La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/10/2005 | FRANCE | N°JURITEXT000006946876

France | France, Cour d'appel de Rennes, Ct0028, 27 octobre 2005, JURITEXT000006946876


COMPOSITION DE LA COUR: lors des débats et du délibéré Président :

Monsieur X... Y... : Madame Z..., Madame A..., prononcé à l'audience du 27 Octobre 2005 par Monsieur X..., conformément aux dispositions de l'article 485 alinéa 3 du Code de Procédure Pénale. MINISTÈRE PUBLIC: représenté aux débats par M. B..., Avocat Général et lors du prononcé de l'arrêt par Mme C..., Avocat Général. GREFFIER: en présence de M. D... lors des débats et lors du prononcé de l'arrêt DÉROULEMENT DES DÉBATS: A l'audience publique du 06 Octobre 2005, le président a constaté l'iden

tité de la prévenue comparante en personne, assistée de Me MAILLARD, la Cour décla...

COMPOSITION DE LA COUR: lors des débats et du délibéré Président :

Monsieur X... Y... : Madame Z..., Madame A..., prononcé à l'audience du 27 Octobre 2005 par Monsieur X..., conformément aux dispositions de l'article 485 alinéa 3 du Code de Procédure Pénale. MINISTÈRE PUBLIC: représenté aux débats par M. B..., Avocat Général et lors du prononcé de l'arrêt par Mme C..., Avocat Général. GREFFIER: en présence de M. D... lors des débats et lors du prononcé de l'arrêt DÉROULEMENT DES DÉBATS: A l'audience publique du 06 Octobre 2005, le président a constaté l'identité de la prévenue comparante en personne, assistée de Me MAILLARD, la Cour déclarant le présent arrêt contradictoire. A cet instant, le conseil de la prévenue et le conseil des parties civiles ont déposé des conclusions. Le Président a invité les experts. Monsieur le Professeur E... JeanPaul, Expert Endocrinologue-Nutritionniste-Diabétologue, demeurant 34, avenue de France 03200 VICHY et Monsieur F... G..., Expert EndocrinologueDiabétologue, demeurant 11-13 rue de Guersent 75017 PARIS, à rester dans la salle d'audience en raison de leur qualité d'expert dans cette affaire. Le Président a invité les témoins, Monsieur H... I..., EndocrinologueDiabétologue, demeurant C.H.U. de Saint-Etienne Hôpital de Bellevue 42055 SAINT-ETIENNE CEDEX 2, Monsieur J... K..., Endocrinologue, demeurant xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx 44000 NANTES et Monsieur WEMEAU L..., Endocrinologue-Diabétologue, demeurant xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx 59037 LILLE CEDEX, à quitter la salle d'audience. Ont été entendus :

Sur la nullité de procédure soulevée in limine litis : Maître DAVEAU, en sa demande, Monsieur l'avocat général, en ses observations, Maître DAVEAU, qui a eu la parole en dernier, La Cour après en avoir délibéré joint l'incident au fond. Monsieur X..., en son rapport, M... N... épouse O..., en son interrogatoire et ayant exposé

sommairement les motifs de son appel, Puis l'expert Monsieur E... P..., après avoir prêté serment, en sa déclaration, Puis l'expert Monsieur F... G..., après avoir prêté serment, en sa déclaration, Puis le témoin, Monsieur H... I..., après avoir prêté serment conformément à l'article 446 du code de procédure pénale, en sa déclaration, Puis le témoin, Monsieur J... K..., après avoir prêté serment conformément à l'article 446 du code de procédure pénale, en sa déclaration, Puis le témoin, Monsieur WEMEAU Q..., après avoir prêté serment conformément à l'article 446 du code de procédure pénale, en sa déclaration, Sur la demande de complément d'information : Maître MAILLARD, en sa demande, Maître DAVEAU, en ses observations, Monsieur l'avocat général, en ses observations, Maître MAILLARD, qui a eu la parole en dernier, La Cour après en avoir délibéré, sur les dispositions de l'article 169 du code de procédure pénale, dit qu'il sera passé outre et entend les parties sur le fond. R... S..., en ses observations, Maître DAVEAU, en sa plaidoirie, Monsieur l'avocat général, en ses réquisitions, La Cour a invité le conseil de la prévenue à s'expliquer sur les dispositions de l'article 121-3 du code pénal, loi du 10 juillet 2000, Maître MAILLARD, en sa plaidoirie, M... N... épouse O..., qui a eu la parole en dernier, Puis, la Cour a mis l'affaire en délibéré pour son arrêt être rendu à l'audience publique du 27 Octobre 2005. Conformément aux prescriptions de l'article 462 alinéa 2 du Code de Procédure Pénale, le Président a avisé les parties présentes de la date de l'audience à laquelle l'arrêt serait rendu. RAPPEL DE LA PROCÉDURE: LE JUGEMENT :

Le Tribunal Correctionnel de NANTES, par jugement Contradictoire en date du 12 MAI 2004, pour HOMICIDE INVOLONTAIRE a condamné M... N... épouse O... à la peine de 6 mois d'emprisonnement avec sursis ; lui a fait interdiction de se livrer à l'activité

