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29/05/2015 | FRANCE | N°10/03184

France | France, Cour d'appel de Pau, 1ère chambre, 29 mai 2015, 10/03184


PC/AM



Numéro 15/2207





COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre







ARRET DU 29/05/2015







Dossier : 10/03184





Nature affaire :



Demande en nullité d'une assemblée générale ou d'une délibération de cette assemblée











Affaire :



[Z] [N]



C/



[U] [S]

SCI SAINT SULPICE

SCP [B]

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE CASTEL MER ET MONT


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Grosse délivrée le :



à :



















RÉPUBLIQUE FRANÇAISE



AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS











A R R E T



prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 29 mai 2015, les parties en ayant été préalablement a...

PC/AM

Numéro 15/2207

COUR D'APPEL DE PAU

1ère Chambre

ARRET DU 29/05/2015

Dossier : 10/03184

Nature affaire :

Demande en nullité d'une assemblée générale ou d'une délibération de cette assemblée

Affaire :

[Z] [N]

C/

[U] [S]

SCI SAINT SULPICE

SCP [B]

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE CASTEL MER ET MONT

Grosse délivrée le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

A R R E T

prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour le 29 mai 2015, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

* * * * *

APRES DÉBATS

à l'audience publique tenue le 13 janvier 2015, devant :

Madame PONS, Président

Monsieur CASTAGNE, Conseiller, magistrat chargé du rapport conformément à l'article 785 du code de procédure civile

Madame NICOLAS, Conseiller

assistés de Madame VICENTE, Greffier, présente à l'appel des causes.

Les magistrats du siège ayant assisté aux débats ont délibéré conformément à la loi.

dans l'affaire opposant :

APPELANT :

Monsieur [Z] [N]

né le [Date naissance 1] 1938 à [Localité 1]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

représenté par Maître Vincent LIGNEY, avocat au barreau de PAU

assisté de Maître SORNIQUE, avocat au barreau de BAYONNE

INTIMES ET APPELANTES :

Monsieur [U] [S]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

SCI SAINT SULPICE

[Adresse 5]

[Adresse 5]

agissant poursuites et dilgiences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

représentés par Maître Sophie CREPIN, avocat au barreau de PAU

assistés de Maître BOERNER, avocat au barreau de PARIS

INTIMES :

SCP [B]

[Adresse 6]

[Adresse 3]

prise en la personne de son gérant domicilié en cette qualité audit siège

représentée et assistée de la SCP ETCHEGARAY & ASSOCIES, avocats au barreau de BAYONNE

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE LA RESIDENCE CASTEL MER ET MONT dont le siège social est [Adresse 1] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège et agissant par son syndic la SARL AGENCE CLEMENCEAU dont le siège social est [Adresse 2] agissant elle-même par son gérant domicilié en cette qualité audit siège

représenté par Maître Sophie CREPIN, avocat au barreau de PAU

assisté de Maître ETCHEVERRY, avocat au barreau de BAYONNE

sur appel de la décision

en date du 21 JUIN 2010

rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE BAYONNE

Selon délibération du 12 décembre 2005, l'assemblée générale des copropriétaires de la résidence Castel Mer et Mont à Anglet (64) a accordé à la SCI Saint Sulpice l'autorisation de procéder à des travaux d'affouillement du sol pour réaliser une piscine 'sur le terrain à jouissance privative du bâtiment A' dans lequel elle est propriétaire de divers lots, ainsi que son gérant, M. [U] [S].

Un litige est né à la suite de la dénonciation par M. [Z] [N] de l'empiétement de la piscine sur un jardin, lui-même affecté à la jouissance exclusive du lot n° 18 dont il est titulaire.

Après l'annulation du permis de construire par la juridiction administrative, l'assemblée générale des copropriétaires a accordé à la SCI Saint Sulpice et à M. [S], son gérant, pris tant en son nom personnel qu'ès qualités, suivant délibération du 19 décembre 2008, une nouvelle autorisation pour réaliser les travaux litigieux.

