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25/05/2016 | FRANCE | N°14/02839

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 25 mai 2016, 14/02839


CS/AM



Numéro 16/2192





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 25/05/2016







Dossier : 14/02839





Nature affaire :



Demande en réparation des dommages causés par l'activité des auxiliaires de justice















Affaire :



[S] [Y]



C/



[U] [W] [C]


























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Grosse délivrée le :



à :



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS









A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 25 mai 2016, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code...

CS/AM

Numéro 16/2192

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 25/05/2016

Dossier : 14/02839

Nature affaire :

Demande en réparation des dommages causés par l'activité des auxiliaires de justice

Affaire :

[S] [Y]

C/

[U] [W] [C]

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 25 mai 2016, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 09 février 2016, devant :

Madame SARTRAND, Président, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile

Monsieur CASTAGNE, Conseiller

Madame NICOLAS, Conseiller

assistés de Madame VICENTE, Greffier, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

Le ministère public a eu connaissance de la procédure le 02 février 2015.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Maître [S] [Y]

né le [Date naissance 1] 1961 à [Localité 1] (Algérie)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

assisté de Maître Jean-Claude SENMARTIN, avocat au barreau de TARBES

représenté par la SCP BERNARD - HUGUES - JEANNIN - PETIT, avocats au barreau D'AIX EN PROVENCE

INTIME :

Monsieur [U] [W] [C]

né le [Date naissance 2] 1940 à [Localité 3]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

assisté et représenté par Maître Pascal MARKHOFF, avocat au barreau de TARBES

sur appel de la décision

en date du 17 JUIN 2014

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE TARBES

FAITS ET PROCEDURE

M. [L] [C] (le vendeur) est propriétaire des droits d'exploitation et d'adaptation de deux oeuvres du peintre [J] [D] (les droits [D]).

Envisageant de les céder à M. [F] [Z] (l'acquéreur), président de la fondation Gala [D] à [Localité 2], M. [C] chargeait son avocat habituel Me [S] [Y] (l'avocat) de rédiger l'acte de cession, de défendre ses droits dans la négociation de cession de ses droits patrimoniaux et de négocier la cession du nom de '[D] Universal'.

Une première vente sur partie de ses droits [D] moyennant le prix de 200 000 €, est intervenue en 2010.

Puis une deuxième vente a été projetée sur la totalité restante de ses droits [D] à M. [Z].

En vue de ces projets de vente, M. [C] et son avocat concluait le 22 octobre 2009 une convention d'honoraires qui prévoyait un honoraire moyen et un honoraire de résultat de 5 % du montant total obtenu.

Le 28 mars 2011, l'avocat proposait un projet de contrat pour cette deuxième vente, et le 1er avril 2011 un contrat de vente conforme au projet était passé en l'absence de l'avocat, portant sur l'intégralité des droits de M. [C] au profit de M. [Z] moyennant le prix de UN million d'euros, payable à raison de 20 000 € le jour de la signature, lesquels furent réglés, puis en 49 mensualités de 20 000 € chacune.

Cette convention prévoyait la caducité du contrat au niveau des modalités de paiement (défaut de paiement du prix) ainsi que des modalités de règlement en cas de défaut de paiement d'un terme, 2 mois après un commandement de payer, en contrepartie de quoi, M. [C] conservait les sommes versées au titre d'une indemnité d'immobilisation et recouvrer ses droits cédés.

M. [C], alerté par un ami, faisait observer à son avocat que ce contrat ne prévoyait pour lui aucune garantie protectrice dans la mesure où les clauses de caducité y insérées faisaient finalement dépendre la bonne exécution du contrat de la seule volonté de l'acquéreur, sans qu'il ne soit prévu un moyen de contraindre ce dernier à exécuter le contrat.

Afin de 'sécuriser le contrat et les rapports financiers' des parties, Me [Y] rédigeait alors un avenant qu'il adressait le 15 avril suivant à M. [C] ainsi qu'à l'avocat de l'acquéreur, qui stipulait qu'en cas de non-paiement, le contrat ne serait pas caduque, mais que le paiement deviendrait immédiatement exigible, l'article 1er de l'avenant visant en outre, l'obligation pour l'acquéreur de prendre une garantie bancaire irrévocable, l'article 2 prévoyant que le contrat prendrait effet à compter du 1er avril et l'article 3, que les autres dispositions du contrat du 1er avril 2011 demeuraient inchangées.

