La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/02/2005 | FRANCE | N°05/357

France | France, Cour d'appel de Rennes, Ct0028, 10 février 2005, 05/357


DOSSIER N 04/00839 Arrêt N du 10 Février 2005

COUR D'APPEL DE RENNES

3ème Chambre,

ARRET Prononcé publiquement le 10 Février 2005 par la 3ème Chambre des Appels Correctionnels, PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

X... Y... né le 26 Juin 1959 à SLIVEN (BULGARIE) fils de X... Nedelcho et de TODOROVA Yanka de nationalité bulgare, marié, ingénieur, navigateur, capitaine de navire demeurant XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXBULGARIE prévenu, appelant, libre, comparant assisté de Maître VATIER Bernard, avocat au barreau de PARIS ET : L'ASSOCIATION FRANCE NATURE E

NVIRONNEMENT (FNE), 57, rue Cuvier - 75231 PARIS CEDEX 05 partie civile, appelante re...

DOSSIER N 04/00839 Arrêt N du 10 Février 2005

COUR D'APPEL DE RENNES

3ème Chambre,

ARRET Prononcé publiquement le 10 Février 2005 par la 3ème Chambre des Appels Correctionnels, PARTIES EN CAUSE DEVANT LA COUR :

X... Y... né le 26 Juin 1959 à SLIVEN (BULGARIE) fils de X... Nedelcho et de TODOROVA Yanka de nationalité bulgare, marié, ingénieur, navigateur, capitaine de navire demeurant XXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXXBULGARIE prévenu, appelant, libre, comparant assisté de Maître VATIER Bernard, avocat au barreau de PARIS ET : L'ASSOCIATION FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT (FNE), 57, rue Cuvier - 75231 PARIS CEDEX 05 partie civile, appelante représentée par Monsieur LEOST Raymond L'ASSOCIATION MOR Z..., Maison de quartier - 1 rue de Quercy - 29200 BREST partie civile, intimée représentée par Monsieur HELLEQUIN A... L'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGE B..., 25 rue de Ponthieu - 75008 PARISpartie civile, appelante représentée par Maître BARBIER Franck, avocat au barreau de RENNES L'ASSOCIATION BRETAGNE VIVANTE SEPNB, 186 rue Anatole France - BP 32 - 29276 BREST partie civile, appelante représentée par Monsieur C... Le SYNDICAT MIXTE DE PROTECTION DU LITTORAL D..., Route de Rodanne - 22560 PLEUMEUR BODOU partie civile, appelant représenté par Maître BRIAND Maurice, avocat au barreau de GUINGAMP Le SYNDICAT POUR L'ASSAINISSEMENT DU MONDE MARITIME, 52 rue Porscave - 29810 LAMPAUL PLOUARZEL partie civile, intimé représenté par Monsieur LE GUEN E... LE MINISTÈRE PUBLIC F..., COMPOSITION DE LA COUR : lors des débats et du délibéré : Monsieur BEUZIT, Président

: Madame PIGEAU, Conseillers

: Madame G...,

Prononcé à l'audience du 10 Février 2005 par Monsieur BEUZIT, conformément aux dispositions de l'article 485 alinéa 3 du Code de Procédure Pénale. MINISTÈRE PUBLIC : représenté aux débats et lors du prononcé de l'arrêt par Madame FIASELLA-LE H..., Avocat Général. GREFFIER : en présence de Madame LE I... lors des débats et de Madame J... lors du prononcé de l'arrêt DÉROULEMENT DES DÉBATS :

A l'audience publique du 13 Janvier 2005, le président a constaté l'identité du prévenu comparant en personne, assisté de Me VATIER, la Cour déclarant le présent arrêt contradictoire. A cet instant Monsieur X... Y..., ne parlant pas suffisamment la langue française, le Président a désigné Madame ROUX K... ... ; Monsieur X... Y..., n'ayant pas eu connaissance de l'acte de citation, a accepté de comparaître volontairement ; A cet instant, Maître VATIER, Monsieur LEOST, Maître BARBIER, Maître BRIAND ont déposé des conclusions. Ont été entendus : Monsieur BEUZIT, en son rapport, Monsieur X... sur les motifs de son appel et en son interrogatoire, Monsieur LEOST, représentant l'Association France Nature environnement en ses observations, Monsieur LE GUEN E..., représentant le Syndicat pour l'assainissement du monde maritime en ses observations, Monsieur C..., représentant l'association Bretagne Vivante SEPNB, en ses observations, qui a déposé des conclusions, Monsieur HELLEQUIN A..., représentant l'Association

