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05/01/2017 | FRANCE | N°14/02983

France | France, Cour d'appel de Pau, Chambre sociale, 05 janvier 2017, 14/02983


DT/CD



Numéro 17/00018





COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale







ARRÊT DU 05/01/2017









Dossier : 14/02983





Nature affaire :



Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution















Affaire :



[N] [U]



C/



HABITAT SUD ATLANTIC - OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE BAYONNE







































RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R Ê T



Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 05 Janvier 2017, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues ...

DT/CD

Numéro 17/00018

COUR D'APPEL DE PAU

Chambre sociale

ARRÊT DU 05/01/2017

Dossier : 14/02983

Nature affaire :

Demande d'indemnités liées à la rupture du contrat de travail CDI ou CDD, son exécution ou inexécution

Affaire :

[N] [U]

C/

HABITAT SUD ATLANTIC - OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE BAYONNE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R Ê T

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 05 Janvier 2017, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de Procédure Civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 07 Novembre 2016, devant :

Madame THEATE, Président

Madame COQUERELLE, Conseiller

Madame PEYROT, Conseiller

assistées de Madame HAUGUEL, Greffière.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [N] [U]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Comparant, assisté de Maître MENDIBOURE de la SCPA MENDIBOURE-CAZALET, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMÉ :

HABITAT SUD ATLANTIC - OFFICE PUBLIC DE L'HABITAT DE BAYONNE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Comparant en la personne de Madame [E] [I], responsable des ressources humaines, munie d'un pouvoir régulier, assistée de Maître BACHELET, avocat au barreau de BORDEAUX

sur appel de la décision

en date du 04 JUILLET 2014

rendue par le CONSEIL DE PRUD'HOMMES - FORMATION PARITAIRE DE BAYONNE

RG numéro : F 12/00439

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur [N] [U] a été engagé par la SA Habitat Sud Atlantic- Office Public de l'Habitation, le 21 juin 1994, par contrat à durée déterminée de 18 mois pour occuper un poste de technicien au sein du bureau d'études du service technique de cette société.

Le 22 décembre 1995, les parties ont conclu un nouveau contrat de travail, à durée indéterminée, sur un poste 'd'adjoint technique' catégorie M1 de la Convention collective des sociétés anonymes et fondation d'HLM.

Le 1er janvier 2001, le salarié a bénéficié d'une revalorisation de salaire et le 3 mai 2002 d'un reclassement en qualité 'd'adjoint technique qualifié' catégorie M2 indice 433. Le 23 janvier 2004, il a atteint l'indice 473 et le 1er octobre 2006 a été nommé chef d'agence [Localité 1] regroupant 2900 logements et de nombreux ERP sur un territoire de 14 communes.

Monsieur [N] [U] a poursuivi sa progression professionnelle en passant à l'indice 538 le 1er juillet 2008, et en accédant au statut cadre le 1er juillet 2009 position G6 avec un salaire brut de 2.947,54 €.

Le 1er janvier 2011, son contrat de travail a été transféré à l'Office Public de l'Habitat de Bayonne.

Le 28 décembre 2011, un avertissement était adressé à Monsieur [N] [U] au motif de 'difficultés importantes dans l'exercice de vos fonctions qui aboutissent à des dysfonctionnements...'. L'intéressé y répondait par lettre du 12 janvier 2012.

Le 7 février 2012, un second avertissement était adressé à ce responsable, qui par lettre du 16 février 2012, réclamait le retrait de cette sanction et dénonçait les pressions subies depuis des mois à l'origine d'un malaise vagal survenu le 13 février 2012, qu'il considérait comme caractérisant un harcèlement moral.

La sanction était retirée par lettre du directeur général le 29 février 2012, bien que les reproches sur la défaillance de son attitude managériale soient maintenus.

Le 6 mars 2012, Monsieur [N] [U] adhérait au syndicat CFE-CGC et présentait sa candidature au poste de représentant du CHSCT dans la catégorie 'agents de maîtrise et cadres' mais n'était pas élu.

Le 19 avril 2012, il recevait une lettre de convocation à un entretien préalable en vu d'un éventuel licenciement fixé au 3 mai 2012.

Le 27 avril 2012, Monsieur [N] [U] sollicitait la saisine de la commission de discipline comme l'y autorisait l'article 38 du décret 2011-636 du 8 juin 2011 applicable aux personnels des offices publics de l'habitat.

Lors de l'entretien préalable qui a eu lieu le 3 mai 2012, il était précisé au salarié qu'à compter de cette date, il était dispensé d'activité avec maintien de son salaire.

Le 10 mai 2012, Monsieur [N] [U] était convoqué devant la commission de discipline qui devait se réunir le 22 mai 2012.

Le 1er juin 2012, Monsieur [N] [U] se voyait notifier la sanction de la rétrogradation prise sur avis conforme de la commission de discipline, emportant modification de son contrat de travail et une reclassification dans un emploi de 'chargé d'opération à la Direction du Développement et du Patrimoine'. Il était précisé qu'en cas de refus de sa part, un licenciement serait envisagé.