professionnelle dans l'exercice ou à l'occasion pendant 4 mois de laquelle l'infraction a été commise conformément aux articles 131-27 et 221-8 du code pénal. Sur l'action civile : a déclaré la constitution de partie civile de M. R... S..., Mme T... U... divorcée R... et de M. R... V... recevable et régulière en la forme ; a déclaré O... née GUILLARD N... entièrement responsable du préjudice subi par les parties civiles ; a condamné O... née GUILLARD N... à payer: * à M. R... S... - la somme de 6.256,50 euros à titre des frais d'obsèques, - la somme de 20.000 euros au titre du préjudice moral, * Mme T... U... - la somme de 20.000 euros au titre du préjudice moral -M. R... V... - la somme de 12.000 euros au titre du préjudice moral *aux consorts R... - la somme de 3.000 euros au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; l'a condamné en outre aux dépens de l'action civile. LES APPELS: Appel a été interjeté par: Madame M... N..., le 14 Mai 2004 à titre principal sur les dispositions pénales et civiles, Monsieur le Procureur de la République, le 17 Mai 2004 à titre incident sur les dispositions pénales, Madame BAILLAY U..., le 21 Mai 2004 sur les dispositions civiles, Monsieur R... S..., le 21 Mai 2004 sur les dispositions civiles, Monsieur R... V..., le 21 Mai 2004 sur les dispositions civiles, LA PRÉVENTION: Considérant qu'il est fait grief à M... N... épouse XW... : - d'avoir à NANTES, le 28 ou le 29 janvier 2000, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou manquement à une obligation de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou les règlements, en l'espèce à l'issue de son examen du 25 janvier 2000, en ne procédant pas ou en ne faisant pas procéder immédiatement à des investigations complémentaires et en ne mettant pas en place par la suite des mesures thérapeutiques en urgence, involontairement causé la mort

d'Elise R... ; faits prévus par l'article 221-6 al. l du Code Pénal et réprimés par les articles 221-6 al. 1, 221-8, 221-10 du Code Pénal ; Motifs : Les appels sont réguliers et recevables en la forme. A l'issue des auditions de MM. I... H..., Q... WEMEAU et K... J..., cités comme témoins par la défense, il a été demandé aux experts, au ministère public, à la défense et aux parties civiles, leurs observations au regard des dispositions de l'article 169 du Code de procédure pénale. L'ensemble des parties disposant de tous les éléments nécessaires pour discuter des contradictions et des indications nouvelles apportées aux points de vue techniques contenus dans les rapports d'expertises judiciaires, il a été décidé de passer outre aux débats sans qu'il y ait lieu de renvoyer l'affaire à une date ultérieure. Invoquant les dispositions des articles 11 et R.156 du Code de procédure pénale, les parties civiles soulèvent l'irrecevabilité des "expertises" produites par N... M... épouse O... dès lors qu'il résulte des documents établis par les médecins intervenus à la demande de la prévenue qu'ils ont eu accès à l'ensemble des éléments de la procédure. Il convient, en application des dispositions de l'article 459 du Code de procédure pénale, de joindre cet incident au fond et de statuer en premier lieu sur l'exception. Le moyen doit être examiné au regard de l'article 114 du Code de procédure pénale qui dispose, en son sixième alinéa, que "Seules les copies des rapports d'expertise peuvent être communiquées par les parties ou leurs avocats à des tiers pour les besoins de la défense. " Les documents établis par le Professeur I... H... et le Docteur K... J... ne peuvent donc être concernés par ce moyen d'irrecevabilité car rien ne permet de considérer que ces praticiens aient eu connaissance de pièces autres que les rapports des expertises ordonnées par le Juge d'instruction. Par contre, l'examen des documents établis par le Professeur Q... WEMEAU et le

Docteur G... XX... montre qu'ils ont eu accès à des procès-verbaux et, d'une manière générale, à des pièces d'enquête et d'instruction autres que les rapports d'expertise visés par le texte précité. Cette communication a eu lieu au plus tard dans la phase de la procédure postérieure au jugement de première instance mais nécessairement avant l'ouverture des débats devant la Cour, circonstance qui n'était pas de nature à autoriser des tiers à prendre connaissance des pièces du dossier autres que les rapports d'expertise endehors de la procédure régie par l'article R.156 du Code de procédure pénale. Cependant, il n'apparaît pas que cette irrégularité soit de nature à entacher d'irrecevabilité les documents établis par ces tiers dans le cadre du débat sur la culpabilité de la prévenue qui ne saurait, pour ce motif, se voir privée de son droit, résultant des dispositions de l'article 427 du Code de procédure pénale, de discuter contradictoirement les preuves apportées à son encontre par des éléments dont il appartiendra à la Cour d'apprécier la pertinence et la valeur probante. Le moyen d'irrecevabilité doit donc être rejeté. Les faits retenus comme fondement des poursuites sont ainsi relatés dans les actes de la procédure : Le samedi 29 janvier 2000, peu après 20 heures, les Services de Police de NANTES étaient amenés à intervenir à la suite de la découverte par les sapeurspompiers, dans un appartement du deuxième étage de l'immeuble situé au no 2, rue d'Alverne à NANTES, du corps sans vie de l'occupante, Elise R..., née le 23 janvier 1979, étudiante en psychologie. La défunte, de forte corpulence, reposait, à moitié nue et face contre le sol, sur la moquette de la salle de séjour ; il était relevé par les enquêteurs de nombreuses lividités cadavériques sur toute la surface de la peau ainsi que des traces de vomissures et de sang séché au niveau de la bouche. En plusieurs endroits de l'appartement, de type 2, il était constaté un grand désordre ainsi