MOR Z..., en ses observations, Maître BRIAND, pour le Syndicat mixte de protection du littoral breton, en sa plaidoirie, Maître BARBIER, pour l'Association pour la protection des animaux sauvages, en sa plaidoirie, Madame l'Avocat Général en ses réquisitions, Maître VATIER, pour Monsieur X... Y..., en sa plaidoirie, Monsieur X... Y... qui a eu la parole en dernier,

Puis, la Cour a mis l'affaire en délibéré pour son arrêt être rendu à l'audience publique du 10 Février 2005,

Conformément aux prescriptions de l'article 462 alinéa 2 du Code de Procédure Pénale, le Président a avisé les parties présentes de la date de l'audience à laquelle l'arrêt serait rendu.

RAPPEL DE LA PROCEDURE : LE JUGEMENT : Le Tribunal Correctionnel de BREST par jugement Contradictoire en date du 16 DECEMBRE 2003, pour REJET D'HYDROCARBURE DANS LES EAUX TERRITORIALES PAR UN NAVIRE ETRANGER AUTRE QUE CITERNE D'UNE JAUGE BRUTE EGALE OU SUPERIEURE A 500 TONNEAUX, NATINF 002313 -a déclaré X... Y... coupable des faits qui lui sont reprochés ; -a condamné X... Y... à la peine d'amende de 200.000 ç - a ordonné la publication par extraits du jugement dans les journaux suivants : le Lloyd's Register Fairplay , Lombard House 3 Princess Way, Redhill SURREY RH1 1UP United Kingdom et le Journal La Marine Marchande ; a dit que le coût de ces publications ne devait pas dépasser la somme de 850 ç pour chacun des deux journaux ; -a prononcé la confiscation des scellés (no 631/2003) Sur l'action civile : -a condamné X... Y... à payer à l'Association France Nature Environnement la somme de 3.000 ç à titre de dommages-intérêts et la somme de 300 ç au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; -a condamné X... Y... à payer au Syndicat mixte de protection du Littoral breton la somme de 3.000 ç à titre de dommages-intérêts et la somme de 300 ç au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; -a condamné X... Y... à

payer au Syndicat pour l'assainissement du monde maritime la somme de 3.000 ç à titre de dommages-intérêts ; -a condamné X... Y... à payer à l'association BRETAGNE VIVANTE SEPNB la somme de 3.000 ç à titre de dommages-intérêts et la somme de 300 ç au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; - a condamné X... Y... à payer à l'Association MOR Z... la somme de 3.000 ç à titre de dommages-intérêts ; - a condamné X... Y... à payer à l'Association pour la protection des animaux sauvages la somme de 2.500 ç à titre de dommages-intérêts ; LES APPELS : Appel a été interjeté par : - X... Y..., le 23 Décembre 2003 à titre principal sur les dispositions civiles et pénales, - Monsieur le Procureur de la République, le 23 Décembre 2003 à titre incident sur les dispositions pénales, - l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES (APSA), le 24 Décembre 2003 à titre incident sur les dispositions civiles, - l'ASSOCIATION BRETAGNE VIVANTE SEPNB, le 29 Décembre 2003 à titre incident sur les dispositions civiles, - le SYNDICAT MIXTE DE PROTECTION DU LITTORAL D..., le 30 Décembre 2003 à titre incident sur les dispositions civiles, - l'ASSOCIATION FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT (FNE), le 30 Décembre 2003 à titre incident sur les dispositions civiles, LA PREVENTION : Considérant qu'il est fait grief au prévenu d'avoir dans la zone économique au large des côtes du territoire de la République, le 30 juillet 2003, en qualité de capitaine du navire "DOBRUDJA" battant pavillon de la Bulgarie, autre qu'un navire-citerne d'une jauge brute égale ou supérieure à 500 Tonneaux, rejeté des hydrocarbures à la mer en violation de la convention internationale du 2/11/1973 pour la prévention de la pollution infraction prévue et réprimée par les articles L 218-21, L 218-10, L 218-24, L 218-29, L 218-30 du Code de l'environnement et les règles 9 et 10 de l'annexe 1 de la convention internationale du 02/11/1973