Monsieur [N] [U] ayant refusé cette 'rétrogradation' il était une nouvelle fois convoqué, le 15 juin 2012, à se présenter à un nouvel entretien préalable fixé au 3 juillet 2012. Le salarié sollicitait à nouveau la réunion de la commission de discipline laquelle se réunissait le 10 juillet 2012 et se prononçait en faveur d'un licenciement pour faute (deux avis), voire pour faute grave (deux avis).

Le 12 juillet 2012, le comité d'entreprise se réunissait à son tour et émettait un avis favorable au licenciement pour faute grave par 4 voix contre 2.

Le 19 juillet 2012, l'employeur saisissait la DIRECCTE Aquitaine d'une demande d'autorisation de licencier Monsieur [N] [U]

Après enquête et par lettre du 9 août 2012, l'inspecteur du travail refusait d'accorder cette autorisation. Monsieur [N] [U] était aussitôt placé en congés payés et RTT jusqu'au 7 septembre 2012.

Entre-temps, la période de protection de Monsieur [N] [U] (en sa qualité de candidat aux élections professionnelles) avait pris fin le 5 septembre 2012 et Monsieur [N] [U] avait rejoint son poste. Le 7 septembre 2012, il faisait l'objet d'une nouvelle convocation à un entretien préalable et d'une mise à pied conservatoire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 21 septembre 2012, Monsieur [N] [U] se voyait notifier son licenciement pour faute grave.

Le 19 octobre 2012, Monsieur [N] [U] saisissait le conseil de prud'hommes de Bayonne, section encadrement, pour obtenir la condamnation de la SA Habitat Sud Atlantic au paiement de son salaire pendant la période de mise à pied, des indemnités légales de préavis et de licenciement, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi qu'une indemnité de procédure et la condamnation de la partie adverse aux dépens.

La tentative de conciliation ayant échoué, l'affaire et les parties étaient renvoyées devant la formation de jugement où le salarié reprenait ses demandes initiales tandis que la SA Habitat Sud Atlantic concluait au débouté du demandeur, à sa condamnation aux dépens et au versement d'une indemnité de procédure.

Par jugement du 4 juillet 2014, le conseil de prud'hommes de Bayonne, statuant en formation paritaire, a débouté Monsieur [N] [U] de l'ensemble de ses prétentions et l'a condamné aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité de procédure de 75 €.

Par lettre recommandée avec accusé de réception expédiée le 29 juillet 2014, l'avocat de Monsieur [N] [U] a fait appel de ce jugement au nom et pour le compte de son client à qui le jugement avait été notifié le 11 juillet 2014.

En l'état de ses dernières conclusions enregistrées le 31 octobre 2016 au greffe de la cour, reprises oralement à l'audience du 7 novembre 2016 et auxquelles il y a lieu de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, Monsieur [N] [U] demande à la cour :

* d'annuler le jugement dont appel pour défaut de motivation ;

* de juger que le licenciement de Monsieur [N] [U] est nul sur le fondement de l'article L. 1152-3 du code du travail et pour détournement du statut protecteur des salariés candidats à une élection au CHSCT, et de juger en tous cas que le licenciement est constitutif de pratiques caractérisant la mauvaise foi de l'employeur ;

Subsidiairement :

* de juger le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

En toute hypothèse :

* de condamner la SA Habitat Sud Atlantic à lui payer les montants suivants :

- 2.296,16 € de rappel de salaire pour la période de mise à pied conservatoire du 7 septembre 2012 au 25 septembre 2012 ;

- 10.366,95 € bruts à titre d'indemnité de préavis ;

- 18.890,88 € d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 200.000 € de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et harcèlement moral ;

- 3.000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

* de condamner la SA Habitat Sud Atlantic aux entiers dépens et au paiement d'un montant de 3.000 € à titre d'indemnité de procédure

Sur la nullité du jugement

Monsieur [N] [U] invoque les dispositions de l'article 455 alinéa 1 du code de procédure civile et fait valoir que le jugement du conseil de prud'hommes de Bayonne est dépourvu de toute analyse, tant en ce qui concerne l'argumentation du demandeur que les motifs du licenciement qui sans autre motivation a déclaré les fautes 'avérées'.

Sur la nullité du licenciement

Monsieur [N] [U] fonde cette demande sur deux moyens : le détournement du statut protecteur d'un salarié candidat à une élection d'une part, le harcèlement moral, d'autre part.

Sur le premier moyen, Monsieur [N] [U] fait valoir que de parfaite mauvaise foi, l'employeur a attendu l'expiration de la période de protection pour le licencier, en invoquant des faits qui se sont produits au cours de cette période.

Il rappelle qu'au regard de la candidature qu'il avait régularisée, la période de protection découlant de l'application de l'article L. 2411-10 du code du travail (six mois) venait à expiration le 5 septembre 2012.

Or, la chronologie des faits révèle que l'employeur a, dès le 19 avril 2012, mis en oeuvre une procédure de licenciement à laquelle le refus de l'inspecteur du travail a mis un terme et que le jour même de la fin de la protection dont il bénéficiait une nouvelle procédure de licenciement pour faute grave a été diligentée. Monsieur [N] [U] considère que ce comportement caractérise un détournement de procédure et en tous cas, la mauvaise foi de l'employeur.