Par acte du 17 février 2009, M. [Z] [N] a fait assigner la SCI Saint Sulpice, M. [U] [S], et le syndicat des copropriétaires en annulation de la délibération de l'assemblée générale du 19 décembre 2008 ayant autorisé la construction et en démolition de l'ouvrage.

Par jugement du 21 juin 2010, le tribunal de grande instance de Bayonne a :

- déclaré recevable le recours en annulation de M. [N] contre la décision de l'assemblée générale du 19 décembre 2008,

- débouté M. [N] de toutes ses demandes,

- débouté le syndicat des copropriétaires de sa demande en dommages-intérêts,

- condamné M. [N] à payer à la SCI Saint Sulpice, à M. [S] et au syndicat des copropriétaires de la résidence Castel Mer et Mont la somme de 900 € chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

M. [N] a interjeté appel de cette décision selon déclaration remise au greffe de la Cour le 30 juillet 2010 (instance enrôlée sous le RG n° 10/03184).

Par arrêt du 18 octobre 2011, la Cour a :

- confirmé le jugement du 21 juin 2010 en ce qu'il a déclaré recevable l'action en annulation de la délibération de l'assemblée générale du 19 décembre 2008 et, au fond, l'a rejetée,

- ordonné, avant dire droit sur l'allégation d'empiétement sur le lot privatif de M. [N], une expertise,

- désigné M. [T] pour y procéder, avec mission de rechercher les limites actuelles des lots remis en jouissance exclusive aux parties, de situer exactement au regard de ces limites l'emplacement de la piscine litigieuse et de décrire et chiffrer le coût des travaux de remise en état.

Par acte du 8 juillet 2013, la SCI Saint Sulpice et M. [S] ont fait assigner la SCP [B], géomètres-experts, en intervention forcée au fond, devant la cour d'appel (instance enrôlée sous le RG n° 13/02635).

Par ordonnance du 11 septembre 2013, le magistrat de la mise en état a ordonné la jonction de la procédure RG n° 13/03635 et de la procédure RG n ° 10/03184 et déclaré irrecevables l'intervention forcée en cause d'appel de la SCP [B] et la demande aux fins de voir déclarer communes à cette dernière les opérations d'expertise ordonnées par l'arrêt du 18 octobre 2011.

Le 13 janvier 2014, M. [T] a déposé un rapport d'expertise aux termes duquel il conclut :

- que les limites actuelles des lots remis en jouissance exclusive aux parties sont celles du plan [K] dressé en 1966 et ayant servi à l'établissement du règlement de copropriété et de l'état descriptif de division,

- qu'au regard de ces limites, l'emplacement de la piscine empiète sur le jardin à jouissance exclusive du lot 18 appartenant à M. [N] sur une surface de 25 m²,

- que le coût des travaux de suppression de l'empiétement et le coût de remise en fonctionnement normal de la piscine ont été évalués par un sapiteur spécialisé en matière de piscine aux sommes respectives de 106 000 € et 14 000 €.

La clôture de l'instruction a été prononcée par ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 17 décembre 2014.

Par conclusions dites de procédure déposées le 12 janvier 2015, M. [S] et la SCI Saint Sulpice ont sollicité, sur le fondement de l'article 16 du code de procédure civile, le rejet des conclusions signifiées par M. [N] le 15 décembre 2014.

MOTIFS

Les conclusions remises et notifiées par M. [N] le 15 décembre 2014 ne constituent qu'une simple réplique aux conclusions des appelants, répondant seulement aux moyens et arguments soulevés par ceux-ci et ne contenant aucun moyen nouveau justifiant une réplique particulière.

La seule circonstance qu'elles ont été déposées et signifiées deux jours avant la clôture doit demeurer sans incidence dès lors qu'il n'est pas justifié de circonstances particulières ayant empêché le respect de la contradiction.