* * * EN LA FORME : Considérant que les appels sont réguliers et recevables en la forme ; AU FOND : Rappel des faits : Le 30 juillet 2003, à 9 heures 28, Lionel L..., lieutenant de vaisseau de la marine nationale, commandant de bord de l'aéronef de patrouille maritime ATL 2 affecté à la flottille 23 F de la base aéro-navale de Lann- Bihoué, en mission de surveillance dans le golfe de Gascogne, constatait l'existence dans le sillage du navire de commerce DOBRUDJA, battant pavillon Bulgare, faisant route au Nord et se trouvant à la position 46o00' de latitude Nord/ 005o54' de longitude Ouest, de traces d'irisation collant à la poupe. Interrogé par radio, la capitaine du navire, Y... X..., déclarait qu'il n'y avait aucune panne à bord et qu'il ne déversait rien, contestant toute pollution maritime. Le navire, de type cargo RO-RO, faisait route vers le Nord et avait quitté le port d'Avilès (Espagne) la veille, à 21 heures. Il se rendait au port d'IJMUIDEN (Pays-Bas). Durant la liaison par radio, l'un des veilleurs à bord de l'aéronef informait son commandant que le rejet dans le sillage du navire venait de s'arrêter, fait confirmé par l'observation d'un arrêt net des traces de pollution sans que le navire ne change de cap ni de vitesse. Le commandant de bord recevait alors l'ordre de rester sur place et de guider l'aviso "Commandant BLAISON". Celui-ci arrivait sur zone à 10 heures 48 et mettait son embarcation à l'eau pour procéder à des prélèvements qui étaient effectués dans la nappe à 11 heures 15, à la position 46o00,9 N - 005o54 W. Le lieutenant de vaisseau L... dressait à bord de son aéronef un procès-verbal de constatation de pollution maritime par rejet d'hydrocarbures et caractérisait les dimensions de la nappe de la manière suivante : - longueur : 5 kilomètres - largeur : 0,5 km, présentant l'aspect d'une nappe continue et argentée à la surface de l'eau avec irisations, de catégorie B et C. Les prélèvements d'eau de mer effectués dans trois

bocaux en verre d'une contenance d'un litre et trois boîtes contenant des éponges "Polmar" étaient placés sous scellés. Seul le scellé no3 a pu être analysé par le laboratoire d'analyses de surveillance et d'expertise de la marine (LASEM) mais avec difficultés, en raison de la faible quantité d'hydrocarbures prélevée. L'expert a conclu que "l'examen des chromatogrammes montre que le polluant prélevé en mer contient un mélange de produits pétroliers dont un de type "fuel lourd". L'absence des fractions légères confirme que le mélange est dégradé (évaporation)." La teneur en hydrocarbures totaux exprimée en mg/L d'eau de mer a été chiffrée à 130 mg/ L d'eau de mer. Entendu par les enquêteurs, Y... X... a contesté toute action de rejet en provenance de son navire, propriété de la compagnie de navigation maritime bulgare LTD (NAVIBULGAR) qui n'a pu être régulièrement citée devant le Tribunal en qualité de civilement responsable. Il a expliqué qu'au moment du survol par l'avion de la patrouille maritime française, un membre de l'équipage était en train de laver les ponts extérieurs de la passerelle et les vitres à l'aide d'un jet d'arrosage car au port de départ d'Avilès, en Espagne, le navire avait été souillé par des poussières de charbon. Il précisait également que la dernière vidange des eaux de cale et des boues avait été effectuée le 2 juillet 2003, à Burgas, en BULGARIE. Le tribunal a relevé que la pollution constatée a cessé lorsque l'aéronef de surveillance est entré en contact radio avec le capitaine du navire et que les photographies confirmaient l'existence d'une nappe argentée à l'arrière du navire ainsi que l'analyse des prélèvements en mer, la présence d'hydrocarbure avec une concentration de 126 ppm, l'analyse comparée de ces prélèvements avec ceux effectués dans le puisard de la cale arrière et la caisse de rétention concluant à une vraisemblance d'identité de produit, à savoir un mélange de produits pétroliers dont un de type fuel lourd. Le tribunal a en outre relevé

qu'après avoir contesté toute possibilité de pollution de son navire, position maintenue à la barre à titre principal, Y... X... a fait état d'une possible pollution involontaire, reconnaissant que quelqu'un a dû de toute façon ouvrir une vanne sans autorisation.

