PC/AM
Numéro 16/4848
COUR D'APPEL DE PAU
1ère Chambre
ARRÊT DU 06/12/2016
Dossier : 14/02543
Nature affaire :
Demande d'exécution de travaux, ou de dommages-intérêts, formée par le maître de l'ouvrage contre le constructeur ou son garant, ou contre le fabricant d'un élément de construction
Affaire :
[F] [J]
[N] [W] épouse [J]
C/
SAS [V]
SELARL BRENAC ET ASSOCIES
SA AXA FRANCE IARD
Grosse délivrée le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
A R R Ê T
prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 06 décembre 2016, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
* * * * *
APRES DÉBATS
à l'audience publique tenue le 26 septembre 2016, devant :
Monsieur CASTAGNE, magistrat chargé du rapport,
assisté de Madame VICENTE, greffier, présente à l'appel des causes,
Monsieur CASTAGNE, en application des articles 786 et 907 du code de procédure civile et à défaut d'opposition a tenu l'audience pour entendre les plaidoiries et en a rendu compte à la Cour composée de :
Madame SARTRAND, Président
Monsieur CASTAGNE, Conseiller
Madame ROSA SCHALL, Conseiller
qui en ont délibéré conformément à la loi.
dans l'affaire opposant :
APPELANTS :
Monsieur [F] [J]
né le [Date naissance 1] 1942 à [Localité 1](62)
de nationalité française
[Adresse 1]
[Adresse 2]
Madame [N] [J] née [W]
née le [Date naissance 2] 1944 à [Localité 2] (80)
de nationalité française
[Adresse 1]
[Adresse 2]
représentés et assistés de Maître François PIAULT, avocat au barreau de PAU
INTIMEES :
SAS [V]
[Adresse 3]
[Adresse 2]
prise en la personne de son gérant en exercice
SELARL BRENAC ET ASSOCIES ès qualités de mandataire judiciaire à la procédure collective de la SAS [V]
[Adresse 4]
[Adresse 5]
représentée par Maître Alix BRENAC
représentées et assistées de Maître Jean-Michel GALLARDO, avocat au barreau de PAU
SA AXA FRANCE IARD
[Adresse 6]
[Adresse 7]
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
représentée par Maître Sophie CREPIN, avocat au barreau de PAU
assistée de Maître DE TASSIGNY, avocat au barreau de PAU
sur appel de la décision
en date du 23 AVRIL 2014
rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PAU
Selon acte authentique du 11 avril 2005, les époux [F] et [N] [J] ont acquis une maison d'habitation à [Localité 3] dont, courant 2001, la SARL [V] avait réalisé les lots gros oeuvre, maçonnerie et assainissement.
Par actes des 13 et 14 avril 2010, les époux [J], invoquant l'existence de désordres affectant le réseau d'assainissement de l'immeuble, ont fait assigner la SARL [V] et son assureur, la SA Axa France, en référé-expertise.
Par ordonnance du 9 juin 2010, le juge des référés a ordonné une expertise aux termes de laquelle M. [O] a déposé le 2 avril 2013 un rapport définitif dont les conclusions sont les suivantes :
- au jour de la clôture du rapport, il n'existe pas de désordre, l'écoulement des eaux étant satisfaisant,
- cependant, l'état des tuyauteries enterrées, principalement sur les tronçons 1 et 2 situés sous la chaussée véhicules entre la limite de propriété et l'entrée principale de la maison, provoquera un désordre à court terme par rupture,
- l'état de ces tuyauteries enterrées présente une déformation prononcée (ovalisation) due à la nature inadaptée des tuyauteries employées (classe de rigidité) et à la nature du remblai employé (argile),
- sur ces tronçons 1 et 2, la classe de rigidité très faible des tuyauteries mises en oeuvre, en fonction de la nature du sol et de sa destination en surface, augmentée par la nature du remblai employé, constitue une malfaçon,
- la réfection suppose le remplacement des tuyauteries situés à l'avant du bâtiment d'habitation, sur une longueur de 25 m, pour un coût de 8 000 € TTC.
Par acte du 1er août 2013, les époux [J] ont fait assigner la SARL [V] et la SA Axa France IARD en indemnisation de leurs préjudices.