que la présence de nombreux emballages vides d'aliments et de boissons sucrés. Il était trouvé également des plaquettes de comprimés et notamment de l'Androcur. Le médecin requis constatait la mort réelle et constante remontant à une période comprise entre douze et vingt-quatre heures. Entendu dans la matinée du 30 janvier, le père de la défunte, M. S... R..., ... ; mais, son épouse et lui-même n'ayant pu la joindre au téléphone dans la journée du samedi, ils en avaient avisé leur beau-frère qui, s'étant rendu au domicile de sa nièce et n'obtenant aucune réponse à ses appels, avait alerté les sapeurs-pompiers. Par courrier du 7 février 2000, l'avocat de M. S... R... transmettait au Parquet de NANTES photocopies de deux ordonnances délivrées le 2s janvier 2000 à Elise R... parle Docteur N... XY..., l'une prescrivant un traitement médicamenteux composé d'Androcur, Oronone et Lormexin, l'autre prescrivant des analyses de glycémie, ainsi que de la feuille de résultat de ces analyses datée du 27 janvier 2000 et faisant apparaître : d'une part, un taux de glycémie à jeun de 5,69 g/1 alors que la normale indiquée était de 0,70 à 1,10 et que la précédente analyse de ce type pratiquée sur la personne d'Elise R... avait donné un taux de 1,06 g/l, d'autre part, un taux de glycémie post-prandiale de 3,76 g/1 alors que la normale indiquée était de 0,70 à 1,60. Le 7 février 2000, M. S... R... déposait plainte contre le Docteur N... XY... et contre le Docteur XZ..., biologiste, en exposant que, compte tenu de la

chronologie des événements qu'il avait reconstituée, de l'état dans lequel se trouvait sa fille, tel qu'il ressortait notamment des résultats des analyses, et de la nature des diligences accomplies par l'endocrinologue-gynécologue et par le biologiste, si ces praticiens avaient fait hospitaliser sa fille le 27 janvier ou le lendemain, elle aurait aussitôt été prise en charge par le milieu médical et elle ne serait pas morte. Le 19 février 2000, le Parquet de NANTES a requis l'ouverture d'une information contre X. des chefs d'homicide involontaire et non assistance à personne en péril. Il a été procédé, le 14 mars 2000, à l'autopsie du corps d'Elise R... Le rapport de cette opération, établi par le Docteur Anne-Elisabeth XA..., conclut à un décès consécutif à une inhalation bronchique de vomissement, comme en témoigne la présence de vomissures dans la trachée et les bronches souches, inhalation qui n'a pu se produire qu'en raison d'une altération de l'état de conscience de la jeune fille dont les résultats de glycémie du 27 janvier 2000 permettent de penser qu'elle a présenté un coma diabétique dont les vomissements de la soirée du 28 étaient probablement les premiers signes. Le compte-rendu anatomo-pathologique médico-légal établi le 26 mai 2000 par le Docteur Hélène XB... en exécution d'une ordonnance de commission d'expert du 3 avril 2000 a mis en évidence un syndrome asphyxique marqué par une alvéolite oedémateuse et hémorragique et des aspects de pseudo-emphysème aigu traumatique avec une congestion massive et une inhalation de matériel étranger d'origine alimentaire dans les bronches souches, les bronches lobaires et dans de nombreuses bronches et bronchioles, cette inhalation étant contemporaine du décès comme en atteste l'absence de réaction inflammatoire aiguù au niveau des bronches dont la lumière est obstruée. L'examen du foie a mis en évidence une stéatose essentiellement macrovésiculaire pouvant tout à fait s'intégrer dans

le cadre d'un diabète de même que la relative raréfaction des îlots de Langerhans objectivée par l'examen du pancréas, ce diabète pouvant être installé depuis plusieurs semaines, voire plusieurs mois. Selon les éléments recueillis au cours de l'enquête diligentée sur commission rogatoire, et en particulier par la première audition de Mme N... M... épouse O..., effectuée le 1 3 avril 2000, Elise R... était suivie depuis le mois d'octobre 1998 par ce médecin spécialiste en endocrinologie et gynécologie pour un hirsutisme et aussi sur le plan gynécologique. Il lui était prescrit un traitement médicamenteux à base d'Androcur et d'Oromone ainsi qu'un régime amaigrissant compte tenu de sa surcharge pondérale. Dans le cadre de ce suivi, un rendez-vous avait été pris pour le 21 mars 2000 mais avait été avancé en urgence au mardi 25 janvier au matin à la demande de la patiente qui se plaignait d'une mycose et d'une soif intense. Lors de cette consultation, le Docteur XY..., qui avait diagnostiqué une "grosse mycose", avait établi les deux ordonnances susvisées, l'une prescrivant des examens sanguins relatifs au taux de glycémie, sans mention écrite d'urgence, l'autre prescrivant un traitement anti-mycosique ainsi que le renouvellement du traitement hormonal habituel. Selon ses déclarations, à la fin de sa consultation, lorsqu'elle avait interrogé Elise R..., celle-ci lui avait dit qu'elle buvait quatre litres d'eau par jour. Elle avait donc immédiatement pensé à un diabète et lui avait demandé de faire réaliser rapidement une prise de sang. Cependant, bien que disposant à son cabinet d'un appareil de lecture automatique de glycémie, elle n'avait pas estimé nécessaire de pratiquer un "dextro" (glycémie capillaire par prélèvement d'une goutte de sang), estimant qu'il n'y avait pas d'urgence particulière puisqu'il n'y avait pas, alors et selon elle, d'altération de l' état général. Elle ajoutait que, compte tenu de l'état clinique de sa patiente, tel que révélé