Il ajoute que le fait de ne pas l'avoir réintégré à son poste, après la décision du 9 août 2012 de l'inspecteur du travail, caractérise une manoeuvre frauduleuse et un délit d'entrave au sens de la jurisprudence de la Cour de cassation.

Il relève enfin, que dès lorsqu'il n'a plus occupé son poste à partir du 19 avril 2012, les motifs de son licenciement sont nécessairement antérieurs à cette date et à la saisine le 23 juillet 2012 de l'inspecteur du travail par l'employeur.

Or, certains des motifs notifiés dans le cadre de la seconde procédure de licenciement (après expiration de la période de protection) ont sciemment été omis des griefs soumis à l'appréciation de l'inspecteur du travail ce qui d'une part, les rend irrecevables du fait de la prescription, en tous cas les disqualifient en tant que faute grave, enfin, atteste de la mauvaise foi de la SA Habitat Sud Atlantic.

Sur le harcèlement moral, Monsieur [N] [U] fait état d'une brusque rupture dans l'évolution de sa carrière à compter de 2011 après qu'il ait fait part de ses craintes quant à une inadéquation des moyens, aux charges et impératifs de qualité de l'agence qu'il dirigeait. Les agissements de harcèlement moral se sont alors multipliés :

* avertissements hâtifs injustifiés et vexatoires, sur lesquels l'employeur a d'ailleurs pour certains été contraint de revenir (notamment celui qui lui avait été adressé pour avoir dénoncé des faits de harcèlement moral),

* critiques et surveillance constante ayant pour objet de l'humilier, ce qui a entraîné une dégradation de son état de santé (malaise vagal du 13 février 2012 notamment),

* mise en place d'une procédure disciplinaire accompagnée d'une rétrogradation et d'un déclassement, mise à l'écart,

* procédure de licenciement abusive et frauduleuse enfin.

Sur l'absence de cause réelle et sérieuse

Monsieur [N] [U] reprend un à un les motifs énoncés dans la lettre de licenciement pour les contester :

* sur la teneur des SMS envoyés aux représentants du personnel, Monsieur [N] [U] les explique par le fait que Monsieur [K], qu'il avait choisi pour l'assister et le défendre dans le cadre de la procédure de licenciement, et à qui il s'était confié, a siégé au sein de la commission de discipline et a donné un avis favorable à son licenciement, ce qu'il a considéré comme une atteinte à ses droits et légitimé sa vive émotion. Il en va de même de Monsieur [E] qui l'avait assuré de son soutien et n'en a rien fait. En aucun cas, ces propos ne peuvent s'analyser en une violation du secret des délibérations puisque Monsieur [N] [U] n'y assistait pas et qu'il affirme en avoir été informé par l'employeur.

* sur les manquements répétés dans son travail (absence de mise en place d'un 'état des lieux informatiques' et d'une classification des emplois), l'appelant expose que la classification des emplois ne relevait pas de ses fonctions et que les états des lieux étaient régulièrement portés sur informatique, qu'aucun délai ne lui avait été assigné et qu'il était connu pour sa célérité et son sens du service.

***********

Suivant conclusions enregistrées le 7 novembre 2016, reprises oralement à l'audience du même jour, et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la SA Habitat Sud Atlantic demande à la cour de :

* débouter Monsieur [N] [U] de sa demande de nullité du jugement entrepris ;

* débouter Monsieur [N] [U] de sa demande de nullité du licenciement fondée sur les dispositions de l'article L. 1152-3 du code du travail ;

* débouter Monsieur [N] [U] de ses demandes fondées sur la mauvaise foi de la SA Habitat Sud Atlantic, sur le harcèlement moral ainsi que sur la violation du statut protecteur ;

* constater que le licenciement de Monsieur [N] [U] est régulier, bien-fondé, et repose sur une faute grave caractérisée.

En conséquence :

* débouter Monsieur [N] [U] de son appel, et de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

* confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et au surplus ;

* condamner Monsieur [N] [U] à verser à la SA Habitat Sud Atlantic la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance.

Sur la demande de nullité du jugement du 4 juillet 2014

La SA Habitat Sud Atlantic fait tout d'abord valoir que ce moyen est sans emport puisqu'en toute hypothèse, la cour doit statuer sur le fond par l'effet dévolutif de l'appel.

Sur le fond l'employeur considère que la décision rendue par les premiers juges est suffisamment motivée.

Sur la nullité du licenciement

L'employeur conteste tout détournement de procédure et du statut protecteur dont bénéficiait Monsieur [N] [U], en soulignant le nombre de fois où le salarié a bénéficié d'un examen contradictoire de sa situation et ce, aussi bien dans le cadre des instances disciplinaires que dans le cadre des instances représentatives du personnel.

Sur la non réintégration de Monsieur [N] [U] à la suite de la décision de l'inspecteur du travail, la SA Habitat Sud Atlantic invoque la période estivale de congés et la nécessaire réorganisation imposée par le retour de Monsieur [N] [U].