Enfin, l'analyse des documents de bord montrait de nombreuses anomalies , notamment l'absence de pompage d'eaux sales en direction de la cuve d'eaux usées, depuis le 17 juillet 2003 jusqu'au jour de l'infraction, soit pendant treize jours. Sur l'action publique - Sur la constatation matérielle du rejet

Considérant que le lieutenant de vaisseau Lionel L..., commandant de bord d'un aéronef de la marine nationale, a constaté la présence dans le sillage du navire DOBRUDJA d'une nappe d'hydrocarbures de forme continue, de 5 kilomètres de longueur et 0,5 kilomètres de large ; qu'il a décrit cette nappe comme ayant l'aspect d'une nappe argentée à la surface de l'eau et présentant des traces de coloration par irisations ; qu'il a observé un arrêt des rejets pendant sa conversation radio avec le capitaine du navire ; Considérant que ces observations visuelles de l'agent verbalisateur sont corroborées par les photographies prises de l'avion par un membre de l'équipage sur ordre du commandant de bord ; que leur examen révèle l'absence de pollution à l'avant du navire et, en revanche, la couleur gris-argentée d'une nappe continue dans le sillage du navire DOBRUDJA, visible sur les clichés numérotés 1, 2, 5, 6, et 7 ; Considérant que la preuve de l'élément matériel du rejet d'hydrocarbures par le navire DOBRUDJA se trouve rapportée par ces

seules constatations et les clichés photographiques qui les corroborent ; Considérant que si le procès-verbal de constatation mentionne un nombre de photographies, prises de l'avion, supérieur à celui des parties A et B de la planche photographique annexée à la procédure, cette circonstance n'a pas pour autant effet d'ôter à ces derniers clichés leur caractère probant, la preuve de la pollution résultant de l'examen de chaque cliché où ce phénomène est visible et la répétition de cette observation, dans des clichés différents, venant renforcer ce mode de preuve ; Considérant que la circonstance selon laquelle aucune photographie n'a été prise côté bâbord du navire où se trouve la vanne de rejet ne saurait pour autant empêcher de connaître l'origine de la pollution, le seul fait que celle-ci soit présente dans le sillage du navire alors qu'aucune pollution n'existe à l'avant et sur les côtés de ce dernier, suffisant à déterminer l'origine interne du rejet ; Considérant que les clichés 15 et 16 qui présentent une nappe dont l'irisation est très marquée sont à relier avec les clichés précédents, numérotés 13 et 14, qui montrent la progression de l'embarcation mise à l'eau depuis l'aviso Commandant BLAISON jusqu'à la nappe d'hydrocarbures ; Considérant que le procès-verbal établi par le commandant de ce navire, le capitaine de frégate Guillaume d'Arcimoles, dont le bâtiment se trouvait à 11 heures 12 en limite sud de la zone de pollution qu'il déclare visible de la passerelle, confirme qu'il s'agit de celle laissée dans le sillage du DOBRUDJA, compte tenu de sa position et de celle où les prélèvements ont été effectués depuis l'embarcation ( 46o00,9 N - 005o54,0 W) ; qu'en effet, à ce moment, près de deux heures après la constatation de la pollution, le Commandant BLAISON se trouvait dans une position très proche de celle du navire DOBRUDJA, lorsque la pollution a été constatée ( 45o59,4 N- 005o53,8 W pour le premier et 46o00 N - 005o54' W pour le second) ; qu'il s'agit à l'évidence de

l'extrémité sud de la nappe, le navire pollueur faisant route au nord ; que le commandant du navire Commandant BLAISON évalue lui-même la nappe à 2,7 milles nautiques de long et 400 yards de large, confirmant ainsi les estimations relevées par le pilote de l'aéronef, dans son procès-verbal de constatation ;

Considérant que si parmi les six échantillons d'hydrocarbures prélevés en mer depuis l'embarcation, seul le scellé no 3 (flacon en verre de un litre) a pu être exploité, et ce avec difficulté, en raison de la faible quantité d'hydrocarbures, l'examen des chromatogrammes montre que le polluant prélevé contient un mélange de produits pétroliers dont un de type "fuel lourd"; que l'analyse des produits prélevés dans le puisard de la cale arrière machine et de la caisse de rétention de cale du navire DOBRUDJA montre qu'ils contiennent un mélange de produits pétroliers dont un de type "fuel lourd" de même nature que le produit prélevé dans la zone polluée ; que même si le laboratoire a émis une réserve sur cette correspondance en raison de la qualité du prélèvement polluant de l'eau de mer contenant une trop faible quantité d'hydrocarbures, cette circonstance ne saurait pour autant affaiblir cette preuve supplémentaire de la pollution par hydrocarbures constatée, les réserves émises ne portant pas sur la réalité de la pollution de l'eau de mer prélevée dans la nappe issue du sillage, mais sur la composition comparée des prélèvements effectués dans l'eau polluée, d'une part, dans le navire, d'autre part ; - sur le caractère volontaire du rejet Considérant que faute par le commandant du DOBRUDJA de justifier d'une raison ou d'un incident qui aurait