Il convient dès lors de rejeter la demande de M. [S] et de la SCI Saint Sulpice tendant à voir déclarer irrecevables lesdites conclusions et de statuer sur la base des conclusions suivantes :

1 - conclusions du 15 décembre 2014 par lesquelles M. [N] demande à la Cour :

- de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déclaré recevable en son recours en annulation de l'assemblée générale du 19 décembre 2008 et a débouté le syndicat des copropriétaires de ses demandes en dommages-intérêts,

- de condamner la SCI Saint Sulpice et M. [S], in solidum, à démolir la piscine construite suivant permis de construire du 20 janvier 2006 annulé par jugement du tribunal administratif de Pau du 14 octobre 2008, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir,

- de condamner la SCI Saint Sulpice et M. [S], in solidum, à faire procéder à tous travaux de remise en état du terrain affecté en jouissance exclusive au lot 18 dont il est titulaire,

- de condamner la SCI Saint Sulpice et M. [S], in solidum, à lui payer la somme de 5 000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait des travaux irréguliers de construction puis de démolition de la piscine,

- de condamner la SCI Saint Sulpice et M. [S], in solidum à lui payer la somme de 8 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile et les entiers dépens, avec application de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi que les frais et honoraires d'expertise judiciaire taxés à la somme de 11 295,62 € TTC, les honoraires de M. [I] et les frais de constat d'huissier de justice,

2 - conclusions du 12 août 2014 par lesquelles M. [S] et la SCI Saint Sulpice demandent à la Cour, au visa de la loi du 10 juillet 1965 et des articles 544 et 545 du code civil :

- à titre principal, de constater que M. [N] n'est pas propriétaire du lot 18 mais titulaire d'un simple droit de jouissance exclusive, que le jardin à jouissance exclusive du lot 18 est la propriété exclusive du syndicat des copropriétaires et de déclarer M. [N] irrecevable en ses demandes en ce qu'elles tendent à la démolition, même partielle de la piscine,

- subsidiairement, de constater qu'ils ont saisi le tribunal de grande instance de Bayonne d'une critique du rapport de M. [T] au contradictoire de la SCP [B], de dire qu'ils ne sauraient perdre le bénéfice du double degré de juridiction et en conséquence, de renvoyer devant le tribunal de grande instance de Bayonne déjà saisi de l'examen des conclusions du rapport de M. [T],

- très subsidiairement, de dire que le plan établi par la SCP [B] le 9 septembre 1996, s'impose et remplace celui établi par M. [K], de constater que les conclusions de l'expert [T] ne peuvent être tenues pour suffisamment fiables et que l'empiétement de la construction litigieuse sur le terrain à jouissance exclusive de M. [N] n'est pas établi, en conséquence, d'ordonner en tant que de besoin un complément d'expertise enjoignant à M. [T] d'avoir à trouver une solution alternative conforme aux surfaces

affectées à chaque lot dans l'état descriptif de division puisqu'il ne saurait être allégué d'un empiétement de 25 m² sur le lot affecté en jouissance privative à M. [N] quand l'expert lui accorde 999 m² au lieu et place des 978 m² dont il doit être normalement alloti et de débouter M. [N] de ses demandes indemnitaires non justifiées,

- en tout état de cause, de constater que la demande de M. [N] tendant à l'annulation de la délibération unique de l'assemblée générale des copropriétaires du 19 décembre 2008 se heurte à l'autorité de chose jugée par l'arrêt du 18 octobre 2011, de confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Bayonne du 21 juin 2010 et de débouter M. [N] de ses demandes,

- de condamner M. [N] à lui payer la somme de 6 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens d'appel et de première instance, avec bénéfice de distraction au profit de la SCP Marbot - Crépin,

3 - conclusions déposées le 5 mai 2014 par lesquelles le syndicat des copropriétaires de la résidence Castel Mer et Mont demande à la Cour :

- sur la demande de M. [N] tendant à l'annulation de la délibération unique de l'assemblée générale du 19 décembre 2008, de constater que cette demande se heurte à l'autorité de chose jugée par l'arrêt du 18 octobre 2011 et de débouter M. [N] de ses demandes,

- sur la demande en condamnation de la SCI Saint Sulpice et de M. [S], de lui donner acte de sa remise à justice,

- de condamner la partie succombante à lui payer la somme de 3 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens avec bénéfice de distraction au profit de la SCP Marbot - Crépin,

4 - conclusions déposées le 22 juillet 2013 par la SCP [B] aux termes desquelles celle-ci demandait à la Cour :

- à titre principal, de déclarer irrecevables les demandes formées par M. [S] et la SCI Saint Sulpice à son encontre,

- subsidiairement, de les en débouter et de les condamner à lui payer la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

SUR CE,

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de M. [N] :

Il n'est pas contesté que le prétendu empiétement dont M. [N] poursuit la suppression concerne une partie de terrain commune, à usage d'agrément, affectée à la jouissance privative exclusive du lot 18 dont il est titulaire et non une partie purement privative.