par les analyses antérieures, et en particulier de son intolérance aux hydrates de carbone, mais aussi de l'efficacité d'une diététique équilibrée, elle était affectée d'un pré-diabète de type 2, non insulino-dépendant et n' entraînant aucune contre-indication par rapport à l'Androcur. Elise R... s'était rendue au laboratoire du Docteur XZ... deux jours plus tard, le 27 janvier, et les analyses ont donné les résultats déjà mentionnés. Le vendredi 28 janvier 2000, vers 18 heures 30, Elise R... avait appelé le cabinet du Docteur Brigitte XC..., médecin généraliste, et un rendez-vous lui avait été fixé par la secrétaire pour le lendemain 29 janvier à midi. Selon les déclarations de ce praticien, si une notion d'urgence avait été évoquée, il lui aurait été donné rendez-vous plus tôt. Entendu le 1er avril 2000, le Docteur Christophe XZ..., biologiste, a déclaré qu'au vu des résultats de la première analyse, le jeudi 27 janvier à 14 heures 30, puis de la seconde, vers 17 heures, il avait estimé qu'il n'y avait pas d'urgence impérieuse mais que, s'agissant de résultats anormaux, il avait cependant appliqué la procédure en vigueur dans son laboratoire, d'abord en téléphonant vers 17 heures 30 au cabinet du Docteur XY... pour communiquer à la secrétaire les résultats des analyses, ensuite en les adressant à ce médecin le soir même par porteur. Il était vérifié que la communication téléphonique avait bien eu lieu à 17 heures 28, mais que, le cabinet du Docteur XY... étant alors fermé, elle avait été transférée sur un standard téléphonique géré par une société de télésecrétariat, la société "BEST". La télé-secrétaire alors en service, Mme Sonia XD..., a déclaré qu'elle se souvenait de l'appel du Docteur XZ... mais que celui-ci ne lui avait pas communiqué les résultats, ayant seulement demandé à parler au Docteur XY... et ayant répondu par la négative à la question de la télé-secrétaire demandant si l'objet de son appel était urgent ;

selon Mme XD..., le Dr XZ... avait alors indiqué que les résultats seraient transmis au Dr XY... par courrier. Mme XD... avait, conformément à son habitude, faxé le message au cabinet du Docteur XE... vers 19 heures. S'agissant de l'envoi du courrier concernant les résultats d'analyses, il était vérifié que le laboratoire du Docteur XZ... avait recours aux services d'une société de portage, la société CNS, dont le responsable commercial a déclaré de façon très affirmative que si les résultats d'analyses avaient été confiés à sa société le jeudi 27 janvier, Mme O... les avait nécessairement reçus dès le vendredi 28. Mme O... a déclaré qu'elle n'avait eu ces résultats dans sa boîte aux lettres que le samedi 29 à 13 heures quand elle avait pris son courrier, précisant que, si elle les avait reçus la veille, elle aurait essayé de i oindre la patiente par téléphone pour lui demander de venir la voir à son cabinet ou d'aller voir son médecin traitant dans les meilleurs délais. Elle a indiqué que le message effectivement reçu par fax le 27 janvier à 19 heures et dont elle avait pris connaissance le lendemain matin n'indiquait pas de résultats chiffrés et mentionnait seulement que le Docteur XZ... voulait lui parler des résultats de Mlle R... ; elle n'avait pas réagi à ce message, ayant pensé qu'il pouvait provenir d'un médecin homonyme, le Docteur I... XZ... gastro-entérologue. Elle avait alors pensé qu'Elise R... était en train de décompenser un diabète insulino-dépendant nécessitant une prise en charge assez rapide pour faire le bilan et lui donner un traitement adapté. mais elle n'avait pas pensé à un risque vital imminent. Elle avait appelé sa cliente au téléphone le lundi matin et, n'ayant pas de réponse, elle lui avait fait un courrier qui n'avait pas été posté puisqu'en fin de matinée, la mère d'Elise R... lui avait appris son décès. Le Professeur P... E..., expert en endocrinologie-nutrition, désigné par le Juge

d'instruction, a établi son rapport le 15 décembre 2000. Constatant que Elise R... avait consulté pour la première fois Mme le Docteur O... le 9 octobre 1998 pour un hirsutisme important associé à un excès pondéral (98 kg pour 1,76 m) et que, le 18 décembre suivant, au vu des résultats d'analyse, ce médecin endocrinologue avait jugé "catastrophique" le bilan métabolique avec une glycémie à jeun déjà élevée à 1,29 g et qu'elle l'avait ensuite suivie régulièrement jusqu'en juin 1999 prenant directement en charge l'aspect diagnostique et thérapeutique de cette patiente, l'expert estime que Mme XF... avait parfaitement et correctement examiné sa patiente lors des premières consultations et que ses diagnostics étaient à l'époque rigoureusement exacts. Mais il relève que, la consultation en urgence du 25 janvier 2000 ayant été demandée pour deux anomalies parfaitement consignées dans l'observation - une infection gynécologique majeure et une augmentation énorme de la sensation de soifMme XY... n'a manifestement pas réalisé la présence d'une poussée diabétique et n'a pas réellement pris en compte sur le plan du risque thérapeutique le fait qu'Elise R... buvait énormément et que l'infection gynécologique était extraordinairement importante, s'abstenant de vérifier les glycémies, alors qu'elle était équipée pour le faire, et de demander l' analyse en urgence. Or. pour l'expert, le processus mortel dont a été victime Elise R... est le coma hyperglycémique pur appelé également coma hyperosmolaire dans lequel il n'y a pas de manque en insuline, mais qui présente le risque d'une déshydratation du cerveau par suite de l'élévation des substances dissoutes dans le sang qui fait un grand appel d'eau depuis les tissus pour tenter de maintenir l'équilibre plasmatique. Le mécanisme de la mort est alors dû à l'absorption d'une quantité importante de liquide ; quand le patient arrive dans le coma, ce liquide va automatiquement dans la trachée et entraîne,