Sur la régularité du licenciement, la SA Habitat Sud Atlantic fait en premier lieu valoir que l'employeur ne peut pas soumettre une demande d'autorisation de licenciement à l'inspecteur du travail sur des faits qui n'auraient pas fait l'objet de la procédure disciplinaire contradictoire exigée par les textes et notamment de la saisine pour avis du comité d'entreprise.

Si des faits nouveaux surviennent après consultation du comité d'entreprise la procédure doit être reprise et le comité d'entreprise à nouveau consulté. En l'espèce, et compte tenu des délais, si cette procédure avait été suivie, l'inspecteur du travail n'aurait pu que constater la fin de la période de protection au moment où il aurait été saisi. De plus, l'employeur qui disposait d'un délai de deux mois pour invoquer des faits de nature disciplinaire n'était pas obligé de reprendre immédiatement cette procédure. La SA Habitat Sud Atlantic en déduit d'une part, qu'elle n'a pas manqué à ses obligations, d'autre part, que l'inspecteur du travail s'est très régulièrement abstenu d'évoquer dans sa décision des éléments nouveaux survenus avant sa saisine mais qui n'étaient pas énoncés dans la demande d'autorisation de licenciement.

La SA Habitat Sud Atlantic fait enfin valoir qu'à expiration de la période de protection, elle a retrouvé le droit de licencier sans autorisation préalable.

Elle en déduit que dans le cadre de l'exercice de ce droit, elle était fondée à motiver le licenciement pour faute grave qu'elle envisageait de prononcer à l'encontre de Monsieur [N] [U] sur les faits nouveaux survenus pendant la période de protection mais après consultation du comité d'entreprise et qui ne faisaient pas partie de la saisie de l'inspecteur du travail.

Elle considère en revanche que le salarié n'est pas fondé à se prévaloir d'un statut protecteur dont il ne bénéficie plus lors de la mise en oeuvre de la procédure de licenciement.

Sur le harcèlement moral ensuite, la SA Habitat Sud Atlantic le conteste, affirme qu'il ne repose que sur de vagues allégations, et que l'ensemble des pièces produites démontre à l'inverse que l'employeur a tenté à de multiples reprises de parvenir à une solution acceptable dans le cadre d'une discussion ouverte et loyale. Quant aux répercussions sur la santé de Monsieur [N] [U] elles ne sont en rien démontrées, le certificat médical produit étant sans rapport avec l'activité professionnelle ou les conditions de travail du salarié, le malaise vagal dont il atteste étant survenu dans un contexte de gastro-entérite.

Sur les motifs du licenciement

La SA Habitat Sud Atlantic rappelle que Monsieur [N] [U] a été licencié pour faute grave, aux motifs :

* de messages irrespectueux, insultants, mensongers et portant atteinte à la liberté d'expression de ces personnes envoyés par SMS à des collègues, exerçant des fonctions électives dans des instances représentatives,

* de dysfonctionnements importants dans le service dont Monsieur [N] [U] avait la charge, liés au non-respect de consignes et procédures que la direction avait pourtant demandées de mettre en place (saisie informatique des états des lieux, non-application de la classification des emplois adoptée par accord collectif en 2011) et ce en dépit d'avertissements précédemment adressés à cet égard, dont l'employeur déduit la preuve de l'insubordination manifestée par le salarié.

Pour l'employeur ces fautes graves sont très largement établies par les pièces produites. Il relève d'ailleurs que Monsieur [N] [U] ne conteste pas les insultes et menaces mais se contente vainement d'en minimiser la portée. Quant aux carences professionnelles du salarié, elles sont établies par les rapports annuels d'évaluation attestant des difficultés rencontrées par Monsieur [N] [U] en dépit des formations dont il avait bénéficié et par les améliorations rapides et significatives obtenues à la suite du remplacement de ce dernier, par la simple mise en place de l'organisation préconisée par la hiérarchie.

MOTIFS

Sur la nullité du jugement

Selon l'article 145 alinéa 1 du code de procédure civile :

'Le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens. Cet exposé peut revêtir la forme d'un visa des conclusions des parties avec l'indication de leur date. Le jugement doit être motivé'.

En l'occurrence, quoique de façon particulièrement succincte et peu circonstanciée, le jugement dont appel n'en est pas moins motivé, en sorte qu'il y a lieu de débouter l'appelant de sa demande.

La cour n'en demeure pas moins saisie de l'entier litige par l'effet dévolutif et l'appel non limité interjeté par Monsieur [N] [U].

Sur la nullité du licenciement

Monsieur [N] [U] invoque en premier lieu les dispositions de l'article L. 1152-3 du code du travail et le harcèlement moral dont il déclare avoir été victime.

Le harcèlement moral est caractérisé par des agissements répétés qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte aux droits du salarié et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Il résulte des dispositions des articles L. 1152-1, L. 1152-2 et L. 1154-1 du code du travail, que dès lors que le salarié établit la matérialité de faits constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

A cet égard Monsieur [N] [U] invoque :

- une surcharge de travail ;

- deux avertissements injustifiés n'ayant eu pour objet que de l'humilier et de mettre artificiellement en place un dossier disciplinaire, qui lui ont été délivrés à quelques semaines d'intervalle ;

- une surveillance constante matérialisée par l'obligation de rendre compte de l'ensemble de ses activités, obligation qui n'était imposée à aucun autre cadre ;

- la mise en oeuvre d'une procédure disciplinaire dépourvue de toute justification.