Par jugement réputé contradictoire du 23 avril 2014 (la SARL [V] n'ayant pas constitué avocat), le tribunal de grande instance de Pau a :
- rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la SA Axa France IARD (du chef d'un cumul prohibé de fondements juridiques),
- déclaré irrecevables les demandes des époux [J] en tant que dirigées contre la SAS [V] (en relevant que seule a été assignée la SARL [V]),
- débouté les époux [J] de l'ensemble de leurs demandes tant sur le fondement de la responsabilité décennale que sur le fondement de la responsabilité contractuelle,
- condamné les époux [J] à payer à la SA Axa France IARD la somme de 1 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Les époux [J] ont interjeté appel de cette décision, selon déclaration transmise au greffe de la Cour le 2 juillet 2014, en intimant la SAS [V] et la SA Axa France IARD.
Le 29 octobre 2014, la SELARL Brenac et associés a constitué avocat, ès qualités de mandataire judiciaire à la procédure collective de la SAS [V], selon jugement du 17 juin 2014.
La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 26 août 2016.
Dans leurs dernières conclusions déposées le 8 juillet 2016, les époux [J] demandent à la Cour, réformant le jugement entrepris, au visa des articles 1134, 1147, 1153, 1154, 1792, 1792-1 et 1844 du code civil et des articles 114 et 115 du code de procédure civile :
- à titre liminaire, de dire que la SAS [V], anciennement SARL [V] Bruno, a été régulièrement appelée en cause par l'assignation du 1er août 2013,
- à titre principal :
$gt; de constater que les réseaux extérieurs réalisés par la SAS [V] ne sont pas conformes aux règles de l'art et aux normes en vigueur et que les malfaçons constatées ont compromis dès 2009 la destination de l'ouvrage dans les conditions prévues par l'article 1792 du code civil,
$gt; de dire que les travaux de reprise nécessaires ne sauraient être limités aux tronçons situés en partie avant de la maison dès lors qu'il a été constaté en cours d'expertise que c'est l'ensemble du réseau qui est non conforme, en ce compris les tronçons situés à l'arrière,
$gt; de constater que la police d'assurance souscrite par la SARL [V] auprès de la SA Axa France IARD garantit les désordres de nature décennale survenus après réception,
$gt; de condamner en conséquence, in solidum, la SAS [V] et son assureur, la SA Axa France IARD à leur payer la somme de 15 503,75 € dont 8 391,14 € au titre de la réfection des réseaux d'adduction d'eau potable et d'assainissement situés à l'avant de l'immeuble et 7 112,61 € pour la réfection des réseaux eaux usées et eaux pluviales situés à l'arrière, en ce compris la réfection du trottoir,
$gt; de dire que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 mai 2009,
$gt; de condamner in solidum la SAS [V] et la SA Axa France IARD à leur payer la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec bénéfice de distraction au profit de Me Piault,
- subsidiairement :
$gt; de dire qu'ils sont fondés à mettre en cause la responsabilité contractuelle de droit commun de la SAS [V] en raison des malfaçons et non-conformités constatées,
$gt; de dire que les travaux de reprise nécessaires ne sauraient être limités aux tronçons situés en partie avant de la maison dès lors qu'il a été constaté en cours d'expertise que c'est l'ensemble du réseau qui est non conforme, en ce compris les tronçons situés à l'arrière,
$gt; de constater que la police d'assurance souscrite par la SARL [V] auprès de la SA Axa France IARD garantit les désordres intermédiaires,
$gt; de condamner en conséquence, in solidum, la SAS [V] et son assureur, la SA Axa France IARD à leur payer la somme de 15 503,75 € dont 8 391,14 € au titre de la réfection des réseaux d'adduction d'eau potable et d'assainissement situés à l'avant de l'immeuble et 7 112,61 € pour la réfection des réseaux eaux usées et eaux pluviales situés à l'arrière, en ce compris la réfection du trottoir,
$gt; de dire que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 mai 2009,
$gt; de condamner in solidum la SAS [V] et la SA Axa France IARD à leur payer la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec bénéfice de distraction au profit de Me Piault,
- très subsidiairement, si leurs demandes contre la SAS [V] étaient déclarées irrecevables à raison des mentions figurant dans l'assignation :
$gt; de relever que la recevabilité de leur action à l'encontre de la SA Axa France IARD n'est pas subordonnée à la mise en cause de la SAS [V],
$gt; de condamner la SA Axa France IARD à leur payer la somme de 15 503,75 € dont 8 391,14 € au titre de la réfection des réseaux d'adduction d'eau potable et d'assainissement situés à l'avant de l'immeuble et 7 112,61 € pour la réfection des réseaux eaux usées et eaux pluviales situés à l'arrière, en ce compris la réfection du trottoir,
$gt; de dire que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 mai 2009,
$gt; de condamner la SA Axa France IARD à leur payer la somme de 5 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec bénéfice de distraction au profit de Me Piault.