par fausse route, une mort brutale. Il précise que le coma hyperosmolaire est la complication la plus connue et la plus classique du diabète avec obésité et que son diagnostic médical est facile à porter. Le Professeur E... relève également que, les résultats étant incontestablement parvenus à Mme XY... le samedi en fin de matinée, elle n'a pas pris la peine d'intervenir en urgence auprès de sa patiente, attendant le lundi matin pour tenter de le faire. Il considère par conséquent qu'à la consultation du 25 janvier 2005, Mme O... M... n'a pas accompli un acte médical complet malgré les anomalies très graves qu'elle avait observées et qu'il y a une faille évidenteIl considère par conséquent qu'à la consultation du 25 janvier 2005, Mme O... M... n'a pas accompli un acte médical complet malgré les anomalies très graves qu'elle avait observées et qu'il y a une faille évidente dans son raisonnement puisqu'elle n'a pas pensé à exploiter les glycémies, ce qui est confirmé par son attitude ayant consisté à ne pas écrire en urgence, à ne pas procéder à un "dextro" et quatre jours après, à réception des résultats, à n'en tirer aucune conséquence par une démarche immédiate auprès de sa patiente. Il ajoute que l'Androcur est formellement à déconseiller lorsque le trouble glucidique est présent, ce qui était le cas à la dernière consultation. Enfin, l'expert indique que la cause du décès est un coma d'une hyperglycémie datant de huit à dix jours avec des troubles majeurs dans le sang accompagné de l'absorption d'un liquide au moment où le patient entre dans le coma, étant précisé que, jusqu'à la minute précédent le passage de la boisson et des aliments éventuels dans l'arbre respiratoire, il aurait été très facile de sauver la victime en la réhydratant par voie parentérale en eau pure pour obtenir la rétrocession de cette hyperglycémie. Par ordonnance du 19 mars 2001, le Juge d'instruction, faisant droit à la demande de contre-expertise

présentée par le conseil de Mme N... M... épouse O..., a commis en qualité d'expert le Docteur G... F..., Endocrinologue-Diabétologue. Dans son rapport, établi le 16 juillet 2001, ce praticien expose tout d'abord que; compte tenu de la pathologie retenue, la fréquence des visites; les examens cliniques, les examens prescrits, les traitements mis en place correspondaient aux données des connaissances médicales et que la prescription d'Androcur, qui n'est contre-indiquée que dans le cas de diabète sévère et dans des cas très particuliers où la molécule est utilisée à de très fortes posologies, ce qui n'était pas le cas de Mlle R... à l'instauration du traitement, était justifiée au regard de son état de santé. Mais à propos de la consultation du 25 janvier 2000, il relève que, face à cette situation manifestement d'urgence, le Docteur O... M... aurait dû réaliser à son cabinet soit une glycémie capillaire ( dextro ), soit la vérification de l'acétone dans les urines par bandelette urinaire, car la constatation d'une glycémie capillaire élevée ou la présence d'acétone dans les urines aurait confirmé le caractère d'urgence de la situation. Il estime qu'au regard des résultats des analyses du 27 janvier 2000 qui étaient très pathologiques chez une personne jeune, les mesures thérapeutiques auraient dû être mises en place dans l'instant et que, pour cela, le Dr XZ... aurait dû s'assurer personnellement de la transmission des résultats biologiques et de leur réception par le Dr O... M.... L'expert indique que la décompensation d'un diabète insulino-dépendant, évoquée par le Dr O... M..., constitue une urgence thérapeutique implicitement reconnue par celle-ci et que si, comme elle l'a déclaré, une hospitalisation est possible mais pas forcément obligatoire , encore faut-il s'assurer que les paramètres vitaux de la personne sont conservés, notamment par des examens sanguins et la prise des constantes cliniques (pouls, température,

diurèse, pression artérielle, conscience...). Or, ces derniers éléments n'ont pas été vérifiés en l'occurrence. Pour le Docteur F..., la cause du décès est une complication aiguù de diabète, le tableau clinique correspondant à une acidocétose, les troubles digestifs avec vomissements s'intégrant dans le cadre de la décompensation du diabète au même titre que la polydipsie (4 litres d'eau par jour) et la mycose, et le déséquilibre glycémique, avec le très probable coma diabétique qui a conduit au décès, ayant pu être accéléré par le comportement alimentaire de Mlle R... qui peut expliquer l'apparente rapidité d'installation du coma diabétique. Il estime que Mlle R... aurait pu être sauvée tout d'abord si les contrôles nécessaires avaient été effectués lors de la consultation du 25 janvier, ensuite si les résultats sanguins avaient été portés à la connaissance du docteur O... M... dès le 27 janvier, ce qui aurait probablement permis la mise en oeuvre des mesures thérapeutiques adaptées qui consistaient en un traitement insulinique d'urgence. Il conclut en conséquence que des erreurs dans l'appréciation du caractère d'urgence de la situation ont été commises tant par le Docteur XY... que par le Docteur XZ... et que ces erreurs ont contribué au décès d'El ise R... dans la mesure où les moyens thérapeutiques nécessaires n' ont pas été mis en place. Mise en examen le 14 février 2001, N... M... épouse O... a confirmé les déclarations qu'elle avait faite au cours de l'enquête préliminaire. Lors de son interrogatoire du 8 novembre 2001, elle a déclaré qu'elle n'était pas d'accord avec les affirmations des experts qui se sont basés sur des éléments apparus après et que l'état clinique de la patiente, le jour où elle l'avait vue, n'était pas inquiétant, qu'il y avait des signes cliniques d'appel, mais pas des signes cliniques d'urgence vitale et en particulier aucun signe de décompensation aiguù d'un diabète. Elle