- les incidences sur sa santé l'ayant conduit jusqu'à une hospitalisation.

Cependant, la surcharge de travail n'est ni précisée, ni établie. Il importe également de rappeler qu'en tant que cadre, il incombait à Monsieur [N] [U] d'organiser son travail et celui des personnes placées sous ses ordres. Or, il ressort des écritures et des pièces que l'appelant avait un réel problème de management et d'organisation de son travail sur lequel l'employeur avait attiré son attention notamment lors des entretiens d'évaluation de 2010 et 2011.

L'avertissement délivré le 28 décembre 2011 par la SA Habitat Sud Atlantic à Monsieur [N] [U] était motivé par le refus de celui-ci de se remettre en cause, son attitude négative et une erreur de positionnement vis-à-vis de ses équipes incompatible avec l'exercice de ses fonctions.

Cette lettre d'avertissement fait suite d'une part, à l'avis que Monsieur [N] [U] avait demandé aux personnels placés sous ses ordres, d'exprimer sur 'la confiance' qu'elle lui accordait à la suite de l'entretien qu'il avait eu avec la direction sur son aptitude à diriger l'agence, d'autre part, au refus affiché en réunion par Monsieur [N] [U] de mettre en place les mesures souhaitées par la direction en invoquant un manque d'effectif. La réalité de ces griefs n'est pas remise en cause par le salarié. En effet, dans sa lettre en réponse du 12 janvier 2012, Monsieur [N] [U] tente seulement de minimiser la portée de son positionnement, en assurant l'employeur de sa loyauté, ce qui est sans incidence sur la justification de l'avertissement délivré, qui au vu de la teneur des griefs reprochés était légitime et approprié. Il importe en outre de relever que cet avertissement est rédigé en termes mesurés et objectifs et constitue dès lors une décision étrangère à tout harcèlement moral.

Le second avertissement du 7 février 2012 avait notamment trait à une absence injustifiée de Monsieur [N] [U] à une réunion de chantier. A la suite des explications données par le salarié, l'employeur a par lettre du 29 février 2012 retiré ce grief dans des termes parfaitement clairs : 'Vos arguments éclairent d'un jour nouveau les faits évoqués. Soyez sûr que j'en tiendrai compte pour évoquer directement avec l'administrateur la situation dans laquelle il vous a mis en cause injustement'.

Le second grief invoqué dans l'avertissement du 7 février 2012 portait sur l'injonction faite à Monsieur [N] [U] de traiter les réclamations des locataires dans des délais raisonnables (15 jours), et 'que les travaux d'entretien votés au budget 2012 du ressort de votre agence soient programmés sans délai et que vous mobilisiez l'ensemble de vos collaborateurs sur la gestion des priorités que vous définirez'.

L'employeur a maintenu cette exigence dans sa lettre du 29 février 2012, justifiée par la persistance des difficultés rencontrées par Monsieur [N] [U] pour diriger et organiser le travail des équipes dont il avait la responsabilité (annexe n° 18 de la SA Habitat Sud Atlantic du 10 novembre 2011). Ces difficultés ne sont pas discutées par l'appelant. Dans ce contexte, le compte rendu exigé par l'employeur sur les actions effectivement mises en place pour y remédier apparaît d'autant plus justifié que ces difficultés étaient récurrentes au moins depuis 2010 (voir grille d'entretien annuel).

Quant au malaise vagal ayant conduit le 13 février 2012 Monsieur [N] [U] à l'hôpital, les pièces médicales produites attestent qu'il avait une cause totalement exogène. De même, aucune pièce ou explication du salarié ne permet de relier l'arrêt de travail 'pour état dépressif' du 4 au 20 mai 2012 à ses conditions de travail.

En conclusion, il apparaît que les faits allégués par Monsieur [N] [U] ou bien ne sont pas établis (surcharge de travail, dégradation de sa santé en lien avec ses conditions de travail) ou bien sont justifiés par l'exercice du pouvoir de sanction de l'employeur et trouvent leur cause dans des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement (avertissements des 28 décembre 2011 et 7 février 2012).

Il en découle que la demande de nullité du licenciement de Monsieur [N] [U] pour cause de harcèlement moral n'est pas fondée.

Sur les motifs du licenciement

Monsieur [N] [U] a été licencié par lettre recommandée du 21 septembre 2012 ainsi motivée :

'(...) Vous avez 14 juillet dernier, adressé à certains de vos collègues, élus des instances représentatives du personnel, des messages irrespectueux et insultants par SMS. Les propos tenus les mettent en cause, mais également menacent leur liberté d'expression en tant que salariés et en tant que membres de ces instances. Exemple : « arrête de te foutre de ma gueule. Je sais qui sont les quatre traîtres qui ont voté pour mon licenciement pour faute grave lors du CE ».

Ces messages insultants ont été envoyés sur les téléphones professionnels, et s'appuient sur la violation du secret des débats du comité d'entreprise.

Au demeurant, ces messages comportent des informations fausses et des propos diffamants nous concernant, en ce qui concerne nos supposées intentions de licencier Monsieur [E] et de sanctionner à trois reprises Madame [A], deux de vos collaborateurs destinataires des SMS.

