 000 francs;

Considérant qu'en conséquence, la SCI de Raguenès ne pouvant imputer à madame [X] [E] le défaut d'entretien et l'état de vétusté du bien loué, doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts et le jugement confirmé de ce chef ;

Sur la demande en paiement des loyers impayés

Considérant que le bailleur ayant manqué à son obligation de livrer et d'entretenir la chose en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée, et ayant rendu par son attitude l'exploitation impossible il ne peut pour la période non prescrite réclamer le paiement des loyers, le preneur étant bien fondé à soulever l'exception d'inexécution ; que le jugement sera également confirmé de ce chef ;

Sur la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive

Considérant que pas plus que devant les premiers juges, Madame [X] [E] ne rapporte la preuve de l'existence d'une faute commise par la SCI de RAGUENES dans l'exercice de l'instance ; qu'en conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Considérant que la SCI de Raguenès échouant dans ses demandes en appel et cette instance ayant entraîné des frais supplémentaires pour Madame [X] [E], elle sera condamnée à lui payer une indemnité de 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens ;

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement du tribunal de grande instance de QUIMPER en date du 20 octobre 2009 en toutes ses dispositions

Y ajoutant,

Condamne La SCI de RAGUENES à payer à madame [X] [P] veuve [E] la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la SCI de RAGUENES aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER.-.LE PRÉSIDENT.-.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 09/08590
Date de la décision : 11/10/2011

Références :

Cour d'appel de Rennes 1A, arrêt n°09/08590 : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2011-10-11;09.08590 ?
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