a précisé que, connaissant l'intolérance de Mlle R... aux hydrates de carbone, elle lui avait demandé de faire vérifier d'urgence sa glycémie et que si les résultats lui avaient été transmis rapidement, elle aurait été prise en charge. Elle a critiqué d'autres points des rapports d'expertise. En réponse à une question du magistrat instructeur, elle a précisé avoir pris son courrier en quittant son cabinet le samedi à midi et ne l'avoir ouvert que dans l'après-midi alors qu'elle avait déjà quitté NANTES, ce qui explique qu'elle n'était pas, alors, en possession des coordonnées de sa cliente. M. Christophe XZ... a déposé en qualité de témoin assisté et n'a pas été mis en examen. Par ordonnance du 29 juillet 2002, le Juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à suivre contre quiconque du chef de non assistance à personne en péril et a renvoyé N... M... épouse O... devant le Tribunal correctionnel du chef d'homicide involontaire. Sur appel de la partie civile, cette ordonnance a été confirmée en toutes ses dispositions par arrêt de la Chambre de l'instruction du 6 mai 2003. Pour déclarer la prévenue coupable des faits qui lui sont reprochés, le Tribunal correctionnel a considéré qu'en omettant de procéder à des investigations médicales élémentaires sur une patiente qu'elle suivait depuis octobre 1998 et chez laquelle elle avait déjà constaté et traité des taux de cholestérolomie, de triglvcémie et de glycémie excessifs et en ne prêtant pas suffisamment attention à la révélation de sa surconsommation d'eau, elle s'était privée de façon fautive des moyens de poser un véritable diagnostic qui lui aurait permis d'apprécier l'urgence que revêtait la prise en charge médicale d'Elise R..., comportement qui ne lui avait pas permis d'apprécier à sa juste mesure l'appel du Docteur XZ... le 27 janvier 2000 en fin d'après-midi, n'ayant même pas cherché à joindre ce biologiste lorsqu'elle fût informée, le lendemain matin, de son

appel de la veille. Le Tribunal en déduit que le Docteur XY... n'a pas accompli les diligences normales qui lui incombaient en tant que spécialiste disposant de la compétence, du pouvoir et des moyens pour accomplir sa mission et que cette négligence, en ne permettant à Elise R... ni d'être informée de la gravité de son état, ni d'être soignée de façon appropriée, est directement à l'origine de son décès. Le Professeur P... E... et le Docteur G... F..., entendus en application des dispositions de l'article 168 du Code de procédure pénale, ont confirmé à l'audience le contenu de leurs rapports écrits, précisant notamment, que la nature du coma - hyperosmolaire ou acidocétosique - qui a provoqué le décès de Mlle Elise R... ne changeait rien à leurs conclusions respectives, le Professeur E... ayant indiqué en particulier que, comme il en avait évoqué l'hypothèse en page 7 de son rapport, le coma diabétique acidocétosique décelé par son collègue le Docteur F... a pu être une circonstance aggravante en phase ultime du coma hyperosmolaire. Le Docteur F... a particulièrement insisté sur le fait que, sans les troubles de la conscience imputables au diabète, il ne pouvait y avoir de vomissement avec avalement dans la trachée, le trouble alimentaire compulsif n'ayant pu, à lui seul, aboutir à une inhalation. A cet égard, il a précisé que, le comportement alimentaire de la patiente, tel qu'il résultait des constatations faites à son domicile, avait pu être majoré par le problème diabétique lui-même, ce qui est un phénomène connu depuis longtemps. Il a confirmé que l'état de Mlle R..., tel qu'il s'était révélé au Docteur O... lors de la consultation du mardi 25 janvier, caractérisait bien une situation d'urgence, l'association de la mycose et de la polydipsie devant nécessairement évoquer le diabète d'autant plus qu'il y avait eu antérieurement des signes d'une telle pathologie. Les éléments apportés par les spécialistes consultés par

Mme XE... ne sont pas de nature à contredire utilement les conclusions des experts judiciaires. En effet. dans la lettre qu'il a adressée au conseil de la prévenue le 1 5 avril 2005, le Professeur I... H... critique l'hypothèse de l'imputation du décès de Mlle R... à un coma acidocétosique tout en admettant qu'elle est en accord avec l'histoire clinique évolutive de la patiente (glycémie élevée transitoire quelques années auparavant. baisse de l'état général progressive et récente marquée par la polydipsie, la mycose et se compliquant par l'apparition de vomissements) en observant qu'il manque le phénomène d'amaigrissement important, mais aussi la recherche d'acétone (possible au cabinet médical) et la recherche d'acidose (nécessairement en laboratoire). Or, l'absence de la première recherche est due à l'appréciation de son inutilité par le Docteur XY... qui, d'autre part, n'a pas insisté par écrit sur l'urgence de la seconde. Quant à l'amaigrissement, on a vu précédemment que le coma acidocétosique pouvait être une complication en phase ultime du coma hyperosmolaire, de sorte que l'absence d'un déficit pondéral, au demeurant non constatée de façon certaine dans les derniers jours ayant précédé le décès de Mlle R... ne constituepas une dénégation utile des conclusions des experts judiciaires. Le Professeur H... exclut d'autre part l'hypothèse d'une acidose lactique avec coma hyperosmolaire en raison de sa rareté statistique chez des personnes jeunes, opinion qui n'est pas déterminante au regard des observations et des conclusions du Professeur RAYMOND.L'autre hypothèse évoquée par le Pr H..., à savoir un trouble du comportement alimentaire se manifestant par une crise boulimique, elle ne peut être admise que sous réserve de l'action du diabète dont le rôle déterminant et nécessaire dans le processus mortel résulte de façon certaine des travaux des deux experts judiciaires. Par ailleurs, les éléments d'information fournis