Ces faits sont graves, car ils matérialisent des manquements aux principes fondamentaux : l'insulte, la violation du secret des délibérations des réunions des instances représentatives du personnel, la pression sur leurs membres, la violation de leur vie personnelle, professionnelle et syndicale, les mensonges ne sont pas acceptables.

Vous avez outrepassé vos droits et comprendrez que les membres du comité de direction ne puissent plus être en capacité de travail avec un cadre bafouant les principes essentiels des libertés individuelles et du fonctionnement des instances représentant le personnel. Ces faits caractérisent en outre un total manquement dans l'appréciation des valeurs et du positionnement à avoir en qualité de cadre.

Vous ne nous avez apporté au cours de l'entretien, aucun élément permettant de modifier notre analyse de ces faits et de la situation qui en résulte.

Ce comportement fautif fait suite à des manquements répétés dans le travail.

Depuis votre dispense d'activité, l'intérim sur votre poste a permis de porter à notre connaissance des dysfonctionnements importants de votre service tirés essentiellement du non-respect des consignes et procédures que nous vous avions demandé de mettre en place.

Vous n'avez pas appliqué :

* certaines décisions stratégiques telles que la saisie informatique des états des lieux, au motif que les collaborateurs ne disposaient ni du temps, ni de la formation nécessaires, alors que le chef d'agence intérimaire est parvenu à les faire mettre en oeuvre rapidement.

* certaines dispositions relatives à l'organisation de l'entreprise : la classification des emplois adoptée par accord collectif en 2011 n'était pas appliquée à l'agence [Localité 1], aucune distinction n'étant faite entre les emplois d'assistantes de gestion et les chargés d'activité.

Vous n'avez pas tenu compte des différents avertissements qui vous avaient déjà été adressés à cet égard et qui vous rappelaient la nécessité de vous mettre en règle avec les instructions de votre hiérarchie. Votre insubordination n'est pas acceptable.

Ces faits nouveaux s'ajoutent à des fautes déjà établies, telles que le non traitement de l'agression de Madame [I] [Y], personnel d'immeuble en janvier 2012, et la diffusion à vos équipes de documents confidentiels dans le cadre du groupe de travail « adapter notre présence sur le terrain » en mars 2012, à l'occasion desquelles nous avons pu déjà constater, outre vos manquements graves, votre incapacité à appréhender la réalité du positionnement d'un cadre ainsi que votre absence de remise en cause personnelle.

Vous comprendrez que les faits exposés ci-avant constituent en eux-mêmes, mais aussi par leur répétition, un motif légitime de licenciement pour faute grave.

Votre constance à ne pas vous remettre en cause, ni à analyser votre comportement et vos actions ne nous permet plus d'envisager une autre solution.

Nous vous signalons à cet égard qu'en raison de la gravité des faits qui vous sont reprochés, le salaire correspondant à la période pendant laquelle nous vous avons mis à pied à titre conservatoire ne vous sera pas versé. (...)'.

Il est acquis aux débats qu'à la suite de son adhésion le 6 mars 2012,au syndicat CFE-CGC Monsieur [N] [U] a présenté sa candidature au poste de représentant du CHSCT dans la catégorie 'agents de maîtrise et cadres' mais n'a pas été élu.

Aux termes de l'article L. 2411-10 du code du travail :

'L'autorisation de licenciement est requise pour le candidat aux fonctions de membres élus du comité d'entreprise, au premier ou au deuxième tour, pendant les six mois suivant l'envoi des listes de candidatures à l'employeur.

Cette autorisation est également requise lorsque la lettre du syndicat notifiant à l'employeur la candidature aux fonctions de membre élu du comité d'entreprise ou de représentant syndical au comité d'entreprise a été reçue par l'employeur ou lorsque le salarié a fait la preuve que l'employeur a eu connaissance de l'imminence de sa candidature avant que le candidat ait été convoqué à l'entretien préalable au licenciement'.

Selon l'article L. 2411-13 du même code :

'Le licenciement d'un représentant du personnel au comité d'hygiène de sécurité et des conditions de travail ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail.

Cette autorisation est également requise pour le salarié ayant siégé en qualité de représentant du personnel dans ce comité, pendant les six premiers mois suivant l'expiration de son mandat ou la disparition de l'institution'.

Il est admis et non discuté que le salarié, qui a été candidat aux fonctions de membre élu du CHSCT, doit à ce titre bénéficier de la protection prévue par les articles précités en faveur des candidats aux élections professionnelles, et ce quel qu'aient pu être les résultats des élections.

En l'occurrence, il ne fait pas débat que la période de protection dont bénéficiait Monsieur [N] [U] a expiré le 5 septembre 2012. Il en découle que le salarié n'en bénéficiait plus au moment de la mise en oeuvre de la procédure de licenciement qui a débuté avec sa convocation à un entretien préalable notifié par lettre du 7 septembre 2012.