occasionné ou nécessité le rejet constaté dans le sillage de ce navire, celui-ci doit être présumé volontaire ; qu'en outre, il a été observé par le pilote de l'avion de la patrouille maritime que la pollution avait cessé dès que le contact radio avait été établi avec le commandant du DOBRUDJA ;

Considérant, en premier lieu, qu'il est soutenu que l'acte de pollution est invraisemblable dans le contexte décrit, parce que le capitaine et l'équipage avaient repéré la présence de l'aéronef avant le début de l'acte de pollution allégué et qu'ils n'avaient aucune nécessité d'effectuer des rejets en mer dans la mesure où la cuve de stockage n'était remplie qu'au tiers et que le déchargement des eaux usées devait être effectué au prochain port, aucune instruction de rejet en mer n'ayant été donnée ; qu'en outre, selon les éléments du dossier et l'enregistrement d'un film vidéo, le début de la pollution correspondrait au moment où l'avion passait au dessus du bateau ; Mais considérant que la co'ncidence entre le début de la pollution et le passage de l'avion au dessus du navire est infirmée par le témoignage de Lionel L..., pilote de l'avion, recueilli à la barre du tribunal et acquis aux débats, qui a déclaré que lorsqu'il a constaté la pollution, celle-ci devait durer depuis environ un quart d'heure, la longueur de la nappe étant de 5 kilomètres ; Considérant en outre que si le même avion avait déjà survolé le navire, permettant à son équipage de repérer sa présence, son premier passage au dessus du DOBRUDJA, se situe entre une à deux heures avant la constatation de la pollution -soit entre 7h30 et 8h30 - selon, d'une part, les déclarations de Y... X... et, d'autre part, celles du pilote de l'avion qui a précisé qu'il avait, à 9 heures 07, à la fin de la mission opérationnelle d'identification de tous navires se trouvant sur zone, commencée à 6 heures 54, décidé de revenir sur un navire de commerce identifié afin d'effectuer un exercice de

réalisation de prises photographiques ; Considérant que dès lors, il ne peut être déduit de ces circonstances de fait que le rejet volontaire parce que commencé en présence de l'avion de surveillance, serait invraisemblable ; qu'au contraire, il peut être conclu que le second passage de l'avion a été inopiné, le rejet à la mer ayant été décidé après qu'il se soit éloigné une première fois et qu'il n'ait pas réapparu pendant suffisamment de temps pour laisser à croire qu'il s'était définitivement éloigné ; qu'enfin il convient de rappeler que la pollution a cessé pendant le second passage de l'avion ; Considérant, en second lieu, que dans ses conclusions Y... X... soutient que l'absence de pompage d'eaux sales ne constitue pas une anomalie et ne permet pas d'en déduire une pollution volontaire ; Mais considérant que force est de constater qu'alors que du 2 au 17 juillet 2003, période pendant laquelle le navire a navigué 12 jours, 12,5 m3 d'eaux sales ont été pompées de la cale machine vers le bilge water tank, aucun pompage n'a été enregistré du 18 au 30 juillet, pour une navigation de 7 jours, suivant les constatations faites par le centre de sécurité des navires du Finistère Nord ; qu'en outre, les inspecteurs ont relevé que les cales machines, grasses et sales, et les coulures sur les moteurs de propulsion et les auxiliaires, témoignaient de sources de fuite importantes tandis que l'examen du puisard révélait une faible quantité d'un mélange chargé d'hydrocarbures ; Considérant que Y... X... n'a pu fournir aucune explication sérieuse sur ces graves anomalies ; qu'il a même soutenu devant le tribunal que le seul mouvement du navire entre le 17 et le 30 juillet l'avait été de Bilbao à Avilès soit quatre heures de mer, fait démenti par les constatations des inspecteurs relatives aux dernières escales ; Considérant que l'hypothèse d'un rejet accidentel par dysfonctionnement du séparateur, en raison du maintien en position