Si un droit de jouissance exclusive sur des parties communes n'est pas un droit de propriété et ne peut constituer la partie privative d'un lot, il constitue cependant un droit réel et perpétuel dont le titulaire a qualité et intérêt à assurer la défense en justice, sur le fondement de l'article 15 de la loi du 10 juillet 1965 (tout copropriétaire peut néanmoins exercer seul les actions concernant la propriété ou la jouissance de son lot, à charge d'en informer le syndic).

Il convient dès lors de rejeter la fin de non-recevoir soulevée de ce chef par M. [S] et la SCI Saint Sulpice.

Sur la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée par l'arrêt du 18 octobre 2011 :

En ce qu'elle tend à obtenir cessation de l'atteinte portée au droit de jouissance exclusive du jardin affecté au lot n° 18, l'action de M. [N] ne se heurte pas à l'autorité de la chose jugée par l'arrêt du 18 octobre 2010 qui a validé la délibération de l'assemblée générale du 19 décembre 2008 en ce qu'elle a autorisé le principe même de la construction d'une piscine sur le terrain affecté à l'usage exclusif de la SCI Saint Sulpice et de M. [S], tout en réservant les demandes tendant à voir sanctionner le prétendu empiétement préjudiciable à l'exercice exclusif de la jouissance du terrain affecté à la jouissance exclusive du lot 18.

Sur la demande de 'renvoi' devant le tribunal de grande instance de Bayonne :

La seule circonstance que l'assignation en intervention forcée du cabinet [B] - [L] en cause d'appel a été déclarée irrecevable par le magistrat de la mise en état en application de l'article 555 du code de procédure civile ne peut justifier le dessaisissement de la Cour au profit du tribunal de grande instance de Bayonne devant lequel les intimés ont fait assigner cette société de géomètres en responsabilité.

En effet, le sort de cette action est subordonné à la décision à intervenir sur la demande de M. [N] tendant à faire reconnaître l'empiétement de la piscine litigieuse en sorte que M. [S] et la SCI Saint Sulpice ne sont pas privés du bénéfice de double juridiction puisque le jugement déféré a statué de ce chef (en déboutant M. [N]) et qu'il n'existe pas de risque de contrariété de décisions.

Sur la caractérisation d'une atteinte à la jouissance de la partie commune affectée à l'usage exclusif du titulaire du lot 18 :

Considérant :

- que le lot litigieux a été attribué à M. [N] pour une superficie de 978 m² et que les plans de la copropriété établis le 13 juin 1966 par M. [K] constituent un document de référence définissant la limite entre les lots,

- que l'expertise confiée à M. [I], choisi unilatéralement par M. [N] en 2006, a conclu que l'emprise de la piscine débordait sur le jardin attribué en jouissance exclusive au lot 18,

- que pour contredire ces conclusions claires, il est opposé un plan de masse dressé par M. [B] qui aurait été approuvé par une assemblée générale du 15 octobre 1999 et que M. [I] n'a pas analysé,

- que ce plan est présenté dans cette délibération comme permettant d'entériner des accords intervenus au cours d'une assemblée générale du 10 mai 1996 en septième résolution,

- que cette septième résolution visait à l'approbation du plan définitif de circulation à l'intérieur de la copropriété sans citer expressément le rédacteur de ce plan,

- que la question relative à la sixième résolution et portant approbation de la scission de la copropriété avec modificatif du règlement et de l'état descriptif a été retirée de l'ordre du jour de sorte qu'il n'est justifié d'aucune force probante de l'existence d'un droit contraire à celui résultant de la création de la copropriété,

- que dès lors l'allégation d'empiétement ne peut être écartée par une simple référence à une résolution entérinant un plan dont l'objet est évoqué par renvoi à la résolution d'une autre assemblée générale, elle-même imprécise et votée à des fins étrangères à l'objet du litige, la Cour a ordonné une expertise aux fins de rechercher les limites actuelles des lots remis en jouissance exclusive aux parties et situer exactement au regard de ces limites l'emplacement de la piscine litigieuse.