Cependant, si une fois la période de protection expirée, l'employeur retrouve la possibilité de licencier le salarié dans les conditions de droit commun, c'est à la condition qu'il n'ait pas contourné le statut protecteur du salarié en laissant volontairement passer la période de protection. Pour ce motif, le salarié ne peut pas être licencié pour des faits commis lors de la période de protection qui auraient dû être soumis à l'appréciation de l'inspecteur du travail. En outre, les faits déjà invoqués par l'employeur devant l'inspecteur du travail et qui ont donné lieu à un refus d'autorisation de licencier ne peuvent pas être invoqués comme motif de rupture après l'expiration de la période de protection du salarié.

Ainsi en est-il des reproches faits à Monsieur [N] [U] dans la lettre de licenciement précitée relatifs au 'non traitement de l'agression de Madame [I] [Y], personnel d'immeuble en janvier 2012' et à 'la diffusion à vos équipes de documents confidentiels dans le cadre du groupe de travail « adapter notre présence sur le terrain » en mars 2012' qui avaient été expressément évoqués au soutien de la demande d'autorisation de licencier présentée à l'inspecteur du travail et que celui-ci avait considéré comme insuffisants pour justifier un licenciement. Au demeurant, lors de la mise en oeuvre de la dernière procédure de licenciement, le 7 septembre 2012, ces faits fautifs étaient prescrits.

Le salarié n'ayant plus occupé son poste de travail à compter du 3 mai 2012, les 'décisions stratégiques telles que la saisie informatique des états des lieux' et les 'dispositions relatives à l'organisation de l'entreprise' telles que' la classification des emplois adoptée par accord collectif en 2011' qui 'n'était pas appliquée à l'agence [Localité 1]' sont également des motifs que l'employeur a reconnu avoir découvert 'depuis votre dispense d'activité' et à la faveur de 'l'intérim sur votre poste' sans démontrer, ni même soutenir qu'il n'en était pas informé au moment de la mise en oeuvre de la procédure disciplinaire ayant abouti au refus d'autorisation de licencier Monsieur [N] [U] opposé par l'inspecteur du travail, et alors que deux mois 'd'intérim' s'étaient déjà écoulés à cette date.

Ces griefs qui n'ont pas été évoqués par l'employeur dans le cadre de la procédure de licenciement soumise à autorisation, ne peuvent dès lors plus l'être après expiration de la période de protection et étaient en tout état de cause prescrits le 7 septembre 2012.

S'agissant en dernier lieu des faits du 14 juillet 2012, il est établi que les 14 et 16 juillet 2012, Monsieur [N] [U] a adressé à Monsieur [R] [K] - qui l'avait assisté dans le cadre de la procédure disciplinaire - à Monsieur [G] [E] et à Madame [F] [A] des SMS de réprobations et menaces en relation avec le vote présumé de ces membres du comité d'entreprise en faveur de son licenciement pour faute grave. Ces trois salariés ont immédiatement informé l'employeur de ces messages. La SA Habitat Sud Atlantic en était en conséquence nécessairement informée lorsqu'elle a saisi la DIRECCTE le 19 juillet 2016, ce que l'intimée ne conteste pas. Elle soutient cependant qu'elle ne pouvait faire figurer ce motif de licenciement dans sa demande à l'inspection du travail sans devoir reprendre la procédure de consultation tant de la commission de discipline que du comité d'entreprise, ce qui, au regard des délais applicables, et de la période d'été, aurait nécessairement conduit au-delà de la période de protection.

L'argument tiré de la longueur des délais est cependant discutable au regard de leur abrégement en cas de mise à pied du salarié protégé. Or, il sera relevé que la SA Habitat Sud Atlantic a immédiatement mis à pied , Monsieur [N] [U],dès la période de protection expirée, ce qu'elle aurait donc dû faire dès le mois de juillet 2012, puisque la situation était strictement identique. De plus et dans la mesure où il n'appartient pas à l'employeur de juger de la compétence de l'inspecteur du travail pour statuer sur la demande d'autorisation de licenciement de l'employeur ce moyen est dépourvu de pertinence et ne pouvait en tout état de cause valider la décision de l'employeur de ne pas soumettre à l'appréciation de l'inspecteur du travail des faits commis pendant la période de protection.

Il sera enfin observé qu'une nouvelle convocation de la commission de discipline et du comité d'entreprise préalable à la saisine de l'inspecteur du travail ne pouvait avoir aucune incidence sur l'avis de ces instances et sur les droits du salarié protégé puisque tant la commission de discipline que le comité d'entreprise s'étaient déjà prononcés en faveur du licenciement pour faute grave de Monsieur [N] [U].

L'inspecteur du travail qui dans le cadre de son enquête avait été informé de l'incident du 14 juillet 2012, n'a cependant pas pu en tenir compte dans son appréciation puisqu'il n'en avait pas été saisi par l'employeur.

Il en découle :

* ou bien que l'employeur ne considérait pas les faits litigieux du 14 et 16 juillet 2012 comme suffisamment graves pour être soumis à l'appréciation de l'inspecteur du travail saisi d'une demande d'autorisation de licenciement pour faute grave et dans ce cas ce motif ne pouvait être invoqué comme un grief justifiant un licenciement pour faute grave après expiration de la période de protection,

* ou bien que l'employeur a sciemment omis de mentionner ce grief dans sa demande d'autorisation de licenciement pour pouvoir l'invoquer dès l'expiration de la période de protection, et ce quelle qu'ait pu être la décision de l'inspecteur du travail, ce qui caractérise un contournement de la procédure de protection.