Dans ses dernières conclusions 'n° 5", déposées le 12 juillet 2016, la SAS [V] demande à la Cour, au visa des articles L. 622-21 et L. 622-22 du code de commerce et 1134, 1147 et 1792 du code civil :
- à titre principal, de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action visant la SAS [V], de dire que toute demande de condamnation visant la société
[V] est irrecevable et, à tout le moins, de déclarer l'action irrecevable en conséquence du rejet définitif de la déclaration de créance des époux [J] et du rejet définitif de leur action en relevé de forclusion,
- subsidiairement, de débouter les époux [J] de leurs demandes en constatant l'absence de fondement de la demande reposant sur le terrain de la garantie contractuelle,
- très subsidiairement et à titre incident, si la Cour estimait que les désordres présentent un caractère décennal ou relèvent de l'assurance responsabilité contractuelle souscrite au titre des désordres intermédiaires, de 'condamner la SA Axa France, solidairement avec elle, et la condamner à la relever quitte et indemne de l'intégralité des prétentions formulées à son encontre',
- subsidiairement, de constater l'irrecevabilité de l'action contractuelle des époux [J] à son encontre,
- en toute hypothèse, de condamner les époux [J] à lui payer la somme de 3 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions déposées le 25 juillet 2016, la SA Axa France demande à la Cour, au visa des articles 1792 et 1792-1 du code civil et L. 124-3 du code des assurances :
- à titre principal de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a constaté que la réception a été judiciairement fixée au 1er octobre 2001, constaté qu'aucun désordre de nature décennale n'est avéré dans le délai de la garantie décennale, jugé qu'une non-conformité sans dommage n'entraîne pas la mise en oeuvre de la garantie décennale ni celle de la théorie des dommages intermédiaires et débouté les époux [J] de leurs demandes,
- subsidiairement, de déclarer opposable aux époux [J] la franchise prévue au contrat, s'agissant d'une garantie facultative,
- en toute hypothèse, de condamner les époux [J] à lui payer la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec bénéfice de distraction au profit de la SELARL Lexavoué Pau-Toulouse.
MOTIFS
I - Sur les demandes des époux [J] contre la SAS [V] :
Dans ses dernières écritures, la SAS [V] ne se prévaut pas de la fin de non-recevoir tirée de la délivrance de l'assignation introductive d'instance à la SARL [V] et de l'absence de mise en cause régulière par les époux [J] à son égard.
Cette fin de non-recevoir retenue par le premier juge ne peut en toute hypothèse être accueillie dès lors qu'il résulte du procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire de la SARL [V] en date du 1er décembre 2011 (pièce n° 5 des appelants) que la transformation de la SARL [V] en SAS [V] n'a pas entraîné la création d'une personne morale distincte, en sorte qu'il doit être considéré que l'assignation délivrée à la SARL [V] est opposable à la SAS [V] qui n'est que la continuation même de celle-là.
S'agissant de la fin de non-recevoir tirée des dispositions des articles L. 622-21 et L. 622-22 du code de commerce soulevée en cause d'appel par la SAS [V], il y a lieu de constater :
- que, par jugement du 17 juin 2014, le tribunal de commerce de Pau a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la SAS [V] et a désigné la SELARL Brenac et Associés en qualité de mandataire judiciaire,
- que par jugement du 19 janvier 2016, le tribunal de commerce de Pau a décidé la continuation de l'exploitation de la SAS [V], arrêté le plan de sauvegarde et fixé sa durée à 10 ans, en nommant la SELARL Brenac et Associés en qualité de commissaire à son exécution,
- que par ordonnance, devenue définitive, du 24 février 2016, le juge-commissaire de la procédure de sauvegarde de la SAS [V] a déclaré irrecevable la requête en relevé de forclusion présentée par les époux [J] du chef de la créance par eux alléguée dans le cadre de la présente instance, laquelle n'avait pas fait l'objet d'une déclaration régulière dans le délai prévu à l'article L. 622-24 du code de commerce.