rinçage de la vanne manuelle permettant de rincer le contrôleur d'huile, mentionnée dans le rapport de Chris DYSON (observation 16 du rapport), n'a été confirmée ni par le capitaine ni un membre de l'équipage ; qu'ainsi Slavcho PESHKOV, ingénieur mécanicien à bord, dans sa déclaration devant les enquêteurs, a indiqué ne pas s'être servi du séparateur le 30 juillet 2003, être descendu après le déroutement du navire inspecter le séparateur afin de vérifier qu'il ne rejetait pas à la mer d'eau sale et avoir relevé son parfait état de fonctionnement ; que dès lors, le rapport DYSON ne soulève que des hypothèses non étayées par les éléments du dossier et de l'enquête et n'apporte pas la preuve du caractère accidentel du rejet d'hydrocarbures ; Considérant en conséquence que l'infraction se trouvant constituée dans tous ses éléments, il convient de confirmer la décision entreprise sur la culpabilité ; Sur la peine Considérant que les premiers juges ont fait une juste appréciation de la loi pénale en prononçant une peine de 200.000 ç d'amende qui sanctionne un rejet volontaire d'hydrocarbures en mer qui, comme tout acte de cette nature, constitue une atteinte grave à l'environnement maritime ; que la répétition de ces actes de pollution sur des routes maritimes de grand trafic comme celle suivie par le DOBRUDJA justifie également que soit faite une application ferme de la loi pénale à chaque fait constaté et prouvé ;

Considérant qu'il convient enfin d'ordonner, en application des dispositions de l'article L.218-24 alinéa 3 du Code de l'environnement, la publication par extraits de la présente décision , comme l'ont ordonné les premiers juges, aux frais de Y... X..., dans la presse écrite spécialisée, dans les conditions prévues à l'article 131-35 du Code pénal ; que cette publication se

substituera à celle ordonnée par les premiers juges ; Sur l'action civile Considérant que le syndicat mixte de protection du littoral breton dit VIGIPOL demande la confirmation du jugement sur la déclaration de culpabilité et de condamner le prévenu à lui payer la somme de 30.000 ç en réparation de son préjudice matériel et moral et de l'atteinte aux intérêts collectifs qu'il défend ; qu'il demande en outre d'élever à 2.000 ç l'indemnité allouée au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; Considérant que le syndicat mixte de protection du littoral breton est un établissement public régi par les dispositions des articles L 5721-1 et suivants du Code général des collectivités territoriales ; que les dispositions de l'article L 141-1 du Code de l'environnement relatives aux associations agréées ne lui sont pas applicables ; Considérant que le syndicat mixte de protection du littoral breton a notamment pour objet de coordonner et d'unir les moyens des collectivités territoriales adhérentes pour mettre en oeuvre tous les moyens légaux y compris les actions judiciaires afin d'obtenir l'indemnisation et la réparation des dommages causés par les pollutions du littoral ; qu'il est chargé de la défense des intérêts collectifs de 92 communes possédant 1145 kilomètres de littoral maritime auquel les rejets d'hydrocarbures causent des dommages par l'apport de déchets qu'il convient ensuite de gérer ; que cette gestion qui s'effectue à longueur d'année représente un coût élevé pour ces collectivités qui subissent ainsi un préjudice matériel ; qu'en outre, existe un préjudice moral, la présence de déchets sur les plages étant de nature à ternir la réputation des stations touristiques de ce littoral ; Considérant que l'infraction commise porte atteinte de manière directe aux intérêts collectifs défendus par le syndicat mixte de protection du littoral breton ; que cependant, le rejet ayant été pratiqué dans le golfe de Gascogne, dans une zone dont les eaux ne donnent pas directement sur