En l'occurrence, cette seconde explication est confortée par les faits suivants :

* les SMS adressés aux membres du comité d'entreprise et de la commission de discipline constituent le principal motif du licenciement de Monsieur [N] [U] dans la lettre du 21 septembre 2012 ;

* la SA Habitat Sud Atlantic s'est employée par tous moyens à empêcher Monsieur [N] [U] de reprendre son poste de travail à partir du 3 mai 2012 jusqu'à la date de son licenciement ;

* la dernière procédure de licenciement a été mise en oeuvre le jour même de son retour dans l'entreprise, soit le 7 septembre 2012 où il s'est vu à la fois convoquer à un entretien préalable et mis à pied.

Quoiqu'il en soit et dans les deux cas, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les demandes financières

Monsieur [N] [U] ayant été licencié sans cause réelle et sérieuse, il est en droit de percevoir les sommes qu'il réclame au titre des rappels de salaire, indemnité compensatrice de préavis et indemnité conventionnelle de licenciement, à savoir :

* 2.296,16 € bruts à titre de rappel de salaire pendant la période de mise à pied (7 septembre 2012 au 21 septembre 2012) ;

* 10.366,95 € bruts d'indemnité de préavis équivalant à trois mois (article 17 de la Convention collective nationale des personnels des sociétés anonymes et fondations HLM) ;

* 18.890,88 € d'indemnité conventionnelle de licenciement (article 34 de la Convention collective précitée).

S'agissant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, il importe de tenir compte de l'ancienneté du salarié, des circonstances de son licenciement prononcé à tort pour faute grave et du fait qu'en dépit de recherches entreprises et dont il justifie, Monsieur [N] [U] n'a pas retrouvé d'emploi pendant un an, ce qui l'a conduit à s'orienter vers une activité d'auto-entrepreneur. Au vu de ces éléments, il est justifié de fixer le montant des dommages et intérêts dus par la SA Habitat Sud Atlantic à la somme de 65.000 €.

Au regard de l'ancienneté du salarié et du nombre de salariés employés par la SA Habitat Sud Atlantic les dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail sont applicables. La SA Habitat Sud Atlantic sera en conséquence condamnée à rembourser au Pôle Emploi dont dépendait Monsieur [N] [U] les indemnités de chômage versées du jour de son licenciement au jour du jugement du conseil de prud'hommes, dans la limite de 6 mois d'indemnités, en application des dispositions précitées.

Sur les dépens et l'application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile

Il incombe à la SA Habitat Sud Atlantic qui succombe de supporter la charge des dépens de première instance et d'appel et de verser à Monsieur [N] [U] la somme de 2.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la demande de l'intimée fondée sur les mêmes dispositions légales étant rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort et par arrêt mis à disposition au greffe,

DÉBOUTE Monsieur [N] [U] de sa demande tendant à faire déclarer nul le jugement dont appel ;

INFIRME ce jugement dans toutes ses dispositions ;

ET STATUANT À NOUVEAU :

DÉBOUTE Monsieur [N] [U] de sa demande tendant à faire déclarer son licenciement nul sur le fondement de l'article L. 1152-3 du code du travail ;

JUGE que ce licenciement est sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE en conséquence la SA Habitat Sud Atlantic à payer à Monsieur [N] [U] les sommes suivantes :

- 2.296,16 € (deux mille deux cent quatre-vingt-seize euros et seize centimes) bruts à titre de paiement de salaire pendant la période de mise à pied ;

- 10.366,95 € (dix mille trois cent soixante-six euros et quatre-vingt-quinze centimes) bruts à titre d'indemnité de préavis ;

- 18.890,88 € (dix huit mille huit cent quatre-vingt-dix euros et quatre-vingt-huit centimes) à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement ;

- 65.000 € (soixante cinq mille euros) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE SA Habitat Sud Atlantic à rembourser aux organismes intéressés (Pôle Emploi) les indemnités de chômage versées à Monsieur [N] [U] du jour de son licenciement au jour du jugement du conseil de prud'hommes, dans la limite de 6 mois d'indemnités, en application des dispositions de l'article L. 1235-4 du code du travail,

DIT que conformément aux dispositions des articles L. 1235-4 et R. 1235-2 du Code du Travail, une copie du présent arrêt sera adressée par le greffe au Pôle Emploi du lieu où demeure le salarié,

CONDAMNE la SA Habitat Sud Atlantic à payer à Monsieur [N] [U] une indemnité de procédure de 2.000 € (deux mille euros) ;

REJETTE la demande de la SA Habitat Sud Atlantic à ce titre ;

CONDAMNE la SA Habitat Sud Atlantic aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Arrêt signé par Madame THEATE, Présidente, et par Madame HAUGUEL, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA GREFFIÈRE,LA PRÉSIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 14/02983
Date de la décision : 05/01/2017

Références :

Cour d'appel de Pau 3S, arrêt n°14/02983 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2017-01-05;14.02983 ?
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