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25/03/2011 | FRANCE | N°10/00304

France | France, Cour d'appel de reims, 1ère chambre civile - section ii, 25 mars 2011, 10/00304


R. G. : 10/ 00304 ARRÊT du : 25 mars 2011

Madame Agnès X...née Y...
Monsieur Eric Y...
Madame Corinne Z...née Y...
C/
Monsieur Emile Y...

Formule exécutoire le : à :
Me Pierangeli S. C. P. D. J. C. R.

COUR D'APPEL DE REIMS 1ère CHAMBRE CIVILE-SECTION II
ARRÊT DU 25 MARS 2011

APPELANTS : d'une ordonnance de la juge de la mise en état rendue le 08 juillet 2009 et d'un jugement rendu le 08 janvier 2010 par le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières (RG 07/ 351)
1o- Madame Agnès X...née Y... ...
2o- Monsieur Eric

Y... ...
3o- Madame Corinne Z...née Y... ...
COMPARANT, concluant par Maître Estelle Pierangeli, avoué à la...

R. G. : 10/ 00304 ARRÊT du : 25 mars 2011

Madame Agnès X...née Y...
Monsieur Eric Y...
Madame Corinne Z...née Y...
C/
Monsieur Emile Y...

Formule exécutoire le : à :
Me Pierangeli S. C. P. D. J. C. R.

COUR D'APPEL DE REIMS 1ère CHAMBRE CIVILE-SECTION II
ARRÊT DU 25 MARS 2011

APPELANTS : d'une ordonnance de la juge de la mise en état rendue le 08 juillet 2009 et d'un jugement rendu le 08 janvier 2010 par le tribunal de grande instance de Charleville-Mézières (RG 07/ 351)
1o- Madame Agnès X...née Y... ...
2o- Monsieur Eric Y... ...
3o- Madame Corinne Z...née Y... ...
COMPARANT, concluant par Maître Estelle Pierangeli, avoué à la cour, et ayant pour conseil Maître Charles Rahola, avocat au barreau de Charleville-Mézières
INTIMÉE :
Monsieur Emile Y... ...
COMPARANT, concluant par la S. C. P. Delvincourt-Jacquemet-Caulier-Richard, avoué à la cour, et ayant pour conseil Maître Alain Ledoux, avocat au barreau de Charleville-Mézières
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Hascher, président de chambre Madame Lefèvre, conseiller Madame Magnard, conseiller
GREFFIER D'AUDIENCE :
Madame Bif, greffier, lors des débats et du prononcé
DÉBATS :
A l'audience publique du 10 février 2011, le rapport entendu, où l'affaire a été mise en délibéré au 25 mars 2011

ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, signé par Monsieur Hascher, président de chambre, et par Madame Bif, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire

* * *

Le 4 février 2010, Madame Agnès Y..., Monsieur Eric Y... et Madame Corinne Y... (" les consorts Y... ") ont interjeté appel d'une ordonnance de la juge de la mise en état du 8 juillet 2009 du tribunal de grande instance de Charleville-Mézières ayant autorisé Monsieur Emile Y..., leur frère à exploiter dans le cadre d'une vente d'herbe moyennant le prix de 3. 200 € par an, les parcelles dépendant de l'indivision successorale de Madame Paula E...situées sur les communes de Neuville Lez Beaulieu et de Regniowez dans les Ardennes ainsi que d'un jugement du 8 janvier 2010 du tribunal de grande instance de Charleville-Mézières ayant déclaré irrecevable l'exception d'incompétence territoriale de la juridiction française, déclaré la loi française applicable à la demande d'attribution préférentielle de Monsieur Emile Y..., ordonné l'ouverture des opérations de compte liquidation et partage des successions ainsi que de la communauté de leurs parents, Madame Paula E...et son époux, Monsieur Emile Joseph Y..., tous deux décédés en Belgique en 1995 et 2006, désigné Monsieur le président de la chambre interdépartementale des notaires de la cour d'appel de Reims pour ce faire, avec faculté de délégation, ordonné l'attribution préférentielle à Monsieur Emile Y..., à charge de soulte s'il y a lieu, des bâtiments d'habitation et d'exploitation, prés et bois, sis en France, commune de la Neuville Lez Beaulieu (Ardennes) cadastrés lieudit « La Ferme du Seigneur » section A n º 49, 50, 51, 52 et 53 et lieudit « Bois du Lieutenant » n º 274 ainsi qu'un pré sur la commune de Regniowez (Ardennes) lieudit « Clos Gobeau » cadastré section AC n º 5, 6, 7, 8 et 9, préalablement aux opérations de partage, et pour y procéder, ordonné une expertise immobilière, a renvoyé la présente affaire à l'audience de mise en état, fait masse des dépens qui seront intégrés dans le passif de la succession et en a ordonné l'emploi en frais privilégiés de compte, liquidation et partage, débouté Mesdames Agnès Y... épouse X...et Corinne Y... épouse Z...ainsi que Monsieur Eric Y... de leur demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile, dit n'y avoir lieu à application de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions du 1er février 2011, Mesdames Agnès et Corinne Y..., Monsieur Eric Y..., de nationalité belge, soulèvent l'incompétence de la juridiction française, disent que Monsieur Emile Y... ne justifie pas des conditions prévues par l'article 832 du code civil pour bénéficier d'une attribution préférentielle et demandent de débouter ce dernier de sa demande au titre de la vente d'herbe qui sera faite au plus offrant. Ils concluent à la condamnation de Monsieur Emile Y..., outre aux dépens, à leur payer une somme de 5. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Monsieur Emile Y..., également de nationalité belge, a conclu le 3 février 2011 à la confirmation des deux décisions attaquées, à la condamnation des appelants à lui payer, chacun, une somme de 1. 500 € à titre de dommages et intérêts pour appel abusif et injustifié, une somme de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.
Sur ce, la cour :
Considérant qu'en matière internationale, la contestation élevée sur la compétence du juge français saisi ne concerne pas une répartition de compétence entre les tribunaux nationaux mais tend à lui retirer le pouvoir de trancher le litige au profit d'une juridiction d'un Etat étranger ;
Considérant que dès lors peut être soulevée d'office, ainsi que le soutiennent les consorts Y..., l'exception d'incompétence internationale fondée sur les règles du droit conventionnel ici, la Convention franco-belge du 8 juillet 1899 sur la compétence judiciaire, l'autorité et l'exécution des décisions judiciaires et des sentences arbitrales et actes authentiques dont l'article 7, qui énonce que seront, dans chaque pays, portées devant le juge du lieu de l'ouverture de la succession les actions en pétition d'hérédité, les actions en partage et toutes autres actions entre cohéritiers jusqu'au partage, les actions contre l'exécuteur testamentaire, les actions en nullité ou en rescision de partage et en garantie des lots, les actions des légataires et des créanciers contre les héritiers ou l'un d'entre eux, crée une unité de juridiction pour toutes les actions successorales qu'il énumère, mais que l'article 7 vise le cas du français décédé ou domicilié en Belgique ou du belge décédé ou domicilié en France, alors que les époux Y...- E...étaient tous deux de nationalité belge, pays dans lequel ils sont respectivement décédés en 2004 et 1995 ;
Considérant que d'après les règles de droit commun qui s'appliquent alors, par exception à la compétence de l'ordre juridictionnel du dernier domicile du défunt, compétence exclusive est donnée pour les immeubles à l'ordre juridictionnel du pays où ils sont situés, s'agissant de bâtiments d'habitation et d'exploitation, prés et bois situés en France, commune de Neuville Lez Beaulieu cadastrés lieudit " la Ferme du Seigneur " section A no 49, 50, 51, 52 et 53 et lieudit " Bois du Lieutenant ", no 274 ainsi qu'un pré sur la commune de Regniowez, lieudit " Clos Gobeau " cadastré section AC no 5, 6, 7, 8 et 9, il convient, rejetant l'exception d'incompétence soulevée par les consorts Y... au profit du juge belge, de dire compétent le juge français ;
Considérant que les règles concernant l'attribution préférentielle à Monsieur Emile Y... des immeubles de la succession de ses parents situés en France sont, en raison de l'objet de politique économique et sociale de l'institution, non pas soumises à la loi personnelle comme le soutiennent les consorts Y..., mais sont des lois de police du lieu de situation quelle que soit la compétence législative découlant de la division des biens successoraux entre meubles et immeubles, que la loi française est donc applicable, soit l'article 832 du code civil dans sa rédaction antérieure à la loi du 23 juin 2006 en raison de la date d'assignation antérieure au 1er janvier 2007 ;