Après avoir procédé à un relevé de l'état des lieux et analysé le règlement de copropriété et l'état descriptif de division du 13 juin 1966, les procès-verbaux des assemblées générales des 12 décembre 2005, 10 mai 1996 et 15 octobre 1999, le titre de propriété de M. [N], le plan d'origine dressé par M. [K] le 13 juin 1966, la note explicative communiquée par le cabinet [B] - [L] et le plan de projet d'agrandissement du terrain affecté en jouissance exclusive au bâtiment A, l'expert judiciaire a relevé :

- qu'il n'a été procédé à aucun bornage initial en sorte que les limites périmétriques définies au plan [K] s'appuient soit sur des clôtures et murs existants à l'époque, soit sur une simple application des limites cadastrales, sans garantie aucune de contenance, étant cependant constaté qu'à l'intérieur du périmètre de la copropriété, les limites entre lots étaient parfaitement cotées, spécialement pour la façade nord du lot 18 mentionnée à 4 m de la partie ouest de la façade nord de la construction existante, comme pour la largeur de 18 m mentionnée pour le terrain à jouissance exclusive du bâtiment A,

- que le règlement de copropriété, faisant référence au plan [K], décrit le lot 18 comme comprenant la totalité du bâtiment C (garage, logement et dépendances donnant côté est sur les parties communes et côté nord, sud et ouest sur un jardin affecté en jouissance exclusive) d'une superficie totale d'environ 978 m²,

- que l'ordre du jour et la délibération n° 7 de l'assemblée générale du 10 mai 1996 n'évoquent pas la question d'une modification de la consistance des jardins à jouissance exclusive,

- que la délibération n° 6 de l'assemblée générale du 15 octobre 1999 emporte approbation du plan de masse [B] en vue d'entériner des accords consacrés par une septième résolution de l'assemblée générale du 10 mai 1996 qui n'abordait pas l'éventualité d'une modification de la consistance des jardins en jouissance exclusive,

- que la résolution n° 2 de l'assemblée générale du 12 décembre 2005 autorisant, à la majorité de l'article 26, M. [S] et la SCI Saint Sulpice à effectuer à leurs frais exclusifs les travaux d'affouillement du sol pour réaliser la construction d'une piscine sur le terrain à jouissance privative du bâtiment A situé devant celui-ci, selon plan [B] - ci-joint, aurait pour effet d'agrandir le terrain à jouissance exclusive du bâtiment A d'une bande de 3 m de large environ à prendre sur le jardin à jouissance exclusive du lot 18,

- que cependant l'article 26 de la loi du 10 janvier 1965 dispose que l'assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu'elles résultent du règlement de copropriété,

- qu'il en résulte que les limites actuelles des lots remis en jouissance exclusive aux parties sont celles du plan de M. [K] et qu'au regard de ces limites, l'emplacement de la piscine litigieuse empiète sur le jardin à jouissance exclusive du lot 18, sur une surface de 25 m².

M. [N], se prévalant des conclusions de l'expert judiciaire, soutient qu'il convient de prendre en compte le plan descriptif de la copropriété établi par M. [K] le 13 juin 1966, visé au règlement de copropriété, dès lors qu'aucune modification de ce règlement n'est intervenue depuis lors, qu'en effet l'approbation par l'assemblée générale du 15 octobre 1999 du plan dressé par le cabinet [B] le 9 septembre 1999 (réduisant à un mètre la largeur de la bande de terrain affectée à l'usage exclusif du lot 18) est limitée en sa portée par l'objet des résolutions qui ont été votées lors de cette assemblée et qui concernaient le sens de circulation dans la copropriété et en aucun cas la partie de la copropriété sur laquelle se trouvent les terrains affectés à usage exclusif de certains copropriétaires qui ne comprend aucune voie de circulation, qu'en outre, tant lors de cette assemblée que lors des assemblées postérieures, il n'y a pas eu de décision entérinant une modification de la consistance du lot 18 et de son terrain affecté en jouissance exclusive.