Or, aux termes de l'article L. 622-26 du code de commerce, les créances non déclarées régulièrement dans les délais prévus à l'article L. 622-24 sont inopposables au débiteur pendant l'exécution du plan et après cette exécution, lorsque les engagements énoncés dans le plan ou décidés par le tribunal ont été tenus.
Il convient dès lors de confirmer, par substitution de motif, le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes des époux [J] dirigées contre la SAS [V].
II - Sur les demandes des époux [J] contre la SA Axa France :
L'irrecevabilité des demandes formées par les époux [J] contre la SAS [V] ne les prive pas de la possibilité de présenter des demandes contre l'assureur de celle-ci, en exerçant à son encontre l'action directe prévue par l'article L. 124-3 du code des assurances.
En l'espèce, aux termes d'appréciations qui ne font l'objet d'aucune contestation technique sérieuse, l'expert judiciaire, dans son rapport du 2 avril 2013, a conclu :
- que le réseau d'assainissement eaux usées / eaux vannes et eaux pluviales, non séparatif, est constitué par des tuyaux en PVC cheminant à 60 cm de la surface dans un remblai en argile et présentant à l'avant de l'habitation des sections très fortement ovalisées et à l'arrière de la maison des sections en partie ovalisées, en raison de la pression du remblai,
- que cette ovalisation est due à la nature inadaptée des tuyaux mis en oeuvre, en raison de leur rigidité insuffisante à contenir la pression du remblai employé,
- qu'au regard des résultats des sondages réalisés, l'état des tuyauteries enterrées, principalement sur les tronçons situés à l'avant de l'immeuble, sous la chaussée destinée à l'accès automobile, provoquera un désordre à court terme, par aplatissement jusqu'au point de rupture mécanique, avec obstruction du réseau,
- qu'à la date de la réunion d'expertise du 3 octobre 2011, il n'existe pas de désordre, l'écoulement des eaux dans les réseaux étant satisfaisant,
- que les tuyauteries mises en oeuvre à l'arrière du bâtiment ne présentent pas de contre-indication, la société [V] ayant réalisé le réseau et le remblai en tout-venant sur lequel M. [J] a réalisé courant 2006 une dalle béton présentant à plusieurs endroits des affaissements dus à des tassements différentiels,
- qu'au jour du dépôt du rapport définitif, il n'apparaît aucun désordre, à l'exception de celui ayant donné lieu, courant 2009, à une réparation par la SARL [V] et intervenu alors que M. [J] avait réalisé une dalle béton au-dessus de ces réseaux, ayant obligatoirement eu une incidence sur la nature du sol, par l'objet des travaux réalisés,
- que seuls les tronçons 1 et 2 (situés à l'avant) sont non conformes, du fait de la rigidité insuffisante des tuyaux au regard de la nature du sol et de la destination de la surface,
- que les tuyauteries et leur mise en oeuvre sur la partie arrière ne présentent pas de contre-indication au regard de la norme applicable (NF EN 1453-1).
Par ailleurs, il y a lieu de constater qu'aucune partie ne conteste l'existence d'une réception tacite des travaux de la SARL [V] au 1er octobre 2001, telle que retenue par un arrêt de cette Cour en date du 15 février 2011 dans le cadre d'une instance opposant notamment les époux [J] à leurs vendeurs et à la SARL [V].
Les époux [J] fondent leur demande à titre principal sur les dispositions de l'article 1792 du code civil et subsidiairement sur celles de l'article 1147 du code civil.
S'agissant du fondement invoqué à titre principal par les appelants, il y a lieu de rappeler qu'aux termes de l'article 1792 du code civil, tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination et qu'une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère.