le littoral des communes adhérentes, toutes côtières de la Manche, la demande formulée paraît excessive en son montant ; qu'il convient dès lors de confirmer la décision des premiers juges qui ont justement apprécié le montant du préjudice subi par le syndicat mixte de protection du littoral breton à la somme de 3.000 ç ; Considérant qu'ajoutant au jugement, il sera alloué une somme de 1.000 ç au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale tant pour la première instance que celle d'appel ; Considérant que le syndicat pour l'assainissement du monde maritime demande la confirmation du jugement en ce qu'il l'a reçu en sa constitution de partie civile et a condamné le prévenu à lui payer la somme de 3.000 ç en réparation de son préjudice matériel et moral et de l'atteinte aux intérêts collectifs qu'il défend et celle de 300 ç en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; Considérant que le syndicat pour l'assainissement du monde maritime est constitué au sens de l'article L 411-1 du code du travail et a vocation à défendre les intérêts collectifs de ses adhérents ; que tout rejet d'hydrocarbure illicite en mer porte atteinte à ces intérêts ; qu'en conséquence, Jo Le GUEN, en sa qualité de secrétaire général de ce syndicat, est recevable à se constituer partie civile en son nom ; que le montant des dommages et intérêts accordé par les premiers juges constitue la juste réparation de l'atteinte portée aux intérêts dont ledit syndicat est le défenseur et qu'il convient de confirmer le jugement sur ce point ; Considérant que l'association France Nature Environnement demande de confirmer le jugement eneur et qu'il convient de confirmer le jugement sur ce point ; Considérant que l'association France Nature Environnement demande de confirmer le jugement en ce qu'il l'a reçue en sa constitution de partie civile et de le réformer sur le montant des dommages et intérêts en condamnant le prévenu à lui payer la somme de 20.000 ç en réparation de son

préjudice matériel et moral et de l'atteinte aux intérêts collectifs qu'elle défend et celle de 1.000 ç en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; qu'elle demande en outre, à titre subsidiaire, la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et de condamner le prévenu, pour l'instance d'appel, à une indemnité de 600 ç au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; Considérant que l'association France Nature Environnement, fédération française des associations de protection de la nature et de l'environnement a été agréée par arrêté ministériel du 29 mai 1978 au titre de l'article L 141-1 du code de l'environnement ; qu'elle a dès lors qualité pour exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts qu'elle a pour objet de défendre et constituant une infraction aux dispositions législatives ayant pour objet la lutte contre les pollutions ; Considérant que la pollution de mer par hydrocarbures lèse les intérêts défendus par l'association qui a subi du fait de l'infraction un préjudice moral qui sera réparé par la somme de 3.000 ç à titre de dommages et intérêts ; qu'il convient en outre de lui allouer en cause d'appel la somme de 600 ç en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

Considérant que l'association Mor Z... demande la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné le prévenu à lui payer la somme de 3.000 ç à titre de dommages intérêts ;

Mais attendu que l'association MOR Z... dont l'objet est de " Défendre la mer et toutes les activités maritimes" a été régulièrement déclarée le 21 juillet 2003 ; qu'elle ne remplit pas les conditions légales pour exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts collectifs qu'elle a pour objet de défendre, ne

justifiant pas, d'une part, avoir été agréée dans les conditions prévues par l'article L 141-1 du Code de l'environnement, et, d'autre part, être déclarée depuis au moins cinq ans à la date des faits ; qu'en outre, ladite association ne justifie ni ne prétend avoir subi un préjudice direct en raison de l'infraction constatée ; qu'en conséquence sa constitution de partie civile n'est pas recevable et le jugement doit être infirmé sur ce point ; Considérant que l'association Bretagne Vivante SEPNB demande de condamner le prévenu à lui payer la somme de 20.000 ç à titre de dommages et intérêts et la somme de 600 ç en application des dispositions de l'article 475 -1 du Code de procédure pénale ; Considérant que l'association Bretagne Vivante SEPNB a été déclarée à la préfecture du Finistère le 7 janvier 1959 ; qu'elle a pour objet la sauvegarde dans les départements bretons de la faune et de la flore naturelle et des milieux dont elles dépendent ; qu'elle a dès lors, en application des dispositions de l'article 142-2 alinéa 2 du Code de l'environnement, qualité pour exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts qu'elle a pour objet de défendre et constituant une infraction aux dispositions législatives ayant pour objet la lutte contre les pollutions ; Considérant que la pollution de mer par hydrocarbures lèse les intérêts défendus, de longue date et de manière soutenue par l'association Bretagne Vivante SEPNB qui a subi du fait de l'infraction un préjudice moral qui sera réparé par la somme de 3.000 ç à titre de dommages et intérêts ; qu'il convient en outre de lui allouer en cause d'appel la somme de 600 ç en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; Considérant que l'association pour la Protection des Animaux Sauvages (APSAS) demande de confirmer le jugement en ce qu'il l'a reçue en sa constitution de partie civile et a condamné le prévenu à