par le Pr H..., en particulier sur la progression en deux temps - lente puis accélérée - de la dégradation de l'état général dans l'hypothèse de l'acidocétose, sont plutôt de nature à renforcer l'obligation qu'avait le Docteur XY... - dès la constatation de l'état de la patiente le 25 janvier 2000 - de faire procéder dans les meilleurs délais aux investigations qui s'imposaient et de s'enquérir de leurs résultats au lieu de s'en remettre à la seule initiative d'une patiente insuffisamment informée de la gravité de son état. Dans un document intitulé "Rapport d'expertise privée" en date du 18 janvier 2005, le Docteur K... J... expose que Mlle R... est décédée dans la nuit du vendredi au samedi d'une inondation pulmonaire d'origine alimentaire probablement secondaire à un trouble de la commande centrale, quelle qu'en soit l'origine, de sorte que, dans le contexte d'une glycémie voisine de 5 grammes, l'hypothèse de l'évolution d'un coma diabétique (qu'il soit hyperosmolaire ou acidocétosique) est évidemment à suspecter en premier lieu. 11 estime néanmoins que l'on ne peut pas reprocher à Mme XY... de ne pas avoir suspecté une décompensation diabétique chez sa patiente au vu des données cliniques et de ne pas avoir programmé l'examen - une mesure de glycémie veineuse - qui s'imposait assez rapidement "puisque la patiente, pendant la consultation du mardi, n'était pas en situation clinique d'urgence (pas de notion de troubles digestifs. respiratoires ou neuropsychiques)''. Mais cet avis est contredit par les déductions concordantes des deux experts judiciaires Selon l'avis écrit du Professeur Q... WEMEAU, en date du 14 avril 2005, la cause du décès est loin d'être établie, le niveau de la glycémie, constaté le jeudi, la veille ou l'avant-veille du décès, mesuré entre 3 et 5 g/1 était important mais, s'agissant d'une situation communément observée chez les patients venant en consultation et ne conduisant pas

nécessairement à l'hospitalisation, il n'y avait pas cliniquement, lors de la consultation du mardi 25 janvier 2000, d'élément de gravité qui présageait d'une situation d'urgence, même si l'état de soif accru témoignait alors d'un diabète sucré. Il estime que l'état de la patiente s'est aggravé entre la consultation jusqu'à son décès du fait de la prolongation d'erreurs diététiques. Il s'agit là d'appréciations qui, pour être en contradiction avec les avis donnés par les experts judiciaires, notamment sur le rôle fondamental du coma diabétique dans le processus mortel, ne sont étayés par aucun élément d'ordre logique ou technique ayant pour conséquence nécessaire de leur donner la préférence sur les conclusions concordantes de MM. E... et F... Le Conseil de Mme XY... verse également au dossier un avis du Docteur G... XX..., non daté mais annexé à celui du Professeur WEMEAU. Outre le fait qu'il substitue par erreur la date du 19 janvier 2000 à celle du 25 janvier pour situer le jour de la consultation, le Docteur XX... privilégie comme cause du décès, mais sans véritable argumentation médicale, des perturbations psychologiques avec un comportement abandonnique et suicidaire qui, selon lui, rendent Elise R... "en très grande partie responsable de son décès", ajoutant "que la surveillance et la coopération familiale n'ont peut-être pas été celles que l'on pouvait souhaiter". Ces énonciations relèvent essentiellement de l'appréciation personnelle, de même que l'affirmation selon laquelle "lors de l'examen du 19 janvier 2000 il n'existait aucune manifestation clinique faisant craindre un diabète ayant évolué de façon gravissime" qui n'apparaît étayée par aucun élément sérieux face aux conclusions des experts judiciaires. Il résulte de l'ensemble des considérations qui précèdent : - d'une part, qu'en présence des symptômes que présentait Mlle Elise R... dans la matinée du 25 janvier 2000, il y avait à craindre

l'évolution de son état dans le sens d'un coma diabétique pouvant être mortel s'il ne faisait pas l'objet d'un traitement adapté, ce qui rendait urgentes des investigations permettant de mettre en évidence les mesures thérapeutiques nécessaires, ces investigations consistant dans la vérification des paramètres vitaux de la personne et dans les examens sanguins relatifs au taux de glycémie : - d'autre part, qu'en l'absence de contrôle immédiat de la glycémie capillaire ou de vérification de la présence de corps cétoniques dans les urines, diligences qui auraient pu donner au praticien une première information fiable, l'état de la patiente imposait à Mme XY... de suivre de près la suite qui serait donnée à ses prescriptions et, en l'absence de manifestation de la patiente elle-même ou de transmission directe des résultats de l'analyse en provenance du laboratoire, de s'enquérir des résultats des analyses qu'elle avait prescrites. En effet, il est établi par les différentes expertises que la mort de Mlle R..., survenue dans la nuit du vendredi 28 au samedi 29 janvier 2000, est imputable à un coma diabétique ayant provoqué l'absorption de liquides et d'aliments par l'arbre respiratoire. Or, il appartenait à Mme N... XY..., qui connaissait son état antérieur et qui était en possession, le 2s janvier 2000, d'un tableau clinique laissant apparaître un tel risque, d'appréhender la situation dans sa totalité en procédant elle-même aux vérifications qu'elle pouvait faire. A cet égard, il n'est pas discuté qu'elle disposait de l'appareil nécessaire pour pratiquer un 'dextro" qu'elle pouvait utiliser, étant observé que le document qu'elle produit, intitulé "La Lettre Faxée de DIABETOLOGIE", du 8 juin 2005 ne contient aucune interdiction, mais seulement des recommandations. D'autre part, l'urgence de la situation rendait nécessaire un suivi, de telle sorte que le retard dans la communication des résultats devait d'autant