M. [S] et la SCI Saint Sulpice soutiennent que la preuve d'un empiétement n'est pas rapportée dès lors :

- que le procès-verbal de constat du 11 mai 2006 est imprécis et fait référence au plan [K] dont il n'est pas établi qu'il a été publié,

- que des contradictions existent en ce qui concerne la superficie du lot 18, M. [N] revendiquant un terrain dont la superficie est supérieure à celle indiquée sur son titre de propriété (jugement d'adjudication du 13 mars 1972) mentionnant une superficie de 978 m² sans délimitation précise,

- que leur propre terrain mesure 18 m alors que la piscine mesure 14 m de long sur 6 m de large,

- que M. [N] n'a pas contesté la résolution du 15 octobre 1999 approuvant le plan de masse [B] qui précisait que la bande de terrain séparant le lot 18 et le terrain affecté à leur propre jouissance exclusive était d'une largeur d'un mètre en sorte que le surplus de la bande séparant les deux terrains doit être considérée comme commune et qu'ils disposaient d'un droit d'affouillement des sols conformément aux dispositions de l'article 3 de la loi du 10 juillet 1965.

Il est constant :

- que dans la configuration d'origine telle que déterminée par les documents constitutifs de la copropriété (règlement de copropriété, état descriptif de division, plan [K] y annexé), la bande de terrain affectée à l'usage exclusif du titulaire du lot 18 s'étendait, selon un tracé rectiligne, le long du mur de façade nord du bâtiment implanté sur l'assiette de ce lot, avec une largeur maximale de 4 m au droit du décrochement de ce mur,

- qu'il n'est ni soutenu ni établi que ce mur de façade aurait été déplacé et/ou modifié en sorte qu'il constitue un point de référence objectif et intangible pour la détermination de la limite entre les zones à usage exclusif contiguës litigieuses, la circonstance que M. [N] eut 'annexé' une bande de terre située à l'opposé de son bâtiment étant à cet égard sans incidence,

- que l'emprise de la piscine construite par les propriétaires du lot 19 se situe pour partie à l'intérieur de la bande de terrain affectée à l'usage exclusif du lot 18 telle que déterminée par les documents constitutifs de la copropriété.

Or, il n'est pas justifié d'une décision de l'assemblée générale de la copropriété réduisant l'assiette du terrain affecté à l'usage exclusif du lot 18 ni d'une renonciation univoque du titulaire dudit lot à ses droits, étant considéré :

- qu'il résulte des termes mêmes des procès-verbaux de délibération correspondants que 'l'approbation' du plan [B] (sur lequel la largeur de la bande de terrain affectée à l'usage exclusif du lot 18 est réduite) par l'assemblée générale de la copropriété du 15 octobre 1999 a été adoptée afin d'entériner les accords intervenus au cours de l'assemblée générale du 10 mai 1996 en septième résolution,

- que cette septième résolution emportait seulement approbation du plan du sens de circulation à l'intérieur de la copropriété,

- que la sixième résolution mentionnée à l'ordre du jour de l'assemblée générale du 10 mai 1996 (qui prévoyait l'approbation de la scission de la copropriété avec modification du règlement de copropriété et de l'état descriptif de division) a été retirée de l'ordre du jour,

- que l'approbation du plan [B] par l'assemblée générale du 15 octobre 2009 doit donc s'analyser au regard de l'objet de cette résolution, étranger à la détermination des superficies des terrains affectés à la jouissance exclusive des lots 18 et 19 et ne peut, à défaut de tout élément clair et univoque en ce sens, emporter modification de ces superficies,

- que la mise en place d'une clôture dont l'antériorité à la construction de la piscine n'est pas établie ne peut constituer une preuve suffisante d'une renonciation non équivoque de M. [N] aux droits résultant de la création de la copropriété.