Considérant que les consorts Y... soutiennent que Monsieur Emile Y... ne peut justifier d'une exploitation du bien dont il demande l'attribution, en raison de ses interventions ponctuelles comme entrepreneur de travaux agricoles, que l'intimé ne réside pas en France mais en Belgique d'où il ne peut participer effectivement à l'exploitation de la " Ferme du Seigneur " ;
Considérant que pour pouvoir prétendre à l'attribution préférentielle d'une exploitation agricole, il suffit d'y avoir effectivement participé, soit antérieurement, au jour de l'ouverture de la succession, soit postérieurement, la participation peut donc se situer à un moment quelconque, soit du vivant du défunt, soit pendant le cours de l'indivision ;
Considérant que les consorts Y... produisent une attestation établie en 2007 (Monsieur F...) relatant de 2003 à 2005, le fauchage du foin par Monsieur Emile Joseph Y... et son pressage par Monsieur Emile Y..., travaux que ce dernier facturait à son père, ils précisent qu'un autre entrepreneur agricole travaillait également en 2005 sur la ferme pour réaliser des travaux d'épandage d'engrais ;
Que Monsieur Emile Y... produit d'autres attestations, également datées de l'année 2007, relatant de manière précise et concordante que l'intimé effectuait des travaux agricoles et participait à l'exploitation, que les éléments versés par les consorts Y... ne contredisent pas les nombreuses attestations convergentes produites par Monsieur Emile Y... sur sa participation effective à l'exploitation, l'intervention additionnelle ou accessoire de ce dernier en qualité d'entrepreneur rémunéré par son père n'étant pas incompatible avec une participation à la mise en valeur de l'exploitation ;
Considérant que les consorts Y... disent alors que Monsieur Emile Y... ne peut fournir des garanties pour justifier de sa capacité à verser la soulte comptant, l'insolvabilité de l'attributaire en raison du risque qu'elle fait courir aux copartageants devant conduire au rejet de l'attribution préférentielle et ils ajoutent aussitôt s'interroger sur la constitutionnalité de la loi, qui ne prévoyant pas cette condition devrait préciser la nécessité pour l'attributaire de faire la preuve de sa solvabilité, que par ailleurs la loi n'envisageant pas de mesures conservatoires afin de s'assurer du paiement effectif de la soulte au moment où l'attribution préférentielle prend son entier effet, " cela est constitutif d'une rupture d'égalité et porte atteinte au droit de propriété " soulignent-ils, que cette interrogation qui n'est pas présentée dans un écrit distinct et motivé, ne soulève pas une question prioritaire de constitutionnalité ;
Considérant que les consorts Y... font des suppositions sur la situation financière de leur frère, au cas où il devrait une soulte, extrapolant leur conclusion sur son insolvabilité présumée à partir de l'affirmation d'un endettement auquel s'ajouteraient les charges fixes liées à l'activité d'entrepreneur agricole de Monsieur Emile Y..., du reproche de détournement de fonds de la succession, du non versement d'une somme de 84. 859 € correspondant à la reprise en Belgique de la maison familiale et de la condamnation de Monsieur Emile Y... dans diverses procédures à verser une somme de 4. 235, 25 €, que ces allégations n'étant pas démontrées, la théorie des consorts Y... est impuissante à rapporter l'incapacité de Monsieur Emile Y... à leur payer une soulte, s'il en devait une ;
Considérant que la réunion des autres conditions de l'article 832 du code civil n'étant pas sérieusement discutée, le jugement ayant accueilli la demande d'attribution préférentielle de Monsieur Emile Y... est confirmé ;
Considérant que les consorts Y... se plaignent enfin de la spoliation de l'indivision résultant du prix de 3. 200 € par an auquel Monsieur Emile Y... a été autorisé à vendre l'herbe provenant des parcelles successorales et ils justifient avoir trouvé un acquéreur prêt à verser en 2010 un prix de 4. 300 €, qu'il convient, infirmant l'ordonnance, d'autoriser Monsieur Emile Y... à vendre au prix de 4. 300 € en 2010 ;
Considérant que Monsieur Emile Y... ne rapporte pas la preuve d'une faute des consorts Y... permettant de conclure à la nature abusive ou injustifiée de leur appel même s'ils succombent pour l'essentiel, que les consorts Y... supportent les dépens et versent, chacun, à Monsieur Emile Y..., une somme de 2. 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Par ces motifs :
Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Charleville-Mézières du 8 janvier 2010, sauf en ce qu'il a dit irrecevable l'exception d'incompétence territoriale de la juridiction française,
Le réforme et statuant à nouveau,
Dit recevable l'exception d'incompétence internationale du juge français soulevée par Mesdames Agnès et Corinne Y... et Monsieur Eric Y... et la rejette,
Confirme l'ordonnance de la juge de la mise en état du 8 juillet 2009 sauf en ce qui concerne le prix de 3. 200 € par an auquel Monsieur Emile Y... est autorisé à exploiter dans le cadre d'une vente d'herbe les parcelles successorales pour ce qui concerne l'année 2010,
La réforme et statuant à nouveau,
Dit que Monsieur Emile Y... est autorisé à exploiter dans le cadre d'une vente d'herbe moyennant un prix de 4. 300 € en 2010,
Condamne Madame Agnès et Corinne Y..., Monsieur Eric Y... à verser, chacun, à Monsieur Emile Y... une somme de 2. 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette toute autre demande,
Condamne Madame Agnès et Corinne Y..., Monsieur Eric Y... aux dépens et accorde à la S. C. P. Delvincourt-Jacquemet-Caulier-Richard, avoué, le bénéfice du droit prévu par l'article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de reims
Formation : 1ère chambre civile - section ii
Numéro d'arrêt : 10/00304
Date de la décision : 25/03/2011
Sens de l'arrêt : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Type d'affaire : Civile

Références :

ARRET du 10 octobre 2012, Cour de cassation, civile, Chambre civile 1, 10 octobre 2012, 11-18.345, Publié au bulletin

Décision attaquée : DECISION (type)


Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel.reims;arret;2011-03-25;10.00304 ?
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