lui payer la somme de 2.500 ç à titre de dommages et intérêts et une indemnité de 900 ç au titre de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ; Considérant que l'association pour la Protection des Animaux Sauvages (APSAS) a été agréée par arrêté ministériel du 20 décembre 1999 au titre de l'article L 141-1 du code de l'environnement ; qu'elle a dès lors qualité pour exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts qu'elle a pour objet de défendre et constituant une infraction aux dispositions législatives ayant pour objet la lutte contre les pollutions ; Considérant que la pollution de mer par hydrocarbures lèse directement les intérêts défendus par l'association qui a subi du fait de l'infraction un préjudice moral qui a été justement réparé par la somme de 2.500 ç ; qu'il convient en outre de lui allouer en cause d'appel la somme de 600 ç en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale ;

Considérant que les sommes allouées aux parties civiles seront prélevées sur le cautionnement fourni suivant les règles fixées à l'article 471 alinéa 3 du Code de procédure pénale ; PAR CES MOTIFS, LA COUR,

Après en avoir délibéré conformément à la loi,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire à l'égard de X... Y..., l'ASSOCIATION FRANCE NATURE ENVIRONNEMENT (FNE), l'ASSOCIATION MOR Z..., l'ASSOCIATION POUR LA PROTECTION DES ANIMAUX SAUVAGES, l'ASSOCIATION BRETAGNE VIVANTE SEPNB, le SYNDICAT MIXTE DE PROTECTION DU LITTORAL D... et le SYNDICAT POUR L'ASSAINISSEMENT DU MONDE MARITIME ; EN LA FORME Reçoit les appels, AU FOND Sur l'action pénale Confirme le jugement du tribunal correctionnel de BREST en toutes ses dispositions pénales ; Ordonne, aux frais du condamné, la publication par extraits de la présente décision dans les journaux

suivants : le Lloyd's List et le Journal La Marine Marchande ; dit que le coût de ces publications ne devra pas dépasser la somme de 850 ç pour chacun des deux journaux ;

Sur l'action civile Confirme le jugement en toutes ses dispositions civiles sauf en ce qu'il a déclaré l'action civile de l'association MOR Z... recevable ; Infirmant le jugement sur ce point, déclare irrecevable la constitution de partie civile de l'association MOR Z... ; Y ajoutant, Condamne Y... X... à payer en application des dispositions de l'article 475-1 du Code de procédure pénale : - au syndicat mixte de protection du littoral breton dit VIGIPOL la somme de 1.000 ç tant pour la première instance que l'appel ; - à l'association France Nature Environnement la somme de 600 ç pour l'instance d'appel ; - à l'association Bretagne Vivante SEPNB la somme de 600 ç pour l'instance d'appel ; - à l'association pour la Protection des Animaux Sauvages (APSAS) la somme de 600 ç pour l'instance d'appel ; Dit que les sommes allouées aux parties civiles seront prélevées directement sur le cautionnement fourni en application des dispositions de l'article 471 alinéa 3 du Code de procédure pénale ; La présente décision est assujettie à un droit fixe de procédure d'un montant de 120 euros dont est redevable le condamné, en vertu de l'article 800-1 du Code de procédure pénale. LE GREFFIER,

LE PRESIDENT, Annie J...

Xavier BEUZIT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Rennes
Formation : Ct0028
Numéro d'arrêt : 05/357
Date de la décision : 10/02/2005

Analyses

PROTECTION DE LA NATURE ET DE L'ENVIRONNEMENT - Eau et milieux aquatiques - Eaux marines et voies ouvertes à la navigation maritime.

L'infraction de rejet d'hydrocarbure à la mer est caractérisée dès lors que la preuve de l'élément matériel de l'infraction consistant dans le rejet maritime est rapportée, outre un faisceau de preuves, de par un procès-verbal rapportant les observations visuelles directes de l'infraction, corroborées par des photographies et que la preuve de l'élément moral est établie par l'impossibilité pour le commandant du navire de justifier d'une raison ou d'un incident qui aurait occasionné ou nécessité le rejet constaté; rejet devant dès lors être présumé volontaire

ACTION CIVILE - Préjudice - Evaluation - Eléments pris en considération.

La pollution résultant d'un rejet d'hydrocarbure, dans une zone dont les eaux ne donnent pas directement sur le littoral des communes adhérentes à un syndicat mixte de protection du littoral, justifie une réparation moins importante du préjudice de ce dernier


Références :

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.rennes;arret;2005-02-10;05.357 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award