En l'espèce, l'expertise judiciaire n'a caractérisé aucun dommage existant, au sens de l'article 1792 du code civil, l'expert relevant, sans être techniquement contredit, que l'écoulement des eaux dans le réseau litigieux s'effectue normalement et que l'écrasement d'un tuyau à l'arrière du bâtiment courant 2009 est imputable à la réalisation par les appelants, quatre ans après la réception, d'une dalle-trottoir en béton à l'arrière du bâtiment, sans lien avec la rigidité insuffisante des tuyaux situés à l'avant de celui-ci, en sorte que l'intervention réparatoire de la SARL [V], suite à la dénonciation de cet incident ne peut être considérée comme une reconnaissance non équivoque de responsabilité, interruptive de la prescription décennale.
Cependant, la circonstance que l'expert a affirmé la certitude de la survenance, à court terme, d'un désordre (rupture des canalisations en PVC entraînant un engorgement de nature à compromettre la destination de l'ouvrage) est suffisante à engager la responsabilité décennale du constructeur et la mobilisation de la garantie de son assureur, dès lors que ce dommage, futur, ne peut être considéré comme hypothétique et qu'il a été identifié, dans ses causes, dans le délai décennal d'épreuve, même s'il ne s'est pas réalisé pendant celui-ci.
Il convient dès lors de réformer la décision entreprise en ce qu'elle a débouté les époux [J] de leurs demandes contre la SA Axa France, ès qualités d'assureur décennal de la SAS [V].
Considérant que les époux [J] ne produisent aucun élément technique probant au soutien de leur contestation de l'avis expertal limitant les travaux de réfection au réseau situé à l'avant de leur maison d'habitation, il convient de condamner la SA Axa France IARD, en sa qualité d'assurer décennal de la SARL [V], à payer aux époux [J] la somme de 8 000 € TTC, indexée sur l'évolution de l'indice du coût de la construction BT 01 publié par l'INSEE, l'indice de référence étant celui en vigueur au 2 avril 2013, date de dépôt du rapport d'expertise.
La SA Axa France sera déboutée de sa demande subsidiaire tendant à voir déclarer opposable la franchise contractuelle stipulée dans la police souscrite par la SARL [V], laquelle ne peut être appliquée aux indemnités dues au titre de la garantie décennale obligatoire.
L'équité commande de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a condamné les époux [J] à payer à la SA Axa France, en application de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 1 000 € au titre des frais irrépétibles par elle exposés en première instance et de condamner la SA Axa France IARD à payer de ce chef aux époux [J] la somme globale de 3 000 € au titre des frais par eux exposés tant en première instance qu'en cause d'appel.
La SA Axa France IARD sera condamnée aux entiers dépens d'appel et de première instance, en ce compris les frais de référé et d'expertise judiciaire, avec bénéfice de distraction au profit de Me Piault.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :
Vu le jugement du tribunal de grande instance de Pau en date du 23 avril 2014,
Confirme la décision entreprise en ce qu'elle a déclaré irrecevables les demandes des époux [J] dirigées contre la SAS [V],
Réformant le jugement déféré pour le surplus et statuant à nouveau :
Condamne la SA Axa France IARD, ès qualités d'assureur décennal de la SARL [V], à payer aux époux [J] la somme de 8 000 € (huit mille euros) TTC, indexée sur l'évolution de l'indice du coût de la construction BT 01 publié par l'INSEE, l'indice de référence étant celui en vigueur au 2 avril 2013,
Déboute les époux [J] du surplus de leurs demandes indemnitaires,
Déboute la SA Axa France IARD de sa demande subsidiaire tendant à voir déclarer opposable aux époux [J] la franchise stipulée dans la police d'assurance souscrite par la SARL [V],
Condamne la SA Axa France IARD à payer aux époux [J], en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme globale de 3 000 € (trois mille euros) au titre des frais irrépétibles par eux exposés tant en première instance qu'en cause d'appel,
Déboute les autres parties de ce chef de demande,
Condamne la SA Axa France IARD aux entiers dépens d'appel et de première instance, avec bénéfice de distraction au profit de Me Piault, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.
Le présent arrêt a été signé par Mme Sartrand, Président, et par Mme Vicente, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRESIDENT,
Sandra VICENTE Christine SARTRAND