Le 3 mai suivant, par l'intermédiaire de son avocat, M. [Z] faisait connaître que cet avenant bouleversait l'économie du contrat, qu'il souhaitait reprendre sa réflexion, puis finalement, ne réglait pas les deux premières mensualités provoquant ainsi la caducité du contrat de vente, et proposait alors, à M. [C] de conclure une nouveau contrat de vente portant sur ces mêmes droits [D], mais cette fois-ci, moyennant le prix de 250 000 € que ce dernier acceptait, en proie à d'importantes difficultés financières.

M. [C], considérant qu'en insérant à l'acte de vente une clause de caducité faisant dépendre la bonne exécution du contrat que du seul bon vouloir de M. [Z] sans par ailleurs, prévoir de garantie d'exécution de la convention, Me [Y] avait commis des manquements constitutifs d'une faute engageant sa responsabilité professionnelle, l'assignait en indemnisation de son préjudice.

En réponse, Me [Y] a soutenu devant les premiers juges qu'il n'avait commis aucune faute tant au niveau de la rédaction de l'acte de cession que des modalités de son exécution, et qu'en tout état de cause, aucune faute ne pouvait être rattachée à la perte de chance de céder les droits litigieux pour le prix initialement convenu.

Par un jugement du 17 juin 2014, le tribunal de grande instance de Tarbes, a considéré que Me [Y] avait commis des fautes, mais que la clause inopportune de caducité était sans lien direct avec le préjudice constitué par l'importante baisse de prix consentie par M. [C], et l'a débouté de sa demande en indemnisation.

En revanche, le tribunal a estimé que les manquements de l'avocat lors de la rédaction du contrat puis de l'avenant proposé et refusé par l'acquéreur, commandait de déclarer nulle la convention d'honoraires, et a condamné Me [Y] à restituer une somme de 12 500 € représentant le montant des honoraires déjà perçus.

Me [Y] a interjeté appel de cette décision limité en sa disposition relative à la résolution de la convention d'honoraires, en ses motifs qui ont admis à son encontre des fautes caractérisées, et en ce qu'elle l'a débouté de sa demande en dommages-intérêts, et il sollicite voir dire qu'il n'a commis aucune faute et condamner M. [C] à lui payer la somme de 10 000 € pour procédure abusive, ainsi que celle de 10 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir pour l'essentiel, qu'il n'a commis aucune faute estimant pour sa part, que la clause de caducité ne constituait nullement une clause potestative, que s'il avait inséré les clauses de garantie de paiement et de déchéance du terme contenues dans l'avenant du 15 avril, M. [Z] aurait refusé d'acquérir, que cette clause de caducité constituait bien une sanction d'inexécution dès lors que l'acquéreur perdait les sommes versées et les droits acquis qui demeuraient la propriété du vendeur et que par ailleurs, cette clause protégeait M. [C] dès lors que les capacités financières de M. [Z] n'étaient pas démontrées, et qu'enfin, cette clause avait fait l'objet de l'approbation par M. [C] qui aurait joué un rôle actif dans la rédaction de cet acte.

Enfin, il soutient que la clause de caducité impliquait des restitutions réciproques et qu'en cela, elle ne constitue pas un préjudice réparable.

Sur la convention d'honoraires, il fait valoir que cette demande est irrecevable pour se heurter à l'autorité de la chose jugée eu égard à l'ordonnance du premier président de la cour d'appel de Toulouse du 6 novembre 2012, qui a jugé ses honoraires dus, et à défaut, il sollicite voir dire cette demande mal fondée compte tenu de la cession effective des droits litigieux le 11 juillet 2012.

M. [C] a interjeté appel incident sollicitant que le jugement soit réformé en sa disposition qui n'a pas admis le lien de causalité entre les fautes prouvées de son avocat et son préjudice, et sollicite la condamnation de ce dernier à lui payer en réparation de son préjudice la somme de 750 000 €, et subsidiairement, celle de 700 000 €. Il sollicite en outre, une indemnité de 8 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur la responsabilité de l'avocat

Attendu qu'il est constant pour être établi et non contesté que Me [Y] avocat habituel de M. [C], a été mandaté par ce dernier pour rédiger l'acte de cession à M. [Z], de ses droits patrimoniaux portant sur deux oeuvres de [D], de défendre ses droits dans la négociation de cession de ces droits et de négocier la cession du nom de '[D] Universal' ;

Attendu que M. [C] reproche à son avocat d'avoir commis des manquements fautifs au niveau des modalités d'exécution de cet acte de vente permettant à l'acquéreur de se délier de son engagement selon son seul bon vouloir, sans prévoir aucune clause pour garantir l'exécution de la convention ;

Attendu que Me [Y] se défend d'avoir commis de telles fautes, estimant la clause de caducité efficace.