Il convient dès lors, réformant le jugement entrepris et compte tenu de l'arrêt du 18 octobre 2011, de condamner M. [S] et la SCI Saint Sulpice à procéder :

- à la démolition (dont l'expertise judiciaire a établi la possibilité technique de réalisation) de la partie de la piscine et de ses équipements par eux construits sur le terrain affecté à l'usage exclusif de leurs lots empiétant sur le terrain affecté à l'usage exclusif du lot 18 dont M. [N] est propriétaire, sur la base de la délimitation proposée par M. [T] en annexe 1 de son rapport,

- à la remise en son état antérieur à la construction litigieuse de la partie du terrain affectée à l'usage exclusif de M. [N],

- le tout sous astreinte de 150 € par jour de retard à compter du premier jour du troisième mois suivant la signification du présent arrêt.

L'empiétement dont a été victime M. [N] a causé à celui-ci un trouble manifeste de jouissance qui sera, compte tenu de l'usage et de l'importance de la zone concernée et de la durée du trouble évalué à la somme de 3 000 €.

L'équité commande de condamner M. [S] et la SCI Saint Sulpice, in solidum, à payer à M. [N], en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 4 500 € au titre des frais irrépétibles par lui exposés tant en première instance qu'en cause d'appel et de débouter les autres parties de ce chef de demande.

M. [S] et la SCI Saint Sulpice seront condamnés aux entiers dépens d'appel et de première instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, étant rappelés que les frais d'établissement de constat d'huissier de justice et d'expertise privée ne constituent pas des dépens au sens de l'article 695 du code de procédure civile mais des frais irrépétibles au sens de l'article 700 dudit code.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort :

Vu le jugement du tribunal de grande instance de Bayonne en date du 21 juin 2010,

Vu l'arrêt de cette Cour en date du 18 octobre 2011,

Vu l'ordonnance du magistrat de la mise en état en date du 11 septembre 2013,

Rejette la demande de M. [S] et de la SCI Saint Sulpice tendant à voir déclarer irrecevables les conclusions par lui remises et notifiées le 15 décembre 2014.

Rejette la fin de non-recevoir soulevée par M. [S] et la SCI Saint Sulpice du chef du prétendu défaut de qualité et d'intérêt à agir de M. [N].

Déboute M. [S] et la SCI Saint Sulpice de leur demande tendant à voir renvoyer devant le tribunal de grande instance de Bayonne déjà saisi de l'examen des conclusions du rapport de M. [T].

Réformant le jugement entrepris dans les limites de sa saisine résiduelle :

- condamne M. [U] [S] et la SCI Saint Sulpice à procéder :

- à la démolition de la partie de la piscine et de ses équipements par eux construits sur le terrain affecté à l'usage exclusif de leurs lots et empiétant sur le terrain affecté à l'usage exclusif du lot 18 dont M. [N] est propriétaire, sur la base de la délimitation proposée par M. [T] en annexe 1 de son rapport,

- à la remise en son état antérieur à la construction litigieuse de la partie du terrain affectée à l'usage exclusif de M. [N] et victime de l'empiétement,

- le tout sous astreinte provisoire de 150 € (cent cinquante euros) par jour de retard à compter du premier jour du troisième mois suivant la signification du présent arrêt.

Condamne M. [S] et la SCI Saint Sulpice, in solidum, à payer à M. [N] la somme de 3 000 € (trois mille euros) à titre de dommages-intérêts.

Condamne M. [S] et la SCI Saint Sulpice, in solidum, à payer à M. [N], en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme globale de 4 500 € (quatre mille cinq cents euros) au titre des frais irrépétibles par lui exposés tant en première instance qu'en cause d'appel.

Déboute les autres parties de ce chef de demande.

Condamne M. [S] et la SCI Saint Sulpice aux entiers dépens d'appel et de première instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, avec bénéfice de distraction au profit de la SCP Marbot - Crépin.

Le présent arrêt a été signé par Mme Pons, Président, et par Mme Vicente, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Sandra VICENTEFrançoise PONS


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Pau
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 10/03184
Date de la décision : 29/05/2015

Références :

Cour d'appel de Pau 01, arrêt n°10/03184 : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée


Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2015-05-29;10.03184 ?
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