plus l'alerter qu'elle affirme dans ses conclusions (page 14) avoir insisté auprès de Mlle R... pour qu'elle effectue ses analyses dès le lendemain matin 26 janvier (sans pour autant attirer l'attention du laboratoire par une mention écrite sur la prescription) et donc susciter de sa part une initiative auprès de sa cliente dont elle connaissait les coordonnées; de même, dans ce contexte d'urgence, la réception du fax l'informant d'une communication téléphonique émanant d'un médecin qui "voulait lui parler des résultats de Mlle R..." ne devait pas rester sans suite comme ce fût le cas. En s'abstenant de procéder à ces diligences, Mme XY... s'est privée des moyens de poser le diagnostic exact et complet de l'état de la patiente et de prendre les mesures thérapeutiques nécessaires en un temps où elles auraient été encore efficaces. Par ces abstentions, qui sont ainsi la cause directe du décès d'Elise R..., Mme XY... n'a pas accompli les diligences normales qui lui incombaient compte tenu de ses fonctions, de ses compétences et des moyens dont elle disposait, ce qui constitue les fautes d'imprudence et de négligence caractérisant le délit d'homicide involontaire visé à la prévention. Il y a lieu de constater à cet égard que la citation énonce exactement le fait poursuivi conformément aux dispositions de l'article 551 du Code de procédure pénale. Si la prévention retient les dates des 28 ou 29 janvier 2000, elle vise également celle du 2s janvier précédent. En définissant dans l'énoncé un ensemble de faits qui ont pris place du 2s au 29 janvier, à savoir l'absence d'investigations complémentaires immédiates et le défaut de mise en place par la suite des mesures thérapeutiques en urgence, le ministère public a retenu sans aucune ambigu'té, comme fondement de la poursuite, l'enchaînement des faits, étalés sur quatre ou cinq jours, qui a abouti au décès de la victime, ce qui inclut sans

équivoque les omissions constatées dans la consultation du 25 janvier comme l'inaction de la prévenue au cours des quatre journées qui ont suivi. Le jugement dont appel doit par conséquent être confirmé sur la déclaration de culpabilité. En ce qui concerne la sanction, compte tenu de la nature des faits, des circonstances dans lesquelles ils ont été commis et de l'absence de tout antécédent judiciaire de la prévenue, la peine d'emprisonnement avec sursis n'apparaît pas nécessaire et il convient de prononcer à titre principal et comme unique peine, en application des dispositions des articles 131-10, 131-11, 131-27 et 221-8, l', l'interdiction d'exercer l'activité professionnelle dans l'exercice ou à l'occasion de l' exercice de laquelle l'infraction a été commise. Cette interdiction, visant par conséquent l'activité de Médecin spécialiste en endocrinologie-métabolismes, diabétologie et gynécologie médicale, sera prononcée pour une durée de six mois. Sur les réparations civiles, les premiers Juges ont correctement apprécié le montant des indemnités allouées à M. S... R... Mme U... T... et M. V... R... en réparation du préjudice moral subi par chacun d'eux. Le jugement sera donc confirmé de ce chef. Par contre, il est justifié par M. S... R... de ce que le montant total des sommes qu'il a exposées au titre des frais funéraires s'élève à 8.238.50 ç. Ce montant ressort des factures versées aux débats et non contestées par la partie adverse. Mme M... épouse O... sera par conséquent condamnée au paiement de cette somme. Au regard de la nature et de la durée des procédures ayant conduit au présent arrêt, compte tenu de l'équité et de la situation économique de la partie condamnée, il y a lieu de condamner Mme XY... à payer aux parties civiles unies d'intérêts la somme de 4 000,00 ç au titre des frais non payés par l'Etat et exposés par celles-ci à l' occasion de l'ensemble des procédures suivies devant les juridictions

d'instruction et de jugement en première instance et en cause d'appel. Aucune assignation en déclaration d'arrêt commun n'ayant été délivrée au liquidateur de la M.N.E.F., il ne peut être considéré comme appelé en la cause. Dispositif : LA COUR, Après en avoir délibéré conformément à la loi, Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à l'égard de M... N... épouse O..., de BAILLAY U... divorcée R..., de R... S... et de R... V..., Reçoit les appels ; Vu l'article 169 du Code de procédure pénale, Déclare qu'il sera passé outre aux débats ; Rejette l'exception d'irrecevabilité soulevée par les parties civiles ; Sur l'action publique: Confirme le jugement sur la déclaration de culpabilité ; Le réformant sur la peine et, statuant à nouveau de ce chef : Prononce à l'encontre de N... M... épouse O..., à titre de peine principale et pour une durée de six mois, l'interdiction d'exercer l'activité professionnelle de Médecin spécialiste en endocrinologie-métabolismes, diabétologie et gynécologie médicale ; Sur l'action civile: Confirme le jugement sur l'indemnisation des préjudices moraux ; Le réformant pour le surplus, Condamne N... M... épouse O... à payer à M. S... R... la somme de 8.2

ç au titre des frais funéraires ; La condamne à payer aux trois parties civiles unies d'intérêt la somme de 4.000,00 ç en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale au titre de l'ensemble de la procédure ; Dit n'y avoir lieu à déclaration d'arrêt commun. La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure de 120 ç dont est redevable la condamnée en application des dispositions de l'article 800-1 du Code de procédure pénale.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Ct0028
Numéro d'arrêt : JURITEXT000006946876
Date de la décision : 27/10/2005

Analyses

JURIDICTIONS CORRECTIONNELLES - Débats - Pièces - Versement aux débats - /JDF

Doit être rejeté le moyen d'irrecevabilité fondé sur une irrégularité de documents produits par des tiers au cours des débats, en violation des articles 114 alinéa 6 et R. 156 du Code de procédure pénale, dès lors qu'en application de l'article 427 du même Code, le prévenu ne saurait se voir privé de son droit de discuter contradictoirement les preuves apportées à son encontre par des éléments dont il appartient à la cour d'apprécier la pertinence et la valeur probante


Références :

Code de procédure pénale, articles 11, 114, 427, et R. 156

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2005-10-27;juritext000006946876 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award