Mais attendu que nonobstant les moyens de défense ainsi développés par Me [Y], force est de constater que celui-ci a admis implicitement mais nécessairement que la clause de caducité insérée à l'acte ne constituait pas pour ce dernier une garantie, tel que cela résulte :

- du courrier qu'il a adressé le 15 avril à M. [C] dans lequel il indique expressément :

'Je vous prie de trouver en pièce jointe le nouvel avenant auquel j'ai rajouté quelques garanties supplémentaires afin de vous protéger' (pièce 64 de M. [C]),

- de l'avenant au contrat de vente signé le 1er avril 1er avril 2011 dans lequel Me [Y] mentionne dans le préambule :

'...... Les parties ont convenu de se rencontrer à nouveau afin de sécuriser les rapports financiers.... Il s'agit de garantir la bonne fin dudit contrat', etc....

Et attendu que même si la clause de caducité faisait recouvrer à M. [C] ses droits cédés et le rendait bénéficiaire des sommes versées, il n'en demeure pas moins que l'objectif poursuivi par M. [C] pour la réalisation duquel il avait spécialement mandaté Me [Y] pour en assurer la sécurité juridique, était la cession totale de ses droits à M. [Z] moyennant le prix d'UN million d'euros arrêtée par les parties au contrat ;

Or, attendu qu'en insérant à l'acte de vente la caducité de plein droit de celui-ci en cas de défaut de paiement du prix ou encore, d'une mensualité, l'avocat permettait unilatéralement à l'acquéreur de mettre un terme à l'exécution du contrat et à son obligation de paiement, objet essentiel du contrat, selon sa seule volonté, sans que les sommes versées devant rester au vendeur ne puissent être considérées comme une clause protectrice de ce dernier dès lors que cette contrepartie définie à l'acte en indemnité d'immobilisation n'était pas fixée à minima et était aléatoire puisque son montant dépendait de la date à laquelle l'acquéreur pouvait décider de provoquer la caducité du contrat ;

Et attendu que le risque ainsi créé par la prévision de cette clause contractuelle de caducité, s'est finalement réalisé puisqu'il a suffi à M. [Z] de ne pas régler les deux premières mensualités pour se délier unilatéralement de son engagement ferme et définitif et provoquer la caducité de la vente, replaçant ainsi M. [C] dans son statut initial de vendeur, alors que le contrat de vente passé était parfait, les parties s'étant accordées sur la chose et le prix, et sans qu'il ne puisse être considéré que la somme de 20 000 € réglée à la signature de l'acte et demeurant acquise à M. [C], soit une juste contrepartie de l'enjeu de cette vente ;

Que l'équilibre entre les parties n'a donc pas été respecté ;

Attendu qu'il résulte de ce qui précède qu'il incombait à l'avocat de satisfaire à son obligation découlant, indépendamment du mandat donné, de son statut d'avocat rédacteur d'acte, en assurant efficacement l'exécution de cet acte de vente en y insérant des clauses de garantie de paiement, ou encore, permettant au vendeur de faire exécuter la convention et d'obtenir le paiement du prix fixé entre les parties, ou bien encore de prévoir des pénalités dissuasives pour garantir son exécution ;

Qu'en ne le faisant pas, Me [Y] n'a pas assuré l'efficacité de l'objectif poursuivi par son client pour lequel il avait été spécialement mandaté, mais encore, a abandonné M. [C] au bon vouloir de M. [Z], alors qu'étant l'unique rédacteur de l'acte, il était tenu de veiller en outre, à assurer l'équilibre du contrat de l'ensemble des intérêts en présence et de prendre l'initiative de conseiller les deux parties à la convention sur la portée des engagements souscrits de part et d'autre, et notamment M. [C], qui l'avait mandaté à cet effet ;

Et attendu que pour sa défense Me [Y], pour ne pas en rapporter le moindre commencement de preuve, ne saurait soutenir que M. [Z] n'aurait pas accepté d'acquérir si une clause de déchéance du terme y avait été insérée, ou encore, s'il avait été exigé une caution bancaire irrévocable, dès lors qu'il n'allègue, ni même ne soutient que ces clauses de garanties qu'il a rajoutées dans l'avenant postérieurement à la signature de l'acte, seraient entrées dans la négociation de cette cession de droits et auraient été refusées par l'acquéreur ;

Que de même, il ne saurait invoquer et mettre en doute la capacité financière de l'acquéreur à assurer son engagement financier dès lors qu'il ne produit aucun élément en ce sens, que M. [Z] est président de la fondation Gala [D] à [Localité 2] et acquérait à ce titre, mais encore, et pour le cas où Me [Y] aurait eu un tel doute sur la solvabilité de cet acquéreur, il lui aurait alors appartenu de conseiller M. [C] de renoncer à cette vente qu'il pensait être vouée à l'échec, ce qu'il ne soutient pas non plus avoir fait, ou encore, de prévoir et d'obtenir des garanties de paiement ;

Qu'enfin, Me [Y] ne saurait non plus tenter d'éluder sa responsabilité en soutenant que M. [C] aurait approuvé le projet d'acte et qu'il aurait joué un rôle important dans sa rédaction, alors que M. [C], non juriste, l'avait spécialement mandaté pour protéger ses intérêts, rédiger l'acte de vente et assurer sa défense dans la négociation, et qu'à supposer que M. [C] aurait eu des compétences en matière juridique, ce qui n'est pas le cas en l'espèce, Me [Y] n'aurait pas pour autant été déchargé de son devoir de conseil, et il est certain qu'avisé du risque encouru des conséquences possibles de la clause de caducité, M. [C] aurait exigé des garanties qui auraient pu entrer dans la négociation ;

Attendu que Me [Y] a incontestablement commis des manquements fautifs en ne prévoyant pas dans les modalités d'exécution de cette convention qu'il a établie, des clauses garantissant sa bonne fin, ce qu'ont retenu les premiers juges ;

Mais attendu qu'il s'évince de ce qui précède que seuls, ces manquements fautifs commis par l'avocat en ce qu'ils ont permis à l'acquéreur de se délier unilatéralement de ses engagements fermes et définitifs sans juste contrepartie pour le vendeur, sont à l'origine du préjudice allégué par M. [C] qui est constitué par la caducité de ce contrat et la contrainte dans laquelle il s'est retrouvé de chercher un nouvel acquéreur avec l'aléa attaché à toute vente, mais d'autant plus grand en l'espèce, qu'il s'agit de biens très particuliers susceptibles de n'intéresser que peu de personnes, y compris dans le petit monde très fermé des arts dans lequel au surplus, la réputation de M. [C] s'était soudainement fragilisée du fait du procès qu'il avait introduit devant le tribunal de grande instance de Paris, pour cession illicite de ses droits [D] aux enchères publiques par la société Fondica impliquant des commissaires-priseurs et administrateurs de justice, ce que savait pertinemment Me [Y] pour être l'avocat de M. [C], lequel connaissait en outre, la situation financière très délicate de son client dans laquelle l'avait plongé ces cessions illicites qui dévalorisaient la valeur de ces droits par une perte de confiance des acheteurs potentiels, ce qui aurait dû inciter l'avocat à sécuriser davantage encore, ce contrat de vente ;

Que le jugement sera infirmé en ce qu'il a dénié un lien de causalité entre cette seule clause de caducité prévue au contrat de vente qu'il a reconnu comme étant 'inopportune' et le préjudice allégué par M. [C] ;

Sur l'étendue du préjudice

Attendu que M. [C] a revendu ses droits à M. [Z] pour la somme de 250 000 €, et il estime que par les fautes de Me [Y], il a perdu une chance de percevoir la somme de un million d'euros, ainsi que celle de revendre ses droits à ce montant là, et sollicite à titre de dommages-intérêts la somme de 750 000 € qui représente la différence entre le prix convenu au contrat d'un million d'euros et la revente de ses droits à hauteur de 250 000 € ou subsidiairement, une somme qui ne saurait être inférieure à celle de 700 000 € liée à cette perte de chance ;

Attendu que Me [Y] fait valoir que selon la jurisprudence, 'les restitutions réciproques consécutives à l'annulation d'un acte de cession ne constituent pas en elles-mêmes un préjudice réparable', et qu'en l'espèce M. [C] a récupéré l'intégralité de ses droits sur les oeuvres de [J] [D] et la somme versée, et qu'en outre, 'il ne peut que s'en prendre à lui-même' s'il a fait le choix de céder à nouveau ses droits à M. [Z] pour un montant de 250 000 € sans le mettre en concurrence en recherchant un autre acquéreur, avançant même l'idée que M. [C] aurait pu accepter de faire bénéficier M. [Z] d'une réduction de 750 000 € en échange de l'organisation d'expositions ou autres événements que sa réputation semble seule à même de porter efficacement, et dont M. [C] tirait ses revenus ;

Qu'une fois encore, Me [Y] avance des hypothèses dont il ne n'apporte pas le moindre commencement de preuve, mais encore, qui sont contredites par les pièces produites, dès lors que dans le contrat du 1er avril 2011 devenu caduc était déjà prévu une clause où M. [Z] s'engageait à rémunérer M. [C] pour organiser des expositions et qu'en outre, Me [Y], pour avoir été également le rédacteur en 2010 du premier contrat de vente portant sur la cession d'une partie des droits de M. [C], savait qu'il y avait inséré une clause de préférence obligeant M. [C] à négocier d'abord avec M. [Z] ;

Que quoiqu'il en soit, l'existence du préjudice allégué par M. [C] ne saurait être apprécié dans son principe par rapport à son comportement postérieur à cet acte de vente conclu le 1er avril 2011, car ce préjudice tire sa seule origine de ce contrat de vente, la revente intervenue ultérieurement ne pouvant avoir d'incidence que sur l'étendue de ce préjudice ;

Et attendu qu'en l'absence de preuve rapportée de l'insolvabilité de M. [Z], le préjudice de M. [C] résultant de cette clause de caducité ayant permis à l'acquéreur de se délier unilatéralement d'un engagement ferme et définitif sans une juste contrepartie, est certain, qu'il lui sera alloué en réparation, une somme de 730 000 € représentant la différence entre le prix convenu au contrat d'un million d'euros et la revente de ses droits à hauteur de 250 000 € diminuée de la somme de 20 000 € demeurée acquise à M. [C], au paiement de laquelle sera condamné Me [Y] ;

Sur la convention d'honoraires

Attendu qu'à l'occasion des deux projets de cessions de ses droits [D], M. [C] a conclu le 22 octobre 2009 une convention d'honoraires avec Me [Y] prévoyant un honoraire moyen, et un honoraire complémentaire de résultat de 5 % en vertu de laquelle M. [C] a versé la somme de 12 500 € et dont il poursuit la résolution et le remboursement de cette somme versée ;

Que les premiers juges ont fait droit à sa demande, écartant à bon droit l'autorité de la chose jugée opposée par M. [Y] tirée de l'ordonnance du premier président de la cour d'appel de Toulouse en date du 7 mars 2012 statuant sur recours de la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats de Toulouse, portant sur une demande en contestation d'honoraires, dès lors qu'il n'était pas soumis à l'appréciation de ce magistrat les fautes qu'aurait pu commettre cet avocat justifiant la résolution de la convention sollicitée et le remboursement des honoraires ;

Que toutefois, en exécution de cette convention, Me [Y] a accompli les diligences prévues à la convention ; qu'il ne peut donc être prononcé la résolution de cette convention d'honoraires pour inexécution, et le fait que l'avocat ait pu commettre des fautes dans l'exécution de celle-ci, ce qui est le cas en l'espèce, se trouve réparé par les dommages-intérêts qui viennent d'être alloués à M. [C] en indemnisation du préjudice résultant de cette mauvaise exécution ;

Que M. [C] sera en conséquence débouté de la demande ce chef et le jugement infirmé.

PAR CES MOTIFS

La Cour, après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

INFIRME le jugement entrepris,

Et STATUANT à nouveau,

VU le mandat confié à Me [S] [Y], avocat, par M. [L] [C],

DIT que Me [Y] a commis des manquements constitutifs de fautes en sa qualité de rédacteur de l'acte de cession conclu le 1er avril 2011 portant sur les droits d'exploitation et d'adaptation de deux oeuvres de [D] appartenant à M. [C] et cédés à M. [Z],

DIT que ces fautes ont directement concouru au préjudice souffert par M. [C],

CONDAMNE Me [S] [Y] à payer à M. [L] [C] la somme de 730 000 € (sept cent trente mille euros) en réparation de ce préjudice,

DEBOUTE M. [L] [C] de sa demande en résolution de la convention d'honoraires conclue le 22 octobre 2009 avec Me [Y],

CONDAMNE M. [S] [Y] à payer à M. [L] [C] la somme de 5 000 € (cinq mille euros) au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Le CONDAMNE également aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Mme Sartrand, Président, et par Mme Vicente, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Sandra VICENTE Christine SARTRAND


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14/02839
Date de la décision : 25/05/2016

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°14/02839 : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2016-05-25;14.02839 ?
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